M. Henrion président, M. Mousnier-Buisson rapporteur, M. Piet avocat, par lequel : « LA COUR, — Sur les conclusions conformes de M. de Vatimesnil, avocat-général; Attendu que l'ancien droit romain, dans les pays mêmes où il avait été adopté comme loi générale, ne devenait pas une législation tellement absolue, qu'il ne fût et ne pût être modifié par l'usage et la jurisprudence des cours souveraines, dans le ressort desquelles il était observé; Que, dans l'espèce, la question est de savoir si la femme mineure, mais apte à contracter mariage, pouvait, avec l'assistance de son curateur, et dans l'ancien ressort du parlement de Toulouse, régi par le droît écrit, donner pouvoir, en contrat de mariage, à son futur époux, de vendre ses immeubles qu'elle se constituait dotalement, à la charge, par le mari, d'en reconnaître le prix sur ses propres biens; Que le droit romain, d'après plusieurs lois du Digeste et du Code, repousse en effet une semblable convention et la frappe de nullité; mais qu'il faut reconnaître aussi que, dans une grande partie de la France où le mariage et les conventions civiles qui en ont été souvent la cause impulsive ont toujours été favorables, la maxime Aptus ad nuptias, aptus ad omnia pacta nuptialia, avait prévalu et modifié le droit romain; par «Que l'arrêt dénoncé et le jugement dont il est confirmatif, rendus des magistrats institués dans l'ancien ressort du parlement de Toulouse, attestent que, dans ce ressort, cette maxime protectrice des mariages était observée; que la stipulation qui est consignée dans le contrat de mariage de la demanderesse, sous la date du 18 février 1764, y était d'un usage fréquent, qu'elle y était considérée comme une convention ordinaire, et telle qu'un majeur raisonnable la contractait; que cet usage, attesté par les magistrats de la localité, n'est démenti par aucune autorité plus imposante; que l'arrêtiste Catellan et son annotateur Vedel, qui ont écrit l'un et l'autre dans le ressort et pour le ressort du parlement de Toulouse, attestent l'existence de cette jurisprudence, liv. 4, chap. 45, et liv..5, chap. 26; que, s'il y avait doute, il conviendrait de s'attacher au principe Aptus ad nuptias, etc., par le motif qu'il est conforme à la législation actuelle et absolue introduite par le code civil; —Attendu que, ce premier et principal moyen étant ainsi rejeté, par cette raison que le mineur apte à contracter mariage pouvait, tout aussi bien qu'un majeur, donner pouvoir de vendre, il est inutile d'exa-miner si, après le mariage célébré, le mari avait besoin de recourir aux formalités de justice pour aliéner valablement, puisque cette question se trouve écartée et explicitement résolue pour la négative; -Rejette. S II: Le droit romain, bien qu'il fut la loi des pays de droit écrit, n'y avait-il cependant d'autorité que suivant la manière dont il était entendu et appliqué par la jurisprudence des parlements? En ce cas, l'arrêt qui décide que, d'après la jurisprudence de tel ressort, la novelle 117 ne faisait point obstacle à ce que la prescription courút contre le fils de famille, en la puissance de son père, du jour de sa majorité, pour les biens dont le père n'avait pas l'usufruit, est-il inattaquable sous le rapport de la violation des lois romaines? (Rés. aff.) DISPAN, C. SAUSOT ET AUTRES. Un sieur Daspe, par son testament de 1722, avait légué les métairies de Tuffery et d'Entusset à Dispan fils, sous la condition que sa mère en jouirait pendant sa vie. Il mourut peu de temps après, c'est-à-dire dans le courant de 1723. A cette époque, Dispan fils était sous la puissance paternelle. Il fut émancipé en 1740. Toutefois, ce ne fut qu'en 1773 qu'il fit assigner en délaissement un sieur Sausot, détenteur du domaine de Tuffery. Celui-ci 'lui opposa la prescription de trente ans. Cette exception', rejetée en première instance, fut accueillie, sur l'appel, par arrêt de la cour d'Agen, du 27 août 1825,-«Attendu, y est-il dit, que la question doit être décidée par le droit romain, tel qu'il était suivi en France; que tous les auteurs qui l'ont traité sont d'accord que le fils de famille ayant l'âge requis pouvait agir par lui-même, pour la conservation de ses biens, lorsque son père n'en avait pas l'asufruit, et qu'ainsi la prescription pouvait courir contre lui pour lesdits biens. » Pourvoi en cassation pour fausse application de la novelle 117, chap. 1er, et pour violation des lois romaines, qui ne font courir la prescription contre le fils de famille du jour où il a été affranchi de la puissance paternelle par mancipation. que l'é Mais, le 23 août 1826, ARRÊT de la section des requêtes, M. Botton faisant les fonctions de président, M. Hua rap porteur, M. Odillon-Barrot avocat, par lequel: LA COUR, Sur les conclusions de M. Lebedu, avocat général; — Attendu que, si le droit romain était la loi des pays de droit écrit, elle n'y avait pourtant d'autorité que suivant la manière dont elle était entendue et appliquée par la jurisprudence des parlements; que la cour royale d'Agen, en attestant que, dans son ressort, la novelle 117 ne faisait point obstacle à ce que la prescription courût contre le fils de famille en la puissance du père, du jour de sa majorité, lorsque le père n'avait point l'usufruit du bien dont le fils avait la propriété, a déclaré un point de jurisprudence qui a pu être la règle de son arrêt; - Que d'ailleurs elle a reconnu, en fait, que la prescription trentenaire était acquise avant la demande; - REJETTE.. B. COUR DE CASSATION. L'énonciation que le jugement a été rendu EN L'audience suffit-elle pour établir la présomption légale qu'il l'a été publiquement? (Rés. aff.) Loi du 20 avril 1810, art. 7. Les dispositions législatives qui, pour le cas où le mari refuse d'autoriser sa femme à passer un acte, prescrivent une forme particulière de procéder, doivent-elles étre observées en cause d'appel, comme en première instance? (Rés. nég.) Cod. civ., art. 219; cod. de proc., art. 861. Par exemple, en cas d'appel du jugement qui accorde à la femme l'autorisation demandée, le mari doit-il étre cité et entendu en la chambre du conseil sur les motifs de son refus, avant que l'arrêt puisse être prononcé ? (Rés. nég.) CHARVE, C. SA FEMME. La dame Charve, séparée de corps et de biens, demande à son mari l'autorisation nécessaire pour passer un acte qui l'intéresse. Celui-ci la refuse sur le motif ou le prétexte que l'acte projeté serait ruineux pour sa femme. Dans cette situation, la dame Charve cite son mari devant le tribunal de première instance, dans la forme prescrite par les codes civil et de procédure, et après avoir entendu ce dernier à lå cham-`` bre du conseil sur les causes de son refus, le tribunal rend un jugement qui autorise la femme à passer l'acte en question. Sur l'appel de Charve, la cour d'Aix, après un débat public à l'audience, a confirmé ce jugement par arrêt du 11 avril 1825. Pourvoi en cassation. Deux moyens sont présentés au nom du demandeur. Le premier est fondé sur une prétendue violation de la loi du 20 avril 1810. L'art. 7 de cette loi vent que tous les jugements sans distinction soient rendus publiquement et à l'audience; dans l'espèce, celui qui autorise la dame Charve à contracter avait été rendu dans la chambre du conseil donc il ne l'avait pas été publiquement, donc il était nul, et la cour d'Aix, en le confirmant, s'était approprié cette nullité radicale et absolue. Telle était en analyse la conclusion du demandeur. : Le second moyen était pris d'une contravention aux art. 219 du cod. civ. et 861 du cod. de proc. Dans l'économie de ces articles, les débats relatifs à l'autorisation demandée devaient avoir lieu à la chambre du conseil. Cette sage mesure, dont l'objet est d'éviter le scandale que pourrait exciter la publicité des divisions qui s'élèvent entre époux, avait été suivie en première instance; cependant on s'en était écarté en cause d'appel, quoique le motif du secret fût le même, et c'est après un débat en audience publique que la cour d'Aix avait rendu son arrêt du 11 avril 1825. Évidemment cet arrêt était en opposition avec le texte et l'esprit de la loi : comment pourrait-il, après cela, échapper à la censure de la cour suprême ? Du 23 août 1826, ARRÊT de la section des requêtes, M. Botton faisant fonctions de président, M. Chilhaud de la Rigaudie rapporteur, M. Piet avocat, par lequel: « LA COUR, Sur les conclusions de M. Lebeau, avocat-général; Sur le premier moyen, pris de la violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que le jugement du 24 septembre 1824, adopté par l'arrêt attaqué dans ses motifs et son dispositif, n'aurait pas été rendu en audience publique, Attendu que ce jugement énonce qu'il a été rendu en l'audience, ce qui suffit pour établir la présomption légale qu'il l'a été publiquement; Sur le second moyen, pris de la violation de l'art. 219 du cod. civ. et de l'art, 861 du cod. de proc., en ce que la cause n' n'aurait pas été instruite dans la chambre du conseil en cause d'appel, comme elle l'avait été devant les premiers juges, Attendu que ces deux articles ont prescrit une forme particulière de procéder pour le cas qui y est prévu, celui du refus fait par le mari d'autoriser son épouse à passer un acte, exigeant, dans ce cas, que la femme ne puisse citer son mari devant le tribunal de première instance qu'après qu'elle l'aura appelé en la cham2 bre du conseil; qu'il résulte évidemment des dispositions de ces deux articles que le législateur a en pour but un essai de conciliation si désirable entre époux, mais qu'il serait inutile de renouveler en cour royale: d'où il suit que l'arrêt attaqué n'a violé aucun des articles invoqués par le demandeur;— REJETTE. » B. COUR DE CASSATION. L'ascendant peut-il exercer le droit de retour légal, pour raison de sommes mobilières par lui constituées en dot à sa fille, sur le prix d'un immeuble à elle abandonnée en paiement de ces mêmes sommes par son mari? (Rés. nég.) Cod. civ., art. 747. P.-P. SAURAIN, C. J.-A. SAURAIN. Le 1er janvier 1813, mariage d'Angélique Saurain avec le sieur Morain. P.-P. Saurain, père de la future, lui avait constitué, conjointement avec sa femme, une dot de 6,000 fr. en numéraire, plus un cheptel, évalué à 600 fr. — Morain, mari de la donataire, ayant fait de mauvaises affaires, celle-ci poursuivit et obtint sa séparation de biens. Les droits et reprises d'Angélique Saurain furent liquidés, par acte notarié du 24 janvier 1816, à une somme de 8,025 fr. Pour la remplir de cette somme, Morain lui abandonna son domaine de Gemeux, d'une valeur égale au montant de ses reprises. Angélique Saurain décède sans postérité. Sa succescession est dévolue pour une moitié à ses père et mère, et pour l'autre moitié à une sœur unique, mariée avec un sieur J.-A. Saurain. - Tous les héritiers vendent, d'un commun accord, le domaine de Gemeux, moyennant une somme de 8,025 fr., qu'ils se partagent entre eux. La sœur d'Angélique décède à son tour, laissant pour légataire universel son mari. — On voulut procéder aux opérations du partage: ce fut alors que le père d'Angélique éleva, tant en son nom qu'au nom de son épouse, la prétention d'exercer, aux termes de l'art. 747 dủ cod. civ., et avant tout partage, le prélèvement, à titre de retour légal, de toutes les sommes mobilières por eux |