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Cette capitulation fut fignée en Virginie, le 1 2 Mars 1651, & fut enfuite confirmée par Cromwel en Angleterre.

Le parlement annulla à la vérité, lors de la reftauration de Charles II, tout ce qui avoit été fair par Cromwel. Mais fi cette capitulation étoit comprise dans les actes annullés, les habitans de la Virginie étoient réintégrés dans le droit primitif d'une indépendance abfolue de l'Angleterre. Si, au contraire, la capitulation devoit subsister, les habitans de la Virginie devoient, fuivant le IV article, être maintenus dans la liberté de commercer avec toutes les nations; ils ne pouvoient, d'après le cinquième, être grevés d'aucune taxe, fans le confentement de leur affemblée générale.

Ces deux conféquences font bien importantes à faifir, pour fe convaincre de l'injustice des taxes que l'Angleterre voulut mettre fur toutes les colonies, & qui, après avoir donné lieu à la guerre de 1774, opérèrent leur indépendance.

Je dois cependant observer que tous les états de l'Amérique feptentrionale n'ont, ni la même origine, ni les mêmes titres que celui de la Virginie. Plufieurs furent fondés fur des conceffions faites par les compagnies de Londres & de Ply

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La Colonie de Penfilvanie a une origine parti

culière; elle eut pour fondateur Guillaume Penn, auquel Charles II accorda une charte, dont les conditions furent, «que le roi auroit un cinquième » du produit des mines d'or & d'argent; qu'il » feroit payé à la couronne un tribut annuel; que » la province seroit appelée Penfilvanie; que les » habitans auroient, à la cour de Londres, un député pour répondre à tout ce qui pourroit être allégué contr'eux; que dans le cas où ils ne satisferoient à la condamnation prononcée, le monarque pourra reprendre le gouvernement jufqu'à ce qu'ils y ayent fatisfait, fans que cela puiffe néanmoins porter préjudice aux proprié»taires particuliers».

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Par un autre article, il eft dit: «que le monar» que ne mettra, ni taxes, ni impofitions fur » ladite province, fans le confentement du propriétaire ou de l'affemblée, ou fans un acte du » Parlement d'Angleterre ».

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Ce dernier article, particulier à la Penfilvanie, paroiffoit rendre la cause des habitans défavorable dans la dernière guerre, parce que les taxes imposées étoient revêtues d'un acte du parlement; mais ceux-ci objectoient que ce traité avoit été passé seulement entre Penn & Charles II, fans leur concours; que dans celui qui les lioit avec leur gouverneur, il n'étoit il n'étoit pas queftion de la fuprématie d'Angleterre. En effet, un des articles

de la charte de Penn avec les émigrans, porte; » que le gouvernement, c'eft-à-dire la fouverai» neté, doit résider dans l'assemblée générale de la province, confiftant dans le gouverneur & » dans les repréfentans des hommes libres, pour » faire des loix, mettre des taxes, établir des » tribunaux & des officiers ». Il est dit : « que

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tout homme, faisant sa résidence dans la province, qui paye la taxe au gouvernement, doit » être considéré comme homme libre, & jouir » du droit d'élire & d'être élu à quelqu'emploi » que ce puiffe être; que quiconque reconnoît un » Dieu tout puissant, ne doit point être inquiété » dans fes principes de religion, en matière de » foi ou de culte, ni forcé d'entretenir ou de fré» quenter aucun miniftre:

D'après ce contrat paffé entre Penn & les habitans d'Angleterre, qui s'attachèrent à lui, ils s'embarquerent pour l'Amérique, & s'établirent dans un canton de la province connu fous le nom de Philadelphie.

La province de Penfilvanie a été plus rapidement habitée que les autres états de l'Amérique, parce que le plan de légiflation y parut plus fage; les Quakers, qui n'étoient foufferts, ni en Virginie, ni dans aucune des autres colonies de l'Angleterre, y furent reçus, & y exercèrent ces vertus douces & paifibles qui caractérisent leur fecte,

Nous devons ajouter que rien ne contribua plus à peupler l'Amérique feptentrionale, que les guerres de religion. Les émigrations devinrent fi nombreuses, en 1633, qu'on examina dans le confeil du roi d'Angleterre fi on devoit les défendre, & elles furent effectivement défendues en 1637; mais cette prohibition ne fit que rendre le defir de s'embarquer plus vif: on partoit pour l'Amérique de tous les ports de l'europe.

L'intolérance, fi nuifible à la France, eût tourné au profit de l'Angleterre, fi elle eût fu conferver fon afcendant fur des hommes qui n'abandonnoient pas totalement leur patrie, en fe refugiant dans des colonies avec lefquelles elle confervoit des relations de commerce; mais ce peuple, qui Le croit fi fupérieur en lumières & en politique, n'eut pas pas l'art de nourrir le fentiment qui reste au fond du cœur d'un émigrant pour la terre qui l'a vu naître; rempli de l'idée de fa fupériorité, il regarda avec mépris cette génération qui s'étendoit au-delà des mers, & qui n'avoit plus de commun avec lui que le même langage. Abufant de fa force & de fon opulence, il s'attribua le droit de régler le commerce des Américains; il les affujettit à ne recevoir que de lui feul les denrées qui leur manquoient, à n'amener que dans fes ports les fruits de leur induftrie. Plufieurs états de l'Amérique, dirigés par l'habitude, étoient

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perfuadés que cette loi rigoureufe étoit réellement, comme le prétendoient les miniftres de la GrandeBretagne, un pacte de convenance réciproque, & s'y foumettoient fans en murmurer.

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Tant que ces prétentions injuftes, dit l'auteur des Recherches fur les États-Unis,» ne portoient » que fur des objets particuliers, on proteftoit, on difputoit, mais on aimoit mieux fouffrir que » d'en venir à une rupture». Il eft difficile, continue le même écrivain, « de prévoir ce qui feroit » arrivé, fi les miniftres Anglois avoient conti» nué d'avancer pas à pas. L'heureufe étoile des » colonies a voulu que l'obftination l'emportât » fur la politique; ils déclarèrent ouvertement

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qu'ils avoient le droit de nous foumettre à toutes leurs loix; alors il ne nous reftoit plus » que l'alternative, ou de nous féparer de la Grande-Bretagne, ou de gémir fous l'esclavage » le plus honteux & le plus terrible».

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On auroit peine à croire jufqu'à quel point l'Angleterre avoit pouffé le defpotifme à l'égard de fes colonies, fi les actes du parlement n'en fourniffoient des preuves authentiques.

Ilétoit défendu aux colons de fabriquer chez eux des objets de première néceffité, afin de les obliger à les tirer des manufactures de l'Angleterre. Milord Chatam, qui s'oppofa le plus vigoureufement aux taxes que l'on vouloit mettre fur les

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