aux dommages et intérêts, sont contre des personnes libres; et non contre des fils de famille, qui sont sans doute excusables s'ils ne veulent pas accomplir le contrat de mariage contre la volonté de leur père.....; qu'il n'était pas juste que, pour épouser l'appelante, de basse condition et de petite fortune, Fondegré contrevint à la volonté de son père, et fût privé de son hérédité, suivant le testament qui l'en privait, au cas qu'il accomplit ce mariage. » Il était répliqué par l'appelante, que l'appelé, pour être fils de famille lors du contrat de mariage, ne devait pas moins les dommages et intérêts; qu'il suffisait qu'il fût alors ágé de trente-deux ans, et qu'il eût fait trois actes à son père, après lesquels il pouvait se marier librement contre sa volonté, et qu'il fût sui juris, et dégagé de la Puissance paternelle pour ce qui concerne le mariage, particulièrement en ce cas, où il n'y avait pas grande différence de condition; qu'ainsi, les pactes de mariage dont il s'agissait, étaient bons et valables, et obligatoires au temps même qu'ils avaient été passés...; >>>> Sur ces raisons, intervint arrèt, le 9 janvier 1680, par lequel Fondegré a été condamné à payer à ladite Fournoly, pour ses dommages et intérêts, la somme de deux cents livres, que la cour jugea suffisante, par rapport à la condition de la fille et à sa fortune, et à la dot qu'elle avait constituée, qui était très-modique ». XIV. Il faut encore mettre au nombre des exceptions à la capacité d'état du fils de famille, la défense que lui font les lois de donner à cause de mort, sans le consentement de son père, et dont elles ne paraissent le dispenser que par rapport à son pécule castrense ou quasi-castrense. Voici ce que portent les §. 4, 5 et 6 de la loi 7, D. de donationibus : « La raison qui empêche le fils de famille de donner entre vifs, l'empêche également de donner à cause de mort; car, quoiqu'il puisse donner, même de cette dernière façon, lorsque son père le lui permet, il ne peut pas le faire sans cette permission. Il faut même remarquer que la permission générale n'emporte point celle de donner à cause de mort; et qu'il faut, à cet égard, une permission particulière. > Tout cela a lieu dans les biens ordinaires; quant à ceux qui ont un pécule castrense ou quasi-castrense, ils sont, par état, capables de donner et entre-vifs et à cause de mort; ils jouissent même à cet égard de la faction testamentaire ». Ces décisions suffisaient, au temps où elles ont été écrites, pour résoudre toutes les difficultés qui pouvaient se présenter sur cette matière. On ne connaissait alors au fils de famille que deux sortes de pécules, le profectice et le castrense ou quasi-castrense. Ainsi, en décidant qu'il pouvait donner à cause de mort les biens compris dans le second, et qu'il n'avait pas la méme faculté par rapport à ceux du premier, on avait tout dit, tout prévu, tout décidé. Mais les lois du Code et les novelles ont introduit un troisième pécule, qu'on a appelé adventice; elles en ont assuré la propriété au fils, et l'usufruit au pére; elles ont même marqué certains cas où le fils doit en être à la fois propriétaire et usufruitier; et de là est venue la question de savoir s'il peut ou non les donner à cause de mort, sans le consentement de son père. On convient généralement que la négative n'est susceptible d'aucun doute, relativement aux biens adventifs, dont le père a l'usufruit; c'est même ce que parait décider la loi 8, §. 5, C. de bonis quæ liberis. Mais la plupart des auteurs soutiennent le contraire, par rapport aux biens de la même nature qui sont dans la pleine propriété du fils. Tels sont, entre autres, Bartole sur la loi 8, C. de bonis quæ liberis; Perés sur le Code, titre de mortis causa donationibus, no 18; Romanus, dans son conseil 512; Fachinée, liv. 5, chap. 25; Godefroi, sur la loi 3, C. qui testamenta facere possunt; Jason, sur la loi nemo du même titre; Chasseneuz sur la coutume de Bourgogne, rubr. 7, §. 12, gl. dernière, no 8; le président Favre, Jurisprudentiæ Papinianeæ scientia, tit. 8, princip. 3, illat. 4; Ricard, des donations, part. 1, nos 277 et 279. Furgole adopte ce sentiment dans sa question 22 sur la matière des donations, et détaille toutes les raisons sur lesquelles on l'appuie. « Nous nous fondons premièrement (dit-il) sur ce que la loi 7, §. 4, D. de donationibus, dit en termes exprés qu'il est défendu au fils. de famille de donner à cause de mort, par la même raison qu'il lui est défendu de donner entre-vifs: Pari autem ratione quá donare filiusfamilliás prohibetur, etiam mortis causá donare prohibetur : >> 2o De là il suit que, tout comme il n'y a point d'incapacité dans la personne du fils de famille, qui l'empêche de donner à cause de mort, ainsi ce n est point l'autorité, mais la permission ou la volonté du père qui est requise, suivant l'expression des lois qu'on vient de citer; et que (tout comme il lui était défendu de donner entrevifs, à cause qu'il n'avait rien en propriété, excepté le pécule castrense ou quasi-castrense, à raison duquel toute donation lui était permise, et que la simple concession du pécule pour l'administrer, n'attribuait pas le droit de donner, comme nous l'avons établi dans la question précédente), il en doit être de même à l'égard de la donation à cause de mort, puisque la prohibition de l'une et de l'autre est fondée sur la même raison. Or, la raison prise du défaut de propriété, qui était le motif de cette prohibition, et qui faisait que le consentement du père était requis, cessant, depuis que, par la loi cùm oportet 6, C. de bonis quæ liberis, la propriété des biens adventifs du fils de famille n'est pas acquise au père; que même, suivant la novelle 117, chap. 1, $. 1, le fils de famille peut avoir des biens dont son père n'ait pas l'usufruit, outre le pécule castrense ou quasi-castrense; il faut par conséquent que la prohibition cesse, et que le pére n'ayant plus aucun droit sur cette espèce de biens, sa permission ne soit point requise pour la validité de la donation à cause de mort faite par le fils de famille, puisqu'il n'en souffre aucun préjudice sur ses biens. >> 3o La donation à cause de mort est considérée comme un contrat quoad ejus initium et ordinationem, suivant les docteurs cités par Grassus, §. donatio causa mortis, Cap. de mortis causa donationibus, no 18. Le fils de famille peut faire toutes sortes de contrats sans le consentement de son père (loi 67, D. de judiciis; et loi 39, D. de oblig. et actionib.). Il peut donc donner à cause de mort. La novelle 117, chap. 1, §. 1, a levé toutes les difficultés sur cette matiere; car elle a permis aux fils de famille de disposer à leur gré des biens qui leur appartiennent en propriété et usufruit, licentiam habeant quo velint modo disponere, sans que le consentement du père soit requis en aucune façon; ainsi, c'est une formalité qui n'est plus nécessaire par le droit nouveau ». Ainsi raisonnent Furgole et avec lui tous les partisans de son avis. L'opinion contraire ne manque pas de sectateurs; mais, comme ils ne se déterminent pas tous par les mêmes motifs, il faut les passer en revue chacun séparément. Barry, de successionibus, liv. 1, tit. 7, dit que le fils de famille ne peut, en aucun cas, donner à cause de mort sans le consentement de son père, parceque ce consentement est requis, dans les actes de cette nature, comme une solennité essentielle; et selon le langage des docteurs, ad integrandam personam filii, Mais cette raison a été si solidement réfutée par Fachinée, qu'il ne paraît pas possible de la défendre; on peut même ajouter aux moyens de cet auteur une considération qui lui est échappée : c'est que, si le consentement du père était nécessaire pour l'habilitation de la personne du fils, l'acte passé sans ce consentement, serait perpétuellement nul, comme on l'établira ci-après, §. 5. Il est néanmoins décidé par la loi 1, §. 1, D. de legatis 3o, que, si, après la mort du père, il n'est pas révoqué par le fils, il ne laisse pas de subsister. On ne peut rien de plus décisif. Le président Favre, qui, dans son ouvrage in titulé de erroribus pragmaticorum (Décad. 33, err. 6 et 7), a abandonné l'opinion qu'il avait soutenue dans sa Jurisprudentiæ Papinianece scientia pour embrasser celle de Barry, s'est fondé sur un autre principe qu'il avait puisé dans quelques anciens auteurs. Il a prétendu que, dans les règles, nul ne peut donner à cause de mort, s'il n'a le droit de tester; et il a conclu de là que le fils de famille ne pouvant faire de testament, il ne pouvait aussi faire de donation à cause de mort, du moins de son chef; car, a-t-il ajouté, les lois qui lui ont permis de donner de cette manière, du consentement de son père, supposent que c'est du père que dépend toute la force des donations, et que c'est lui qui est le véritable donateur, puisque les choses données lui appartiennent. Mais cette opinion, quoique soutenue avec tout l'esprit et toute l'érudition possibles, ne peut être mise qu'au rang des erreurs dans lesquelles l'excès de subtilité a quelquefois entraîné le président Favre. Le droit ancien, qui a permis au fils de famille de faire des donations à cause de mort, du consentement de son père, ne les considérait pas proprement comme des dispositions de dernière volonté; il les assimilait plutót aux contrats, et la loi 38, D. de mortis causa donationibus, y exigeait la tradition et l'acceptation, comme dans les donations entre-vifs. Il pouvait donc bien être défendu au fils de famille de tester sans que cette prohibition tirát à conséquence pour les donations à cause de mort. Le président Bouhier, chap. 17, a tout à la fois soutenu le même sentiment que les deux auteurs dont nous venons de parler, et démontreinvinciblement que l'opinion conraire n'est fondée sur rien de solide. On a vu plus haut que Furgole la fait entièrement rouler sur ces termes de la novelle 117, licentiam habeant quo velint modo disponere, termes qui semblent en effet pouvoir être entendus de la donation à cause de mort. Mais nous l'avons déjà dit, ils ont été trompés par le mot disponere, qu'un interprète mal adroit avait substitué au mot grec διοικείν, lequel ne caractérise qu'une simple administration; et une preuve certaine que cette novelle n'a point étendu jusqu'aux donations à cause de mort, le pouvoir qu'elle a accordé, par les termes cités, aux fils de famille, c'est qu'elle ne leur permet de l'exercer que lorsqu'ils sont majeurs, si quidem perfectæ sint ætatis; au lieu que les donations à cause de mort pouvaient être faites dès l'âge de puberté, par toutes les personnes qui n'en étaient d'ailleurs incapables à aucun autre titre. Quel peut donc être le motif de la nécessité du consentement paternel aux donations de cette espèce, lorsque le fils de famille veut les employer à la disposition des biens adventifs dont il a la pleine propriété ? Le voici, répond le président Bouhier: « On sait que chez les Romains, dans l'origine, le fils ne pouvait rien avoir en propre, et que tout ce qu'il acquérait, appartenait au père sans aucune exception. Depuis, il s'en introduisit une en faveur du pécule castrense ou quasi-castrense; mais la règle resta dans son entier pour le pécule profectice, dont le père était censé lui laisser l'administration jusqu'à ce qu'il la lui eût ôtée. Or, la permission d'administrer ne comprend pas la liberté de passer toutes sortes d'actes; elle doit naturellement se restreindre à ceux que le père aurait vraisemblablement permis. Par cette raison, le fils de famille n'avait pas la liberté de faire des donations entre vifs de ce pécule, parceque donner, c'est perdre; et le pécule ne lui avait pas été accordé à cette intention. » Par la même raison encore, si le père lui avait permis de donner entre-vifs, cela ne pouvait être étendu aux donations à cause de mort; car ces sortes de permissions sont de droit étroit et rigoureux. Tel était le droit ancien; et quoique, par le nouveau, les fils de famille aient acquis la propriété de certains biens, avec une pleine liberté de les administrer, néanmoins les lois n'ont rien change à la forme de cette administration, ni au reste de l'autorité des pères pour ce regard. Telle est la vraie raison pour laquelle il a été établi que le fils de famille ne peut donner à cause de mort, non pas même les biens dans lesquels le père n'a ni propriété ni usufruit. Les lois qui en ont ôté l'utile au père, n'ont pas voulu le priver de l'inspection naturelle qui lui appartient sur la conduite de son fils. Elles ont d'ailleurs voulu forcer les enfans à prendre le conseil et l'agrément des pères, dans des choses aussi importantes que le sont les donations entre vifs ou à cause de mort; et, sur le même fondement, elles ont exigé que le fils ne comparût pas en jugement pour raison des mêmes biens, sans le consentement de son père, afin que ce dernier pût l'y assister de ses conseils. >> De plus, on peut dire que les pères ne sont pas en cela tout-à-fait sans un intérêt réel. Car, comme les fils de famille ne peuvent faire de testament, et qu'à l'égard des donations à cause de mort, ils n'en sauraient faire sans l'aveu des pères, il s'ensuit que ces derniers sont intéressés à la conservation des biens de leurs enfans, puisqu'en cas de mort, ils doivent naturellement y succéder ». C'est une question si le fils de famille peut, en cas d'absence ou de refus, se faire autoriser par le juge pour donner à cause de mort. La raison de douter est fondée sur deux considérations; la première, qu'on ne trouve rien dans les lois concernant les donations à cause de mort, qui permette le recours du fils de famille au juge, pour remplacer par son consentement, celui que son père lui refuse ou ne peut pas lui donner; la seconde, qu'il semble dangereux d'accorder cette liberté aux jeunes gens, surtout dans les pays de droit écrit, où l'on peut disposer de ses biens aussitôt qu'on atteint l'âge de puberté. « Il me semble néanmoins (dit le président Bouhier) que plusieurs choses concourent pour accorder ce recours aux fils de famille, je veux dire, l'équité, la décision des lois dans des cas semblables, et le sentiment des jurisconsultes. >> A l'égard de l'équité, elle est tout évidente. Car si l'on refusait aux enfans ce recours au juge, il faudrait souvent de deux choses l'une: ou qu'ils fussent forcés de disposer au gré des pères, on à leur profit, contre leur propre volonté; ou qu'ils perdissent le droit, qui leur est acquis par les lois, de pouvoir disposer de leurs biens par la voie de la donation à cause de mort, extrémités qui sont également dures et injustes. >> Les lois nous ont elles-mêmes tracé la route que le fils de famille doit prendre en de semblables cas: car, encore qu'elles aient ordonné que le fils ne puisse agir en justice, soit en demandant ou en se défendant, sans la permission de son père, elles ont néanmoins décidé qu'en cas de refus de la part du père, il peut y être contraint par le juge : Necessitate, per officium judicis, patri imponenda, tantummodò filio consentire vel fugienti, etc. Elles ont encore accordé aux enfans le même remede dans une autre occasion, savoir, quand le père refuse d'autoriser son fils mineur, pour accepter une succession; car, en ce cas, elles permettent à ce dernier de recourir au juge, afin de lui donner un curateur pour la régie des biens de cette succession: Nolente autem patre res filii gubernare propter causæ necessitatem, habeat facultatem filius adire competentem judicem, et ab eo petere curatorem hereditati dari, etc. Elles n'ont donc pas voulu que les pères abusassent de la Puissance paternelle, jusqu'à faire perdre à leurs enfans des droits qui leur étaient justement acquis. Or, il y a autant de raison d'empêcher les pères d'en abuser, lorsqu'il s'agit de priver leurs enfans de donner à cause de mort. >> Pour ce qui est des docteurs, ils conviennent tous que la permission du père peut être remplacée par celle du juge. Il est vrai qu'ils ne parlent que du cas où ils croient que le père ne peut pas l'accorder, parcequ'il s'agit d'une donation à son profit, et non du cas où il refuse son consen tement. Mais si le juge a droit d'y suppléer dans un cas, je ne vois pas pourquoi il ne l'aurait pas dans un autre. Il est même plus important de lui donner cette autorité, quand le père refuse sans raison de donner son consentement à un parcil acte, puisqu'il est question de réparer un tort que ce père veut faire à son fils. En un mot, les lois ci-dessus citées ayant accordé ce secours aux enfans dans le cas d'un pareil refus, il y a une jus. tice entière d'en faire l'application aux donations, comme le reconnaissent de grands jurisconsultes, dont l'opinion me paraît la plus conforme aux règles. Si nous en cherchons même des exemples, nous en trouverons un dans ce qui se pratique en Catalogne, au sujet d'un statut du pays, qui veut que les fils de famille ne puissent passer aucune espèce de contrat sans le consentement des pères. Car, en cas de refus de ces derniers, ils peuvent se faire autoriser d'office par le juge, en connaissance de cause; et c'est l'usage constant de cette province. >> Nous en avons encore un autre exemple vons en user de même pour l'un et l'autre. » Il semble done qu'on doive appliquer au fils, en cas d'absence du père, la même régle que nous suivons à l'égard de la femme, en cas d'absence du mari. Cette règle est marquée dans l'art. 130 des cahiers dressés pour la réformation de notre coutume; car il porte que, si le mari se trouve absent de longue absence, et que la femme soit pressée de faire un contrat, tester, ou disposer de ses biens, tellement que l'affaire ne puisse être différée sans péril, en ce cas la femme pourra recourir à la justice, pour être autorisée. » Cela paraît même nettement décidé par les lois, à l'égard du fils de famille; car elles veulent que, s'il est éloigné de son père, il puisse agir en justice, sans attendre sa permission, si c'est pour affaire pressée : Si filiusfamilias, legationis vel studiorum causa, aberit, et damnum passus sit, placet posse eum utili judicio agere; ne dùm pater expectatur, impunita sint maleficia, etc. Cette décision paraît expresse; et, si elle ne parle pas de la permission du juge, c'est qu'elle est supposée dans toute poursuite qui se fait en justice. >> Il serait, à la vérité, dangereux de permettre aux fils de famille de disposer de leurs biens, surtout lorsqu'ils se trouvent éloignés de leurs pères, si cela s'accordait sans avoir constaté le refus des pères, et par conséquent sans les avoir avertis du dessein de leurs enfans. Mais comme la permission du juge ne saurait se donner qu'en connaissance de cause, a au et après que les pères ont pu déduire leurs raisons, s'ils le jugent à propos, il n'y cun inconvénient à laisser aux juges la liberté d'y pourvoir suivant leur prudence. Si cela cause du retard aux dispositions des enfans, il n'y a qu'eux qui en souffrent; mais ils doivent s'imputer de ne s'y être pas pris plus tôt, pour avoir la permission de disposer de leurs biens. » Et, quant à ce qu'on dit que cela peut faire naître des contestations entre les pères et les enfans, je ne vois pas qu'il y ait en cela plus d'inconvéniens qu'à l'égard des femmes mariées, qui sont dans le même cas en cette province, par rapport à leurs maris. domestique : c'est celui de la femme mariée, D'ailleurs, quelque parti qu'on prerne, il y laquelle ne saurait, par notre coutume, disposer de ses biens par aucun acte de dernière volonté, sans la licence et l'autorité de son mari; et cependant, en cas qu'il refuse de l'autoriser, elle peut se pourvoir en justice pour avoir cette permission. Or, il n'y a pas plus de raison de la lui accorder qu'au fils de famille; et par conséquent nous de a des inconvéniens de tous côtés ». Une autre question non moins importante, est de savoir si le fils de famille peut faire, au profit de son père et de son consentement, une donation à cause de mort. La négative a plusieurs partisans, et tel est notamment Guy-Pape quest. 223, où il où il rapporte un arrêt du parlement de Grenoble, du 14 août 1459, qui l'a formellement adoptée. Sa raison est que le consentement du père est essentiel pour habiliter la personne du fils, ad integrandam personam filii; qu'on ne doit pas le considérer comme une simple permission, mais comme une véritable autorité; qu'ainsi, il n'y a, à cet égard, aucune différence entre le concours du tuteur aux actes passés par son pupille, et le concours du père à la donation à cause de mort faite par son fils; que le tuteur ne peut certainement pas autoriser son pupille pour un acte dans lequel il a intérêt, puisque, comme dit la loi 1, D. de auctoritate et consensu tutorum, nemo in rem suam auctor esse potest; que par conséquent on doit dire la même chose du père, relativement aux donations à cause de mort faites par son fils. Mais, on le voit clairement, un faux prin. cipe égare les sectateurs de cette opinion. Nous avons déjà dit que le consentement paternel n'est point requis sur cette matière, pour l'habilitation de la personne du fils, et cela est de la plus grande évidence. Les lois qui en parlent, notamment la loi 7, §. 4, D. de donationibus, et la loi 25, §. 1, D. de donationibus mortis causa, se servent seulement des mots Volonté et Permission, Ex VOLUNTATE PATRIS, PERMITTENTE PATRE; ce qui diffère essentiellement de l'autorisation que les lois exigent de la part d'un tuteur envers son pupille. Nous voyons dans la loi 1, §. 2, D. de tutelis, qu'un muet ne peut être tuteur, quia auctoritatem præstare non potest; et cependant la loi 5, D. de acquirenda hereditate, et la loi 1, D. de verborum obligationibus, portent qu'il peut faire tous les actes pour lesquels il ne faut qu'un simple consente ment. Une autorisation doit toujours être insérée dans le corps de l'acte auquel elle se réfère : le §. 2, aux Institutes, de auctoritate tutorum, y est exprés. Le simple consentement, au contraire, peut être donné avant ou après l'acte, comme l'établissent Tiraqueau, de legibus connubialibus, gl. 6, no 5; Evrard, consil. 8; Alexandre, lib. 6, consil. 106; et Balde sur la loi 1, C. de sacrosanctis ecclesiis. C'est même ce qui se pratiquait chez les Romains par rapport aux donations à cause de mort des fils de famille. Cicéron, dans son Traité des lois, liv. 2, no 20, nous apprend qu'il suffisait, pour la validité de ces actes, que le père les ratifiát après coup: Quod paterfamiliàs, dit-il, in ejus donatione qui in ipsius protestate esset, approbavit, ratum TOME XXVI. est. Quod, eo INSCIENTE, factum est, SI ID IS NON APPROBAT, ratum non est. C'est donc une erreur manifeste d'appliquer au consentement paternel sur la matière des donations à cause de mort, des lois qui ne parlent que de l'autorisation proprement dite; et il y a de l'absurdité à en conclure que le père ne peut pas recevoir de son fils une libéralité de cette espèce. Aussi les arrêts intervenus depuis celui que rapporte Guy-Pape, ont-ils invariablement confirmé ces sortes de dispositions. Il y en a deux du parlement de Toulouse, l'un du 7 février 1586, inséré dans le recueil de Maynard, liv. 5, chap. 3; et l'autre du 15 septembre 1593, rapporté par Cambolas, liv. 1, chap. 45. De Bezieux, liv. 5, chap. 4, §. 9, nous en retrace un semblable rendu au parlement de Provence, le 20 décembre 1620. Bouhier dit que le parlement de Dijon a toujours jugé de même. « Les arrêts (continue-t-il) en sont rapportes par les commentateurs de notre coutume (1); et en dernier lieu, la même chose a été jugée dans une affaire dont voici l'espèce : Claude et Gabriel Lavirotte, fils de Claude Lavirotte, marchand à Nolay, étant en áge de puberté, avaient fait, au mois de mars 1712, sans la permission de leur père, une donation à cause de mort mutuelle et réciproque, au profit l'un de l'autre, de tous les biens qui leur étaient échus par la mort de leur mère. Peu après, Gabriel Lavirotte étant tombé malade, fit une autre donation à cause de mort, de tous ses biens au profit de son père présent et l'autorisant, avec révocation de toute disposition précédente. Le donateur étant mort, et ensuite son père, aussi bien que Claude Lavirotte, son frère, il y eut procés pour la succession de Gabriel, entre Jeanne Lavirotte, sa sœur germaine, héritière de Claude son frère, laquelle demandait l'exécution du don mutuel du mois de mars 1712, contre les enfans d'un second lit de Claude Lavirotte père, lesquels, en qualité de ses héritiers universels, demandaient l'effet de la seconde donation. La sentence du bailliage de Beaune ayant prononcé en leur faveur, Jeanne Lavirotte en interjeta appeľ; et, outre les moyens de droit, elle ne manqua pas de faire valoir celui de fait, résultant de ce que cette seconde donation tendait à faire passer les biens de sa mère aux (1) V. Taisand, tit, 6, art. 3, note a. 11 |