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généralité du principe sur lequel il la fonde: Silentium, dit-il, donatoris vel donatricis ad illud tempus referatur quo donatio conscripta sit; sicut et aliàs ratihabitione negotiorum ad illa reduci tempora oportet in quibus

contracta sunt.

Il y a même plusieurs cas où la donation faite par le père à son fils non émancipé, est valable dans son principe, et n'est conséquemment pas sujette à révocation.

Le premier est, suivant Paul de Castro et quelques autres auteurs, lorsque le père remet

à son fils l'usufruit que la Puissance paternelle lui donne sur ses biens adventifs. Ils fondent cette doctrine sur la loi 6, §. 2, C. de bonis quæ liberis, qui cependant ne contient point là-dessus de disposition précise. Elle décide, à la vérité, que le père ne peut pas se faire restituer par son fils les fruits qu'il lui a permis de percevoir sur ses biens adventifs : mais conclure de là qu'il ne puisse pas révoquer pour l'avenir une permission de cette espèce, c'est, ce semble, aller trop loin; la loi ne le dit pas et quelle raison y a-t-il d'étendre jusque-là sa disposition?

Catellan, liv. 2, chap. 46, après avoir rendu compte d'un arrêt de 1677, par lequel il a été jugé que les fruits perçus par le fils de famille, en conséquence d'un pareil consentement, ne sont pas sujets au rapport (ce qu'a également décidé un arrêt du parlement de Pau, qu'on trouvera sous les mots Rapport à succession, §. 4, no 8), fait sur ce point une distinction remarquable. Il commence par transcrire les termes dont Justinien s'est servi dans le texte cité, et ensuite il ajoute:

« Dans cette loi, la tolérance du père, et la rémission tacite qu'il fait de l'usufruit à lui appartenant, est comparée à une donation; ce qui fournit une objection, d'autant que toute donation faite par le père à son fils est sujette au rapport.

>> Mais à cela il est répondu que cette tolé. rance et cette rémission tacite du père ne sont pas une donation d'un usufruit déjà acquis, mais une simple renonciation à un usufruit qu'il pouvait acquérir s'il eût voulu, et dont il se départ pour laisser jouir pleinement son fils des biens qui lui appartiennent, de quoi les légitimaires ne peuvent pas se plaindre. La tolérance du père acquiert donc les fruits à son fils, et quoique régulièrement les donations que les pères font aux enfans qu'ils ont sous leur Puissance, puissent être révoquées et ne soient confirmées que par la mort, je crois néanmoins qu'il n'est plus permis à ce père de révoquer, quant au passé, la dona

tion ou rémission journalière qu'il a faite de ces fruits à ce fils; mais il lui est sans doute permis de reprendre cet usufruit, quand bon lui semble, pendant sa vie, pour l'avenir.

>> Ainsi, la donation faite par le mari à sa femme, qui n'est confirmée que par la mort, peut être révoquée par le mari; mais cette révocation ne donne point au mari le droit de demander les fruits de la chose que la femme a perçus, suivant la loi 15 et les deux suivantes, D. de donationibus inter virum et uxorem. De même la patience du père qui laisse jouir son fils des fruits des biens qui lui appartiennent en propre, les lui acquiert irrévocablement, mais seulement pendant le temps que cette patience a duré : mais, si le pére a remis à son fils cet usufruit pour toujours, cette rémission vaut et ne peut être révoquée par le père, suivant l'avis de Paul de Castro sur cette constitution de Justinien; et c'est une différence notable entre la renonciation expresse et la tacite ».

Le deuxième cas où les auteurs regardent communément la donation faite par le père à son fils non émancipé, comme valable dans son principe, et par conséquent irrévocable, est lorsqu'elle consiste dans une chose mobilière, et qu'elle a pour objet d'aider un fils militaire dans les dépenses qu'il est obligé de faire à l'armée. C'est ce qu'établissent Schneidewin, sur les Institutes, titre de donationibus, no 72, et après lui Furgole, sur l'ordonnance de 1731, art. 46.

Le troisième cas, est, suivant les mêmes jurisconsultes, celui où le père donne à son fils pour acquérir une dignité.

Ils en ajoutent un quatrième : c'est lorsque la donation est faite pour cause d'études; mais ce dernier point est fortement combattu par le president Favre, de erroribus pragmaticorum, décade 41, erreur 7.

Le cinquième cas, s'il faut en croire l'opinion vulgaire, est lorsque la donation est rénumératoire. Mais c'est une erreur qu'a entièrement pulvérisée le savant magistrat que nous venons de citer.

Le sixième cas remarqué par les auteurs, offre quelque chose de plus exact: c'est celui d'une donation faite à une fille pour cause de dot; on prétend qu'elle est irrévocable, et cela est vrai dans la thèse générale. Le père est obligé de doter sa fille; comment pourraitil, après l'avoir fait, revenir sur ses pas, et révoquer une disposition qui n'est que le paiement d'une dette légale?

Mais cette irrévocabilité n'a-t-elle lieu qu'en faveur du mari, et la fille peut-elle s'en pre

valoir contre son père, après la dissolution du mariage?

Il est certain, suivant le droit civil, que la dot retourne au père lorsque la fille à qui il l'avait constituée, se trouve encore sous sa Puissance au moment du décés du mari. Mais ce retour n'est qu'imparfait: le père ne peut recevoir le remboursement de la dot, que du consentement exprès ou tacite de la fille, comme la fille ne peut se la faire rendre sans le concours de son père. C'est ce qu'établissent la loi 2, §. 1 et 2, la loi 3, la loi 22, §. 1, la loi 34 et la loi 37, D. soluto matrimonio; les lois 2, 7 et 17, C. au même titre, et la novelle 97, chap. 6, §. 1.

D'où vient cette nécessité du consentement simultané du pére et de la fille? Ce n'est pas que le père ne reprenne la propriété de la dot; mais c'est parcequ'aux termes du chap. 5 de la novelle 97, il est obligé, en cas de convol de sa fille à un second mariage, de la lui constituer de nouveau, et que par conséquent la fille a intérêt de veiller à la conservation de cette partie du patrimoine de son père.

Le concours des deux consentemens ne serait plus requis, si la fille, après s'être mariée pendant qu'elle était sous la Puissance paternelle, se trouvait émancipée au moment de la dissolution du mariage, ou même de la restitution de la dot. Dans ce cas, elle la recevrait seule sans difficulté, et ni le père ni ses héritiers n'y pourraient rien prétendre. C'est la disposition expresse de la loi 31, §. 2; de la loi 44, et de la loi pénultiėme, §. 2, D. soluto matrimonio; et cela seul prouve bien nettement que la donation à titre de dot, est, pour la fille non émancipée, un titre valable et habile à la rendre propriétaire des biens qui y sont compris.

Nous avons dit que le père reprend la dot en toute propriété, lorsque la fille est encore sous sa Puissance, au temps de la restitution qui s'en fait. Il résulte de là que, si la fille ne se remarie pas avant le décès du père, elle ne pourra pas la réclamer dans sa succession comme une chose qui lui appartienne. C'est ce que le président Favre (1) démontre trèsbien par des inductions tirées de la loi 35, D. familiæ erciscundæ.

Le septième cas où les auteurs font valoir la donation d'un père à son fils non émancipé, est lorsqu'elle est faite en faveur du mariage de celui-ci.

Ce n'est point dans le droit romain qu'il

(1) Conjectur., lib. 7, cap. 12.

TOME XXVI.

faut chercher la justification de cette doctrine: on n'y trouve au contraire rien qui ne la condamne formellement. C'est ce que le président Favre (1) a très-bien prouvé contre l'opinion commune des interprètes. Mais, comme il l'observe lui-même, l'usage de tous les pays de droit écrit a prévalu sur ses raisons: Usu ipso, jam ità invalescente ut nec dubitetur ampliùs an valeant, præsertim si juratæ proponantur, quasi quod ratio juris nunquàm permissura fuerat, nostris nunc moribus obtentum aut potiùs extortum videatur.

Ricard dit à peu près la même chose dans son Traité des donations, part. 1, no 299: « L'usage du royaume a encore introduit une >> voie particulière et qui n'était pas connue » du droit romain, par laquelle la donation » du père au fils qui est sous sa Puissance, a >> effet dans les provinces du droit écrit, où >> le droit d'autorité paternelle est encore en >> vigueur: c'est à savoir lorsque la donation >> est faite par contrat de mariage. Nos mœurs >> ont eu tant de considération pour les con>> ventions faites dans cette espèce de contrat, » qu'elles les ont rendues susceptibles de tou>> tes sortes de pactions, quoique contraires >> aux lois du pays; et les provinces de droit >> écrit ont, en cette occasion, aussi bien >> que les autres, dérogé à leurs lois, pour se > rendre conformes à l'esprit général de la >> France en une matière qui est le principal >> objet de la vie civile, et en laquelle tous les >> peuples d'un état doivent être également » réunis ».

D'Olive, liv. 3, chap. 30, dit que « cette » maxime donne sujet de douter si une dona» tion, qui était faite par le père à son fils, en » faveur du mariage qu'il disait se devoir con>> tracter avec une fille nommée dans l'acte, >> était bonne et valable, sans pouvoir être >> révoquée, parceque cette donation n'était > pas incorporée dans les pactes de mariage, » qui ne furent passés ni le mariage célébré ▸ que quatre mois après cette donation. Mais >> (continue d'Olive) après partage de la pre>> mière chambre des enquêtes (du parlement >> de Toulouse), à la deuxième, il fut conclu > le 18 décembre 1596, pour la validité de >> cette donation (parceque le mariage en » avait été la vraie cause finale), quia matrimonium fuerat causa finalis hujus dona» tionis, et in vim illius subsecutum fuerat ». Mais, si le mariage en faveur duquel le père a donné à ses enfans non émancipés,

(1) De erroribus pragmaticorum, decad. 4г err. 2 et 4.

10

demeure en projet et ne s'effectue pas, la donation rentre dans le droit commun, et devient sujette à révocation. C'est ce qu'ont jugé trois arrêts du parlement de Toulouse, des 13 juillet 1636, 3 septembre 1637, et To décembre 1638, rapportés par d'Olive, liv. 3, chap. 30.

XII. Aux incapacités que nous avons vues

» comme avec un père de famille. Dans les >> contrats (dit l'autre), comme dans les délits, >> le fils de famille est sujet à toutes les pour› suites judiciaires ». La loi 8, D. de procuratoribus, fait entendre la même chose, lorsqu'elle déclare en général que le fils de famille peut constituer procureur en defendant: ad defendendum quoque poterit filiusfamiliás

jusqu'à présent dériver de l'état du fils de fa- procuratorem dare.

mille, il faut ajouter celle d'ester en jugement, sans l'aveu de son père, dans les causes relatives à ses biens adventifs.

C'est ce qui résulte nécessairement de la loi 8, C. de bonis quæ liberis. On voit, dans

Mais que doit-on décider par rapport aux actions dans lesquelles le fils de famille est

demandeur?

Le dernier des textes que nous venons de citer, insinue clairement qu'il y a là-dessus

ce texte, que, lorsqu'un père refuse d'accep- quelques distinctions à faire. Le fils de famille gement rendu à son avantage. D'après cela, procédés bas et vils; il appuie cette restriction

ter une hérédité déférée à son fils, et que par là il se prive du droit d'en avoir l'usufruit, c'est le fils qui en recueille tous les avantages, et qui en supporte tous les risques; et alors, dit l'empereur Justinien, « le juge doit obli» ger le père de donner à son fils le consente> ment dont il a besoin pour plaider, soit en » demandant, soit en défendant, de peur » qu'un jugement n'ait l'air d'être valable » sans le concours du père ». Le législateur ajoute que cette disposition est bornée au cas où le fils est majeur, et que, s'il s'agissait d'un mineur, il pourrait, sur le refus de son père d'agir pour lui, se pourvoir devant le juge, et demander qu'il lui fut nommé un cura

teur.

Cette loi prouve bien évidemment qu'en cette matière, le fils de famille majeur n'est pas plus capable d'ester en jugement qu'un mineur, et que son incapacité n'est pas uniquement fondée sur l'intérêt du père. Il y a cependant quelques auteurs qui enseignent le contraire (tels sont notamment Guy-Pape, quest. 54, et ses annotateurs), mais leur opinion doit céder à un texte aussi formel. A l'égard des causes étrangères aux biens adventifs du fils de famille, il faut distinguer: ou elles concernent son pécule, soit castrense, soit quasi-castrense, ou elles se rapportent à d'autres objets.

Dans le premier cas, le fils peut plaider seul, tant en demandant qu'en défendant, parcequ'il est à cet égard réputé père de famille.

Dans le second cas, il ne lui faut ni consentement ni autorisation de son père pour plaider en défendant: c'est ce que prouvent la loi 39, D. de obligationibus et actionibus, et la loi 37, D. de judiciis. « Le fils de famille >> (porte l'une) peut s'obliger pour toutes » sortes de causes, comme un père de famille; » et, par cette raison, on peut agir avec lui

(y est-il dit) peut constituer procureur, même en demandant, pourvu que ce soit dans des causes où il puisse agir lui-même: filiusfamilids et ad agendum dare procuratorem potest, si quæ sit actio quá ipse experiri potest.

Pour mettre ceci dans tout son jour, distinguons les matières criminelles d'avec les matières civiles.

D'abord, on ne doute point que le fils de famille ne soit capable de prendre seul la voie extraordinaire pour la poursuite d'un délit public. C'est ce qu'établit Godefroy sur la loi 5, §. 4, D. de his quæ ut indignis auferuntur. Les termes de ce jurisconsulte sont aussi clairs que précis: in publicis judiciis filius potest accusare, invito patre; et la loi sur la. quelle il s'explique de la sorte, justifie nettement sa doctrine: voici comment elle est conçue : « si le fils de famille a accusé un >> testament de faux, doit-on refuser une nou>> velle action au père? Je crois que, s'il a >> intenté son accusation malgré son père, >> on ne doit pas refuser à celui-ci l'action >> qu'il a de son chef ». La loi 37, D. ad legem Juliam de adulteriis, n'est pas moins formelle: << Il est décidé par une constitution expresse, >> qu'un fils de famille n'a pas besoin du con>> sentement de son père pour intenter con>> tre sa femme l'action publique d'adultère. >> La raison en est qu'il ne fait en cela que >> poursuivre la vengeance d'un affront qui » lui est personnel ».

En est-il de même des délits privés?

La loi 9, D. de obligationibus et actionibus, semble assurer l'affirmative, en donnant pour règle générale, que le fils de famille peut exercer l'action d'injure sans l'intervention de son père; mais cette disposition est restreinte par la loi 8, D. de procuratoribus, par la loi 18, §. 1, de judiciis, et par la loi 17, $. 10, D. de injuriis, au cas où le père est absent, ou hors d'état de faire connaître sa volonté; et, comme il n'y a, à cet égard,

aucune raison de différence entre l'injure et les autres délits que les Romains appelaient privés, il est hors de doute que tous ces textes doivent s'appliquer à ceux-ci comme à celle-là.

Remarquons cependant que cette distinction entre les délits privés et les délits publics, n'est plus connue dans nos mœurs, et que l'autorisation paternelle n'est pas actuellement plus nécessaire au fils de famille pour les uns que pour les autres.

C'est ce qu'attestent Bugnyon, des lois abrogées, liv. 1, chap. 188; Christin, son annotateur; Guy-Pape, question 54; et Boucheul sur la coutume de Poitou, art. 310.

Le président Bouhier, chap. 16, no 29, en rend le même témoignage : « cette distinction > (dit-il) a été abolie en France, où, de tous >> les délits qui se poursuivent criminellement, >> il n'y en a plus de purement privés, les par>> ties publiques y étant toujours nécessaire> ment jointes aux instigans. Ainsi, l'autorité >> du père n'y est pas nécessaire au fils de fa>>> mille. Nous le pratiquons ainsi dans tout le >> ressort de notre parlement; et il y en a eu un >> arrêt donné à la chambre des enquêtes, où >> je présidais, le 11 janvier 1724, au rapport >> de M. Lantin, qui valida la procédure cri>> minelle qui avait été faite entre Guillaume>> Antoine de Montalivet, seigneur de Saint>> Maurice-de-Gourdans, en Bugey, accusé ➤ d'outrages et de voies de fait, à la poursuite >> de Henri Coindre, fils de famille, non au>> torisé de son père ».

Il y a apparence que le fils de famille dont il s'agissait dans l'espèce de cet arrêt, était majeur: en serait-il de même dans le cas où le plaignant se trouverait à la fois enchaîné dans les liens de la Puissance paternelle et dans ceux de la minorité?

Il est certain qu'en général, un mineur ne peut pas ester en jugement sans être autorisé de son père, lorsqu'il est fils de famille, ou assisté d'un curateur lorsqu'il est émancipé; mais aussi il est décidé, par la loi 14, C. de procuratoribus, que cette incapacité n'est introduite qu'en sa faveur, et qu'elle ne peut jamais servir de prétexte pour casser un ju

pas se prévaloir de la minorité de son accusateur, pour faire annuler la procédure.

Il y a plus: l'accusé ne pourra pas même, dans le cours de l'instruction, faire prononcer la nullité de tout ce qui a été fait contre lui, sur la requête d'un fils de famille mineur, si, dans l'intervalle de la plainte au jugement, celui-ci était devenu majeur, et avait, en cet état, fait quelques procédures, d'où l'on pût induire une ratification tacite de ce qui aurait précédé de sa part. Le parlement de Dijon l'a ainsi jugé par deux arrêts des 15 décembre 1732 et 11 mars 1754, rapportés dans le Code criminel de Serpillon, page 1502.

On trouve dans le même recueil, page 381, une observation remarquable sur les plaintes rendues en matière criminelle par des fils de famille; elle est conçue en ces termes :

<<< Quoique le fils de famille majeur puisse se plaindre en justice sans l'autorité du père, comme il vient d'être dit, le père peut transiger sur la plainte du fils, malgré lui: c'est ce qui a été décidé à l'audience criminelle du parlement de Dijon, le 21 mars 1691.

>> Nicolas Séguenot avait donné un soufflet à Marguerite Vacherot, fille majeure, demeurant avec son père; il fut convenu verbalement entre les deux pères, qu'il n'en serait fait aucune poursuite: la fille ne laissa pas d'en informer, elle instruisit même la procédure par contumace. Séguenot, en ayant appelé, fut admis à la preuve testimoniale de l'accommodement fait par les pères : il la fit, tant par la déposition de quelques témoins, que par la déclaration de M. Pérard, conseiller aux requêtes du palais, qui

avait été médiateur.

>> La cour réformant, mit les parties hors de cour, et n'adjugea 'pas même les dépens de la contumace; ils furent tous compensés».

Le sénat de Chambéry a jugé la même chose, par un arrêt du 4 mars 1594. Le président Favre, qui le rapporte dans son Code, liv. 8, tit. 33, def. 2, remarque avec raison, qu'il en serait autrement, si le père s'était rendu méprisable et en quelque sorte diffamé par des

il paraît qu'à la vérité, on ne doit pas admettre un fils de famille mineur à rendre plainte sans l'autorité de son père ou du juge, parceque ce serait exposer l'accusé au risque de recommencer la procédure, si les suites en étaient défavorables au plaignant; mais que si, dans le fait, on a une fois admis sa plainte, et rendu en conséquence un jugement avantageux pour lui, la partie condamnée ne peut

sur la loi 17, §. interd. D. de injuriis.

Reste à savoir si, en matiere civile, le fils de famille majeur peut intenter une action personnelle sans le cousentement de son père.

On a déjà vu qu'il ne le peut pas lorsqu'il s'agit de son pécule adventif, et qu'au contraire il en est capable quand il est question de son pécule castrense ou quasi-castrense. It ne peut donc plus y avoir de difficulté que par rapport aux actions relatives au pécule profectice. Or, la loi 9, D. de obligationibus et actionibus, met en principe qu'il ne peut pas les intenter lui-même, à la réserve de trois

qu'elle spécifie, et qui sont la réintégrande, l'action de prêt à usage et celle de dépôt : Filiusfamiliás suo nomine nullam actionem

habet, nisi injuriarum, et quod vi aut clàm,

et depositi et commodati.

La raison de la règle générale établie par ce texte, est que le fils de famille ne peut, dans la gestion de son pécule profectice, rien faire sous son propre nom de ce qui donne lieu aux actions personnelles; car s'il vend, s'il engage, s'il loue les biens qui composent ce pécule, c'est au nom de son père qu'il le fait; et, par conséquent, c'est au nom du père seul que doivent être intentées les actions qui dérivent de ces actes.

Aussi n'est-il pas défendu au fils de famille d'exercer lui-même ces actions au nom de son père: mais il faut, pour cela, qu'il en ait un pouvoir special, si ce n'est en certains cas extraordinaires et pressans, où l'attente d'une procuration du père exposerait ses propres intérêts, et où il y a, comme on le dit ordinairement, péril dans la demeure. C'est ce que portent la loi 18, §. 1, D. de judiciis, et la loi 12, C. de procuratoribus.

Mais pourquoi a-t-on excepté de cette règle générale la réintégrande et les actions de dépôt et de prêt à usage?

C'est, à l'égard de la réintégrande, parcequ'elle ne peut avoir lieu par rapport à un bien appartenant au pécule profectice, sans que le fils de famille ait souffert personnellement une violence, et qu'il est juste de lui laisser le droit d'en poursuivre lui-même la' réparation.

Quant aux actions de dépót et de prêt à usage, le motif de l'exception est que le fils de famille peut déposer et prêter sous son nom une chose qui fait partie de son pécule profectice, parceque ces actes ne transferent ni propriété, ni possession, ni droit quelconque, et ne peuvent, en aucun cas, préjudicier au père. On peut voir, à ce sujet, les lois 8 et 9, D. commodati; la loi 18, S. 1, D. depositi; et le président Favre, dans sa Jurisprudentiæ Papinianecæ scientia, tit. 9, princip. 6, illat. 7.

Il faut observer, en finissant le détail de tout ce qui concerne la faculté d'ester en jugement, que, dans le cas où le fils de famille ne jouit pas de cette faculté, il ne peut ⚫ pas éluder la loi qui la lui õte, en passant un compromis. C'est ce qu'a jugé un

arrêt du parlement de Provence, du 24 février 1707, rapporté dans le recueil de Bezieux, liv. 7, chap. 3, §. 1.

XIII. Une des incapacités les plus remarquables que produit la Puissance paternelle dans la personne des enfans, est celle de contracter mariage sans le consentement du

père. Le droit romain renfermait là-dessus bien des dispositions, qui ont été en partie modifiées, et en partie étendues par les ordonnances de nos rois. V. l'article Empêchemens de mariage.

La prohibition de se marier malgré le père, emporte celle de contracter des fiançailles sans son aveu. C'est la disposition expresse de la loi 7, §. 1, D. de sponsalibus.

Mais, si le fils de famille se trouvait dans un des cas où les lois dispensent son mariage de la nécessité du consentement de son père, il ne pourrait pas alléguer le défaut de ce consentement pour faire annuler les fiançailles qu'il aurait formées de sa propre autorité. C'est ce qu'ont jugé deux arrêts, l'un du parlement de Paris, et l'autre de celui de Toulouse. 1

Par le premier, rendu en 1712, et rapporté dans les conférences de Paris sur le mariage, M. Maynon, conseiller au parlement, fut condamné à soixante mille livres de dommages-intérêts envers la demoiselle de Chabannes de Plonsac, pour l'inexécution d'une promesse de mariage qu'il lui avait faite. En vain se prévalut-il de l'opposition de son père: il ne fut point écouté, parcequ'il était majeur, et qu'il avait obtenu contre celui-ci plusieurs sentences et un arrêt par défaut, qui l'autorisaient à se marier.

Le second arrêt nous a été conservé par Catellan, liv. 4, chap 63:

« Le sieur de Fondegré (dit ce magistrat), fils d'un avocat de Toulouse, ágé de trentedeux ans, après avoir fait trois actes à son père, passe un contrat de mariage avec la demoiselle de Fournoly, fille d'un marchand apothicaire. Le père ayant d'abord forme son opposition, les choses demeurent en cet état pendant deux ans, au bout desquels le père étant mort après avoir fait testament, par lequel, ayant institué héritier son fils, il le prive de son hérédité au cas qu'il épouse cette demoiselle. Fondegré fils, ayant contracte de nouvelles fiançailles avec une autre personne, la demoiselle Fournoly se pourvut contre lui en dommages-intérêts, et fut déboutée par sentence du sénéchal de Toulouse.

» Sur l'appel, on disait, pour justifier ce jugement, que les arrêts qui condamnent

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