» Et ce qui marque sensiblement que c'est l'esprit de ces sortes de coutumes, c'est qu'en core qu'anciennement la représentation n'eût point lieu en France, et que, dans la première rédaction des coutumes du royaume, on se fút tenu à cet ancien droit, néanmoins les arrêts rendus avant la réformation de ces coutumes, l'y ont admise par la voie du Rappel, sur le fondement du droit écrit, qui la reçoit de plein droit en faveur des neveux; et ce Rappel a été traité d'autant plus favorablement, qu'il a toujours été en usage dans ce royaume, comme on le voit en plusieurs endroits de Marculphe, qui en rapporte la formule. En un mot, on en a trouvé l'usage si juste et si legitime, que, de toutes les coutumes qui ont été réformées depuis leur première rédaction, il n'y en a aucune qui n'ait admis la représentation en faveur des neveux, de sorte qu'il en serait vraisemblablement arrivé de même dans celle de Meaux, si elle eût été réformée comme les autres ». Le sieur Colard ajoutait à ces raisons un moyen particulier, qu'il tirait des termes du testament: mais elles ont seules déterminé l'arrêt, et il a jugé la question in thesi. Voici ce qu'il porte : « La cour, sur les appellations dudit Colard, >> a mis lesdites appellations, sentence et ce >> dont est appelé au néant; émendant, or>> donne qu'il sera incessamment procédé par. » devant le conseiller-rapporteur au partage » de la communauté qui a été entre ledit >> défunt Nicolas Legrand et ladite Marand, >> et que distraction sera faîte au profit dudit » Colard et de François Legrand, son beau» frère, de tous les immeubles venus dudit >> Nicolas Legrand, par la succession dudit >> Charles Poulet, que de ceux qui étaient >> propres audit défunt Poulet, que de ceux » qui lui étaient acquêts, comme le tout » ayant été propre audit Legrand; en con» séquence, a maintenu et gardé ledit Colard >> en la possession et jouissance desdits pro » pres ». Cet arrêt avait été précédé, dans la coutume de Meaux même, d'un autre, du 31 mai 1639, lors duquel on avait supposé comme certain ce qui faisait la matière de celui-ci. L'espèce en est remarquable; voici en quels termes la rapporte Bardet, tome 2, liv. 8, chap. 22: « Jean Clercelier ayant des sœurs et des neveux, enfans de défunt Pierre Clercelier, son frère aîné, fit son testament par lequel il rappela ses neveux à sa succession, non purement et simplement, mais légua plusieurs choses à Pierre Clercelier, son neveu, à la charge que, moyennant ce legs, il renonce rait à sa portion héréditaire au profit de ses sœurs, nièces du testateur. >> Après le décès de Jean Clercelier, procés se mut à Meaux entre ses sœurs et nièces, les sœurs prétendant que la portion de Pierre Clercelier, légataire de son oncle, était confuse et absorbée en la masse héréditaire et en toute la succession; et au contraire, les nièces, c'est-à-dire, les sœurs de Pierre Clercelier, soutenant que la portion héréditaire de leur frère leur appartenait entièrement. Ce qui fut ainsi jugé à Meaux, et les sœurs dé. boutées de leur demande. Elles en interjetė. rent appel..... >> M. l'avocat général Bignon dit que.......... si Pierre Clercelier était vivant, et qu'il fût héritier de Jean Clercelier, son frère, cela n'empêcherait pas Pierre Clercelier fils d'ètre légataire de son oncle. Le Rappel n'est pas moins favorable que la représentation, celleci procédant du bénéfice et providence de la loi, et celle-là de la volonté précise du testateur. Ce qui met la cause hors de toute difficulté, c'est que le droit d'accroissement n'a jamais lieu, sinon entre personnes qui succèdent par même voie et par mème moyen, suivant la loi ex duobus, D. de bonorum possessione contrà tabulas (1). Ainsi il a été bien jugé. >> La cour mit l'appellation au néant, ordonna que ce dont était appel sortirait son plein et entier effet, néanmoins sans dépens ». La question jugée par cet arrêt, ne pouvait souffrir aucune difficulté, d'après la déclaration du testateur, que Pierre Clercelier, légataire, renoncerait à sa portion héréditaire au profit de ses sœurs rappelées. Cela revient à ce que dit Pothier, Traité des successions, chap. 2, sect. 3, §. 3. Cet auteur propose la question de savoir si, lorsque le défunt n'a accordé le Rappel qu'à l'un des enfans d'un frère prédécédé, le rappelé doit avoir la portion entière qui aurait appartenu à son père, s'il eût survécu, ou seulement la part qu'il aurait eue dans la subdivision de cette portion, si ses frères et ses sœurs eussent été rappelés comme lui. Pour résoudre cette question, il distingue si le défunt a déclaré qu'il rappelait un tel, son neveu, pour succéder à toute la portion qu'aurait eue son père, ou s'il a dit simplement qu'il le rappelait. Dans le premier cas, il est clair, dit Po (1) Cette loi est expliquée aux mots Institution contractuelle, S. 10, no g. thier, que le rappelé doit avoir toute la por tion qui appartient à sa ligne, si ses frères et sœurs étaient compris dans le Rappel. Guyné décide la même chose pour le second cas; mais, coutinue Pothier, « j'aurais > de la peine à suivre son avis. Le Rappel a >> l'effet de suppléer au défaut de la loi qui » n'a pas admis la représentation; il ne doit >> donc accorder au rappelé que ce que lui au >> rait accordé la loi de la représentation, si la >> coutume l'eût admise. Or, ce neveu ayant » des frères, la représentation ne lui aurait » pas accordé le total de la portion qu'aurait » eue son père, mais seulement une portion >> virile dans cette portion : putà, s'ils sont >> quatre enfans, il aurait eu le quart de cette >> portion; les frères survivans doivent profi» ter du surplus, de même qu'ils auraient > profité du total de la portion du prédécédé, » si aucun des enfans du prédécédé n'eût été » rappelé; de même ils doivent profiter des > trois quarts de cette portion, lorsque trois » des quatre enfans de ce prédécédé n'ont » point été rappelés ». Nous permettra-t-on d'observer que Pothier se contredit ici lui-même? Il convient que le Rappel doit accorder au rappelé ce que lui aurait accordé la loi de la représentation, si la coutume l'eût admise; et ce principe est incontestable. Or, si, dans le cas de la représentation légale, il n'y a qu'un des enfans d'un frère prédécédé qui succède avec ses oncles et tantes, soit parceque ses frères et sœurs sont incapables, soit parcequ'ils ont renoncé, soit parceque le defunt les a déshérités, il est certain qu'il prend toute la portion qui aurait appartenu à son père, s'il eût survécu. Pourquoi n'en serait-il pas de même dans le cas du Rappel? Il s'ensuivrait du système de Pothier, que, quand le défunt a déclaré expressément que le rappelé recueillera toute la portion qu'aurait eue son pére, il faudrait regarder comme acquêt, dans sa personne, et même comme sujet tant à la demande en délivrance qu'aux réserves coutumières, ce qui excéderait la portion virile qu'il eût prise dans cette portion, lors de la subdivision qui s'en serait faite avec ses frères et ses sœurs, s'ils eussent été rappelés avec lui; et telle est en effet la conséquence que Pothier tire lui-même de son opinion; « Je penserais (dit-il) qu'en ce >> cas, le Rappel donnant plus à ce neveu qu'il » n'en aurait eu par la représentation, si la >> coutume l'avait admise, doit être considéré >> comme un Rappel extrà terminos juris ». Mais c'est une erreur que l'arrêt du 9 juin 1689 a prescrite de la manière la plus formelle, en déclarant propre dans la personne de Nicolas Legrand, la moitié entière qu'il avait recueillie de la succession de Charles Poulet, son oncle, en vertu du Rappel établi en sa faveur par le testament de celui-ci, quoiqu'il y eût d'autres neveux et nièces qui n'avaient point été rappelés, et qu'on se fit un moyen de cette circonstance. II. Le Rappel intrà terminos juris donnet-il aux neveux et aux nièces les droits d'aînesse ou de masculinité que leur père eût exercés dans les successions de leur oncle, si celui-ci l'eût prédécédé? Cette question se rapporte, comme l'on voit, à deux sortes de coutumes: à celles qui admettent le droit d'aînesse en ligne collatérale, et à celles qui n'adoptent ce droit qu'en ligne directe, mais qui lui substituent, en ligne collatérale, une préférence dans les fiefs qu'elles accordent aux males sur les femelles, et que nous appelons, par cette raison, droit de masculinité. Dans la première classe sont les coutumes de la ville et du bailliage de Saint-Omer, d'Artois, de Boulonnais, de Ponthieu, de la gouvernance de Douai, de la chátellenie de Lille, etc. Les coutumes de la ville et du bailliage de Saint-Omer ont prévu notre question: on a remarqué ci-devant, $. 1, art. 4, qu'elles donnent au Rappel l'effet de subroger, soit le fils, soit la fille d'un aîné, dans tous les droits de son père, tant en ligne directe qu'en ligne collatérale. Cette disposition ne serait pas reçue facilement dans les autres coutumes semblables: cependant il semble que les principes demandent qu'elle le soit : le Rappel met celui qui en est l'objet, au même état que si la représentation légale avait lieu en sa faveur; nous l'avons démontré. Or, dans les coutumes de cette classe, qui admettent la représentation, il est d'une jurisprudence constante, comme on le voit sous ce mot, d'en étendre l'effet jusqu'au droit d'aînesse; par conséquent, point de raison pour n'en pas user de même dans le cas d'un Rappel, quel que soit l'acte qui en contienne la stipulation. Les auteurs ne conviennent pas tous de cette parité, mais les principes doivent-ils céder à leur doctrine ? La question devrait être également simple pour les coutumes de la seconde classe; et elle devrait y être résolue par une distinction que nous avons proposée à l'article Représentation, sect. 2, §. 3, no 2; mais il en a été juge autrement par deux arrêts intervenus dans la coutume de Senlis, quoiqu'elle fasse entendre clairement, par ses dispositions concernant la ligne directe, qu'il est dans son esprit de donner à la représentation légale la vertu de subroger même la fille d'un aîné au droit d'aînesse de son père. Le premier de ces arrêts est rapporté en ces termes par Brodeau, lettre L, $9: << La coutume de Senlis, art. 134, et celle de Clermont, art. 85, portent qu'en ligne collaterale, les males emportent tous les fiefs, à l'exclusion des filles étant en pareil degré. Jugé que cette exclusion n'a lieu, sinon lorsque les máles succèdent de leur chef et par l'ordre des successions légitimes introduit par la coutume, et non quand ils viennent par un secours étranger, comme est celui du Rappel.... >> Par arrêt donné à la deuxième chambre des enquêtes, le 22 mars 1633, par lequel la cour, infirmant la sentence du bailli du comté de Beauvais, du 24 avril 1632, qui avait adjugé tous les fiefs de la succession d'Antoine Le Barbier, oncle commun des parties, aux neveux rappelés, à l'exclusion de la nièce aussi rappelée, et de la tante succédant de son chef, ordonne que lesdits fiefs situés és coutumes de Senlis et de Clermont, seront partagés par tiers, entre Philippe Le Barbier, sœur dudit Antoine, Marguerite Foy, rappe lée au lieu de Gatherine Le Barbier, sa mère, et Catherine Droit, veuve de Raoul Le Barbier, mère et curatrice de Claude et Jean Le Barbier, Raoul Le Barbier et Anne Le Barbier, enfans dudit défunt Raoul et d'elle. J'avais écrit au procès pour Marguerite Foy, appelante ». Le second arrêt a été rendu le 12 février 1633; voici comment il est rapporté par Bardet, dans l'ordre de sa date : << Pierre Caignard, habitant de la ville de Beauvais, n'ayant point d'enfans, mais seulement Ursule Caignard, sa sœur, des neveux de Jean Caignard, son frère décédé, et des neveux d'une autre sœur, décédée aussi, nommée Catherine Caignard, fait son testament en 1633, par lequel il déclare qu'il rappelle à sa succession, tant les enfans de son frère que de sa sœur decédés, pour entrer au lieu et place de leur père et de leur mère dédédés, et succéder avec leur tante survivante, entendant qu'elle n'eût que le tiers en sa succession. > Incontinent après son décès, procès se meut pardevant le bailli de Beauvais ou son lieutenant. Les enfans de Jean Caignard soutenaient que tous les fiefs délaissés par Pierre Caignard, leur oncle, devaient leur être ad jugés, étant au lieu et place de Jean Caignard, leur père, qui, comme måle, excluait ses sœurs dans la succession des fiefs. Au contraire, Ursule Gaignard soutenait que bien loin que les enfans de Jean Caignard, son frère, dussent l'exclure de la succession des fiefs, ils lui appartiennent par la disposition expresse de la coutume de Senlis, suivant laquelle les filles plus proches en degré excluent les måles plus éloignés de la succession des fiefs. Et de la part des enfans de Catherine Caignard, on disait que le testateur ayant rappelé tous ses neveux à sa succession, avait entendu les y admettre par égales portions; qu'ainsi, les prétentions, tant de leur tante que de leurs cousins-germains, étaient justes. >>> Le bailli de Beauvais ou son lieutenant ordonna que les fiefs seraient séquestres. >> Ursule Caignard, sœur du défunt, en interjeta appel..... » M. l'avocat général Talon dit que, si l'on suivait l'ancienne disposition des fiefs, qui étaient des bénéfices accordés aux seuls máles, la cause des intimés serait sans difficulté; mais notre jurisprudence a d'autres règles qui ne sont aucunement asservies à cette disposition: pour accorder aux intimés (enfans de Jean Caignard) ce qu'ils demandent, il faut faire, non-seulement double, mais triple fiction: l'une, que la coutume de Senlis admet la représentation en ligne collatérale, ce qui n'est pas, le Rappel suppléant ce défaut; la seconde, que, par sa nature, la représentation n'est qu'une fiction qui répute des personnes être en même degré, quoiqu'elles ne le soient pas; et la troisième fiction est en ce qu'il faudrait feindre qu'outre le degré, les enfans auraient encore le privilége et la prérogative de leur père. Tant de fictions accumulées sont contre la disposition du droit.... De plus, la nouvelle coutume de Paris a introduit une jurisprudence certaine, suivant laquelle l'arrêt de 1638, qu'on a allégué, est si formel et si précis, qu'il tranche toute difficulté. Il y a lieu de prononcer de la même sorte. >> La cour mit l'appellation et ce au néant, évoqua le principal, et y faisant droit, ordonna que tant les fiefs que rotures delaissés par Pierre Caignard, seraient partagés également entre toutes les parties et sans dépens ». On voit par cet exposé, que l'unique motif des arrêts dont nous venons de rendre compte, a été la défense de faire concourir ensemble plusieurs fictions et priviléges. Mais cette defense n'existe nulle part. Voici ce qu'en dit le président Bouhier, chap. 73, no 189: « L'objection tirée de la > double fiction, est des plus frivoles. La pré>> tendue règle qu'on n'admet point deux fic» tions ensemble, reçoit une infinité de li>> mitations, suivant les docteurs même qui >> la favorisent le plus (1). Mais elle a été en>> tièrement rejetée par le savant Hauteserre, >> au traité qu'il nous a donné sur les fictions » de droit (2). Duas, dit-il, vel plures fic» tiones in eadem re concurrere nequaquam » alienum est, si æquitas vel utilitas sua>>> deat ». Et Duplessis, à propos même de la représentation, a dit pareillement de cette règle, qu'elle « n'est qu'un brocard qui est allégué. » Car on n'admet ni une ni deux fictions, >> sinon quand la loi les accordé elle-même. >>> Or, quand elle les accorde, on en admet » tout autant qu'elle en veut permettre ». C'est aussi l'avis de Guyne et de tout ce que nous avons de meilleurs auteurs. V. l'article Représentation (droit de), sect. 2, $. 3, nos 2, 3 et suivans. ART. V. Quels sont les effets du Rappel en ligne collatérale, lorsqu'il est hors des termes de droit? I. Il faut distinguer s'il est fait par un contrat de mariage ou par un autre acte. Dans le premier cas, il forme une institution contractuelle, et produit conséquemment tous les effets d'un titre successif. Il y a, , dans le recueil de Bouguier, lettre R, S. 11, et dans le Journal des Audiences, deux arrêts des 21 janvier 1605 et 6 mars 1660, qui le jugent ainsi entre des neveux succédant de leur chef, et des petits-neveux rappelés par contrat de mariage. V. l'article Institution contractuelle, $. 6. II. Dans le second cas, le rappel ne vaut que par forme de legs: le rappelé n'est point héritier, mais simple légataire de la portion que le testateur lui a assignée; il n'en est pas saisi, et doit en demander la délivrance à l'héritier. Celui-ci peut même, en se tenant aux réserves coutumières, la restreindre aux biens dont la loi permet de disposer à cause de mort. C'est ce qu'établit Dumoulin dans sa note sur l'art. 6 de la coutume de l'Epuroux, locale de Blois: Quid si quis, dit-il, rappelle pronepotes ex sorore cum nepotibus ex alid sorore? Respondeo quòd isti vocati veniunt jure legati tantùm, non veniunt ut heredes, nec sunt saisiti, quia consuetudo prohibet, sed non impedit quin valeat jure legati quatenùs legari potest. Bouguier, lettre R, S. 13, dit qu'il « a été » ainsi jugé pour la coutume de Meaux, le >> 19 novembre 1605, à la première chambre >> des enquêtes, la sentence ayant été con>> firmée, par laquelle le juge adjugeait aux > arrière-neveux qui avaient été rappelés » par un testateur a sa succession avec ses >>> neveux, ce que le testateur pouvait léguer >> suivant ladite coutume; tellement que le » Rappel, en ce cas, vaut seulement comme >> legs, et non par droit d'institution, qui » n'a lieu en tous les pays coutumiers ». La même chose a été jugée dans la coutume de Blois, par l'arrêt du 13 février 1634, rapporté ci-devant, art. 2. Le journal des audiences nous en fournit deux autres, rendus dans les coutumes de Senlis et de Vitry. Dans l'espèce du premier, Christine Baveroise, n'ayant pour héritiers que des neveux et nièces, les avait rappelés tous par son testament, avec la clause expresse qu'ils partageraient entre eux par souches, et non par têtes. On contestait cette disposition, et l'on disait qu'il n'était pas au pouvoir des testateurs de changer l'ordre que les lois et les coutumes ont établi pour les successions; que la défunte n'avait pas pu disposer par testament au préjudice des réserves coutumières, ni ordonner que le partage de ses biens se fit par souches, tandis que la coutume, en excluant la représentation, voulait qu'il se fit par têtes. On soutenait, au contraire, que la disposition de Christine Baveroise était un Rappel extrà terminos juris; qu'à la vérité, il ne formait point un titre successif, mais qu'il devait être exécuté comme legs, et comprendre tout ce dont il avait été permis à la défunte de disposer par testament. Et il a été ainsi jugé par arrêt du 6 février 1646, confirmatif d'une sentence du bailliage de Senlis, sur les conclusions de M. l'avocat général Bignon. Le second arrêt est du 24 janvier 1665. Une fille, nommée Guerrois, avait fait son testament le 27 décembre 1663, et avait ordonné, en rappelant ses cousins issus de germains, qu'ils succéderaient par représentation de leurs pères avec ses cousinsgermains. Ceux-ci prétendirent que le tes54 tament était nul dans la forme, et qu'au fond le Rappel ne pouvait avoir plus d'effet qu'un simple legs. Par sentence des requêtes du palais, il fut dit que les rappelés partageraient par souches avec les cousins-germains dans tous les biens laissés par la défunte. Appel; et la cause portée à l'audience de la grand' chambre, de « M. Bignon, avocat général, a dit que les nullités alléguées par les appelans contre le testament, en la forme, n'étaient pas considérables, mais qu'au fond la disposition la testatrice ne pouvait subsister que per modum legati; ainsi, qu'il avait été mal jugé par la sentence qui avait reçu les intimes, arrière-cousins, à partager avec les appelans, qui sont cousins-germains. » La cour a mis les appellations et ce dont a été appelé au néant; émendant, a ordonné, sans avoir égard au faux, que le testament serait exécuté per modum legati; ce faisant, le Rappel exécuté, pour avoir, par les appelans et arrière cousins, seulement part dans les meubles et acquêts, et le tiers des propres de la testatrice, suivant la coutume de Vitry, sous laquelle les biens étaient situés ». On trouve dans le Dictionnaire des Arrêts de Brillon, au mot Rappel, « un arrêt rendu » à la troisième chambre des enquêtes du >> parlement de Paris, le 25 juin 1716, qui ad. >> juge aux petits-neveux, appelés par le testa» ment et codicille de leur oncle, la portion >> qu'aurait eue leur père dans la succession de >> cet oncle, nonobstant les prélegs qui leur >> avaient été faits. La sentence du bailliage >> de Beauvais, du 12 mai 1712, dont était appel, ne leur avait adjugé que les pré>> legs ». Et la cour aurait infailliblement confirmé cette sentence, si elle eût considéré le Rappel autrement que comme un simple legs. (V. l'article Héritier, sect. 5, §. 10). Il y a dans le recueil d'Augeard, un arrêt du 15 mars 1696, qu'on doit supposer, ainsi que le précédent, être intervenu dans une espèce où le défunt n'avait laissé que des meubles et acquêts. Le 11 avril 1679, Jean Flocard, bourgeois de Paris, fit son testament; et, après avoir partagé ses biens entre ses neveux, ordonna que leurs enfans, en cas de prédécès de leurs pères, viendraient à sa succession. Après sa mort, contestation entre les neveux et les petits-neveux dont les pères étaient prédécédés. Les neveux prétendaient que la disposition faite par le testament en faveur des petitsneveux, était nulle, comme contraire à l'art. 220 de la coutume de Paris, qui n'admet la représentation en ligne collatérale qu'en faveur des neveux et des nièces. Les petits-neveux répondaient que l'article de la coutume ne devait avoir lieu que dans les successions ab intestat; qu'un homme était libre de faire par son testament telle disposition qu'il lui plaisait, et qu'il fallait regarder le Rappel fait d'eux à la succession de leur grnad oncle, comme un legs qu'il leur aurait fait. Sur cette contestation, sentence en faveur des petits-neveux; et sur l'appel, arrêt à la première chambre des enquêtes qui la confirme, avec amende et dépens. III. Un testateur qui avait deux neveux pour héritiers légitimes, rappela un petitneveu, et fit un étranger légataire universel de tous ses biens disponibles. Question de savoir si le petit-neveu viendrait, en vertu de son Rappel, partager avec les neveux dans les réserves coutumieres, comme le prétendait le légataire universel, ou s'il prendrait, comme il le soutenait lui-même, de concert avec les neuveux, la moitié du legs universel fait à l'étranger. Lebrun rapporte les raisons dont on appuyait chacun de ces avis, et ensuite il propose le sien en ces termes : << Au milieu de ces deux partis, il y en a un qui me semble fort juste, qui est de considérer le rappelé comme un légataire de la part afférente qu'il aurait eue s'il avait été dans le degré supérieur, et d'obliger le légataire universel de lui fournir cette part aux dépens de son legs universel. >> Par ce moyen, on n'excéde point la disposition du défunt, en tant qu'on donne au rappelé sa part afférente seulement; et on ne l'associe pas à un legs universel, dont la moitié aurait peut-être monté au centuple de sa part afférente dans la succession, comme aussi on ne blesse point les droits des héritiers ab in testat. >> Enfin, comme ce Rappel est extrà terminos juris, on lui donne, à titre de legs seulement, la part que le défunt a voulu qu'il eût dans sa succession, et on conserve dans ce tempérament et les règles et les droits de toutes les parties: en effet, il ne serait pas juste qu'un arrière-neveu, qui ne peut venir que par forme de legs, quand les plus proches héritiers le demandent, vînt donner atteinte à leurs réserves coutumières; et que, d'un autre côté, le testateur ne l'ayant pas fait |