II. Ces dispositions doivent-elles servir de règles dans les autres coutumes de la même classe? Oui, parceque, comme le prouvent le chap. 10 des formules de Marculphe, et la décision 258 de Jean des Mares, rapportées plus haut, elles ne sont que l'expression d'un usage qui avait lieu partout avant la rédaction de nos lois municipales, et dans le temps où la représentation n'était admise presque nulle part. Aussi remarquons-nous, sur ce point, un accord unanime entre tous les auteurs qui ont commenté les coutumes exclusives de la re présentation en ligne directe. Brunel, qui a écrit sur celle d'Artois avant que la representation y eût été introduite par une loi nouvelle dont nous parlons sous ce mot, dit qu'il est sans difficulté que, dans >> les coutumes qui portent que la représen»tation n'a lieu, aussi bien que dans celles ➤ qui n'en parlent pas, on peut y suppléer au > moyen du Rappel ». Duchesne, sur l'art. 8 de la coutume de Ponthieu, 'explique en ces termes : « Notre > coutume n'étant point conçue en termes >> prohibitifs, et ne disant point que repré» sentation ne peut avoir lieu, la disposition >> de l'homme peut faire cesser celle de la loi >> par une représentation conventionnelle qui ➤ se trouve intrà terminos juris ». L'art. 75 de la coutume de Boulonnais a été interprété de même que l'art. 8 de celle de Ponthieu, auquel il est parfaitement conforme. Dumoulin dit danssa note sur ce texte, que la disposition en est odieuse, que cependant elle est fondée en raison sous certains rapports, et que les aïeuls peuvent y remédier en rappelant leurs petits-enfans: Valdè injusta et corrigenda in directá......., tamen habent rationem in hoc ne filii audeant contrahere matrimonium, et generare nepotes sine consensu parentum qui possunt eos habilitare ad succedendum. Le Camus d'Houlouve, dans son commentaire sur la même coutume, tome 1, page 369, dit pareillement que «le Rappel supplée en >> Boulonnais le défaut de représentation ». Leroi de Lozembrune et Bourdot de Richebourg tiennent le même langage dans leurs notes sur l'article cité. Christin, tome 4, décis. 63, demande si l'on peut remédier, par le Rappel, à la disposition des coutumes qui excluent la représentation: an stante statuto aut consuetudine quòd repræsentatio locum non habeat, valeret pactum ut ei sit locus ? Il cite pour l'affir mative le conseil 231 du président Everard; et dit qu'il en a été ainsi jugé au grand conseil de Malines, le 14 janvier 1595, entre Guillaume et Jean Caulier. ART. II. Par quels actes peut-on, en ligne directe, rappeler à une succession les petits-enfans qui en sont exclus par le défaut de représentation légale? I. La manière la plus simple et la plus sûre pour un père, de réparer le défaut de représentation en ligne directe, est de déclarer, par les contrats de mariage de ses enfans du premier degré, qu'en cas de prédécés de leur part, ses petits-enfans à naître viendront prendre dans sa succession les mêmes portions qu'ils y auraient prises eux-mêmes. II. Un autre moyen d'assurer ce droit aux petits-enfans nes ou à naître, et qu'on peut employer après comme avant la mort de leur pere, est de consigner dans un testament une déclaration semblable à celle dont nous venons de parler. Mais un testament imparfait, un billet sous seing-privé, un consentement verbal que les parties intéressées ne mettraient pas en dénegation, suffiraient-ils pour opérer un Rappel? Comme les principes sont les mêmes à cet égard pour la figne collatérale que pour la ligne directe, nous traiterons ici la question par rapport à l'une et à l'autre. Le point d'où il faut partir, est que le Rappel n'est considéré ni comme un legs, ni comme une donation, « mais (dit Ricard, Traité de la représentation, no 31) comme > un acte qui lève un empêchement introduit ➤ contre le droit commun, auquel toutes cho>> ses retournent facilement par la moindre >> signification d'une volonté contraire de >> celui qui y a le principal intérêt, comme >> est au cas particulier celui de la succession >> duquel il s'agit ». Il résulte de là que le Rappel peut être fait par toutes sortes d'actes, et c'est ce qu'établit Dumoulin dans ses apostilles, sur l'art. 37 de l'ancienne coutume d'Amiens, et sur l'art. 139 de la coutume de Blois. Voici les termes de la première: Nec opus est formulá contractús; sufficit constare de consensu vel simplici vocatione ad repræsentandum, sive in testamento, vel codicillis, vel aliàs inter vivos. La seconde est ainsi conçue: Ista est simplex declaratio quæ fieri potest coram duobus testibus, vel aliàs, dummodò constet. Pontanus, sur l'art. 139 de la coutume de Blois; Brodeau, sur Louet, lettre R, S. 9; Renusson, Traité des propres, chap. 2, sect. 8, no 33; Ricard, de la représentation, no 33; Lebrun, des successions, liv. 3, chap. 10, sect. 3, no 2; Brunel, dans ses Observations sur le droit coutumier, chap. 4, no 17, Rousseaud de Lacombe, au mot Rappel, Pothier, des successions, chap. 2, sect. 3, §. 3, enfin, tous les auteurs adoptent le même principe et le regardent comme une sorte de loi fondamentale sur cette matière. Les paroles de Lebrun, surtout, méritent d'ètre ici rapportées : « Je demande par quel acte un oncle peut rappeler son neveu? Il faut dire qu'il le pourra rappeler par toutes sortes d'actes, parceque ce Rappel se faisant intrà terminos juris, est extrêmement favorable, et produit un retour au droit commun... Aussi avons-nous un arrèt dans Brodeau, qui confirme un Rappel fait par une simple déclaration pardevant notaires. De même, un acte sous signature pri vée, dont l'écriture est reconnue, peut être un bon Rappel. >> Je passe plus avant: car pourvu que, dans un testament imparfait, la volonté soit constante, et qu'il y ait des formalités d'un simple acte pardevant notaires, le Rappel porté par un tel acte sera valable, parcequ'il suflit ici de la teneur du Rappel, et pourvu qu'on n'en puisse douter, il n'y a point de for. malités qui doivent arrêter ». III. Mais l'ordonnance de 1731 ne déroget-elle point à cette jurisprudence, en déctarant, art. 3, qu'il n'y aura plus à l'avenir dans leroyaume «que deux formes de disposer › de ses biens à titre gratuit, dont l'une sera >> celle des donations entre-vifs, et l'autre, celle des testamens et des codicilles ? Le président Espiard se propose cette ques tion dans ses notes sur Lebrun, et dit qu'il faut, pour la résoudre, attendre la décision des arrêts. Elle s'est depuis peu présentée au parle ment de Flandre, mais dans des circonstances qui, sans doute, empêcheront toujours qu'on ne puisse argumenter avec certitude de l'arrèt qui peut-être l'a moins jugée qu'éludée. En voici l'espèce, tirée du mémoire que j'avais fait en faveur des rappelés. Nicolas-François Damide, domicilié à Cysoing, dans la chátellenie de Lille, avait un frere nommé Jean-François, et des neveux, fils d'un autre frère prédécédé. Il se proposait d'accorder à ceux-ci, par un acte formel, le bénéfice de représentation que la coutume leur refusait; mais la promesse que lui fit Jean-François de les admettre au partage de sa succession, lui parat suppléer abondamment à des formalités que sa candeur et sa bonne foi lui faisaient regarder comme inutiles; et il mourut dans cette idée, le 28 octobre 1749. Cependant Jean-François oublia pour un temps sa promesse, et garda toute la succession. Mais la maladie dont il mourut, le fit rentrer en lui-même: le 11 mars 1750, c'est-à-dire, près de cinq mois après la mort de NicolasFrançois, sentant approcher sa dernière heure et voyant les portes de l'éternité prêtes à s'ouvrir devant lui, il avoua qu'il avait abusé de la confiance de son frère, qu'il avait retenu injustement la part que ses neveux devaient avoir dans sa succession, et il protesta qu'il ne voulait pas mourir sans la leur avoir abandonnée. En conséquence, il fit appeler leur beau-père, et lui déclara son intention. Il ne se trouvait point là de notaire, et il n'y avait pas un moment à perdre le curé rédigea l'acte, le signa avec deux témoins, et le moribond, qui était hors d'état d'écrire, y ap. posa une simple marque. Sa volonté ne tarda pas à être exécutée. Le 1er avril 1750, il fut passé devant notaire et les mêmes témoins qui avaient reçu ses derniers soupirs, un acte par lequel, pour suivre l'intention de défunt Jean-François Demide, comme il l'a fait sentir à M. Duhamel, pasteur de Cysoing, conformément au sentiment qu'avait aussi Nicolas - François Damide, comme il se voit du billet écrit de la main dudit sieur pasteur joint, la veuve de Jean-François, et celle d'Antoine-Joseph, pere des rappelés, partagèrent la succession de Nicolas-François entre leurs enfans respectifs, dont elles étaient tutrices légitimes. Cet acte reçut d'abord une execution parfaite. Les rappelés ont joui paisiblement pendant vingt-deux ans, des biens qui leur avaient été assignés en partage: mais au bout de ce temps, les enfans de Jean-François, devenus tous majeurs, se sont pourvus à la gouvernance de Lille, et ont demandé que leurs cousins-germains fussent condamités à leur abandonner ces biens. Les rappelés n'ont d'abord opposé à cette demande aucun des moyens qui militaient pour eux. Après quelques procédures, ils ont déclaré, par acte du 5 novembre 1772, qu'ils passaient condamnation volontaire sur la revendication formée contre eux, mais qu'ils n'entendaient restituer aucun fruit, attendu la bonne foi qui avait préside à leur possession. Les enfans de Jean-François, sur la signification qui leur fut faite de cet acte, soutinrent que les fruits devaient leur être adjugés avec le fonds; mais une sentence du 12 decembre 1772 décréta les offres des rappelés sans dépens. Les enfans de Jean-François ont interjeté appel de cette sentence. De leur côté, les rappelés, se voyant entraînés malgré eux dans un proces qu'ils avaient voulu éviter, ont pris des lettres de rescision pour se faire relever de leur désistement; en conséquence, ils ont conclu à l'infirmation de la sentence relativement à la propriété des biens contentieux qu'elle adjugeait à leurs adversaires, et ils ont demandé d'y être eux-mêmes maintenus et gardés, avec dépens, dommages et intérêts. C'est dans cet état que la cause se présentait au parlement de Flandre. * Les rappelés divisaient leur défense en deux propositions: l'une, que la demande formée contre eux n'était pas fondée; la seconde, que leur acquiescement à cette demande en première instance ne pouvait pas empêcher qu'ils ne fussent maintenus dans leur propriété et possession. Que Nicolas-François, leur oncle, avait manifesté une intention formelle de leur accorder, dans sa succession, la part qu'y eût prise leur père, en cas de survie; Que Jean-François lui-même l'avait ainsi reconnu, au moment de sa mort; Que sa veuve, mère et tutrice de leurs ad. versaires, avait donné à la preuve de ce fait une authenticité qui la mettait au-dessus de toute équivoque; Que leurs adversaires eux-mêmes étaient forcés de convenir que le billet du 12 mars 1750 était souscrit de la marque de leur père; Qu'ils n'élevaient aucun doute sur la réalité de sa reconnaissance; que seulement ils l'arguaient de suggestion et de captation, mais qu'ils n'articulaient aucun fait précis, aucune circonstance dont il pût, à cet égard, résulter Já moindre conséquence; Que, d'après cela, il ne s'agissait plus que d'appliquer à la cause les autorités qui établis sent que le Rappel peut se faire par une simple déclaration; Que Dumoulin, et après lui tous les jurisconsultes, ne demandent, pour le faire valoir, qu'une preuve quelconque de la volonté du défunt, dummodò constet; Que l'ordonnance de 1731 n'a apporté aucun changement à ces maximes; Que Rousseaud de Lacombe et Pothier les ont enseignées dans les ouvrages postérieurs à Témanation de cette loi; Qu'elles ont même été consacrées par l'art. 24 de la coutume du bailliage, et par l'art. 16 de la coutume de la ville de Saint-Omer, rédigées en 1743, par M. Sèver, conseiller à la grand'chambre du parlement de Paris, et homologuées par des lettres-patentes enregistrées dans la même cour; qu'en effet, ces articles portent que le Rappeł aux successions féodales peut se faire, soit par les contrats de mariage, SOIT PAR AUTRES ACTES D'ENTRE VIFS, ou par dispositions testamentaires et de dernière volonté ; Que Roussel de Bouret, dans ses notes sur la coutume d'Artois, imprimées en 1771, dit pareillement « qu'il suffit que la volonté du >> rappelant soit évidente et manifestée; que > le Rappel soit fait par écrit en quelque acte >> et quelque forme qu'il se trouve, pourvu >> que ce soit dans les degrés ordinaires de la >> représentation, aux termes de droit >»; Qu'enfin le Rappel n'est ni une donation ni un legs; qu'il ne fait, suivant Ricard, que lever l'obstacle qui écarte d'une succession des personnes auxquelles le droit commun la défère; qu'il imprime à ces personnes la qualité d'héritier, comme si elles succédaient en vertu de la loi même ; qu'on le considère si peu comme une disposition comprise, soit dans l'ordonnance de 1731, soit dans celle des testamens, qu'il ne donne pas ouverture aux droits seigneuriaux, même dans la chátellenie de Lille, qui y soumet cependant jusqu'aux donations en ligne directe, lorsqu'elles ne sont pas faites expressément par forme d'avancement d'hoirie ou de partage héréditaire; que cela résulte nécessairement d'un arrêt rendu dans cette coutume, le 24 décembre 1696, et rapporté ci-après, §. 2, art. 1. Sur la seconde proposition, les rappelés disaient que leur désistement n'eût pu élever contre eux une fin de non-recevoir, qu'autant qu'il eût formé un contrat ou quasi-contrat; qu'il ne formait évidemment ni l'un ni l'autre, puisque leurs adversaires ne l'avaient point accepté purement et simplement; qu'il n'y a point de contrat sans acceptation de la part de celui en faveur duquel il doit se faire; qu'on avait voulu, contre tout principe, diviser leur déclaration, l'accepter pour la propriété, et la rejeter pour les fruits; que par conséquent les choses étant encore entières, il leur était libre de la rétracter tout-à-fait et de faire valoir leurs droits; que du reste, les lettres de rescision, dont ils s'étaient munis au besoin, levaient toute difficulté. Nonobstant ces raisons, arrêt est intervenu, le 11 août 1778, au rapport de M. Wacrenier, qui, sur les appels respectivement interjetés Il y a des raisons très-plausibles pour la négative. Un père peut avoir des motifs pour rappeler les enfans d'un fils, et en avoir de contraires pour laisser ceux d'un autre dans leur état d'exclusion légale : le premier, par exemple, a contracté de son consentement un mariage honorable ou avantageux; le second a formé sans sa participation une alliance honteuse ou peu convenable. S'il est naturel qu'il récompense l'un en rappelant sa postérité, peut-on exiger de lui qu'il étende cette faveur à celle de l'autre? Dumoulin dit, sur l'art. 75 de la coutume de Boulonnais, que l'objet de cette loi, en rejetant la représentation légale, a été d'empêcher les enfans de se marier malgré leurs pères; ce serait donc aller contre les vues des rédacteurs, que de communiquer aux rejetons d'un mariage contracté à l'insçu ou sans l'aveu d'un père, le bénéfice du Rappel qu'il lui a plu d'accorder aux fruits d'une union dont il a lui-même formé les nœuds. Enfin, lors même que les petits-enfans sont tous d'une même branche, il peut y avoir également des raisons personnelles à l'un d'eux, soit pour le rappeler, soit pour l'exclure seul. Ainsi, point d'extension en cette matière. Ce n'est cependant point là ce que pensent les auteurs ni ce que jugent les arrêts. Ricard, Traité de la représentation, no 42, - dit que « le Rappel étant fait d'un des petits>> fils, tous les autres, soit qu'ils soient de la » même souche ou d'une autre, en doivent >> profiter, parceque les coutumes qui rejet>> tent la représentation en ligne directe, n'étant pas seulement contre le droit commun, mais aussi contre le droit naturel, il ne faut que la moindre ouverture pour oter entièrement cette loi rigoureuse et unique à l'égard de tous ceux à qui elle peut servir => d'obstacle; et qu'il faut aider par toutes » sortes de voies cette représentation en ligne directe, qui rétablit l'effet de la loi naturelle qui doit répandre les biens générale,ment dans tous les descendans, puisqu'ils n'ont point d'autres moyens de subsister » que par les bienfaits qu'ils reçoivent de la >> part de leurs pères ». Lebrun adopte le même sentiment, et cherche à étayer les raisons de Ricard, de quelques argumens par induction : « La clause (dit-il) par laquelle un père ou une mère promet à sa fille, en la mariant, de l'égaler aux autres enfans, profite indirectement aux autres. La loi 41, $. dernier, D. de pactis, fait bien une extension d'une paction faite pour une ligne au profit d'une autre ligne, d'une clause stipulée en faveur du frère du donateur, au profit de ses enfans. La loi 101, D. de conditionibus et demonstrationibus, transfere un fideicommis de la collatérale à la directe. Alexandre, tome 2, conseil 130, dit en cas semblable: provisio facta in unum casum à testatore, extenditur in alium in quem similiter providisset, si de eo cogitasset. Si un mari voyant sa femme grosse, et craignant d'être prévenu par la mort, avait institué l'enfant, et qu'il arrivât que la femme accouchât de plusieurs, ils seraient tous censés compris dans l'institution (lois 4 et 5, D. de liberis et posthumis). >> Encore une fois, la raison veut que la condition des enfans soit égale. Sur ce fondement, on voit dans la matière du droit d'aubaine, que, quand un étranger qui s'est marié dans son pays, y a eu des enfans, puis vient s'établir en France, et qu'il lui nait d'autres enfans dans ce royaume, ceux-ci valent lettres de naturalité aux autres, afin que la condition des enfans soit toujours égale ». Il y aurait sans doute bien des choses à opposer à toutes ces raisons; mais l'extrême faveur du Rappel en ligne directe leur a donné, dans les tribunaux, une prépondérance qu'elles ne pouvaient pas acquérir d'elles-mêmes. Dumoulin, sur l'art. 139 de la coutume de Senlis, rapporte un arrêt qui les confirme de la manière la plus précise. Voici comment il s'explique; nous ne faisons que traduire ses paroles : « La représentation en ligne directe n'avait pas lieu dans l'ancienne coutume, mais elle pouvait être réservée, et lorsqu'elle l'était en faveur d'un des enfans, elle était censée l'être pour tous. Il est arrivé qu'un fils, avec qui il n'avait point été stipulé de Rappel, soit en le mariant, soit depuis, est mort avant son père, laissant des enfans. Dans la suite, le père a accordé le Rappel aux enfans d'un autre fils qui est mort parcillement; enfin, le père est décédé lui-même. » Les fils vivans et les petits-enfans rappelés voulaient exclure les petits-enfans dont le père était mort avant le rappel. « J'ai été d'avis qu'ils devaient tous être admis ensemble; et il a été ainsi jugé par arrêt prononcé la veille de Saint-Mathias, 1545 La même chose a été jugée dans la coutume de Ponthieu. Écoutons Bourdot de Richebourg, sur l'art. 75 de celle de Boulonnais: « Le Rappel est autorisé, et s'il est fait par un aieul à l'égard d'un de ses petits-enfans, il profitera à tous les autres petits-enfans, quoique nés d'autres fils ou filles; parce que, quand le Rappel est fait en terme de droit, il profite à tous ceux qui se trouvent dans le même degré que celui qui est rappele, quoiqu'ils ne soient pas compris dans l'acte de Rappel, la raison de l'équité demandant que le père ou la mère qui veulent déroger au droit public et à la loi établie par la coutume, pour un intérêt domestique et particulier, ne le puissent faire en faveur d'un de leurs enfans au préjudice des autres. > Ainsi jugé, dans la coutume de Ponthieu, semblable à celle-ci, par arrèt du 27 janvier 1646, rapporté par Soefve ». Le conseil d'Artois a rendu un jugement semblable sur sa coutume; c'est Brunel qui le rapporte : « Un homme, par son testament, ordonna que les enfans de sa fille décédée représen teraient leur mère, pour venir, en sa succession, à l'encontre d'un fils et d'une fille qu'il avait encore vivans, partager également ses biens entre eux. Depuis le testament ainsi fait, la fille encore vivante lors d'icelui, vint à décéder avant le testateur, laissant aussi des enfans, sans qu'à leur égard le testateur cut fait aucune autre disposition. >> Question fut agitée de savoir si les enfans de la dernière fille décédée étaient en droit de prétendre dans la succession de leur grand pere, la part et portion qu'y aurait eue leur mère, si elle avait vécu; et un jurisconsulte de poids assure, dans son manuscrit, qu'il a eté jugé pour l'affirmative, par sentence renque au conseil d'Artois, confirmative de celle rendue au magistrat d'Arras, ex præsumpta mente testatoris, lequel ayant voulu suppléer au défaut de la coutume, en faveur des enfans de sa première fille décédée, n'est pas, présumé avoir eu moins de dilection pour ceux de son autre fille vivante au temps de son testament; laquelle, dit-on, étant ins. tituée héritière, sa part héréditaire a été adjugée à ses enfans; ce qui parait très-juste, car, quoique les héritiers plus proches doivent exclure les plus éloignés au jour du décès du testateur, cela doit s'entendre d'une suc cession ab intestat, et non pas quand il y a partage par testament ou autrement; parceque pour lors tel partage doit équipoller ou à une institution, ou du moins à un rappel, selon la volonté présumée du testateur ». Maillart a critiqué cette doctrine dans ses notes sur l'art. 93 de la coutume d'Artois; mais on n'en a pas moins persisté à la suivre, et elle est encore adoptée par le dernier commentateur de la même coutume, Roussel de Bouret, à l'endroit cité plus haut. Get auteur y met cependant une restriction très-judicieuse : << A moins (dit-il) que >> le rappelant n'ait manifesté une volonté > contraire, ou qu'au moins il ne se rencontre >> des circonstances bien propres à la faire >> présumer ». Le motif de cette restriction est sensible : ce n'est que par une présomption de volonté qu'on étend le Rappel d'une personne ou d'une branche à une autre: or, toute présomption doit céder, non-seulement à une preuve contraire, mais à une autre présomption de la même force. Ainsi, point de communication du Rappel dans le cas dont il s'agit. L'apostille de Dumoulin sur l'art. 37 de l'ancienne coutume d'Amiens, nous fait voir que tel était également l'avis de ce grand jurisconsulte En voici la traduction littérale: & Que serait-ce si un aïeul ne rappelait qu'un des petits-enfans que lui a laissés son fils prédécédé, et léguait aux autres quelques sommes d'argent? >> Il semblerait que cela ne pût pas se faire, parceque cette nouvelle espèce de représentation est contraire au droit commun, suivant lequel tous les petits-enfans sont également admis à représenter. » Cependant, comme cette disposition est un acte de pure libéralité, et entièrement soumise à la volonté de celui qui la fait, je crois qu'on peut y apposer telle clause qu'on trouve à propos; d'ailleurs, il vaut mieux qu'un des petits-enfans soit rappelé, que tous soient exclus: Et c'est ainsi que je l'ai décidé, en 1558, par une consultation faite pour cette cou tume »." Il y a dans les Observations de Brunel, sur le droit coutumier, un jugement du conseit d'Artois, qui vient à l'appui de la mème opinion: Pere et mère mariant leur fille en premières noces, accordérent representation aux enfans à naitre du mariage, pour venir faire une tête dans leurs successions, à l'encontre de leurs oncles et tantes. Ensuite, cette même fille étant devenue yeuve, convola en |