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Enfin, malgré les motions précédentes, Sa SÉRÉNITÉ le doge ne sera point étonnée, comme son prédécesseur, de se voir en France. Mais pour répondre aux douze ECCELLENTISSIMI qui composent le Sénat, l'Assemblée a porté le décret suivant sur la motion de M. de Buttafuoco.

"L'Assemblée nationale arrête qu'elle confirme son décret du 30 novembre dernier, et que M. le président se retirera pardevant le roi, pour le supplier d'envoyer tout de suite en Corse, le décret qui la réunit à la monarchie française ".

Janvier.

Le travail du comité des finances portoit sur la nécessité de distinguer la dépense courante de l'arriéré. M. le Brun lut un projet de décret pour le paiement de l'arriéré jusqu'au 1 janvier 1790. Il s'agissoit d'établir une ligne de démarcation entre le présent et le passé; le comité comptoit sur le zèle des ministres pour présenter un nouvel ordre de choses. Son

pour se réunir en république; lasse d'elle-même, elle se donna à des consuls, à des podestats, à des capitans, à tous les souverains de l'Europe, à Robert, roi de Naples, aux ducs de Milan, à Charles VI, rai de France, à Charles VII, à Louis XI, qui selon son expression, la donna à tous les diables, etc, etc.

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espoir étant trompé, il y suppléa en pourvoyant au remboursement des dettes effectives, des rentes, des dépenses de la guerre et de la marine. Ce projet fut suivi de plusieurs amendemens. Les uns demandoient que l'on déchirât le voile qui couvroit l'abyme des dettes; les autres qu'on procédât à une liquidation; quelques-uns vouloient qu'elle fût opérée par le comité des finances; quelques autres aussi demandoient que ce fût par un nouveau comité, qui seroit nommé COMITÉ DE LIQUIDATION, dont les membres seroient choisis dans le comité des finances.

Au milieu des contestations s'est élevé M. le comte de Mirabeau, qui a traité tous ces projets de finance de GRIMOIRE IMPOSANT mais auquel personne ne comprend rien; et il a prononcé cette dure, mais impor tante vérité il" n'existe pas un homme, sans én excepter le premier ministre des finances, qui connoisse ces premiers élémens de la restauration,,. Il a demandé que le projet de décret fût relu, car les deux tiers de l'Assemblée ne le comprenoient pas.

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M. l'abbé Mauri, appuyant l'opinion de M. de Mirabeau, a dit: "nous devons prendre une route différente de celle qui a été suivie. On a

toujours jusqu'ici porté la recette au niveau de la dépense. Mais c'est la dépense qu'il faut ramener au niveau de la recette. C'est donc la dépense qu'il faut déterminer avant tout. Il est de notre devoir de jeter, par torrent, la lumière sur les objets de discussion,,. Comme on l'écoutoit avec ces murmures des approbateurs qui fatiguent, il est descendu de la tribune.

M. de Cazalès y est monté pour peser sur la nécessité de connoître la dette publique dans tous ses détails. Chacun pensoit comme lui; de sorte qu'on se demandoit pourquoi tant de chaleur sur une proposition que personne ne contestoit ?

On a d'ailleurs observé avec beacoup de justesse, que les vues de M. de Cazalès entraînoient une lenteur dangereuse dont les circonstances tendoient à faire envisager le comité de liquidation comme une espèce de

chambre ardente.

La motion de M. de Cazalès étoit plus que véhémente, et portoit sur les reproches que fesoient les commettans, pour les avoir privés d'impôts. Il n'étoit question ni d'impôts, ni de nouvelles charges. Il y avoit plus de véhémence encore lorsque M. de Cazales s'est écrié: "qu'on dise donc au peuple qu'on sanc

tionne la dette sans la vérifier, en rejetant même la vérification "".

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Non, a répliqué M. le comte de Mirabeau, on ne dira pas cela au peuple, et on auroit tort de le lui dire. L'équivoque ici vient du sens différent que M. de Cazalès et moi, nous attachons au mot vérification. Sans doute il faut vérifier la dette publique, en ce sens, qu'il faut en avoir les titres sous les yeux, et en calculer l'étendue ? Mais il ne faut pas la vérifier dans le sens où l'entend M. de Cazalès; il ne faut pas vouloir remonter au-delà des titres, et lorsque le titre est reconnu authentique, rechercher pourquoi et comment il a été acquis, ce ne seroit plus là une reconnoissance, mais une inquisition, dans laquelle, pour détruire un titre mal acquis, on pourroit frapper cent titres légitimes

C'est au milieu de ces discussions que l'abbé Maury voulant empêcher qu'on allât aux délibérations sur la question agitée avec chaleur, a voulu prendre la parole. Les cr's d'improbation ont étouffé sa voix. Il ne lui restoit qu'une ressource périlleuse pour se faire comprendre; des gestes expressifs, mais qui n'étoient pas ceux d'un homme de sangfroid.

L'amendement de M. de Cazalès, a été rejeté aussi-tôt M. l'abbé Maury remonte à la tribune et s'écrie: " vous avez pris l'engage ment de payer la dette publique, et vous ne voulez pas la connoître. Les administrateurs infidèles pourront la grossir, au gré de leur cu pidité; et vous, vous vous opposez à ce qu'elle soit révélée, à la France entière. Je le demande à ces hommes à qui la France a refusé toute espéce de courage, mais qu'elle a bien dédom. magé en leur donnant le courage de la honte qu'ils me répondent dans cette Assemblée

Un cri d'indignation retentit dans la salle : les uns demandent qu'on le précipite de la tribune, les autres qu'on en délivre l'Asssemblée ou qu'il n'y paroisse qu'à la barre comme un accusé devant ses juges.

Ces débats tumultueux ont fait place au langage paisible et froid de la raison, auquel il en fant toujours revenir. M. de Mirabeau oubliant combien de fois il avoit eu à se plaindre de la fougueuse éloquence de l'accusé, et par combien d'incartades particulières il avoit préludé à ce jour de scandale, demande sur qu'elle motion il devoit opiner. Cent voix crient en même tems: " M. l'abbé Maury a offensé l'Assemblée nationale toute entière

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