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dans une large zone, à peu près continue, de couvents, de collèges et d'hôpitaux, auxquels appartenait la majeure partie des vieux quartiers et des faubourgs (1).

Vitré et Fougères n'avaient pas été envahies au même degré que Rennes par la propriété ecclésiastique. La première comptait encore, toutefois, une collégiale, un prieuré conventuel et un autre prieuré, 2 communautés d'hommes et 5 de femmes. Fougères possédait une abbaye de chanoines réguliers, 3 communautés de femmes et une d'hommes, et 3 prieurés très largement dotés. Vitré contenait 3 paroisses et Fougères 2. Chacune des deux villes possédait, enfin, un hôpital général et un Hôtel-Dieu, et Vitré avait un collège.

(1) A l'intérieur même des anciens remparts, les Cordeliers occupaient, de la rue Saint-Georges à la rue Saint-François (rue Hoche), tout le quartier du N.-E.; ils possédaient tout le côté oriental de la place du Palais. A l'autre bout de la ville, les maisons du Chapitre, les couvents de la Trinité et du Calvaire de Cucé, l'hôpital Saint-Yves et leurs dépendances se partageaient à peu près tout l'espace qui s'étend des Lices à la Vilaine, et de Saint-Sauveur à la cathédrale. Hors des murs, de la Vilaine à la rue Reverdiays (d'Antrain), les enclos de Saint-Georges, du PetitSéminaire (ancien couvent des Catherinettes), de Saint-Melaine avec le palais épiscopal, des Carmes déchaussés, de la Visitation et des Carmélites, formaient une suite continue, sans autre interruption que le passage des routes de Paris et de Fougères; la rue Saint-Melaine, resserrée entre la Visitation et les Carmélites, appartenait tout entière à ces deux couvents et à Saint-Melaine. De la rue d'Antrain, le couvent des Capucins s'étendait jusqu'au voisinage de la rue SaintMalo et de la maison des Ignorantins; plus bas, vers le nord, c'étaient encore les vastes enclos des Petites Ursulines et de l'Enfant-Jésus. La rue Saint-Malo franchie, descendaient, en une suite ininterrompue, jusqu'à la rivière d'Ille, les couvents et les dépendances des Jacobins, du Grand-Séminaire, des Minimes et des Augustins; leurs propriétés bordaient toutes les rues voisines jusqu'au faubourg l'Evêque (rue de Brest). Là, elles touchaient presque aux moulins et prairies du chapitre et de l'évêché, voisins eux-mêmes de la maison de la Sagesse et du couvent de Saint-Cyr. Au delà, rejoignant la Vilaine vers le moulin du Comte, se succédaient sans interruption les prairies et les métairies de ce dernier couvent et des prieurés de Saint-Cyr et de Saint-Martin.

De la Vilaine aux remparts, le collège, l'hôtel de Kergus, les Grands Carmes et les Petites Ursulines occupaient toute la partie orientale des vieux quartiers de la rive gauche, possédant la majeure partie des rues Saint-Germain, Saint-Thomas, Vasselot et du Pré-Botté. Hors des murs, c'étaient, au S.-E., l'Hôpital général et son annexe des Incurables, propriétaires des vastes prairies qui s'étendaient de la rivière jusqu'au voisinage du Pré-Perché; vers l'ouest, le couvent du Colombier, ses dépendances et celles des Grands Carmes bordaient les remparts, depuis la rue de Nantes jusqu'au faubourg Saint-Hélier, touchant, au sud, aux terres du prieuré de Beaumont et de Kergus (maison de Lorette), et avoisinant, à l'ouest, la maison des Dames Budes.

3 églises paroissiales (Saint-Sauveur, Saint-Germain et Toussaints) et la cathédrale s'élevaient dans l'ancienne enceinte de la ville, et 6 autres au dehors (SaintEtienne, Saint-Martin, Saint-Aubin, Saint-Jean, Saint-Pierre en Saint-Georges et Saint-Hélier). Trois d'entre elles, Toussaints, Saint-Aubin et Saint-Germain, étaient largement dotées d'immeubles dans ieur voisinage.

Les campagnes ne connaissaient guère que le clergé paroissial. Nous n'avons d'autres grands établissements à citer, dans le district de Rennes, que l'abbaye de SaintSulpice-la-Forêt et le couvent des Ursulines de Hédé, dans le district de Fougères, que le monastère des Cordeliers de la Forêt, en Landéan, et, dans le district de Vitré, que la collégiale de Champeaux; aucun autre établissement scolaire que les écoles de village, aucun autre hôpital que les trois modestes maisons de Chantepie, de Hédé et de Vezin, abrițant chacune quatre lits au plus.

Quelle était l'importance du personnel ecclésiastique de la région? On ne saurait l'évaluer exactement. L'église de Rennes, son chapitre, et les deux collégiales de Vitré et de Champeaux, comptaient, outre l'évêque, 5 dignitaires sans canonicat, 38 chanoines et 9 clercs; 160 religieux et 650 religieuses, au plus, occupaient les abbayes, les communautés, les hôpitaux et quelques rares écoles et maisons d'assistance: 143 recteurs et 169 vicaires desservaient les églises paroissiales. Les collèges et Kergus comptaient une vingtaine de régents ecclésiastiques; les hôpitaux et les communautés de femmes, de 30 à 40 chapelains. Mais combien de prêtres encore vivaient des offices des grandes paroisses, des chapellenies, fondations et petits bénéfices de diverse sorte, ou même simplement d'un casuel précaire (1) ?

Au total, un personnel ecclésiastique de 1.300 à 1.400 personnes occupait nos trois districts, dont la population ne devait pas dépasser de beaucoup 200.000 habitants. Les religieuses formaient près de la moitié, et le clergé régulier près des trois cinquièmes de ce personnel.

(1) L'abbaye de Rillé, le prieuré conventuel de Saint-Melaine de Vitré et la plupart des autres prieurés étaient en commende.

CHAPITRE PREMIER

Les Sources.

Il était, pour l'objet de cette publication, une catégorie de documents d'une importance capitale. C'est celle que nous devons aux mesures prises, de 1789 à 1793, par les administrations nouvelles, pour préparer la liquidation des biens ecclésiastiques nationalisés, régler les traitements et les pensions prévus par les décrets de la Constituante, contrôler enfin et réformer les budgets des établissements religieux, hospitaliers et scolaires qui étaient conservés.

Ces documents nous ont fourni les principaux éléments de nos tableaux de revenus et de charges, de dettes et de créances, au moment de la Révolution. Mais il était toujours utile d'en contrôler les données, et il nous fallut souvent parer à leur insuffisance ou à leurs lacunes.

Aux documents relatifs à la liquidation des biens nationaux, nous avons demandé des éléments de contrôle et des compléments indispensables pour l'étude de la propriété foncière du clergé. Les anciens fonds ecclésiastiques, ceux des hôpitaux et des maisons d'éducation, ainsi que le fonds de l'intendance, nous ont non seulement fourni des compléments précieux, mais permis encore de suivre l'administration de la fortune ecclésiastique et ses fluctuations pendant les périodes antérieures. Les cahiers des paroisses pour les Etats Généraux de 1789, enfin, nous ont apporté, avec certains détails utiles, des témoignages contemporains d'une valeur objective souvent certaine.

Notre documentation provient, à peu près exclusivement, des Archives Départementales d'Ille-et-Vilaine, principalement des séries Q (domaines nationaux) et V (administration des cultes), et des anciens fonds ecclésiastiques (séries G et H) et scolaires (série D).

Nous pensions trouver dans la série Q, non seulement les documents relatifs à la liquidation des biens nationaux, mais encore tous ceux que les administrations locales avaient dû rassembler, avant 1792, sur les biens du clergé, et qu'elles auraient dû transmettre, suivant le décret du 19 août 1791, à l'Administration des Domaines, désormais chargée de la gestion desdits biens (1). En fait, la série Q n'a reçu que les inventaires des maisons religieuses du district de Rennes (2); la masse principale des déclarations du clergé et de ses fermiers, et des états ou tableaux dressés par les municipalités et les administrations de district, se trouvent sommairement classés dans la série V. A cette dernière nous devons encore les états de situation des fabriques en 1792 ou 1793, les comptes de gestion du clergé pour l'année 1790, et, d'une façon générale, les documents relatifs à ses traitements et pensions.

A la série L nous n'avons emprunté que les éclaircissements que nous pouvaient fournir les registres de délibérations des administrations du département et des districts, sur les mesures prises par elles pour recenser la fortune de l'ancien clergé. La série C, enfin, nous a fourni les résultats des enquêtes administratives ordonnées, au XVIIIe siècle, sur la situation des hôpitaux et des autres établissements d'assistance.

Les Archives Nationales n'ont rien conservé des déclarations, ni des inventaires, dont les municipalités et les districts devaient expédier le double au Comité ecclésiastique de la Constituante; le fonds de la Commission des Secours et celui de la Commission des Réguliers ne nous ont fourni, sur l'état de certains couvents au XVIIIe siècle, que des indications très sommaires et d'un intérêt médiocre.

Des archives municipales, celles de Rennes seules possédaient un fonds intéressant pour nous, celui du collège. Seules, également, les archives des Hospices de Rennes nous ont procuré des indications abondantes et précises sur les

(1) Voir la délibération prise par le Conseil général du département, le 6 déc. 1791, pour préparer ce transfert (Arch. dép. d'I.-et-V., Reg. délib. du Conseil général, L 214).

(2) Liasses 1 Q 300 et 301.

revenus des anciens hôpitaux et même des bureaux d'assistance de la ville.

Quant aux anciennes archives des fabriques, nous nous en sommes rapporté, pour ce qui en reste après les versements faits aux Archives Départementales, au témoignage de Guillotin de Corson qui eut, pour les étudier, plus de facilité que personne. Il n'a certainement omis, dans son Pouillé de l'Archevêché de Rennes, aucune des données qu'elles pouvaient lui fournir sur les fondations charitables et scolaires, données en réalité bien maigres. Il signale d'autre part tous les comptes de fabriques qu'il a pu connaître; aucun ne concerne le XVIII° siècle. Si nous en jugeons d'ailleurs par ceux qui ont été rassemblés aux Archives Départementales, ces fonds paroissiaux, réduits le plus souvent à quelques titres de fondations et à des cahiers de délibérations plus ou moins mutilés, ne présentaient ordinairement aucun intérêt pour

nous.

I. Les enquêtes de l'époque révolutionnaire (1789-1793).

Nous distinguerons : 1° les documents qui émanent du clergé lui-même; 2° les déclarations de ses fermiers; 3° les documents qui proviennent des administrations publiques.

§ I. LES DOCUMENTS D'ORIGINE ECCLÉSIASTIQUE

Les premières déclarations du clergé. Aussitôt la nationalisation de ses biens décidée, le clergé fut invité à en déclarer lui-même la nature et le revenu. Le décret des 1318 novembre 1789 oblige les titulaires de bénéfices et les chefs d'établissements religieux à faire, dans le délai de deux mois, par devant les juges royaux ou les officiers municipaux, une » déclaration détaillée de tous les biens mobiliers ou immo»biliers dépendant desdits bénéfices, maisons ou établisse»ments, ainsi que de leurs revenus, et à fournir, dans le » même délai, un état détaillé des charges dont lesdits biens » peuvent être grevés. Lesquels déclarations et états seront publiés et affichés, à la porte principale des églises de

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