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Tous les procès-verbaux, qu'ils émanent des commissaires de la municipalité de Rennes ou de ceux du district, paraissent établis avec un soin minutieux. Revenus et charges y sont ordinairement énumérés avec plus de détail que dans les déclarations du clergé, et l'état en est suivi de l'indication sommaire, tout au moins, des dettes et des créances. On y rapporte le détail des prestations en nature, et, souvent, le montant des pots de vin; il est rare toutefois qu'on y donne la contenance des terres. Ces inventaires seuls nous ont fait connaître avec certitude la composition du personnel des communautés, avec les nom, prénoms, âge et qualité de chacun de leurs membres. Mobilier, argenterie et objets du culte y sont toujours décrits dans le plus grand détail. Bibliothèques et archives le sont d'une façon beaucoup plus sommaire; on n'indique, en général, que le nombre des livres de chaque format, et, tout au plus, le genre des pièces réunies dans chaque liasse. Ce n'était pas, il faut le dire, le moment de dresser des catalogues complets, et les commissaires ont au moins vérifié, sur les baux en cours, les livres rentiers et les derniers comptes, les conditions des fermages, l'état des revenus et la situation financière des établissements inspectés. Pour les revenus non affermés, ils ont ordinairement accepté les déclarations des religieux, sans jamais paraître douter de leur véracité.

Nulle autre catégorie de documents ne pouvait nous offrir un ensemble plus complet de détails utiles et certains. Toutes les fois que ces inventaires doublent une déclaration ecclésiastique, celle-ci perd à peu près tout intérêt pour l'objet de notre travail.

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Elats et déclarations des municipalités. Outre leurs inventaires, les municipalités nous ont encore laissé divers états ou tableaux généraux des biens et revenus du clergé, dans leur circonscription. Ce sont d'abord des états « désignatifs et estimatifs », réclamés aux municipalités par le Comité Ecclésiastique de la Constituante, au mois de mars 1790. Pour l'ancien diocèse de Rennes tout entier, la Commission Intermédiaire des anciens Etats de Bretagne, qui tint jusqu'en juillet la place des futures administrations de dépar

tement et de district, en réunit 62 qu'elle adressa au Comité, le 27 avril. Les Archives Départementales d'Ille-et-Vilaine en ont conservé les originaux; la plupart concernent les districts de Rennes et de Vitré.

Ce sont ensuite de nouveaux états de revenus, des états de fermiers, des tableaux de biens et des déclarations, envoyés par les municipalités aux directoires des districts, de septembre à décembre 1790. Ces directoires, aussitôt constitués, c'est-à-dire dès le mois de juillet, avaient dû se préoccuper de former l'état des biens nationaux vendables, et de reconnaître les revenus dont la gestion leur incombait désormais. Sans attendre les nouvelles déclarations réclamées au clergé, ni celles de ses fermiers, obéissant aux ordres de l'administration départementale, ils prièrent les municipalités de leur adresser toutes celles qu'elles avaient elles-mêmes reçues, en exécution du décret des 13-18 novembre 1789, et de dresser à nouveau l'état de tous les biens ecclésiastiques de leur territoire (1). Les municipalités répondirent avec plus ou moins de hâte et d'exactitude. Les districts leur avaient fait parvenir des imprimés, divisés en bandes horizontales, pour les bénéfices ou établissements, et en colonnes verticales, pour les diverses catégories de revenus; elles n'ont pas toujours su les remplir, et beaucoup même ne les ont pas utilisés. Leurs réponses sont parvenues sous les formes les plus diverses et offrent une valeur inégale. Certaines municipalités n'ont signalé que les immeubles, ou même ont donné simplement l'état des fermiers ecclésiastiques; d'autres se sont contentées d'envoyer la déclaration de leur recteur; beaucoup ont omis les biens des fabriques et des fondations qui en dépendent. Les contenances qu'elles indiquent ne sont jamais qu'approximatives, et leurs évaluations, quand elles ne confirment pas simplement celles du clergé, paraissent absolument arbitraires. Les mêmes remarques valent pour les premiers états, envoyés en mars et avril.

Tels qu'ils sont, néanmoins, ces documents constituent un moyen de contrôle qu'on ne saurait négliger, et ils nous ont

1) Voir les délibérations et la correspondance du département et des districts Reg. de délib. des conseils généraux et des directoires; reg. de correspondance du district de Fougères. Août-décembre 1790. Arch. dép. d'I.-et-V., série L).

permis de combler beaucoup de lacunes. La collection en est à peu près complète pour les trois districts, et, là où ils existent, nous sommes d'ordinaire assurés de connaître tous les revenus fonciers et les dîmes du clergé, à l'exception parfois de ceux des fabriques et de leurs fondations; encore arrive-t-il que ces derniers ne nous soient connus que par les déclarations des municipalités.

Etats concernant les fabriques et les hôpitaux. A la fin de l'année 1792, la municipalité de Rennes fit dresser l'état des revenus de toute sorte perçus par les fabriques de la ville, revenus dont elle devait, conformément au décret du 3 septembre de la même année, assumer désormais la gestion. Ces états, transmis à l'administration départementale, nous sont tous parvenus. Les archives des Hospices de Rennes conservent un état des revenus et des charges de l'Hôpital général avant 1789, vérifié par la Commission des Hospices civils, le 15 fructidor VIII, deux états, sans date, des biens dont le même hôpital et l'Hôtel-Dieu avaient continué à jouir depuis la Révolution, et un état, non daté également, des revenus dont le dernier avait été privé par la Révolution. C'est assez pour reconstituer l'état de la fortune de ces établissements en 1790. Mais, pour aucune autre localité, nous ne possédons de documents comparables, si ce n'est le procès-verbal de la descente faite à l'hôpital Saint-Nicolas de Vitré par les commissaires du district. Les archives des Hospices de Rennes (séries H et T) nous ont encore fourni divers états de rentes mobilières appartenant aux hôpitaux et autres établissements d'assistance de la ville; les Archives Départementales possèdent deux états analogues qui intéressent les fabriques et les établissements d'assistance du district de Vitré. Mais ces tableaux, fragmentaires et discordants, ne donnent aucun résultat certain ni complet; aucune indication n'en révèle la date ni l'origine.

Les recensements généraux, par district. Par ses délibérations des mois d'août et septembre et par son compte rendu du 15 septembre 1790 au Conseil général, nous savons le directoire du district de Rennes s'occupa activement de

que

rassembler tous les éléments d'un tableau général de la propriété ecclésiastique dans son ressort. Il réclama partout et vérifia les déclarations et les inventaires déjà faits; il obtint de Sauveur, receveur des décimes dans le diocèse, un état de tous les bénéfices imposés, et, de Du Margat, directeur de la trésorerie des Etats de Bretagne, l'état des rentes sur la province que possédaient les corps et communautés religieuses du district. De tout ce labeur, il ne reste aucune trace. Nous n'avons retrouvé, non plus, aucun des états particuliers des biens ecclésiastiques, par commune, dont le procureur syndic Gandon annonçait, dans le compte rendu du 15 septembre, la formation par le directoire, et l'envoi à toutes les municipalités, pour qu'elles les vérifient et, au besoin, les complètent.

Pour 12 communes du district de Vitré, nous restent, dans les dossiers qui réunissent les déclarations particulières à chacune, des « Extraits de déclarations » rapportant l'état complet des immeubles, dimes et rentes ecclésiastiques de leur territoire; on y mentionne également les biens des hôpitaux. Aucun n'est daté ni signé; mais tous ont été dressés sur le même modèle et écrits de la même main. Ce sont évidemment les vestiges d'un travail entrepris pour l'ensemble du district et par son directoire. Très précis, très utiles pour combler les lacunes des déclarations, il est à remarquer que ces extraits ne se rencontrent guère que là où font défaut les bonnes déclarations municipales.

Seule, l'administration du district de Fougères nous a laissé le résultat définitif de ses travaux dans un « Etat général des » biens ecclésiastiques et domaniaux » de son territoire. Conservé en parfait état, il nous donne, pour chaque commune, le produit des dimes, droits féodaux, rentes foncières et immeubles de chaque propriétaire ecclésiastique, sans omettre les revenus des fabriques, des hôpitaux et des fondations charitables et scolaires. La description des biens pourrait être souvent plus précise. Les évaluations reproduisent ordinairement celles des déclarations ecclésiastiques. Cependant, lorsque les municipalités ont fourni des évaluations supérieures, le district les a toujours adoptées de préférence. Ce document offre, en définitive, le plus grand intérêt; seul il nous apporte un ensemble aussi complet d'indications relativement sûres, pour une région aussi vaste.

II. Les documents relatifs aux biens nationaux.

De ces documents, nous n'avons examiné que ceux qui concernaient les immeubles. Sur le sort des objets du culte et des meubles du clergé, sur la liquidation de ses rentes mobilières ou foncières, on ne saurait, en effet, recueillir, en Ille-et-Vilaine, que des indications fragmentaires et très insuffisantes.

On doit, au contraire, retrouver la trace de tous les immeubles dans les collections de procès-verbaux d'adjudication et d'estimation, ou dans les états sommaires des biens vendus ou invendus. Certaines dépendances des hôpitaux et des établissements d'assistance, qui n'avaient fait l'objet d'aucune estimation, et qui, distraites dès l'an VIII de la masse des biens nationaux, ne figurent pas sur les états de biens invendus dressés depuis, pouvaient seules échapper à nos recherches.

Celle réserve faite, les documents relatifs à la vente des biens nationaux permettent un recensement complet de la fortune immobilière du clergé. En l'absence de déclarations et d'inventaires, nous avons pu, grâce à eux, reconstituer au moins l'état des revenus fonciers de beaucoup de fabriques et de fondations. Nous leur devons encore les seules évaluations solidement fondées que l'on puisse opposer à celles des déclarants, et, pour les terres non affermées en argent au moins, l'indication de contenances constatées sur place, sinon rigoureusement mesurées. Pour les biens affermés en argent, en effet, le prix d'estimation fut, jusqu'en l'an III, calculé d'après le fermage augmenté, s'il y avait lieu, de la valeur des prestations en nature et d'une fraction des deniers d'entrée. Pour les autres, on procéda toujours à des expertises qui furent, autant que l'on en peut juger, conduites avec assez de soin et de sincérité. Les procès-verbaux d'expertises, en tout cas, décrivent les immeubles dans le détail, donnent la contenance, la qualité et le revenu des terres, pièce à pièce, et le taux de leurs évaluations tend plutôt à surpasser celui des fermages dans la même région. Beaucoup de terres étant affermées à prix d'argent, nous ne pouvons malheureusement calculer avec exactitude l'étendue du domaine ecclésiastique,

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