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geux aux familles. Ouvrez Tacite: vous y verrez qus les Francs l'apportèrent de la Germanie. Parmi eux, tous les individus d'une même famille soutenoient la querelle de la famille; on se battoit pour la possession d'un champ, pour l'enlevement d'une fille, & delà les familles étoient des espèces de républiq ues. Est-il étonnant qu'elles eussent adopté un usage qui empêchoit les biens de passer en une autre famille ? Delà encore l'exclusion des filles, parce qu'elles ne pouvoient figurer dans ces combats. Consultez Montesquieu, il vous dira que le retrait lignager est une institution vicieuse. Voyez les coutumes qui l'admettent : ne l'ont-elles pas appellé un droit odieux ne l'ont-elles pas marqué du sceau de la réprobation, en disposant que l'omission de la moindre formalité seroit fatale au retrayant ? D'où vient cet accord, si ce n'est du préjudice qu'il cause à la société ? Votre comité s'est décidé en conséquence à vous en proposer l'abolition.

Aucun membre n'a réclamé, & l'assemblée a décrété le projet du comité en ces termes :

Décret. L'assemblée nationale, sur le rapport de son comité de féodalité, a décrété & décrete ce qui suit.

I. Le retrait lignager est aboli;

II. Toutes demandes en retrait lignager qui n'auront pas été adjugées par jugement en dernier ressort, ou consenties avant la publication du présent décret, sont annullées; & il ne sera statué que sur les dépens.,,

M. Batz a fait un rapport au nom du comité de liquidation. Voici les articles tels qu'ils ont passé.

Décret. L'assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de liquidation, sur la nécessité de fixer d'une manière précise les pouvoirs de ce comité, & de déterminer les fonctions qui lui sont attribuées, a décrété ce qui suit:

« Art. I. L'assemblée nationale décrète comme principe constitutionnel, que nulle créance arriérée ne peut être admise parmi les dettes de l'état, qu'en

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Vertu d'un décret de l'assemblée nationale, sanc tionné par le roi.

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II. En exécution du décret sanctionné du 23 janvier, & de la décision du 15 février derniers, aucunes créan cesarriérées ne seront présentées à l'assemblée nationale, pour être définitivement reconnues, qu'après avoir été soumises à l'examen du comité de liquidation dont les délibérations ne pourront être prises que par les deux tiers au moins des membres de ce comité & lorsque le rapport en sera fait à l'assemblée, if sera imprimé & distribué huitaine avant de le mettre à l'ordre du jour, & néanmoins les vérifications & appuremens des comptes, dont les chambres des comptes & autres tribunaux peuvent être actuellement saisis, continueront provisoirement jusqu'à lanouvelletorgani sation de l'ordre judiciaire, & l'établissement des rè gles fixes sur la comptabilité à s'effectuer comme ci devant, suivant les formes prescrites.

III. Nulle créance qui aura été rejettée dans les formes légitimes par les ordonnateurs des divers départemens, par la chambre des comptes & autres tribunaux, ne pourra être de nouveau présentée au comité de liquidation.

IV. Le garde des sceaux sera tenu de donner au comité de liquidation, connoissance & état exact de toutes les instances actuelles, concernant la vérification, apurement & liquidation des créances sur le trésor public, à quelque titre que ce puisse être.

V. La chambre des comptes fera pareillement remettre audit comité un tableau de toutes les parties de comptabilité, dont la vérification & appurement sont actuellement à l'examen de ce tribunal.

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VI. Tous les tribunaux, tdministrateurs, ordonnateurs & autres personnes publiques seront tenus de fournir les documens & instructions qui leur seront demandés par le comité.

VII. Tous les créanciers qui prétendentêtre employés dans l'état de la dette arriérée, seront tenus de présenter leurs titres dans le délai de deux mois, à compter de la publication du présent décret, pour les personnes

qui habitent le royaume; une année pour celles qui sont en-deça du Cap-de-bonne-espérance, & trois années pour celles qui habitent au-delà du Cap : tous ceux qui, dans ce délai, n'auroient pas justifié, au comité de liquidation; soit de leurs titres duement vérifiés, soit de l'action qu'ils auroient dirigée devant les tribunaux qui doivent en connoître, pour en obtenir la vérification, seront déchus de plein droit de leur répétition sur le trésor public.

VIII. L'objet du travail du comité de liquidation sera l'examen & la liquidation de toutes créances & demandes contre le trésor public, qui sont susceptibles de contestation & de difficultés.

(Cet article est de M. le Camus).

IX. Lè comité de liquidation présentera à l'assemblée nationale ses observations sur la nature de toutes les créances arriérées, sur lesquelles l'assemblée na tionale aura prononcé. Il vérifiera particulièrement si les créances arriérées comprises dans les états certifiés véritables, qui doivent lui être remis en exécution de l'article VII du décret du 22 janvier dernier, ont été dûment vérifiés, ,ou lugés & approuvés dans les formes prescrites par les réglémens & ordonnances.

X. Le comité sera tenu de se procurer tous les renseignemens nécessaires sur les créances que le trésor public a droit d'exercer contre différens particuliers, & d'en faire le rapport au corps législatif.

XI. Il sera tenu registre de toutes les décisions qui ont été portées sur l'admission, rejet ou réduction des diverses portions de la dette arriérée, afin que, dans aucun cas, & sous aucun prétexte, les porteurs des titres rejettés ou réduits, ne puissent renouveller leurs prétentions.

XII. Conformément à l'article IX du décret du 22 janvier dernier, les délibérations sur l'admission, rejet au réduction des diverses parties de la dette arriérée, ne seront que provisoires; aucunes portions de créances présentées au comité de liquidation , ne pouvant être placées sur le tableau de la dette liquidée, qu'après avoir été soumis au jugement de l'assemblée nationale, & à la sanction du roi.

L'article 2 a souffert quelques débats. M. Desmeuniers y a fait quelques amendemens qui ont évé adoptés, entr'autre celui-ci: Lorsque le rapport u comité devra être fait à l'assemblée, il sera imprimé &c.

M. Charles de Lameth y a fait ajouter la disposition tendante à fixer le nombre des membres du comité qu'il faut pour prendre une délibération.

Le même article a fait renouveller les prétentions des Allemands sur les fournitures de fourages pendant la guerre de sept ans.

M. Reubell, mal instruit, a combattu pour la légitimité de ces créances; mais son compatriote M. Lavie s'est écrié: Parmi les créances dont on vous parle, il en est qui n'ont d'autre source que la plus criminele dilapidation. Il est de ces, hommes prétendus créanciers qui ont donné 60 mille livres pour se faire délivrer des bons de 3 ou 4 millions. La dette d'allemagne n'est pas plus légitime; si elle l'étoit, on n'iroit pas solliciter, tranchons le mot, on ne chercheroit pas à corrompre les membres du comité de liquidation. Cette vérité, poignante pour les gens de mauvaise foi, a été singulièrement applaudie par la majorité de l'assemblée.

L'apôtre patriote, M. Gouttes, a dévoilé le mystère. On n'a pas craint, a-t-il dit, de m'offrir une somme de 200 mille livres, si je voulois faire liquider la créance prétendue pour les fourrages pendant la guerre de sept ans; mais le conseil, sous le ministère de M. Calonne même, en a reconnu l'illégitimité. En effet, ces fournitures que l'on réclame n'ont pas été réellement expédiées. Notre armée pendant cette guerre étoit toujours en mouvement; les fournisseurs devoient avoir un magasin de fourrages pour huit jours dans tel ou tel endroit; l'armée n'y restoit qu'un jour : le fournisseur les faisoit enlever, les représentoit à Strasbourg, & faisoit double emploi. J'ai servi, s'estil écrié: je sais comme les fournisseurs se gouvernent. Tout le monde sait comme moi qu'il leur arrive de faire payer des magasins vides, sous prétexte que l'ennemi les a dévalisés. Sans toutes ces fripponneries, Verroit-on ces MM. après la guerre étaler à nos yeux un luxe scandaleux ?

Les articles 7 & 8 n'ont pas souffert de longs débats; seulement sur les observations de M. le Camus, il a été chargé de présenter une rédaction nouvelle du huitième article, & c'est celle qui est dans le décret ci-dessus.

Les autres articles ont passé presque d'emblée. La séance s'est levée, & les membres se sont retirés dans leurs bureaux, pour procéder à la nomi nation de leurs officiers.

Séance du soir 17 juillet 1790.

Plusieurs hommages à la parie, entre autres les droits de l'homme & du citoyen, avec les articles fondamentaux de la constitution, gravés en tableau, bordés d'un médaillon chargé d'attributs analogues.

Lecture d'adresses: pétition de plusieurs prisonniers détenus pour dettes civiles, qui réclament leur liberté en mémoire de la fédération; pétition des prisonniers: du Châtelet; ils se plaignent de la détention de quelquesuns d'entr'eux sans décret; ils demandent des commissaires pour les visiter. Adresse du sieur du Lac, lieutenant en second au régiment de Strasbourgartillerie; il dénonce une lettre de cachet décernée contre lui le premier juin dernier par le ministre de la guerre. Ce mot, si justement abhoré, a soulevé la plus grande partie de l'assemblée. Est-ce parce qu'il est trop bon citoyen, s'est écrié une voix ?

C'est vraisemblablement un ordre militaire, répond M. de Cazalès, & non une lettre de cachet. L'assemblée se couvriroit de ridicule si elle s'en mêloit. Cependant je demande le renvoi au comité des lettres de cachet, pour examiner si c'en est une; car alors le ministre seroit évidemment coupable..

Voici le fait, a dit M. l'abbé Gouttes: M. de Puységur, colonel de ce régiment, m'a rapporté que M. du Lac avoit été chez lui, & lui avoit dit, le c chapeau sur sa tête : je suis surpris, Monsieur,

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