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on choififfoit parmi les officiers du défunt 50 jeunes gens; on les conduifoit fur la tombe de leur maître, où on les étrangloit, on faifoit fubir le même fort à autant de chevaux; après les avoir éventrés, nettoyés & remplis de paille, on les plaçoit fur les chevaux jambe deçà, jambe de-là, autour du monument. Dans quelques peuplades, la loi défendoit abfolument le mariage à toute fille jufqu'à ce qu'elle eût tué un ennemi. Ils ne cultivoient d'autres arts que ceux qui ont rapport à la guerre. « On demande, ajoutent nos auteurs, fi les Scythes étoient un peuple nombreux. Les fçavans ne font pas d'accord fur cette queftion. S'il eft vrai qu'ils aient fait beaucoup d'incurfions dans les pays voifins, leur pays n'étoit guere peuplé; mais d'un autre côté, fi l'on confidere leur maniere de vivre, fimple & laborieufe, leur climat, & plufieurs autres circonftances qui contribuoient à les rendre fains & robuftes, il femble que ce devoit être un peuple nombreux: car nous lifons que peu d'entr'eux mouroient de maladies, & que prefque tous atteignoient un âge avancé, de forte que plufieurs, las de vivre, fe donnoient la mort à eux-mêmes, en fe précipitant de quelque hauteur dans la mer ou dans un fleuve ».

Les auteurs s'attachent, autant qu'il eft poffible, à diftinguer les différentes tribus des Scythes, & à nous les faire connoître fuc-. ceffivement; mais leurs détails fe réduisent à

peu

de chose. Il en eft de même de ceux qui regardent les anciens Phrygiens, Troyens, Lyciens & Lydiens. Ce n'eft point leur faute s'ils ne fatisfont pas les lecteurs ; ils ont tout recueilli, &, nous le répétons, c'eft cette attention à ne rien omettre qui fait le principal mérite du travail des auteurs anglois, qui a fait le fuccès de l'ancienne traduction, & qui doit affurer celui de la nouvelle.

Bibliotheque univerfelle des romans. (Octobre 1779.) Premier & 2e. volumes. A Paris, au bureau, & chez Demonville pour la province.

L

E premier volume de ce mois ne contient que l'abrégé de deux romans, le Caloandre fidele, & Aloyfe de Livarot. Le fecond renferme les Deux freres jumeaux, & un roman bizarre, intitulé: Relation de la découverte du tombeau de l'enchantereffe Orcavelle , avec l'hiftoire tragique de fes amours des Anecdotes fur Cathérine de Pifan & fes romans; enfin, un court extrait d'un roman médiocre & oublié, intitulé: Albureide. Nous ignorons pourquoi les auteurs de la Bibliotheque des romans croient devoir faire mention de ces productions futiles, qu'eux-mêmes mettent à leur place dans la notice qu'il en donnent, &

,

qui étant nées & mortes de nos jours, n'offrent rien de piquant par la peinture des moeurs, par une époque intéreffante,&c. mérite qu'on trouve du moins à d'anciens romans affez médiocres. Le plus confidérable de ceux que les éditeurs préfentent ce mois-ci, eft le Caloandre fidele. L'abrégé qu'ils en donnent étant lui-même un extrait fort bien fait, & cet abrégé contenant 1 36 pages, nous fommes forcés d'y renvoyer le lecteur, d'autant plus que cet ouvrage eft très-compliqué, furchargé de perfonnages dont les intérêts fe mêlent, fe confondent & fe débrouillent enfuite heureusement, felon la maniere ingénieufe, quoiqu'un peu pénible, des longs romans du 17e. fiecle. La lifte feule des perfonnages de celui-ci contient plus de 6 pages, & l'on a cru devoir, pour l'intelligence du livre & la commodité du lecteur, l'imprimer à la tête de l'extrait. Le Caloandre fidele, que nous ne connoiffons guere en France que par les vers de Boileau,

Et toi, rebut du peuple, inconnu Caloandre, eft un des romans qui ont eu le plus de célébrité chez les Italiens & chez les Efpagnols. Le vers de Boileau ne taxe vraisemblablement que la mauvaise verfion de Scudery, qui même ne publia que la premiere des trois parties de fon original.

L'action principale de ce roman, celle qui lie tous les incidens, eft la haine de la princeffe de Trébizonde pour Caloandre, fils de

l'empereur de Conftantinople, tandis que, fous un autre nom, il lui a infpiré l'amour le plus tendre. On fçait que cette fituation a fait le fuccès de Timocrate,qui, dans fa nouveauté, fut joué 80 fois au double, & qui eft oublié maintenant.

Les auteurs de la Bibliotheque rapportent für cet ouvrage une anecdote qui paroît remarquable. Dans la premiere édition de ce roman, de l'an 1641, Pauteur (Ambrofio Marini, qu'il ne faut pas confondre avec le favalier Marini) avoit fait violer à fon héros les regles de cette exacte fidélité prefcrite par les loix des romans d'alors. Ce fut un scandale univerfel, & il fallut corriger cet endroit dans l'édition fuivante. Il fe préfente une réflexion: c'étoit le tems où la galanterie la plus libre avoit pris la place de cette fidélité antique; c'étoit le tems où le maréchal de Baffompierre brûloit fix mille lettres d'amour avant d'être enfermé à la baftille. Depuis François I, la licence regnoit à la cour & à la ville, & on cherche inutilement d'où pouvoit naître ce contrafte du goûr littéraire & des mœurs nationales.

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Nous nous croyons difpenfés auffi de rendre compte de la découverte du tombeau de l'enchantereffe Orcavelle, & ce font les auteurs mêmes qui nous en donnent la raifon. Ce roman difent-ils, n'a point de plan, point d'intrigue. C'eft une narration rapide,

animée par

les tableaux affreux qui fe fuccedent & fe preffent. L'auteur de cet ouvrage, Jules Inige de Medrane, étoit contemporain de la reine Marguerite. Il vint en France, s'attacha à cette princeffe, & fit, pendant plufieurs années, les délices de fes comités littéraires. Les lecteurs qui le jugeront fur la lecture de ce tombeau d'Orcavel le, le placeront auprès d'Young; mais il a fait d'autres ouvrages d'un genre moins horrible & moins fombre.

L'auteur du roman intitulé: Aloyfe de Livarot, eft abfolument inconnu. On fçait feulement que le manufcrit de fon ouvrage, daté de Janvier 1628, devoit être dédié au cardinal de Richelieu. Le fonds en eft intéreffant. Thibaut d'Hangeft & Gontran de Livarot étoient liés d'une amitié intime. Les deux amis fe marierent chacun dans leur province & dans leur château. Ils fe promirent d'unir leurs enfans par le mariage, fi la nature fecondoit ce vou de l'amitié. Thibaut d'Hangeft eut un fils, qu'il nomma Olivier. Gontran de Livarot eut la douleur d'être 5 ou 6 années fans enfans. Enfin, il eut le bonheur d'avoir une fille,qu'il nomma Aloyfe.Les deux peres fongerent à tenir leur promeffe; mais Aloyfe avoit pour marreine Ifabelle de Fervaques, qui fouhaitoit de rompre ce mariage, par un motif d'avidité ou d'ambition. Délelpérant d'engager Gontran de Livarot à manquer à fa parole, elle fe borna à obte

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