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un homme nommé Oshandesbeghe, c'est-à-· dire, homo mundi, nom peu différent de celui de fils de l'homme; que cet homme merveilleux enfeignera à fes difciples la véritable religion, les loix & la juftice; que pendant quelque tems le démon combattra fon empire, mais qu'à la fin ce vertueux perfonnage triomphera de tous les obftacles, & fera regner la paix & le bonheur fur la terre. Il faudroit avoir le Zenda Vefta, & entendre la langue facrée des Parfis, pour vérifier fi cette prédiction s'y trouve réellement, comme la donne Shariftani. Nous ajouterons feulement ici le paffage fingulier & remar quable de Tavernier. « Ils donnent, dit il, trois enfans à leur prophête; & quoique ces enfans n'aient point encore paru dans le monde, leurs noms ne laiffent pas d'être déjà inarqués. Comme il traverfoit le fleuve, difent-ils, ab ipfo ceciderunt tres feminis guttæ, qui feront confervées jufqu'à la fin du monde. Ils ajoutent que Dieu fera entrer dans l'eau de ce fleuve une vierge qui deviendra enceinte per receptionem gutte, & mettra au monde un fils qui fe nommera Oushider, & qui, revêtu d'une autorité puiffante, obligera les hommes à recevoir la loi de fon pere, & confirmera fa doctrine par des miracles. Le fecond, qui fera conçu de la même maniere, s'appellera Oushiderma ; il fecondera fon frere dans l'exécution de fes deffeins, lui fera affocié pour la prédication,

& arrêtera le cours du foleil pendant díx jours, pour convaincre par ce prodige ceux qu'il fera deftiné à convertir. Le troisieme fera conçu par la même mere & de la même façon; fon nom fera Sennoiet-Hotius, & il aura une autorité fupérieure à celle de fes freres, pour qu'il faffe embraffer la véritable religion par tous les peuples de la terre. Viendra enfuite la réfurrection générale; alors les ames qui font dans le ciel & dans l'enfer, rentreront dans leurs corps. Les montagnes & les métaux fe fondront, & rouleront dans l'enfer, de forte que le féjour des démons fera, par ce moyen, rempli & détruit. La terre fera une demeure unie & agréable, où les hommes vivront heureux, louant Dieu & fon prophête ».

Le docteur Hyde, qui a fait un long travail fur la religion des anciens Perses, n'a pas négligé ce paffage; il l'a commenté avec affez d'étendue pour prouver que les trois fils représentent les trois états du meffie, fa nativité, fon miniftere, & fon avénement quand il viendra juger le monde.

Les auteurs anglois conduifent l'histoire perfanne d'après les auteurs orientaux jufqu'à la conquête de cet empire par Alexandre, que les hiftoriens perfans appellent Afcander. Selon eux, il étoit fils de Darab ou Darius I, qui ayant impofé un tribut à Philippe, roi de Macédoine, en avoit aufli reçu la fille, qu'il avoit demandée, parce qu'on lui en avoit van

té la beauté; mais s'étant apperçu qu'elle avoit l'haleine infecte, il l'avoit renvoyée à fon pere, quoiqu'elle fût enceinte. Philippe éleva comme fon fils, l'enfant qu'elle mit au monde, & lui donna le nom d'Alexandre. Les détails de la conquête de la Perfe, & de la mort de Darius font à peu près les mêmes dans les récits des orientaux & dans ceux des Grecs. Les premiers, après s'être, pour ainfi dire, approprié leur vainqueur, ne manquent pas d'en dire de grandes chofes, & d'en rapporter des maximes remarquables. «Je ne fuis pas content de vous, dit-il à un confeiller qu'il avoit depuis longtems à son fervice. Je fçais que je fuis homme, fujet, par conféquent, à bien des fautes, & cependant jamais vous ne m'avez repris. Si c'eft faute de les appercevoir, votre ignorance vous rend indigne de la charge dont vous étes revétu. Si vous vous en êtes apperçu, votre filence eft une véritable trahison.

On dit que, pour éprouver le caractere d'un de fes courtifans, il lui ôta un emploi diftingué pour lui en donner un moins confidérable. Dans la fuite, il lui demanda fi ce dernier emploi lui plaifoit, & comme il s'en acquittoit. « Fort bien, répondit le courtifan; ce n'eft point la charge qui honore l'homme; c'eft l'homme qui honore la charge quand il la remplit d'une maniere qui prouve qu'il a de la probité & du foin ». Alexandre, charmé de cette réponse, lui rendit sa pre

miere charge, & y joignit un préfent confidérable.

Khendemir raconte qu'un jour un homme pauvrement habillé lui préfenta une requête très-bien faite. Le prince, après en avoir admiré le ftyle, le confidéra depuis les pieds jufqu'à la tête, & lui dit : Si vous aviez paru devant moi en habit auffi décent que celui dont vous habillez vos pensées, votre préfence m'auroit été plus agréable. La nature, répondit fur le champ le fuppliant, m'a donné le talent d'écrire que V. M. vient d'ap plaudir; mais il n'appartient qu'à vous, grand monarque, dont la renommée publie partout la générofité, de me faire donner un habit qui me rende'digne de paroître devant vous. Alexandre, touché de cette réponfe, lui fit donner un habit magnifique & une fomme confidérable.

L'hiftoire de Perfe eft fuivie de celle des Scythes & des Gomerites; elle renferme leurs tranfmigrations en Europe, fous le nom de Scythes, Celto-Scythes, Sarmates, Meffagetes, &c. En général, rien de plus confus que l'hiftoire ancienne de ces peuples, qu'on fait ici defcendre de Gomer, fils aîné de Japhet. L'état même des pays qu'ils habiterent d'abord, n'eft point connu : Hérodote, qui a fourni prefque tout ce que l'on a fur les anciens Scythes, parce qu'il avoit voyagé dans leur pays, nous dit gravement que les régions feptentrionales ne pouvoient être tra

verfées, à cause de la quantité prodigieufe
de plumes qui rempliffoient l'air, & qui cou-
vroient la terre. Il dit tenir ces détails des
habitans mêmes, qui, probablement, prennent
pour des plumes les grands flocons de nei-
ge qui tombent abondamment dans ce pays
montagneux.
On peut
inférer de ce paffage
d'Hérodote, qu'il ne pouvoit guere être peu-
plé fort avant dans le nord, puifque les ha-
bitans avoient de la neige des idées si absur-
des.

On a beaucoup vanté les mœurs des Scythes; elles étoient aufteres & frugales, comme celles de tous les peuples pauvres; mais elles n'étoient pas les mêmes partout: elles varioient avec les nations différentes qui portoient le nom général de Scythes. On ne peut pas les attribuer à celles qui obéiffoient à des rois, quoique ces princes ne fuffent pas abfolus pendant leur vie, que quelquefois on les dépofât, & on les condamnât même à mort, lorfqu'ils vouloient introduire dans le pays quelques ufages étrangers. On leur rendoit après leur mort des honneurs barbares dont on ne voit d'exemples maintenant que parmi les nations groffieres qui habitent quelques parties de l'Afrique: on ne manquoit pas d'enterrer avec eux une de leurs concubines, un cuifinier, un valet-de-chambre, un meffager & quelques chevaux. Lorfqu'il s'étoit écoulé un an après les obfeques, on faifoit un anniverfaire encore plus terrible::

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