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parmi les hommes, ce n'est jamais que dans ce qui a été qu'ils ont voulu regarder ce qui pouvait être, ce qui devait être. Élevons-nous à de plus hautes espérances; sachons que le territoire le plus vaste, que la plus nombreuse population, que tout se prête à la liberté : pourquoi en effet un instrument qui saura mettre le genre humain en communauté d'opinions, l'émouvoir et l'animer d'un même sentiment, l'unir du lien d'une constitution vraiment sociale, ne serait-il pas appelé à agrandir indéfiniment le domaine de la liberté, et à prêter un jour à la nature même des moyens plus sûrs pour remplir son véritable dessein, car sans doute la nature entend que tous les hommes soient également libres et heureux?

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>> Vous ne réduisez donc pas, messieurs, les moyens de communication entre les hommes : l'instruction et les vérités nouvelles ressemblent à tous les genres de produit; elles sont dues au travail : or on sait que dans toute espèce de travail c'est la liberté de faire et la facilité du débit qui soutiennent, excitent et multiplient la production: ainsi, gêner mal à propos la liberté de la presse, ce serait attaquer le fruit du génie jusque dans son germe; ce serait anéantir une

théâtrales, lors même que les pièces qu'on joue ne seraient pas imprimées.

Art. XIV. Le progrès des lumières, et par conséquent l'utilité publique, se réunissent aux idées de justice distributive pour exiger que la propriété d'un ouvrage soit assurée à l'auteur par la loi. En conséquence, toute personne convaincue d'avoir imprimé un livre pendant la vie d'un auteur, ou moins de dix ans après sa mort, sans son consentement exprès et par écrit, ou celui de ses ayans-cause, sera déclarée contrefacteur, et comme tel sera condamnée à des dommages et intérêts qui n'excéderont pas la valeur de mille exemplaires de l'ouvrage contrefait; de plus les exemplaires contrefaits qui pourront être saisis seront remis à l'auteur, et payés à ceux qui les auraient acquis de bonne foi, aux dépens de celui qui sera jugé responsable de l'édition furtive; enfin les presses mêmes du contrefacteur pourront être confisquées et vendues au profit du bureau des pauvres.

» Art. XV. L'article précédent ne s'étend pas aux éditions faites en France des ouvrages imprimés originairement en pays étrangers.

partie des lumières qui doivent faire la gloire et les richesses de votre postérité.

» Combien il serait plus naturel au contraire, surtout lorsqu'on montre avec raison beaucoup d'intérêt aux progrès du commerce, de favoriser de toutes ses forces celui qui vous importe le plus, le commerce de la pensée! Mais il ne s'agit pas en ce moment d'une loi pour encourager l'usage utile, mais d'une loi pour réprimer les abus de la presse.

» Votre comité aurait désiré vous présenter, dans un développement préliminaire, l'esprit des principales parties de celle qu'il vous propose, et les motifs mêmes particuliers qui ont dirigé la rédaction de la plupart des articles ; le temps nous a manqué, et même cette entreprise nous eût engagés dans un ouvrage trop volumineux. Vous connaissez déjà le plan général et la marche de notre travail; quant aux détails, la discussion les fera ressortir, et les expliquera beaucoup mieux que nous n'aurions pu faire d'avance.

» Nous nous contentons ici de vous prévenir, messieurs, que nous n'avons pas entendu faire une loi pour un autre ordre de choses que celui qui existe maintenant; car c'est pour le moment que vous la demandez. Cet état présent des choses n'est ni l'ancien ni le nouveau; c'est à dire que votre nouvelle constitution a déjà nécessairement amené des réformes

Quant aux éditions étrangères des ouvrages originairement imprimés en France, et dont l'auteur ou ses ayans-cause conservent encore la propriété, elles seront traitées comme contrefaçons, et ceux qui les vendront comme contrefacteurs, conformément à l'article XIV.

» Art. XVI. Seront néanmoins exceptés de cette loi, pendant deux ans, les libraires qui ont en ce moment en leurs magasins des éditions anciennes, furtives ou étrangères d'ouvrages dont les auteurs doivent être regardés comme propriétaires en France, pourvu que ces libraires fassent, dans l'espace de quinze jours, leur déclaration à la police de leur municipalité de la quantité d'exemplaires contrefaits ou d'édition étrangère qu'ils ont encore à vendre, et qu'ils se soumettent à payer à l'auteur une rétribution proportionnée au nombre et à la valeur de ces exemplaires, et déterminée par la municipalité.

" Art. XVII. Dans le cas où il serait prouvé que la contrefaçon a été faite par l'infidélité soit de l'imprimeur chargé de la première

des changecette double

partielles dans votre législation, et que d'autre part il est impossible que cette législation ne reçoive bientôt dans presque toutes ses parties, et surtout dans son ensemble, mens et des améliorations très considérables considération a dû nous frapper et nous guider. Nous avons cru en conséquence devoir mettre pour premier article que la présente loi n'aura d'effet que pendant deux ans : à cette époque il sera bien aisé au corps législatif d'en décréter une plus longue durée si le nouveau code n'est pas encore achevé ou promulgué; mais si les Français ont reçu le grand bienfait d'une législation uniforme et simple, et d'une procédure prompte et précise, il est évident que votre loi particulière sur la presse ne doit pas rester en arrière, qu'elle doit profiter comme toutes les autres de ces progrès de l'art social.

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Quant à présent nous nous sommes permis tout ce que les changemens déjà opérés parmi nous pouvaient nous permettre de tenter. Ainsi, par exemple, nous avons introduit dans notre loi un commencement de procédure et de juge

impression, soit de quelques autres agens de confiance, cet imprimeur et ces agens seront punis comme dans l'article précédent, et en outre par des dommages et intérêts qui n'excéderont pas une demiannée de leurs revenus, gages ou salaires.

» Art. XVIII. Les pièces de théâtre, soit imprimées, soit manuscrites, ne pourront être jouées sur aucun théâtre public, pendant la vie de l'auteur, ou moins de cinq ans après sa mort, sans son consentement exprès et par écrit, ou celui de ses ayans-cause. Chaque infraction à la présente loi sera punie par des dommages et intérêts d'une valeur égale à la recette totale de la représentation. Mais cinq ans après la mort de l'auteur toutes ses pièces seront censées un bien commun à tous les théâtres.

» Art. XIX. Les articles XIV, XV, XVI et XVII regardent aussi la musique imprimée, et l'article XVIII est commun à la musique de théâtre, imprimée ou manuscrite.

» Art. XX. Les comédiens qui sont déjà en possession de jouer des ouvrages de musique et des pièces de théâtre composés par des auteurs vivans et sans leur consentement seront obligés d'obtenir ce consentement, sinon ils seront tenus de payer à l'auteur une rétribution qui sera réglée par la municipalité; et dans ce dernier cas

ment par jurés; cette institution est le véritable garant de la liberté individuelle et publique contre le despotisme du plus redoutable des pouvoirs. Il sera essentiel d'employer tôt ou tard le ministère des jurés pour la décision de tous les faits en matière judiciaire : cette vérité vous est déjà familière ; vous craignez seulement que son exécution ne soit prématurée en ce moment; mais cette inquiétude ne peut vous arrêter lorsqu'il s'agit des délits de la presse, c'est à dire de cette partie de l'ordre judiciaire qui se prête le plus aisément à l'institution des jurés, et qui échappe à tous les inconvéniens qui pourraient en résulter en toute autre matière: en effet, nous vous prions d'observer d'abord que ce n'est guère que dans

le caissier du théâtre, ou toute autre personne indiquée par l'auteur, sera le dépositaire de cette rétribution pour en rendre compte à l'auteur.

» Art. XXI. Toute cession de privilége faite par l'auteur avant la présente époque subsistera jusqu'à son expiration, après laquelle l'auteur, s'il vit encore, ou ses ayans-cause si l'auteur n'est pas mort depuis dix ans, reprendront la propriété de leur ouvrage pour en jouir aux termes de cette loi. De plus les libraires ou autres qui se trouvent au moment présent avoir acquis, pour un ouvrage quelconque en particulier, un privilége à terme fixe, continueront d'en jouir pendant toute sa durée, même dans le cas où les dix ans de survivance, accordée par l'art. XIV, n'auront pas suffi pour épuiser ce privilége.

" Art. XXII. Ceux qui imprimeront, joueront, vendront ou distribueront des éditions, des ouvrages ou des gravures déjà condamnées en vertu de l'un ou l'autre des articles précédens, encourront des peines doubles de celles qui ont déjà été infligées par le jugement qu'ils bravent.

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" Art. XXIII. Tout homme qui vendra un ouvrage portant une fausse indication du nom ou du domicile de l'imprimeur sera puni, s'il ne peut prouver de qui il a reçu l'ouvrage, par une amende de 36 livres, et sera de plus responsable des délits résultant de la publication de l'ouvrage.

» Art. XXIV. Tout imprimeur qui sera convaincu d'avoir mis à un ouvrage un autre nom que le sien sera puni par une amende de 1200 livres, et sera réputé complice des délits résultant de la publication de l'ouvrage.

» Art. XXV. Tout imprimeur qui mettra un ouvrage sous un autre

les principales villes du royaume que sont les imprimeries, et où se fait le commerce des livres, et que par conséquent il ne sera pas difficile d'y trouver des jurés instruits, et propres à bien décider du fait des délits de la presse. En second lieu, il s'agit ici d'une loi qui ne peut guère intéresser que la plus petite partie du peuple, c'est à dire cette classe de citoyens que leurs lumières accoutumeront bientôt à un changement dont ils sentent et reconnaissent déjà l'utilité, Enfin, nous vous prions de considérer que la plupart des délits de la presse sont de leur nature de vrais délits de police; qu'ils s'accommodent fort bien de l'instruction sommaire, et vous ne serez point étonnés d'une part que nous les fassions juger définitivement au premier tribunal, et de l'autre que nous

nom que celui du véritable auteur sera puni par une amende de 100 louis, et de plus sera responsable des délits résultant de la publication de l'ouvrage s'il ne peut prouver que la fausse indication n'est pas de son fait.

» Art, XXVI. Aucun citoyen ne pourra être puni pour avoir composé, imprimé, publié ou vendu un ouvrage ou une gravure, si cet ouvrage n'est pas jugé être dans un des cas déterminés par les articles précédens, et toutes les lois antérieures sont abrogées à cet égard. Le présent article regarde aussi les comédiens pour cause de représentation théâtrale, sauf la surveillance de police que les administrations de district et municipales doivent exercer sur les salles de spectacle comme lieux publics; toutes lois et usages contraires étant pareillement abrogés à cet égard.

» Art. XXVII. Tout homme qui sera convaincu d'avoir vendu ou distribué un ouvrage en sera responsable, s'il ne peut prouver de qui il

l'a reçu.

» Art. XXVIII. Tout homme convaincu d'avoir imprimé un ouvrage en sera responsable s'il ne peut prouver de qui il a reçu le manuscrit. » Art. XXIX. Tout homme qui a remis un manuscrit pour être imprimé en sera responsable s'il ne prouve pas que l'auteur le lui a remis pour le faire imprimer, et pour cette preuve il suffira, soit dans le cas de cet article, soit dans celui de l'article précédent, de représenter un billet signé de l'auteur ou de celui qui a remis le manuscrit, si c'est un citoyen domicilié dans le lieu de l'impression; sinon de représenter ce même billet garanti par un citoyen domicilié, qui se rendra civilement responsable des suites; et néanmoins, dans le cas où cette garantie serait illusoire, et où il serait prouvé

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