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» Les députés seront placés immédiatement tant à la gauche du roi qu'à la droite du président.

» Le roi sera prié de donner ses ordres pour que sa famille soit convenablement placée.

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Cependant s'approchait le jour de la fête nationale: ce n'était point un seul homme, un seul nom que l'on allait célébrer; c'était la gloire commune, la conquête de la liberté! Le dévouement et le patriotisme concouraient seuls aux préparatifs de cette grande solennité. La capitale se remplissait des députations de tous les corps et de toutes les villes, qui venaient tour à tour exprimer à l'Assemblée les sentimens de tous les Français, et dans ces divers témoignages de la satisfaction générale se reproduisait sans cesse la plus honorable récompense que puissent ambitionner les représentans d'un peuple libre; c'était ce tribut volontaire et si bien mérité, ce franc et noble tribut de recon¬ naissance et d'admiration que la nation payait à ses dignes mandataires. La veille du grand jour, le 13 juillet 1790, la salle des séances de l'Assemblée nationale donna déjà une idée du majestueux tableau qui le lendemain allait se déployer dans l'enceinte du Champ-de-Mars; de nombreuses députations de toutes les gardes nationales de France, de toutes les troupes de terre et de mer, occupaient les tribunes et les amphithéâtres, qu'environnait de toute part l'affluence du peuple, avide de voir réunis ses frères de toutes les provinces, et d'applaudir en commun aux immortels législateurs qui rendaient leurs bienfaits communs à toutes les classes: Au milieu de ce beau spectacle, sous les yeux du peuple, sous les yeux de l'armée, sous les yeux de toute la France, les pères de la patrie délibéraient avec calme et sans orgueil, et le peuple, et l'armée, et la France applaudissait. Dans le cours de la séance un discours fut prononcé au nom de chaque députation. Les gardes nationales de France choisirent pour interprète le héros de la liberté : La Fayette avait à peine fini de parler, que l'Assemblée se leva presque unanimement pour voter des remerciemens à toutes les gardes nationales. Sur

la proposition de M. de Castellane, celte motion, partie de tous les cours à la fois, devint aussitôt un décret, proclamé en ces termes :

« L'Assemblée nationale décrète qu'il est voté des remerciemens aux gardes nationales de France pour l'appui qu'elles ont prêté à la constitution et au maintien de l'ordre public, et pour le patriotisme qu'elles n'ont cessé de déployer. » (1)

Nous terminerons cet article par les trois discours qui suivent, en renouvelant le regret que notre tâche ne nous permette pas de suivre l'Assemblée (2) et la France à l'autel de la patrie (3).

Discours prononcé devant l'Assemblée nationale, par M. La Fayette, au nom de toutes les gardes nationales de France. (Séance du 13 juillet 1790.)

<< Messieurs, les gardes nationales de France viennent vous offrir l'hommage de leur respect et de leur reconnaissance.

» La nation, voulant enfin être libre, vous a chargés de lui donner une constitution; mais en vain elle l'aurait attendue si la volonté éclairée dont vous êtes les organes n'avait suscité cette force obéissante qui repose en nos mains, et si cet heureux concert, remplaçant tout à coup l'ordre ancien que les premiers mouvemens de la liberté faisaient disparaître, n'avait été la première des lois qui succédaient à celles qui n'étaient plus.

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» C'était, nous osons le dire, un prix dû à notre zèle que cette fête qui va rassembler tant de frères épars, mais

(1) Le zèle soutenu et toujours renaissant des gardes nationales de France ne fait-il pas qu'après trente ans cet honorable décret paraît encore jeune de date?

(2) Sur la proposition de M. Barnave, l'Assemblée avait décrété qu'elle ne prendrait aucune délibération hors du lieu ordinaire de ses séances.

(3) M. Talleyrand, évêque d'Autun, d'après l'ordre du roi, officia pontificalement à cette auguste cérémonie.

qui, régis à la fois par votre influence et par le besoin impérieux, si cher aux bons Français, de s'assurer de l'unité de l'Etat, n'ont cessé de diriger vers un point commun leurs communs efforts; c'était aussi sans doute un prix dû à, vos travaux que cet accord unanime avec lequel ils portent aujourd'hui à l'Assemblée constituante de France leur adhésion à des principes que demain ils vont jurer de maintenir et de défendre!

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Oui, messieurs, vous avez connu et les besoins de la France et le vœu des Français lorsque vous avez détruit le gothique édifice de notre gouvernement et de nos lois, et n'avez respecté que le principe monarchique, lorsque l'Europe attentive a appris qu'un bon roi pouvait être l'appui d'un peuple libre, comme il avait été la consolation d'un peuple opprimé!

» Achevez votre ouvrage, messieurs, et, déterminant dans le nombre de vos décrets ceux qui doivent former essentiellement la constitution française, hâtez-vous d'offrir à notre juste impatience ce code dont la première législature doit bientôt recevoir le dépôt sacré, et dont votre prévoyance assurera d'autant plus la stabilité que les moyens constitutionnels de le revoir nous serons plus exactement désignés.

» Les droits de l'homme sont déclarés; la souveraineté du peuple est reconnue; les pouvoirs sont délégués; les bases de l'ordre public sont établies: hâtez-vous de rendre à la force de l'Etat son énergie. Le peuple vous doit la gloire d'une constitution libre; mais il vous demande, il attend enfin ce repos qui ne peut exister sans une organisation ferme et complète du gouvernement.

» Pour nous, voués à la révolution, réunis au nom de la liberté, garans des propriétés individuelles commne des propriétés communes, de la sûreté de tous et de la sûreté de chacun; nous qui brûlons de trouver notre place dans vos décrets constitutionnels; d'y lire, d'y méditer nos devoirs, et de connaître comment les citoyens sont armés pour les remplir; nous, appelés de toutes les parties de la France par le plus pressant de tous, mesurant notre confiance à

votre sagesse, et nos espérances à vos bienfaits, nous portons sans hésiter l'autel de la patrie le serment que vous

dictez à ses soldats.

» Oui, messieurs, nos mains vont s'élever ensemble à la même heure; au même instant nos frères de toutes les parties du royaume proféreront le serment qui va les unir! Avec quels transports nous déploierons à leurs yeux les bannières gages de cette union et de l'inviolabilité de nos sermens! Avec quels transports ils les recevront!

» Puisse la solennité de ce grand jour être le signal de la conciliation des partis, de l'oubli des ressentimens, de la paix et de la félicité publique !

» Et ne craignez point que ce saint enthousiasme nous entraîne au-delà des bornes que prescrit l'ordre public : sous les auspices de la loi l'étendard de la liberté ne deviendra jamais celui de la licence. Nous vous le jurons, messieurs, ce respect pour la loi dont nous sommes les défenseurs, nous vous le jurons sur l'honneur, et des hommes libres, des Français, ne promettent pas en vain. »

Réponse du Président.

<< Messieurs, le jour où le pouvoir absolu a cessé d'être, le jour où les anciens ressorts qui comprimaient les volontés ont cessé de les tenir enchaînées, le jour enfin où vingt-cinq millions d'hommes, qui s'étaient endormis esclaves, se sont réveillés libres, il était à craindre qu'ils n'abusassent d'un bienfait trop nouveau pour eux, que l'anarchie ne remplaçât le malheur du despotisme : à l'instant les gardes nationales ont paru, et la France rassurée a vu en elles le génie destiné à défendre de ses propres excès comme de ses ennemis le liberté naissante.

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Que vos fonctions, messieurs, sont nobles et pures! l'amour de votre pays est à la fois le mobile et la seule récompensé de vos travaux. Que vos devoirs sont grands et utiles! Veiller constamment à la sûreté des personnes et des propriétés, c'est à dire donner à tous les citoyens cette sécurité sans laquelle il n'est point de bonheur; protéger partout la libre circulation des grains et des subsistances, et prévenir

par-là ces prix inégaux, ces renchérissemens subits et violens qui n'ont que trop souvent causé les malheurs ou les désordres du peuple; enfin assurer la perception des contributions publiques, et maintenir aussi le trésor national dans cette abondance si heureuse, si désirable, si nécessaire; telles sont, messieurs, vos obligations civiles. L'Assemblée nationale sait que vous les remplirez; c'est à sa voix que vous êtes nés tout armés, tels que ce symbole ingénieux du courage et de la sagesse; c'est à sa voix que plus d'une fois vous avez donné des preuves de votre zèle et de votre patriotisme; souvent même vous l'avez prévenue; elle vous regarde comme ses enfans; elle vous regarde comme ses appuis; elle reçoit aujourd'hui votre hommage; demain la nation recevra vos sermens. Dans tous les temps vous aurez des droits à l'amour de tous les citoyens, comme à leur reconnaissance. Vous avez formé des vœux pour le prompt rétablissement de l'ordre public et pour l'achèvement de la constitution : ces vœux sont dans le cœur de tous les bons citoyens; ils sont aussi dans le nôtre; le plus beau jour de l'Assemblée nationale sera celui où elle pourra s'en remettre à ses successeurs du soin de consolider l'édifice majestueux qu'elle se hâte de terminer. Heureuse de vous voir dans son sein, elle vous offre les honneurs de sa séance. »

Discours prononcé à l'Assemblée nationale au nom de toutes les troupes de lignes de France, par M. le lieutenant-colonel Beaussert. (Séance du 13 avril 1790.)

Messieurs, si jamais une longue suite d'années de services militaires a eu des charmes, c'est dans ce moment, où les augustes représentans de la nation ont fait choix des plus anciens guerriers pour resserrer les nœuds qui unissent le soldat et le citoyen.

» Deux corps armés vont assurer le maintien de la constitution et le repos de l'Etat par une fédération fraternelle, et un serment plus développé, mais qui n'était pas moins actif dans les cœurs français.

» Si les corps que nous avons l'honneur de représenter ont été assez heureux pour mériter les suffrages de la nation,

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