Page images
PDF
EPUB

intermédiaires entre le roi et l'Assemblée nationale, ce serait détruire l'unité constitutionnelle. Sans doute le président étant auprès du roi, l'Assemblée nationale doit y être aussi, sans aucune espèce de séparation ni de distinction; toute distinction semblerait en mettre une entre le pouvoir du président et celui de l'Assemblée : toutes les fois qu'il s'agit d'un corps délibérant où le président est partie intégrante, il est le premier parmi ses égaux, et s'il était possible qu'il fût confondu, le président devrait être mêlé avec tous les autres membres.

[ocr errors]

J'adopte le troisième article du comité. Sur le quatrième je ne puis être de l'avis de M. l'abbé Maury; il a voulu que le même serment fût prêté par le roi et l'Assemblée nationale. Si dans cette circonstance, mettant à part les fonctions et les pouvoirs, chacun se bornait à prêter un simple serment, je ne m'éleverais point contre cet avis; mais le roi a d'autres devoirs à remplir que l'Assemblée, et lorsque nous voulons resserrer les liens de notre constitution chacun doit prêter leserment affecté à son grade: s'il jurait comme citoyen, incontestablement il prononcerait le même serment que tous les autres; mais c'est comme roi des Français, comme chargé par la constitution de faire exécuter les lois qu'il doit jurer. Je crois donc qu'il doit prêter le serment tel qu'il est proposé par le comité, à l'exception de ces mots: Moi, premier citoyen, auxquels on substituera: Moi, roi des Français.

M. Cazalès.

« Ce n'est pas sans surprise que j'ai entendu dire que le chef suprême du pouvoir exécutif, que le souverain de la nation, que le roi, dont l'autorité a précédé la vôtre.... (Murmures. A l'ordre! à l'ordre ! )

» J'ai peine à concevoir la cause de la défaveur d'une assertion aussi simple et aussi vraie. Je répète : ce n'est pas sans surprise que j'ai entendu dire, que le chef suprême du pouvoir exécutif, que le souverain de la nation, que le roi, dont l'autorité a précédé la vôtre.... (Nouveaux murmures.)

» Certainement je n'ai pas prétendu dire que l'autorité du roi a précédé celle de la nation, de laquelle toutes les autorités émanent; mais j'ai dit, et c'est une vérité incontestable, que l'autorité du roi a précédé celle des représentans de la nation; c'est lui qui vous a donné le mouvement et la vie; sans lui vous n'existeriez pas. Il est donc, dis-je, extraordinaire que votre roi, que celui qui vous a créés, que le représentant héréditaire du peuple français ait besoin d'un décret de vous pour être le chef suprême des forces armées du royaume. Il est difficile de concevoir une monarchie où le roi ne serait pas chef suprême de l'armée; il l'est par la loi du royaume ; il ne l'est pas par vous; il l'est par la nation, et vous n'êtes pas la nation; il l'est par le droit de sa couronne, parce qu'il est le chef héréditaire de l'empire; il l'est par notre constitution, parce que vous avez reçu les ordres souverains de la nation, qui a voulu qu'il fût reconnu tel.

» Il est donc dangereux de lui déférer par un décret ce commandement : on semblerait jeter un nuage sur une vérité qui n'est contestée par personne. Je demande la question préalable sur le premier article du comité. Quant au second article, le préopinant a exprimé d'une manière très claire les principes du gouvernement électif; mais dans un empire où la couronne est héréditaire, dans une occasion solennelle où l'on montre au peuple son roi, les princes de la famil e royale doivent entourer le trône où leur naissance les appelle. Il est de l'intérêt de la nation de donner au peuple l'exemple du respect qu'il doit leur porter, afin que personne n'ait le criminel projet de déranger la succession à la couronne, afin que les peuples, voyant les princes rangés autour du trône, apprennent que rien au monde ne peut déranger l'ordre successif établi pour le bonheur et pour l'éternelle paix de l'empire.

»

Quant au troisième article, je l'adopte, ainsi que tous les préopinans. Le quatrième me parait présenter beaucoup de difficultés; j'ai été étonné qu'on pût nous proposer de présenter au roi des formules de serment : dans quelle étrange position sommes-nous donc vis-à-vis de notre souverain?

que

(Plusieurs voix: A l'ordre!) N'est-ce que du 14 juillet doit commencer sa légitime autorité? Laissez à sa volonté le serment qu'il voudra prêter; que ses engagemens soient libres. Son civisme et ses vertus vous sont connus ; voilà les véritables garans du bonheur du peuple français. Rapportez-vous-en à son patriotisme; il en a donné tant de preuves éclatantes, qu'il serait criminel à nous d'en douter. C'est par ses vertus qu'il sera lié; voilà le seul lien digne de S. M.; tout autre avilirait la dignité du chef suprême de la nation; tout autre serait indigne de lui; tout autre prêterait au roi la couleur d'un chef de parti....

(Les murmures redoublent; on demande avec plus de force que l'orateur soit rappelé à l'ordre; plusieurs membres veulent que M. Cazalès s'explique sur cette dernière phrase.)

» Je dis ce qui me plaît; je n'en dois compte à personne. Tout autre serment, dis-je, prêterait au roi la couleur d'un chef de parti....

(Une voix : « Monsieur le président, faites votre devoir; rappelez à l'ordre ceux qui s'en écartent. »)

>> Je sais me soumettre aux décrets quand ils sont rendus; mais avant je dis ce que j'en pense. Un serment qu'on ferait prêter au roi dans une autre circonstance que son couronnement imprimerait le caractère de la faction à toute assemblée qui oserait l'exiger : que le roi soit libre de prendre avec sa nation tel engagement qu'il lui plaira. Je ne sais quelle prédilection l'Assemblée a pour les sermens les sermens ont de tous les temps servi à rallier les partis; c'est par des seranens qu'on a vu les factieux se soustraire à une autorité légitime. Je conclus donc, car je n'aime pas les sermens, que le premier et le dernier article soient écartés par la question préalable, et qu'on accorde à la confédération une place distinguée aux princes du sang français. »

4

M. Chapelier (au nom du comité de constitution).

à ce

« Je réponds par de très-courtes réflexions aux objections

faites au projet du comité. Quant au premier article, nous avons cru qu'on ne pouvait rien préjuger de ce qui devait être fait par rapport aux gardes nationales; nous n'avons pas cru devoir juger, par un décret de circonstance, ce qui n'est point encore décidé par l'Assemblée. Il n'a encore été rien statué sur les gardes nationales; c'est pour cela que nous vous avons proposé de décréter que le roi serait prié d'en prendre le commandement pour la confédération. Cette expression le roi sera prié est plus convenable que cette autre le roi prendra. Quant au second article, voici les motifs qui nous ont dirigés : le roi est un, les représentans de la nation sont un; le roi, le président et l'Assemblée ne font que deux : voilà pourquoi nous n'avons fixé que la place que devait occuper l'Assemblée nationale et le roi. Nous ne nous sommes pas mêlés des apprêts de la fête; nous n'avons donc pas dû nous inquiéter des places que devaient occuper les personnes distinguées. On ne fait aucune difficulté sur le troisième article. On a dit sur l'article IV que ce n'était pas à nous à présenter la formule du serment qui sera prêté par le roi. Pour moi je ne doute pas que ce soit à nous à le le proposer, et au roi à l'accepter : dans ce cas le serment est un acte législatif. Ceux qui se plaignent ne considèrent pas que la confédération n'a été formée que pour achever la constitution; que par conséquent, lorsque le citoyen jure de maintenir la constitution décrétée par l'Assemblée nationale et sanctionnée par le roi, le roi doit jurer de la soutenir de tout le pouvoir qui lui est délégué par la loi. Je viens à la qualité de premier citoyen; sans doute il est le premier dans la constitution, et après lui il n'y a ni second ni troisième; tout est égal. Nous n'avons pas cru qu'il fût possible de lui déférer une plus belle qualité.

[ocr errors]

M. Alexandre Lameth.

« Messieurs, pour combattre la question préalable proposée sur le premier article, je demanderai la permission de développer quelques considérations qui me paraissent trèsimportantes. Votre comité a pensé, messieurs, qu'il devait vous proposer de rendre un décret particulier sur la circons

accidentelle et réformable, et qu'un autre pût être nommé chef de l'armée essentielle, principale et irréformable de l'Etat, ce serait regarder le roi et l'autorité qu'on lui a confiée comme des accidens.

» Nous ne pouvons pas avoir une pensée si contraire aux principes et à la lettre de notre constitution; et puisque nous avons déclaré le roi chef suprême de l'armée, nous n'avons pas pu vouloir dire que ce serait de l'armée qu'on peut réformer demain, et dont la réforme le laisserait sans fonctions; que ce ne serait pas de l'armée essentielle de l'Etat, qui doit durer autant que l'Etat même et la monarchie. Je trouve donc inconstitutionnel que le roi soit privé de remplir une fonction dont notre constitution l'a impérieusement chargé. C'est par cette raison que je rejette la rédaction du comité, et que, sans être retenu par aucune considération particulière sur l'expression d'une vérité qui me paraît manifeste et utile, j'adopte entièrement la rédaction de M. l'abbé Maury. »

1.

[ocr errors]

Après ce discours on fit lecture des diverses propositions et amendemens. La discussion, très-animée, ramena l'application des principes ci-dessus développés. La question de savoir quelle place devait occuper la famille royale fut celle qui causa le plus de débats; M. Arthur Dillon les termina en faisant adopter, à l'unanimité, l'usage suivi en Angleterre, et d'après lequel le roi désigne lui-même la place de sa famille dans les cérémonies publiques. Enfin, les articles 1, 3 et 4 du décret proposé par le comité furent adoptés sans autre changement que la suppression des mots premier citoyen à l'article 4; mais l'article 2, amendé, ne devint plus qu'un article réglementaire. Dans le projet du comité il portait: En toutes cérémonies, etc.; M. Roederer, vivement combattu par M. Charles Lameth, proposa et obtint que cet article ne serait pas décrété constitutionnellement, et l'on mit à la fédération, etc. Le voici : £. Art. 2. « A la fédération du 14 juillet le président de l'Assemblée nationale sera placé à la droite du roi, et sans intermédiaire entre le roi et lui.

[ocr errors]
« PreviousContinue »