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V. Ep. s'y fit sentir. Les conférences furent suivies, et 1793. l'on en vint à des articles de traité. Le premier

était de rétablir le roi dans son autorité constitutionnelle, telle qu'il l'exerçait avant le 10 août. Dumourier, pour réponse, remit à Manstein le décret de la Convention qui abolissait la royauté et proclamait la république.......

On convint, de part et d'autre, que les choses avaient été trop vivement poussées, mais qu'il n'y avait plus de remède. On convint que le lendemain, l'adjudant-général Thouvenot irait au quartier-général du roi, à Hans, pour y signer le cartel d'échange. Thouvenot fut reçu avec cette courtoisie militaire que la civilisation a introduite dans les camps; séparant les intérêts des souverains, elle rappelle les égards de la société entre des hommes qui doivent se battre sans colère et se tuer sans haine. Brunswick se souvint qu'il avait, trente ans auparavant, fait Dumourier prisonnier. Le marquis de Luchesini, l'ami de société du grand Frédéric, entra en détails avec Thouvenot, et là se firent les premières, ouvertures du traité qui détacha la Prusse de l'Autriche. Luchesini avait jugé la position actuelle des armées. Il sentait la nécessité de négocier; il en convint dix années après. Envoyé à Paris, au temps de la pacification : c'eût été un pas difficile, dit-il, si, à cette époque, tout ce qui était faisable, de part et d'autre eût été fait.

1792.

Custine alors avait effectué son invasion sur Co- V. Ep: · blentz, Mayence et Francfort; et s'il eût porté son armée sur les derrières de l'armée prussienne en retraite, au lieu d'aller, selon l'expression de Dumourier, courir les hasards en terre étrangère...... Mais déja alors les mouvements des armées étaient commandés par la diplomatie Le conseil exécutif provisoire faisait passer partiellement ses ordres aux généraux par l'organe des commissaires de la convention. On fut sage, modéré et prévoyant, On fit à l'ennemi qui se retirait, un pont d'or. Cet ennemi, fatigué par la disette et par l'épidémie, était encore une armée prussienne de quatre-vingt mille hommes, commandée par des généraux célèbres. Quoiqu'elle fût mal enfournée, la nécessité de vaincre pouvait encore la rendre invincible; avant de consentir à voir son roi, qui la commandait, passer les fourches caudines, elle pouvait disputer longtemps le passage. Le territoire de la république était envahi; c'était assez pour son salut et pour l'honneur, de le voir évacuer, aux yeux de l'Europe qui les avait attachés sur cette grande lutte entre la liberté naissante et l'antique pouvoir absolu des rois. Le premier devoir du pouvoir exécutif républicain devait être de sauver la France, et son premier acte fut de la sauver. Voyant dans l'avenir, il était plus po

V Ep. litique de diviser la coalition par des intérêts et 1792. des procédés différents, que de la resserrer par

des revers et par des pertes qui lui eussent été communs. Le sort des armes à Valmy appela la diplomatie dans les conseils de guerre, et les négociations réglèrent et terminèrent les opé rations ultérieures de la campagne. Dumourier avait composé un mémoire sur l'alliance de la Prusse et de l'Autriche; il le fit passer au roi, et Brunswick fit remettre à Dumourier un nouveau manifeste aussi déplacé que le premier. Dumourier répondit : «apparemment le duc de Brunswick me prend pour un bourguemestre d'Anvers, » et rompit la trève; elle avait été strictement observée sur le front des deux camps. Les communications amicales s'étaient établies entre les avant-postes, et les soldats français partageaient leur pain avec les Prussiens. On en manquait assez pour que Dumourier se permît d'envoyer au roi un présent de pain blanc et de café qui fut reçu. Les corps détachés de l'armée avaient rempli leur mission; plusieurs convois avaient été interceptés, d'autres détruits jusqu'au milieu de leurs postes, derrière l'Argonne, à Busanci, où les hussards de Lausun pénétrèrent, Dillon, attaqué aux Islettes, avait repoussé les Hessois jusqu'à Clermont.

Thionville, d'abord investi depuis le 24 août, avait résisté aux attaques des Prussiens, et le

1792.

commandant Wimpfen contribua beaucoup, par V.• Ep. sa résistance, à rendre la retraite des Prussiens nécessaire: Le siége de cette place occupait une partie de leurs troupes ; et la garnison, si le siége était levé, pouvait gêner toutes leurs communications et empêcher la marche de leurs convois. Wimpfen avait pris le système d'une défense active, faisant journellement des sorties, son but était d'empêcher les travaux des assiégeants. Le 6 septembre, il les battit compléte ment; le 8, il fit une sortie générale ; toute sa cavalerie se dirigea vers Sar-Louis; l'ennemi abandonna cette communication qui se trouva ainsi rétablie ; le 11, la garnison eut un nouvel avan→ tage. Il entra, 'peu de jours après, dans Thionville, un renfort de volontaires nationaux et de quelque cavalerie. On s'attendait alors qu'un corps de 5 à 6000 hommes que l'ennemi avait sous Landau, devait se venir joindre aux assiégeants. Cependant, dès le 14, le feu de la place avait éteint une partie de leurs batteries, et les avait forcés d'abandonner leurs travaux près de Gassion; et le 17, l'ennemi parut abandonner son entreprise. Le siége ne fut cependant pas levé; mais les canons furent retirés des batteries; l'ennemi, loin d'attaquer, se retranchait sur la défensive. Ses camps à Richemont, à Guentrange, à Hétange, ne formaient pas plus de 10,000 hommes, et diminuaient tous les

V. Ep. jours par le départ des troupes qui allaient 1792. joindre l'armée de Brunswick. Ces mouvements: étaient une suite de la journée de Valmy, et préparaient la retraite déja méditée.

Le 30 septembre, l'armée prussienne leva son camp de la Lune, et commença sa retraite. En étudiant un peu attentivement les mouvements militaires de cette époque, on y trouve l'explication des faits convenus, et la clef des événements. L'armée prussienne se retira dans le plus bel ordre, et ne fit ce premier jour qu'une lieue. Le camp qu'elle quittait, fut aussitôt occupé, mais on ne put le tenir à cause des cadavres et des traces de l'épidémie qui l'infes

taient.

L'armée de Kellermann, sur l'ordre de Dumourier, s'était portée à Suipe. Cette position, à égale distance de Rheims et de Châlons, communiquait avec les renforts qui s'étaient assemblés dans ces deux villes, et pouvait les appeler à soi au besoin. Placé trois lieues en avant, et sur la gauche des alliés, elle gênait leur retraite; en se portant en avant par une marche à Fontaine, ils étaient prévenus au passage de l'Aisne, et à Antri. Ce poste de Fontaine fut occupé par l'avant-garde aux ordres de Valence. Kellermann, qui se disposait à s'y porter avec son armée, reçut des commissaires l'ordre de ne point sortir de son camp; et ensuite de rappe

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