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de l'abus commis par l'avocat dans sa défense personnelle. (Lois 22 ventose an XII, 31; 30 mars 1808, 103; ord. 20 novembre 1822; 27 août 1830.)

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A l'audience de la Cour d'assises de la Seine du 22 décembre dernier, dans une accusation de complot contre la sûreté de l'état, Me Pinart, Michel et Dupont, défenseurs de plusieurs des accusés, furent l'objet des réquisitions du ministère public à raison des paroles qu'ils avaient proférées au sujet de l'acte d'accusation dans lequel ils avaient signalé des altérations de fails. Les deux premiers s'étaient écriés que cet acte était l'œuvre d'un faussaire, et Me Dupont, dans le cours des débats et surtout dans la défense personnelle, releva les faits qui selon lui justifiaient les attaques portées contre le rédacteur de l'acte d'accusation. Sur ces réquisitions la Cour d'assises, considérant que quelle que soit la latitude qui doive être accordée à la défense, les avocats doivent se renfermer dans les bornes prescripar la loi et leur serment, qui leur imposent l'obligation de respecter les magistrats et de s'exprimer avec décence et modération; que loin de là les avocats susnommés, dans une cause où il s'est montré tant d'irritation, ont donné à leurs clients l'exemple de la passion et de l'outrage; a condamné M. Dupont à une année de suspension, et M Michel et Pinart à six mois de la même peine. C'est contre cet arrêt qu'un pourvoi a

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été formé.

ARRÊT.

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LA COUR ; Sur le moyen commun aux trois demandeurs en cassation, tiré d'une prétendue violation du droit de la défense, non-seulement en ce qui touche la liberté accordée à l'avocat en faveur de l'accusé, mais encore en ce qui concerne la défense personnelle de l'avocat inculpé ; – Attendu quant à la défense personnelle de Me Pinard et de Me Michel, que ce moyen manque en fait, et que l'arrêt attaqué ne contient à leur égard, aucun motif puisé dans ce qu'ils ont dit pour leur défense; et tant qu'à Me Dupont, que c'est un des moyens à lui particuliers, sur lequel il doit être prononcé distinctement;

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En ce qui concerne la liberté de la défense des accusés ;-Attendu que, d'après l'art. 311 du Code d'inst. crim., le conseil de l'accusé est averti par le président des assises « qu'il ne peut rien dire contre sa conscience et contre le respect dû aux lois, et qu'il doit s'exprimer avec décence et modération » ; Attendu que cette disposition a pour but de fixer les limites de la défense, soit à l'égard des membres du barreau, soit à l'égard des autres personnes qui peuvent être admises à concourir à la défense des accusés en matière criminelle; Que par l'art. 31 de la loi du 22 ventose an 12 : « les avocats.... sont tenus de prêter serment, de ne rien dire ou publier, comme défenseurs ou conseils, de contraire aux lois, aux réglements, aux bonnes mœurs, à la sûreté de l'état et à la paix publique, et de ne jamais s'écarter du respect dû aux tribunaux et aux autorités publiques.; Que cette loi, par son art. 38, n. 7, a voulu qu'il fût pourvu

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par des réglements d'administration à son exécution, notamment en ce qui concerne la discipline du barreau; Que l'art. 103 du réglement du 30 mars 1808 a attribué à chaque chambre des Cours et Tribunaux, la connaissance des fautes de discipline qui auraient été commises ou découvertes à son audience ;-Que l'ordonnance du 20 novembre 1822, relative à la discipline du barreau, qui a remplacé le décret impérial du 14 đẻcembre 1810, et à laquelle n'a pas dérogé en cette partie l'ordonnance du 27 août 1830, qui maintient provisoirement ses dispositions, déclare par son art. 16, que les attributions conférées aux conseils de discipline sur les membres de l'ordre des avocals, ne font point obstacle au droit qu'ont les tribunaux de réprimer les fautes commises par les membres du barreau à leurs audiences; - Que loin de là, l'art. 43 du même réglement d'administration publique veut que « Toute attaque qu'un avocat se permettrait de diriger dans ses plaidoiries ,.. contre les principes de la monarchie, la charte, les lois du royaume ou les autorités établies, soit réprimée immédiatement sur les conclusions du ministère public, par le tribunal saisi de l'affaire, et que ce tribunal prononce l'une des peines prescrites par l'art. 18, sans préjudice des poursuites extraordinaires, s'il y a lieux - Et que la suspension jusqu'au terme d'une année et même la radiation du tableau, sont placées par cet art. 18, au nombre des peines de discipline; Attendu qu'il appartient aux tribunaux saisis d'apprécier la nature des fautes qui sont imputées aux membres du barreau, de proportionner les peines disciplinaires à la gravité des infractions, et qu'il n'entre pas dans les attributions de la Cour de se livrer à une nouvelle appréciation de ces faits, lorsque ces tribunaux ont régulièrement et compétemment procédé ; Et attendu que l'arrêt attaqué a reconnu constant, à l'égard des trois demandeurs, des faits qui rentraient dans la compétence de la juridiction de la Cour d'assises, puisqu'ils se sont passés à son audience, et qu'en appliquant à ces avocats la peine de la suspension, disciplinairement, la Cour d'assises du département de la Seine n'a fait qu'user du pouvoir qui lui était conféré par les lois et réglements précités, et que cette Cour n'a nullement porté atteinte à la liberté de la défense des accusés;

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En ce qui concerne les moyens particuliers invoqués dans l'intérêt de Me Dupont, tant dans sa requête qu'à l'audience:- Sur le premier de ces moyens tiré de la violation prétendue de l'art. 23 de la loi du 17 mai 1819, en ce que la Cour d'assises a prononcé contre le demandeur une suspension de plus de six mois : Attendu que si celles des dispositions de cet article qui s'appliquent aux avocats, se confondent avec les lois et réglements relatifs à l'exercice de leur profession, quant à la compétence des tribunaux et quant à certains écarts dont les membres du barreau se rendraient coupables aux audiences, la restriction à six mois de la peine de la suspension, pour la première infraction, qui est prononcée par le troisième alinéa de cet article, n'est relative qu'aux discours prononcés et aux écrits produits devant les tribunaux, qui contiendraient des faits diffamatoires à l'égard des parties en cause, et que les tribunaux jugeraient étrangers au procès ; Que cette disposition restrictive ne saurait être appliquée, aux manquements que les avocats commettraient en infraction au respect qui

leur est commandé par leur serment pour les tribunaux et pour les autorités publiques, et à la défense qui leur est faite d'attaquer les principes de la monarchie, la charte et les lois du royaume ; Et qu'il n'existe à leur égard, sur ce point, d'autres limites à l'exercice du pouvoir disciplinaire, que celles qui sont fixées par les art. 18 et 43 de l'ordonnance précitée du 20 novembre 1822;

Sur le deuxième et dernier moyen, pris d'un excès de pouvoir que la Cour d'assises aurait commis en cumulant les fautes que Me Dupont avait commises dans la défense de l'accusé Kersosi, avec ce qu'il a pu dire pour sa défense personnelle, à l'audience du 22 décembre :—Attendu que s'il est vrai, en droit commun, que l'abus de la défense constitue un fait nouveau, qui rend celui qui s'en est rendu coupable, passible d'une répression distincte sans qu'on puisse faire résulter l'aggravation de la peine du fait primitivement déféré à la justice, ce principe ne s'applique point à la juridiction disciplinaire qui doit réprimer à la fois et dans leur ensemble, les torts des avocats inculpés, soit que ces torts résultent de leurs écarts comme défenseurs de leurs clients, soit qu'ils se rapportent à l'abus qu'ils ont fait dans l'exercice de leur défense personnelle (1); - Attendu que l'arrêt attaqué cons~ tale qu'indépendamment des moyens de défense que Me Dupont a pu employer pour se justifier des faits à lui imputés dans l'audience du 20 décembre, cet avocat a commis, à l'occasion de cette défense, de nouveaux outrages envers le procureur général, qui constituent des fautes distinctes contre les devoirs de sa profession; — Qu'ainsi en prononçant contre lui la peine de la suspension pendant une année, la cour d'assises n'a pas porté atteinte à la liberté de sa défense personnelle et n'a violé aucune loi: — Rejette.

-Du 25 janvier 1854.-Cour de cass.-M. Isambert, rapp. -M. Crémieux, av.

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FORÊTS.-ADJUDICATAIRE.-élection de DOMICILE.

L'art. 27, C. F. qui veut que faute par l'adjudicataire d'avoir élu domicile dans le lieu de l'adjudication, cet adjudicataire soit assigné au secrétariat de la prefecture, s'applique au cas où il s'agit d'un délit, comme à celui où il s'agit d'intérêts purement civils.

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ARRÊT (Fourcault).

LA COUR ; Vu l'article 27 du Code forestier, duquel il résulte que, faute par les adjudicataires d'élire domicile dans le lieu où l'adjudication a été faite, tous actes postérieurs à l'adjudication seront valablement signifiés à la sous-préfecture; - Attendu que les dispositions de cet article sont

(1) Cette distinction, qu'elle paraisse cu non fondée, vient du moins fortifier un principe favorable à la défense en général. (Voy. nos réflexions sur ce point dans notre art. 1088, 1853, p. 44.)

générales et absolues, et n'établissent aucune distinction entre les différentes natures d'actions qui peuvent être dirigées contre l'adjudicataire ; que la Cour royale de Dijon, en décidant que l'article 27 du Code forestier, ne devait recevoir son application que relativement à l'exécution des intérêts civils, et en créant ainsi une distinction qui n'existe pas dans la loi, a commis un excès de pouvoir et violé ledit article 27: Par ces motifs, casse et annule l'arrêt rendu par la Cour royale de Dijon, le 16 janvier dernier.

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Du 28 septembre 1833. Cour de cass. -M. Gilbert de Voysins, rapp.

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L'individu qui, au moment du jugement, est entré seulement dans sa 70° année, peut être condamné à l'exportation: l'art. 2066, C. C. qui répute septuagenaires ceux dont la 70° année est commencée et défend de prononcer contre eux la contrainte par corps, n'est pas applicable en matière criminelle.

ARRÊT (Pierre André.)

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LA COUR ; Statuant sur les conclusions du ministère public, tendantes à soumettre à la prudence de la Cour la question de savoir si le demandeur, ayant été reconnu, par l'arrêt attaqué, avoir soixante-neuf ans, ne pourrait pas invoquer, en sa faveur, le bénéfice que l'article 2066 đu C. C. accorde non-seulement aux septuagénaires, mais encore à ceux qui sont entrés dans leur soixante- et - dixième année, de ne pouvoir pas être condamnés à la contrainte par corps; Vu l'article 2066 du C. C.; Attendu que, si l'article 2066, C. C. en dispensant les septuagénaires de la contrainte par corps, étend la même faveur jusqu'aux individus qui ont commencé leur soixante-dixièmo année, cette faveur, spécialemeut ek uniquement établie en matière civile de contrainte, ne saurait être étendue aux matiéres criminelles qui ne sont régies que par le Code pénal, — Vu aussi les articles 22 et 70 du Code pénal; Attendu qu'il résulte des dispositions littérales de ces deux articles combinés que, par septuagénaires, la lui pénale, comme la grammaire, n'entend que les hommes. qui ont accompli leur soixante - dixième année; et que d'ailleurs, ni ces articles, ni aucune autre disposition législative n'étend cette faveur anx hommes simplement âgés de soixante-neuf ans; — Que dès lors, LA COUR, instituée pour maintenir la stricte exécution et l'applica tion légale des lois, ne saurait, sans commettre un excès de pouvoir, créer, par une analogie tirée de la législation civile, une faveur exceptionnelle la loi pénale n'a point établie : que Par ces motifs, rejette le pourvoi.

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Du 5 septembre 1833. Cour de cass. Lagarde, rapp.

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ART. 1276.

POIDS ET MESURES.-CONFISCATION.

Le seul fait de détention par un marchand dans sa boutique, de poids non marqués du poinçon annuel le rend passible des peines par les art 477 et 481, C. P.

Le tribunal ne peut se dispenser d'en ordonner la confiscation, sous prétexte qu'il ne serait pas constant qu'on en eût fait usage. Les art. 463 et 483 C. P. qui permettent aux juges de réduire les peines de police, en cas de circonstances atténuantes, ne les autorisent pas à faire remise de la confiscation des poids faux ou réputés faux.

ARRÊT (Cailleux.)

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LA COUR;— Vu l'article 481 du Code pénal, portant: « Seront de plus sai»sis et confisqués, les faux poids, les fausses mesures, ainsi que les poids et les mesures différents de ceux que la loi a établis ; » Attendu que le jugement du tribunal de police de Soissons reconnaît et déclare que, parmi les poids trouvés chez le sieur Cailleux, marchand de grains et boulanger, se trouvaient des poids non marqués du poinçon annuel; que ces poids étaient dès lors réputés faux, et que le sieur Cailleux est en contravention aux lois et arrêtés sur les poids et mesures; Attendu toutefois que le jugement attaqué considérant qu'il existait dans l'affaire des circonstances atténuantes, n'a pas prononcé la confiscation de ces poids, parce que, d'ailleurs, il n'était pas constaté que le sieur Cailleux en eût fait usage, ou que ces poids fussent altérés; Attendu que la contravention dont il s'agit, existe par le seul fait de la présence des poids réputés faux, dans les magasins ou maisons de commerce, indépendamment de l'usage qui peut en être fait, et de la qualité intrinsèque de ces poids ;-- Attendu que si les articles 463 et 483, paragraphe 2, du Code pénal, permettent (lorsque des circonstances atténuantes sont déclarées) de réduire même les peines de simple police, dans les proportions qui y sont exprimées, ces dispositions ne modifient en rien les prescriptions absolues de l'article 481, lequel, d'ailleurs, renferme moins une aggravation de peine, qu'une mesure d'ordre destinée à retirer du commerce des instruments de pesage ou de mesurage qui ont été reconnus ne pas offrir la garantie légale ; Attendu dès lors, qu'en se refusant à prononcer la confiscation des poids dont I s'agit, le tribunal de police de Soissons a violé le susdit acticle 481 du Code pénal; - Par ces motifs, casse.

Du 27 septembre 1833.

seilhes, rapp.

Cour de cass. - M. de Crou

(1) Cette décision présente quelque intérêt, en ce qui concerne l'application de la peine de la confiscation. Du reste nous ne pouvons adopter le principe sur lequel elle repose et par lequel les poids déjà poinçonnés, mais non revêtus du poinçon annuel, sont reputés faux. (Voy. nos observalions dans notre art. 1045, 1832, p. 344 ).

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