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COMPAGNTE.

JE pourrois mettre ici, fous les yeux du Le&eur,

les détails relatifs à la formation de la Compagnie, la manière de lui faciliter la réunion des fonds dont elle aura befoin, & les règles qu'il conviendra de lui prefcrire ; mais ce font des objets que je me réserve de développer quand il en fera tems. Je ne dirai point qu'il fera effentiel, de ne la compofer, cette Compagnie, que de gens d'une probité févère & reconnue. Cette précaution, dont l'effet, quelqu'heureux qu'il fut, pourroit n'être que paffager, ne feroit pas de nature à perfuader le Public, moins encore à le tranquilifer. L'intérêt perfonnel étant, en général, le plus puiffant mobile des actions des hommes, pour être fûrs qu'ils font fidèles, il faut les intéreffer à l'être. Or, d'après cette pensée, j'ose affurer que mon plan eft combiné de manière à ne point laiffer d'inquiétude. Je propofe, entr'autres chofes, d'obliger la Compagnie de donner tous les ans, à une époque fixe, l'état de fituation de ses magasins, par un compte d'ordre, que chaque Intéreffé en croupe, fera en droit d'exiger de l'Affocié en nom fon cédant: & en

outre de foumettre toutes fes opérations, ainfi que les demandes qui pourroient être formées contre elle, à la décifion des Tribunaux ordinaires. La première de ces conditions affure, en tout tems, à chaque Intéreffé, la connoiffance de la valeur de fon intérêt : elle affure auffi au Gouvernement, & aux Peuples, celle de l'exactitude des précautions & des réferves, pour l'approvifionnement, non-feulement du Royaume en général, mais de chaque contrée en particulier. La feconde doit être décifive dans l'opinion publique.

Il réfulte de mes calculs fur cette entreprise, qu'au moyen des 12 fols 6 deniers par quintal, que la Compagnie vendra fon bled, plus qu'elle ne l'aura payé, les frais de fa manutention & de l'entretien de ses magasins se trouveront couverts, & qu'elle pourra y trouver l'intérêt de fes fonds, fur le pied de fix pour cent, au moins. Voici les bases fur lesquelles j'ai cru pouvoir présenter l'apperçu de ce résultat.

de

Je me perfuade que le cultivateur qui aura un jeu 30 fols par fetiers, entre le prix auquel il vendroit à la Compagnie, & celui auquel le confommateur achetteroit d'elle, jouera ce jeu, tant qu'il `pourra ; qu'ainfi il ne portera son bled aux magafins de la Compagnie, que lorfque le befoin d'argent l'obligera de vendre, en plus grande quantité.

que n'en exigera la consommation journalière. Je fais que le befoin d'argent commande au cultivateur, vers les mois de Mars ou d'Avril, parce qu'indépendamment que c'eft l'époque à laquelle recommencent les travaux, à la campagne, c'eft auffi celle à laquelle les herbes renaiffent, & qu'alors il trouve à placer utilement fon argent, en l'employant en acquifition de beftiaux, qu'il fait paître & fructifier pendant le printems & pendant l'été.

Je me perfuade, d'un autre côté, que le confommateur qui aura le même jeu de 30 fols par fetier, entre le prix auquel le cultivateur vendroit à la Compagnie, & celui auquel il pourroit acheter d'elle, achetera du cultivateur par préférence, tant que celui-ci fervira le marché & voudra lui vendre. Tous deux y trouveront leur compte ; ainfi il n'y a point à douter qu'ils ne le faffent.

Mais je me perfuade auffi que le bénéfice à réfulter de ce jeu, pour l'un & pour l'autre, ne fera point affez confidérable pour déterminer l'un, à différer la vente de fon bled au-delà du mois de Mars, & l'autre, à en faire chez lui des provifions pour fa consommation pendant l'été & pendant l'automne.

Il est fenfible, en effet, que le cultivateur trouvera plus de profit, à peupler fa terre debeftiaux, & à en faire des engrais, pendant le printems & pen

dant l'été, qu'il n'en trouveroit à continuer le jeu que je fuppofe qu'il aura joué, pendant l'hyver.

Il eft fenfible de même que le confommateur & le boulanger, qui fauront bien pefer les frais d'emmagafinement, de déchec & de manutention qu'exige la confervation des bleds n'en feront point des approvifionnemens qui ne leur présenteroient que des rifques; qu'ainfi, ils feront, de leur argent, des emplois plus utiles.

?

Je conclus de ces confidérations, 1o, que le cultivateur fervira le marché pendant une partie de l'automne, pendant tout l'hyver, & pendant une partie du printems, au fur & à mesure que fes batteurs extraieront fon bled de la paille, & que la confommation lui en procurera le débit. 2° Que le confommateur & le boulanger acheteront du cultivateur par préférence, tant que celui-ci voudra leur vendre; mais au fur & à mesure de leur consommation seulement, & qu'ils ne feront point d'approvisionnemens.

De ces deux premières conféquences, j'en tire une troisième ; c'est que la Compagnie fournira la fubfiftance dans les Villes, pendant fix mois ou environ, chaque année; & cette confommation des Villes, pendant fix mois, je la porte, dans ma fpéculation, à un quart de celle du Royaume au

total.

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Or, la consommation des bleds dans le Royaume, monte au total, comme on l'a vu précédemment, à 40 millions de fetiers, dont le quart fait millions de fetiers, ou 24 millions de quintaux. La Compagnie vendra donc, dans l'intérieur du Royaume, 24 millions de quintaux de froment, &, comme elle le vendra 12 f. 6 d. par quintal, plus qu'elle ne l'aura acheté, les 24 millions de quintaux lui feront un bénéfice de

15 millions de livres en argent, ci, 15,000,000l. Mais le bénéfice ne doit s'entendre

que

de ce qui forme le produit net, & celui que je préfente ici, n'eft pas net, à beaucoup près; il y a a des prélévemens & des déductions néceffaires. Je vais les préfenter auffi telles que je les ai arbitrés.

Je fuppoferai donc maintenant, que la manutention des magafins occafionnera à la Compagnie une dépenfe de 15,000 1. chaque année, l'un portant l'autre ; ce fera, pour les 300 magafins,une dépenfe de 4,500,000l.

ci,

Et cette dépenfe déduite du bénéfice ci-deffus, le réduit à..........

J'arbitre pareillement le montant

4,500,000

10,500,000

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