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rents, de concubinaires. Le faire, ce serait nier le pouvoir civil, le dériver de soi, ou se placer entre Dieu et l'homme social, de même qu'en rapportant le mariage au sacrement il se place entre Dieu et l'homme naturel.

Expliquer que le mariage civil est en soi religieux, étant fondé sur la religion naturelle. Le nier, c'est nier que l'homme puisse s'élever à Dieu intérieurement, et prétendre qu'il ne s'y élève qu'extérieurement par le sacerdoce. Profanation, — cohabitation permise, Henri (Agier), saint Louis (Lanjuinais).

Le clergé s'interpose encore entre Dieu et l'homme, lorsqu'il veut être propriétaire. Le citoyen possède en vertu de sa raison; si le prêtre a la faculté de posséder en vertu de son sacerdoce, le citoyen cesse de posséder par la raison, il possède par le sacerdoce, source du droit social. Je renvoie à l'examen des doctrines de M. le directeur de Saint-Sulpice. Même dans l'ancien régime, ce qu'on appelait les biens du clergé appartenait à la nation; le clergé n'en était que l'usufruitier. Ces biens provenaient des donations faites par les particuliers et les princes aux églises, c'est-à-dire à la communauté, pour l'entretien des ministres et la subsistance des pauvres. A mesure que les laïques furent exclus du gouvernement ecclésiastique, ils semblèrent donnés au clergé.

Quant au monachisme, expropriant l'homme et des

biens et de lui-même, de son corps, de sa liberté, de sa raison, par des vœux que le sacerdoce forme, il est trop évident que le sacerdoce se pose entre lui et Dieu. « La continence embrassée par les vierges, dit saint Cyprien, est-elle contraire à leur volonté ou supérieure à leurs forces, il vaut mieux qu'elles entrent dans les liens du mariage, plutôt que de se jeter par leurs désordres dans les flammes de l'enfer 1. >>

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La loi ne saurait permettre les vœux, loin de les protéger.

Les sœurs de la Charité, pour cinq ans. Sur le rôle du monachisme dans l'Église et dans la société, on peut consulter la fin de l'écrit sur l'histoire de l'Église pendant la Révolution 2.

Tant que le clergé n'abolira point les voeux pour revenir à la pratique libre des conseils évangéliques; tant qu'il se dira capable de propriété et voudra acquérir des biens au lieu de consentir à recevoir un salaire; tant qu'il s'arrogera sur l'union conjugale un pouvoir autre que de la sanctifier; tant qu'il prétendra que l'infaillibilité de l'Église réside dans le pape, et qu'à lui remonte d'une manière quelconque le gouvernement des choses terrestres; tant qu'il pensera que la loi doit se déclarer pour la vraie religion et professer le catholicisme, qu'elle peut interdire les cultes dissidents, et qu'il n'ad

1. Lettre LXI.

2. Voir précédemment Clergé concordataire.

ÉD.

mettra point la liberté réelle de conscience, il niera que l'homme social actuel soit chrétien, ou qu'il relève intérieurement de Dieu; et il n'y aura ni accord ni paix possible entre le citoyen et le fidèle, entre l'État et l'Église.

Voilà les vrais rapports de l'un avec l'autre, rapports où s'est placé l'État, et où par là il a placé l'Église; mais rapports d'où elle travaille à sortir, mais rapports qu'elle soutient faux. La lutte n'est pas sur le fait, elle n'est qu'en prétention. L'État a christianisé l'Église autant qu'il dépendait de lui, en se faisant chrétien.

Esprits incapables de réflexions viriles, directeur à SaintSulpice, évêque de Chartres, etc.

DEUXIÈME PARTIE

RAPPORTS DU PRÊTRE, DE L'ÉVÊQUE ET DU PAPE 、 AVEC L'ÉTAT

Restituons au prêtre la prêtrise, à l'évêque la prêtrise et l'épiscopat, quel nouveau rapport s'établit-il entre eux et l'État? Absolument aucun. Le pouvoir tout intérieur, tout surnaturel qui les constitue, échappe doublement à la loi civile, qui n'atteint que les choses

naturelles et externes. Quelque réel qu'il soit en luimême, il ne saurait être que l'objet de la foi, ni exister que pour ceux qui y croient. Il se réduit à un dogme, dont, par conséquent, le rapport avec l'État vient d'être examiné. N'étant point connu de la loi, le pontife n'a aucun droit dans la société, comme nous l'avons déjà montré. Entretenant le culte spirituel, portant l'homme à Dieu, en qui il puise la justice, il ne se substitue point à Dieu, afin d'être lui-même la justice de l'homme, ni ne se trouve l'intermédiaire qui de Dieu passe la justice à l'homme; et par ces deux raisons encore, il n'a point de droit dans la cité. Rien de plus certain, ni même de plus intelligible, quand on use de sa raison. Mais comment l'attendre d'un clergé pataugeant, si j'ose ainsi parler, dans l'ancien régime, d'un clergé vivant de judaïsme et de paganisme politiques?

Il a sans doute pitié des païens et des juifs grossiers, que révoltait la simplicité du culte évangélique. Quoi! disaient-ils, quelques miettes de pain, quelques gouttes de vin, sur lesquelles on prononce quelques paroles, le tout accompagné de quelques prières, voilà l'offrande à la divinité! N'est-ce pas se moquer d'elle et exciter son courroux? Pour l'honorer dignement et obtenir sa faveur, il faut qu'au milieu d'innombrables et pompeuses cérémonies les animaux tombent continuellement sous le couteau sacré, et que l'autel ruisselle de sang. Leur imagination en travail, forgeant des monstres,

jetait en supplément à l'apparente misère du rite nouveau l'égorgement d'un enfant, dont les fidèles se partageaient et dévoraient les membres. Eh bien! ceux qui veulent le sacerdoce chrétien propriétaire, muni de puissance temporelle, ne sont pas moins stupides, quelque déliés qu'ils puissent être aux autres égards. Ils le dégradent, de même que les païens et les juifs dé– gradaient la liturgie chrétienne et le sacrifice eucharistique qui en fait l'essence.

Ce n'est point au Dieu des esprits, mais à celui des corps, qu'ils immolaient les béliers, les taureaux, et vouaient les fruits. Ils ne demandaient point la vérité et la sainteté, mais la santé et la fortune; les biens du ciel, mais ceux de la terre. Sans oublier les biens de la terre, le chrétien sollicite auparavant les biens du ciel, implore le Dieu des esprits avant d'implorer le Dieu des corps. Il conjure Dieu de purifier l'âme, de la remplir de sa vérité et de sa sainteté infinies, de se livrer à elle pour être lui-même son bien, et ne le prie qu'accessoirement d'ordonner aux éléments de lui fournir les nécessités de la vie.

Comme tout vient de la divinité, qu'on ne saurait lui présenter que ses propres dons, les païens et les juifs lui offraient les biens relatifs au corps, les seuls qu'ils connussent: les produits des plantes, les animaux et quelquefois l'homme, où ils ne voyaient que l'être physique. Le chrétien lui offre le bien de l'âme, c'est

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