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"cation des filles et des écolières, dont nous nous sommes " chargées par notre profession; et sur toutes choses, nous vous demandons, ô notre Dame et Mère, que toutes les filles, qui y seront à l'avenir, aussi bien que "toutes les personnes qui contribueront à leur avance"ment spirituel, soient du nombre de vos élus; afin qu'en "votre compagnie, nous puissions louer notre bon Dieu "dans la bien heureuse éternité."

C'est donc la très Ste. Vierge elle-même qui est censée présider en personne à tout ce qui regarde le gouvernement de la Congrégation; grand motif de foi pour soutenir les Supérieures dans la vigilance et la charité qu'elles doivent avoir, comme tenant la place de Marie, et pour perfectionner dans les inférieures, le respect et l'obéissance. C'est ainsi en effet que la Sœur Bourgeois, en vertu de J'élection dont nous venons de parler, ne se regardoit plus précisément comme Supérieure de la communauté ; et c'étoit plutôt pour obéir que pour commander, qu'elle s'étoit soumise à la proposition qu'on lui avoit faite, de se regarder toujours, et d'agir comme Sous-Supérieure, et sous la conduite de la très Ste. Vierge.

Cependant elle ne perdoit pas de vue le projet d'abdiquer entièrement cette place d'honneur. Elle ne fut pas plutôt de retour de France à Ville-Marie, en 1684, qu'elle renouvella les sollicitations qu'elle avoit faites avant son départ, pour qu'on nommat une nouvelle Supérieure en sa place; et elle le faisoit avec tant d'instance, qu'on étoit prêt à condescendre à ses empressemens. On avoit déjà fait une assemblée à ce sujet, dans laquelle cependant on n'avoit pu rien conclure de décisif, les suffrages s'étant trouvés partagés entre deux sujets, excellents à la vérité, mais que Dieu n'avoit pas choisis pour cet emploi. C'étoient les Sœurs Geneviève Rosoy, et Marguerite Soumillard: mais comme on étoitsur le point de faire l'élection dans les formes, et de choisir pour Supérieure, une des deux proposées, arriva le grand incendie, dont nous avons parlé ailleurs, et dans lequel l'une et l'autre périrent dans les flammes; et l'affaire des élections en demeura là pour long-temps.

Cependantla Sœur Bourgeois pressoit toujours pour

être déchargée de la Supériorité; et comme en 1691, elle étoit au fort de sa peine intérieure, dont nous avons déjà parlé, on pensa de nouveau à la soulager en ce point. On avoit alors dans la Mission de Québec un sujet excellent. C'étoit la Sœur Anne Vérand, Françoise, et l'une des premières compagnes de la Sœur, la même qui avec la Sœur l'Assomption, plus de dix ans auparavant, avoit commencé la Mission de la Ste. Famille en l'Ile d'Orléans. On avoit jetté les yeux sur elle pour la Supériorité. Elle étoit malade à Québec; elle fut mandée pour venir à la communauté, où l'on espéroit que sa santé seroit bientôt rétablie, et qu'on pourroit la mettre en place. Elle se rendit à l'ordre: mais sa mort qui arriva le 2 Septembre de cette même année, peu de jours après son retour à la communauté, renversa encore tous les projets. S'il n'y a pas du merveilleux dans ces événemens, dont la réalité n'est nullement suspecte, on ne peut pas au moins douter qu'il n'y ait quelque chose de bien singulier.

Malgré tous ces événemens, l'humble Supérieure ne perdoit pas de vue le projet de sa déposition, dont les momens n'étoient pas éloignés. Dans un écrit qu'elle fit, peu de temps auparavant, après avoir fait le détail de tous les accidens qui étoient arrivés à la communauté sous son government, elle ajoute: "je vois en tout "cela des effets sensibles de la colère de Dieu, qui me

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font bien connoître, que par ma timidité, je me "suis éloignée du droit chemin des volontés de Dieu, " dans la part qu'il m'avoit donnée, sur la conduite de " cette communanté. Je ne veux plus abuser de sa patience; mais faire en sorte que sa volonté s'accomplisse, à quelque prix que ce soit : mais il faut son assistance, que je demande de tout mon cœur."

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Cependant comme on ne paroissoit pas faire à ses représentations, toute l'attention qu'elle auroit désirée, et qu'on ne se pressoit pas d'y adhérer; elle prit le parti de s'adresser à Monseigneur de St. Vallier, pour obtenir son agrément au sujet de la démission qu'elle désiroit. Le prélat, qui connoissoit son mérite, eut d'abord beancoup de peine à y consentir: et lui ayant demandé, pour quelle raison elle paroissoit si empressée à se démettre ; elle trouva un prétexte vrai, pour cacher, sous le voile d'un orgueil apparent,sa véritable humilité. "C'est, ré"pondit-elle au prélat, que dans l'espérance où je suis, " que Dieu me donnera peut-être encore quelque temps de

vie, (elle avoit alors 73 ans,) je pourrois servir à celle qui " seroit élue en ma place, dans l'expérience que je peux "avoir acquise, depuis euviron 40 ans que je travaille "dans le Canada. "Monseigneur alors, content de cette réponse, consentit à sa démission, et elle se mit sur le champ en état de l'exécuter.

Ce fut au mois de Septembre, 1693, qu'elle assembla la communauté à ce sujet; et après avoir fait humblement sa démission, en la manière marquée dans les constitutions, qui servoient déjà de règle, quoiqu'elles ne fussent pas encore solemnellement approuvées, elle leur annonça de vive voix, et leur laissa par écrit la déclaration suivante:

" li n'est plus question de parler de moi que comme " d'une misérable, qui pour n'avoir pas été fidèle dans

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l'emploi qui m'avoit été si amoureusement confié, " mérite de très grands châtimens, qui s'augmenteront encore par la peine que mon relâchement vous a fait " ressentir: je vous en demande pardon, et le secours de vos prières. Mettez-y le remède, autant qu'il se pourra. Il faut changer promptement de Supérieure, " et que celle qui y sera, fasse garder exactemement les " règles, jusqu'à la plus petite; car sans cela, qu'y a-t-il " dans cette communauté, de plus que ce que font les

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personnes du monde, qui vivent chrétiennement. En"tretenez-vous donc dans l'esprit que vous devez avoir, "qui est la pauvreté, le mépris, l'obéissance, et l'abandon "entre les mains de Dieu."

Sa démission ainsi faite, on laissa passer quelques jours, pendant lesquels elle donna le premier exemple de la conduite, que selon l'esprit des règles, une Supérieure déposée, doit tenir jusqu'au temps d'une nouvelle élection. Elle se fit cette élection, au mois de Septembre 1693, et le choix tomba sur la Sœur Marie Barbier dite de l'Assomption, cette digne et célébre élève de la Sœur Bourgeois, qui déchargée désormais d'un fardeau qui l'avoit long-temps inquietée, se trouva en même temps et comme dans un instant délivrée de la

fameuse peine d'esprit dont nous avons parlé, et dont elle avoit été tourmentée jusqu'alors. Mais si elle osoit se promettre quelque tranquillité, elle n'en étoit flattée que par l'espérance de pouvoir servir Dieu plus utilement, et avec une nouvelle ferveur. Voici comme elle s'en explique elle-même.

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Depuis que je n'ai plus les peines que j'ai eues pen"dant plus de quatre ans, notre bon Dieu me fait la grace, que tous les désirs que je sens, se terminent doucement. Cependant je n'ai rien fait pour mériter cette miséricorde, elle est toute gratuite. Il me semble que j'ai toute la volonté d'en être reconnoissante, n'ayant " rien plus à faire que de m'étudier à faire la volonté de Dieu, à laquelle je me suis vouée de tout temps."

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Mais cette tranquilité, dont elle se flattoit, ne fut pas de longue durée. Par les suffrages de la dernière élection, elle avoit été mise au rang des conseillères: personne en effet n'étoit plus en état quelle, de conduire la maison. Cependant pour éviter cet emploi, que la délicatesse de sa conscience et son humilité lui faisoient encore appréhender, comme andessus de ses forces, toujours dévorée du zèle de la maison de Dieu, vivre en simple particulière, faisoit toute son ambition. Les travaux des Missions, dans un âge plus que septuagenaire, ou les offices les plus pénibles et les plus bas de la communauté, étoient l'unique objet de ses désirs; souvent elle s'offrit pour ces sortes d'emplois: mais ses offres n'étant point acceptées, à cause du respect qu'on avoit pour sa personne, elle se donna toute entière à rassembler les maximes de perfection dont elle étoit remplie, et dont en qualité de conseillère, elle se croyoit redevable à ses Sœurs; et qu'elle pensoit qu'on devoit établir pour règle invariable dans la Congrégation. On les trouvera dans la 6e. partie.

Ces maximes n'étoient pas également à la portée de toutes; quelques unes en étoient effrayées: et comme il se trouve partout des âmes timides et indiscrètes, il s'en trouva une dans la Congrégation naissante, qui osa dire à la Sœur Bourgeois, que c'étoit envain qu'elle faisoit paroître des désirs empressés pour établir une perfection qui sembloit n'être faite que pour elle seule; et que n'étant plus Supérieure, elle ne seroit pas dans le cas de répondre devant

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Dieu de ce qu'elle appelloit relâchement. La réflexion étoit piquante; la Sœur Bourgeois ne s'en offensa pas. Cet avis fut pour elle une pierre précieuse, et elle le reçut avec humilité, et bien déterminée à ne rien dire d'avantage qui pût déplaire à la moindre de ses Sœurs, prit occasion de cette aventure, de leur faire une instruction admirable sur la charité. On la trouve dans ses écrits en ces termes :

Elle

"Nous devons être unies parfaitement ensemble dans " la Congrégation, et à l'imitation des premiers chrétiens, "sous la conduite de la très Ste. Vierge, n'avoir entre

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nous qu'un cœur et qu'une âme ; car sans cette union, " il n'y a point de véritable communauté. Or l'esprit " de grace, qui doit nous animer toutes également, est

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un esprit de simplicité, de petitesse, de pauvreté, de "dégagement de toutes choses, et d'abandon à Dieu. "Sans cela, point de tranquillité: celles qui n'entreroient

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pas dans ces vues, seroient des membres déplacés, "qui feroient souffrir tout le corps, et s'éloigneroient des "intentions de Marie, qui en nous assemblant, ne veut " qu'un même esprit de grace et de volonté dans toute "cette communauté."

Il ne restoit plus à la Sœur Bourgeois que de terminer P'article des règles pour sa communauté; ; il y avoit longtemps qu'après l'arrivée de Monseigneur de St. Vallier dans son Diocèse, en 1686, la Sœur Bourgeois avoit remis entre les mains de ce prélat la compilation de règles qu'elles avoit apportées de France, en son dernier voyage de 1680. On les observoit par provision à Montréal, où elle étoit elle-même une règle vivante: mais elles n'avoient pas le sceau de l'autorité légitime. On peut même présumer, que ces règles, dont on ne nous a pas conservé l'original, n'étoient qu'un extrait, soit de ce qu'il se trouvoit de meilleur dans la règle qu'elle avoit autrefois reçue de Mr. Jandret, soit de ce qu'elle avoit pu remarquer dans les constitutions des filles de La Croix, ou de Miramion, établies à Paris; à quoi elle n'avoit pas manqué sans doute, d'ajouter des pratiques et des austérités conformes à l'esprit de pauvreté, d'humilité et de mortification, dont elle étoit animée; comme de coucher ordinairement sur la paille avec des oreillers de même matière, de ne

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