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garanties que donne le droit civil ! Cette considéralement pour apprécier les faits et les actes tion a été présentée devant la Cour de cassation dans les conclusions de M. l'avocat général Sevin, qui exprimait le regret de n'avoir pu conclure, en raison de l'appréciation de fait résultant de l'arrêt du 25 fév. 1853, à la cassation de cet arrêt. En rap pelant cette considération, j'en ajoute moi-même une autre.

« La requête civile, qui aurait trouvé sa place ici dans le cas où on eût été devant un tribunal civil, est enlevée au titulaire de brevet s'il est vrai que l'arrêt de la chambre d'appels correctionnels, qui a acquitté Crespel, repose sur un document reconnu faux, la couleur bleue indiquée par Jobbins... »

Ici, M. l'avocat général faisant application de ces principes à la cause, se livre à une discussion approfondie pour démontrer que la loi du 5 juill. 1844 sur les brevets d'invention, n'a pas transporté au juge correctionnel le jugement des questions de nullité; qu'il lui a seulement permis d'en connaître comme d'un moyen de défense. «La preuve, dit-il, c'est que le ministère public ne peut pas, au criminel comme au civil, demander la nullité absolue des brevets, aux termes de l'art. 37. Il le pourrait, si le tribunal correctionnel était juge de cette nullité autrement que dans la limite du fait incriminé. Et comment aussi l'individu, condamné comme contrefacteur, pourrait-il, violant la chose jugée, soumettre la question de nullité au tribunal civil, si le tribunal correctionnel jugeait civilement cette nullité? elle serait en ce cas acquise au plaignant comme elle le serait au prévenu en cas d'acquittement. Mais, non, le prévenu condamné peut porter encore la question de nullité, la question de propriété, devant son juge naturel, le tribunal civil (art. 34). »

ARRÊT.

élémentaires du délit; mais pour prononcer sur les exceptions qui peuvent en modifier le caractère, mais que, par un effet nécessaire, légal, de la division des pouvoirs, sa décision sur les exceptions se restreint au fait unique de la poursuite;-Que, conséquemment, si de nouvelles actions sont intentées, ayant pour base des faits postérieurs à l'acquittement, et par là même distincts et séparés de la première accusation, fussent-ils de même nature et la défense dût-elle invoquer les mêmes exceptions, le premier jugement n'a pas l'autorité de la chose jugée;

Considérant que ce principe général du droit criminel est expressément consacré par la loi du 5 juill. 1844; - Considérant, en effet, que par les art. 34, 37 et 46, elle a nettement marqué la distinction entre les pouvoirs des tribunaux civils et ceux des tribunaux correctionnels, quand ils sont appelés à régler les différends relatifs à l'application des brevets d'invention;-Qu'aux termes des art. 34 et 37, c'est aux tribunaux civils qu'est exclusivement réservée la connaissance des questions qui s'engagent sur la déchéance, la nullité, la propriété des brevets, et que, selon les cas et l'attitude que prend le ministère public dans la discussion, ils peuvent non-seulement statuer entre les parties au procès, mais prononcer la déchéance absolue; Que, lorsqu'il s'agit au contraire d'un délit de contrefaçon, l'art. 46 se borne à dire que le tribunal correctionnel statuera sur les exceptions tirées par le prévenu, soit de la déchéance ou de la nullité, soit de la propriété du brevet; - Qu'il ressort de cette disposition que l'exception, quelle qu'elle soit, n'est qu'un moyen de défense; qu'elle se lie comme élément de solution à la poursuite, et que la décision renfermée dans le cercle du débat, l'existence ou la non-existence du délit, ne peut s'étendre aux faits à venir;-Que, s'il en pouvait être autrement, la condition des inventeurs serait singulièrement sacrifiée; - Considérant, en effet, qu'il n'est ni contesté, ni contestable, que le prévenu de contrefaçon qui a succombé dans les exceptions de déchéance et de nullité pent porter devant la juridiction civile une action directe tendant aux mêmes fins et renouveConsidérant que la portée de cette décision, lant le débat épuisé sur un fait spécial, conen quelques termes qu'elle soit conçue, est tester la validité des brevets ;- Qu'à plus forte déterminée par l'art. 360, Cod. inst. crim.;- raison faut il admettre que, lorsque l'inventeur Considérant, en effet, que les délits dont la a échoué dans une poursuite correctionnelle, répression est déférée aux tribunaux correc-il peut, à l'occasion de faits postérieurs, exertionnels, résultant de faits consommés, l'appréciation du juge est limitée par l'objet de la poursuite; Que si, dans l'intérêt d'une prompte répression ou pour laisser toute latitude à la défense, la compétence du juge correctionnel, en certains cas déterminés, s'étend à des questions de droit civil, en dehors de sa juridiction, c'est que, naissant de l'instruction, elles se lient intimement au débat, et que le juge de l'action a qualité non-seu

LA COUR;-En ce qui touche l'exception de chose jugée: -Considérant que les poursuites dirigées en 1851 contre Crespel-Dellisse n'avaient d'autre objet que les quatre turbines saisies dans ses ateliers et à raison desquelles la société Seyrig demandait contre lui l'application de la loi sur la contrefaçon ;-Considérant qu'en réponse à ces poursuites Crespel opposa, comme fin de non-recevoir, la nullité et la déchéance des brevets sur lesquels elles étaient basées, et que, par arrêt du 25 fév. 1853, la Cour de Paris, chambre des appels de police correctionnelle, adoptant les conclusions de la défense, déclara nuls ou déchus les brevets en question et renvoya Crespel des fins de la prévention dirigée contre lui;

cer son droit devant les tribunaux civils;Qu'il suit, de ce qui précède, que le dispositif de l'arrêt du 25 fév. 1853, limité par l'attribution du juge, n'a pu avoir d'autre conséquence juridique que d'exonérer Crespel des poursuites dont il était l'objet à cette époque; Qu'ainsi, l'exception de la chose jugée ne pouvait être opposée, ni par lui, ni par son cessionnaire Leyvratz et comp., à l'action intentée pour faits nouveaux devant la juridiction civile;

Au fond :... motifs étendus, la réalité de l'invention des demandeurs et la validité des brevets par eux obtenus; puis elle statue en ces termes :) - A mis et met l'appellation et le jugement dont est appel au néant; émendant, décharge les appelants des condamnations contre eux prononcées; rejette l'exception de chose jugée invoquée; et faisant droit au fond, condam

ne, etc.

Du 4 janv. 1838.-Cour. imp. de Paris.Aud. solenn. Prés., M. Delangle, p. p. Concl. conf., M. de Vallée, av. gén.-Pl., MM. Senard et Hébert.

CHEMIN DE FER. — Perte d'effetS.-RES

PONSABILITÉ.

Les compagnies des chemins de fer sont responsables, en cas de perte des malles ou bagages d'un voyageur, non-seulement des effets que contenaient les malles perdues, mais encore des sommes d'argent qui y étaient renfermées, alors même que le voyageur n'a fait aucune déclaration de l'existence de ces valeurs, si d'ailleurs elles n'étaient qu'en proportion avec les besoins présumés du voyage. (Cod. Nap., 1782 et suiv.) (1)

|

(La Cour apprécie ici, dans des I pu en éprouver, lui ont causé un préjudice dont la compagnie doit la réparation, préjudice que le tribunal est en mesure d'apprécier; -Attendu que Branchereau n'a pas déclaré, en faisant enregistrer sa malle, qu'elle contenait, avec ses effets, une somme de 400 fr. en or et une autre somme de 900 fr. en billets de banque, objets soumis à un tarif exceptionnel;-Que cette circonstance, en privant la compagnie du prix porté au tarif spécial, ne lui a pas permis de prendre des soins proportionnés à la valeur des objets précieux qui lui étaient confiés;-Attendu que les conditions et le prix des transports par les chemins de fer sont réglés et tarifés par des décisions ministérielles ; que, notamment l'argent et les bijoux, les pierres précieuses et autres valeurs sont l'objet d'un tarif spécial, soumis annuellement à l'approbation du ministre des travaux publics;-Que les conditions et les tarifs approuvés sont obligatoires pour les compagnies comme pour les particuliers;-Attendu que la compagnie fait offre au demandeur de lui rembourser, sur sa déclaration, 214 fr. pour la valeur des vêtements et autres objets contenus dans la malle perdue, mais qu'elle décline sa responsabilité quant à (Branchereau-C. Chemin de fer d'Orléans.) la somme de 1,300 fr. que Branchereau affirme Le 24 août dernier l'abbé Branchereau prit y avoir mise en or et en billets de banque; le train express pour se rendre d'Angers à-Juge la compagnie de son offre (sic) de lui Saumur. Il était porteur d'une petite malle en cuir qu'il fit enregistrer comme bagages. I ne fit pas déclaration des valeurs contenues dans cette malle et qui s'élevaient en espèces et en billets à 1,300 fr., et ne paya pas, dès lors, la prime fixée par le tarif spécial pour transport d'argent.-Lorsque le convoi arriva à Saumur, la malle avait disparu et il fut impossible de la retrouver.-L'abbé Branchereau forma aussitôt contre la compagnie du chemin de fer d'Orléans, une action en responsabilité, afin d'obtenir contre elle condamnation au paiement de la somme de 1514 fr. représentant la valeur de la malle perdue, en effets, espèces et billets, et en 500 fr. de dommages

intérêts.

30 nov. 1857, jugement du tribunal de commerce d'Angers ainsi conçu -« Attendu que la compagnie du chemin de fer d'Orléans n'a pas remis à Branchereau le 24 août 1857, à son arrivée à Saumur, la malle de cuir qu'il avait fait enregistrer à Angers, comme bagages, pour partir par le même train que lui; -Que la perte des effets qu'elle contenait et les entraves que ses affaires ou ses projets ont

(4) La Cour impériale de Paris s'est récemment pronoucée dans le même sens, par un arrêt du 24 nov. 1857 (Vol. 1857.2.759).-Mais il en serait autrement, d'après l'arrêt ci-dessus lui-même et d'après un autre arrêt de Paris, du 10 avr. 1854 (Vol. 1854.2.343-P. 1854.2.586), si le silence du voyageur sur le contenu de sa malle avait eu lieu dans la vue de se soustraire au paiement du tarif plus élevé auquel auraient été soumises les valeurs qu'elle renfermait.

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payer la somme de 214 fr. pour la valeur de la malle et des effets qu'elle contenait; Condamne la compagnie à payer à Branchereau 150 fr. à titre de dommages-intérêts ;Dit que les dépens feront masse, pour être supportés par moitié. » — Appel par l'abbé Branchereau.

ARRÊT.

LA COUR;-En ce qui touche la valeur des effets à l'usage personnel de l'abbé Branchereau et le montant des dommages-intérêts :— Considérant que la restitution de la valeur desdits effets n'est pas contestée et que les dommages-intérêts ont été appréciés dans une juste mesure;

En ce qui touche la somme de 1,300 fr. en or et en billets de banque, contenue dans la malle perdue et réclamée par l'abbé BranConsidérant qu'aux termes des chereau; art. 103, Cod. comm., des art. 1782 et 1784, Cod. Nap., les voituriers et entrepreneurs de transports sont responsables de la perte des effets qui leur sont confiés, et assujettis, comme dépositaires nécessaires, aux obligations imposées par la loi pour la garde et la conservation de ces effets et marchandises;

Considérant que cette responsabilité s'applique aux entreprises de chemins de fer, notamment en ce qui concerne les bagages des voyageurs, lesquels, par les nécessités mêmes de ce mode de transport, se trouvent placés dans l'impossibilité d'exercer sur ces bagages aucune surveillance personnelle ;- Considérant qu'il est à la fois conforme à la raison et à un usage constant de comprendre dans les

et entier effet; dit qu'il a été mal jugé par le jugement dont est appel au chef qui a rejeté la demande de l'abbé Branchereau, tendant à obtenir le remboursement des 1,300 fr. placés dans sa maile; émendant quant à ce, condamne le directeur de la compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans, à payer à l'abbé Branchereau la somme de 1,300 fr., avec intérêts au taux légal à partir du jour de la demande, etc.

Du 20 janv. 1858.-Cour imp. d'Angers.Pres., M. Valleton, 1" prés. Concl. conf., M. de Bigorie, 1 av. gén.-Pl., MM. Affichard · et Bellanger fils.

1° AVOUÉ,

TION.

-

RESPONSABILITÉ,

2o DEPENS.-PLUS-PÉTITION.

PEREMP

1o Les avoués sont responsables des suites de la péremption d'instance que, par oubli ou négligence, ils laissent s'accomplir au préjudice de leur client. (C. proc., 397 et 1031; C. Nap., 1383.)

20 La plus-pétition ou l'exagération de la demande ne peut, à elle seule, servir de base à une condamnation du demandeur aux dépens. (Cod. proc., 130.) (1)

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effets d'un voyageur, non-seulement les effets | le jugement dont est appel sortira son plein à son usage personnel, suivant son sexe et sa condition, mais encore la somme qui lui est indispensable pour ses besoins en voyage et qui doit en être considérée comme l'accessoire-Considérant que les tarifs invoqués par la compagnie d'Orléans ne pouvaient faire disparaître la responsabilité qui lui est imposée par les articles précités du Code de commerce et du Code Napoléon; que ces tarifs sont obligatoires pour tous lorsqu'il s'agit du transport d'objets ou de valeurs, soumis à des taxes exceptionnelles, mais qu'ils ne pourraient constituer pour le voyageur l'obligation de faire, quant aux bagages qu'il transporte avec lui, des déclarations ou de se soumettre à des vérifications, qui créeraient le plus souvent des obstacles insurmontables, sauf néanmoins, quant à la responsabilité de la compagnie, le cas où, frauduleusement, et pour les soustraire au tarif, des valeurs et objets soumis à la taxe exceptionnelle, auraient été abusivement compris par le voyageur dans ses bagages, et l'appréciation qui, alors, et en cas de perte, devrait être faite par les tribunaux, en raison de la fraude où de la faute imputable au voyageur; Considérant qu'il est établi par les faits et documents du procès et que d'ailleurs il n'est pas contesté que l'abbé Branchereau, supérieur du collége de Chollet, aurait, le 24 août dernier, reçu à Angers, une somme de 2,000 fr.; qu'après avoir payé 1,000 fr. à un libraire de cette ville, il aurait placé dans une malle de voyage, où déjà se trouvait une somme de 300 fr. les 1,000 fr. qui lui restaient; qu'il aurait le même jour pris le train express pour commencer un voyage dans le midi, en s'arrêtant d'abord à Saumur, destination pour laquelle un billet lui avait été délivré; que dans le trajet d'une heure à peine et pour ainsi dire sans stations intermédiaires, la malle de l'abbé Branchereau a disparu et n'a pu être retrouvée, malgré ses réclamations et les recherches de la compagnie;-Considérant que la somme de 1,300 fr. qu'emportait ainsi l'abbé Branchereau pour ses dépenses d'un voyage de vacances qui devait le conduire à Toulouse et durer plus d'un mois, n'est nullement exagérée et en dehors de cette proportion raisonnable qui en fait l'accessoire indispensable du voyage, au même titre que les bagages du voyageur;-Qu'on ne saurait admettre que l'abbé Branchereau ait voulu soustraire au tarif exceptionnel la somme qu'il emportait, ni qu'il ait commis une faute ou une imprudence en plaçant dans sa malle une majeure partie de l'argent nécessaire à (1) La décision, en un tel cas, dépend tout à fait son voyage, la surveillance imposée à la comdes circonstances, dont les juges sont appréciateurs pagnie et sa responsabilité en cas de perte se souverains. V. Table générale Devill. et Gilb., vo trouvant assurées et offrant à l'abbé Branche- Dépens, n. 6 et suiv.-C'est d'ailleurs un point constant que les juges ont un pouvoir discrétionnaire reau toute sécurité ; Par ces motifs, conpour faire, entre les parties qui succombent respecfirme la décision des premiers juges quant àvement, la répartition des dépens, sans que leur la somme de 214 fr. pour valeurs des effets contenus en la malle et à celle de 150 fr. pour dommages et intérêts; ordonne qu'à cet égard,

--

(Rossi-C. veuve Andrei.)-ARRÊT. LA COUR ; Considérant que la condamnation prononcée contre Rossi a pour but un oubli ou une négligence qui, sans porter aucune atteinte à son honneur ou à sa délicatesse professionnelle, engageait hautement sa responsabilité;-Considerant que le premier juge a sagement apprécié la nature du mandat qui lie l'avoué à son client, et les conséquences qui en résultent; Considérant, en effet, qu'il est de principe que la remise d'un dossier à un avoué et son acceptation impliquent, d'une part le mandat, et de l'autre l'obligation d'agir en justice pour la partie Considérant qui a effectué cette remise; que l'officier ministériel, détenteur des pièces, est tenu de veiller diligemment à la conserva tion des biens de son client;-Que le premier de ses devoirs est de ne pas laisser tomber l'instance en péremption, à moins qu'il n'ait été autorisé à abandonner les poursuites; Considéraut qu'une semblable autorisation, qui, d'ailleurs, ne se présume pas, doit être expressément prouvée-Que, dans l'espèce, il n'est nullement établi que les défendeurs à

décision à cet égard puisse donner ouverture à cassation: V. ibid., n. 89; adde Cass. 4 avr. 1855 (Vol. 1855.1.668).

la demande en péremption eussent fait connaître à Me Rossi qu'il eût à s'abstenir de tout acte de poursuite; - Que la remise de 40 fr. avant que la péremption ne fût aequise, témoigne d'une intention contraire;-Que, par conséquent, c'est à bon droit que le tribunal de première instance a déclaré M° Rossi responsable des suites de la péremption envers les parties dont il avait accepté la défense;

---

En ce qui concerne l'appel incident :-Sur la condamnation des intimés aux tiers des dépens de première instance; Considérant que la plus-pétition ou l'exagération de la demande n'est point interdite sous notre législation, et qu'elle ne peut à elle seule servir de base à une condamnation aux dépens; Par ces motifs, a démis et démet le sieur Rossi de son appel principal, et disant droit, au contraire, à l'appel incident des parties de Campana;-Infirme la disposition du jugement qui mettait à la charge des sieurs et dames Andrei, intimés, le tiers des dépens de première instance, etc.

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Du 10 nov. 1857.-Cour imp. de Bastia.
Prés., M. Calmètes, 1er prés. Concl., M.
Bertrand, 1er av. gén.-Pl., MM. Rossi et
Lapidi.
CAUTION.

PAIEMENT.

ACTION.

REMBOURSEMENT.

La caution qui a payé, sur les poursuites dirigées contre elle par le créancier, une dette que le débiteur principal avait lui-même payée antérieurement, a une action en remboursement contre ce dernier, dans le cas où il avait omis de donner avis à la caution du paiement effectué par lui. (Cod. Nap., 2031.) (Laizon-C. Farge.)-ARRET.

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LA COUR;- Considérant que Laizon demande à Farge le paiement de deux sommes, Pune de 712 fr. 50 cent., l'autre de 1140 fr., qu'il aurait payées comme fidejusseur de celui-ci; Considérant que Farge justifie que les deux dettes avaient été payées par lui deux ans environ avant les paiements que le fidéjusseur, circonvenu par les créanciers, en aurait fait une seconde fois; Que la question est de savoir si les derniers paiements effectués par Laizon, malgré l'extinction des deux dettes, autorisent, de sa part, comme fidėjusseur, un recours contre Farge, qui avait été débiteur principal;-Qu'il imporie de distinguer, à ce sujet, les deux sommes payées par Laizon; Considérant, quant à la somme de 712 fr. 50 cent., payée à un sieur Bès, que Laizou a fait ce paiement, sans avoir été poursuivi et sans avoir averti le débiteur principal; que, dès lors, conformément au 20 alinéa de l'art. 2031, C. Nap., il était privé de tout recours contre Farge, qui avait déjà éteint la dette; qu'il doit s'imputer d'avoir, spontanément et sans nécessité, payé une dette constituée par une lettre de change venue depuis huit années à échéance, sans avoir prévenu le débiteur primitif et sans s'être assuré près de

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celui-ci, si la dette était encore existante ;-
Considérant, relativement à la somme de
1140 fr., payée à Montel, que Laizon n'a fait
ce paiement qu'après des poursuites exercées
contre lui, en sa qualité de caution, par le
créancier;-Que, dès lors, le deuxième alinéa
de l'art. 2031 lui est inapplicable; — Qu'à la
vérité, la créance primitive était alors éteinte
et avait entraîné l'extinction de l'obligation
accessoire du cautionnement; qu'ainsi Laizon,
en payant, une seconde fois, comme fidéjus-
seur, Montel, créancier de mauvaise foi, n'a
pas fait utilement l'affaire de Farge, et, sous
ce rapport, ne pourrait avoir contre ce der-
nier l'action mandati contraria, dérivant du
cautionnement;
Mais que Farge était en
faute de n'avoir pas averti son fidejusseur du
paiement de la dette; que son obligation à cet
égard était corrélative à celle imposée par le
premier alinéa de l'art. 2031 au fidejusseur,
quand celui-ci effectue le paiement; que c'est
la faute consistant dans un défaut d'avis de
Farge, qui a occasionné le paiement fait par
Laizon à Montel, dans l'ignorance de l'ex-
tinction de la dette; que Laizon a eu juste
motif de payer comme fidejusseur pour échap-
per à des poursuites dirigées contre lui par
le créancier; que, d'après les règles du man-
dat, le mandant doit indemniser le mandataire
des préjudices que celui-ci a éprouvés à l'oc-
casion de sa gestion, sans imprudence qui lui
soit imputable (art. 2000, Cod. Nap.); el que,
par conséquent, Laizon est fondé à exercer
contre Farge l'action mandati contraria,
pour se faire indemniser du paiement indu,
occasionné dans la suite du contrat de fidé-
jusseur par une faute du débiteur principal;...
-Par ces motifs, etc.

ch.

Du 14 mai 1857.-Cour imp. de Lyon.-1" Pres., M. Gilardin, p. p.-Concl., M. Fortoul.-P., MM. Frappet et Turge.

CESSION DE BIENS.-CAUTION.-LIBERATION.

-ACTION.

La cession volontaire de tous ses biens faite par un commerçant, après cessation de paiements, au profit de ses créanciers, qui l'ont acceptée, mais seulement jusqu'à retour à meilleure fortune, ne libère pas ses cautions, et ne suspend même pas l'action des créanciers contre elles. (C. Nap., 1270, 1287; C. comm., 541, 545.) (1)

(1) Cette décision ne laisse pas de faire difficulté, en ce qu'elle applique à une cession de biens volontaire, librement acceptée par les créanciers en dehors du cas de faillite déclarée, les règles tout exceptionnelles du concordat, à l'égard des cautions ou coobligés du failli (C, comm., 545); elle a du reste été, de la part des rédacteurs du Recueil de jurisp. de la Cour de Douai (1857, p. 340), l'objet d'observations critiques fort judicieuses, que nous leur empruntons ici.- La cession de biens, y est-il dit, n'est pas permise au commerçant failli (Cod. comm., art, 541); mais cela s'entend de la cession de biens ju

termes :

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(Delecambre-C. Licson.) Le tribunal de Lille l'avait ainsi décidé par un jugement du 29 août 1856, conçu en ces «< Attendu qu'Emile et Elise Delecambre ont cautionné jusqu'à concurrence de 20,000 fr. un crédit ouvert à Louis, leur frère, chez Licson, son banquier;-Attendu que durant ce cautionnement Louis Delecambre, qui réunissait toutes les conditions de l'état de faillite, bien que celle-ci n'ait pas été déclarée, assembla ses créanciers, les initia à sa situation et les amena à accepter l'abandonnement de tout son actif, qu'ils réalisèrent, et dont ils firent la répartition proportionnelle aux droits de chacun; Que celle-ci opérée et les ressources généralement quelconques alors offertes par le failli ayant été ainsi discutées et épuisées, Licson demeura son créancier d'une somme supérieure encore aux 20,000 fr., objet | du cautionnement dont il a été parlé et qui avait été contracté justement pour conjurer cette éventualité ; Attendu qu'un tel abandonnement, qui n'est autre chose qu'une véritable cession de biens, conserva les caractères et ne produisit que les effets que lui attribue la loi (art. 1270, Cod. Nap.), c'est-à-dire ne fut libératoire que jusqu'à concurrence des biens abandonnés; - Attendu que moyennant cet abandonnement total, tous les créanciers indistinctement consentirent à libérer leur débiteur du surplus de la dette envers chacun d'eux jusqu'à son retour à une meilleure fortune;-Attendu que ce pacte qui, par cela seul qu'il a nécessairement réuni l'adhésion unanime des créanciers, ne saurait être inférieur en rien au concordat judiciaire, à raison de la plénitude des garanties qu'il offre, ne consacre qu'un pur atermoiement, en ce qu'il ne fait que s'approprier et pour ainsi dire dans les mêmes termes, les dispositions du droit commun en matière de cession de biens, ainsi que

diciaire seulement (C. rej. 18 avr. 1849, S-V. 49. 1.497; Massé, Dr. comm., tom: 5, n. 277). Le commerçant, avant et même après faillite, peut faire arrangement amiable avec ses créanciers: la cession de biens volontaire lui est permise, cela n'est pas douteux, et se met en pratique tous les jours. Le traité amiable fait entre le commerçant et l'unanimité de ses créanciers a la force de tous les contrats. Mais quels sont les effets de ce pacte vis-à-vis des cautions? Comme dans le cas de concordat, les cautions resteront-elles obligées envers les créanciers? L'arrêt que nous rapportons répond à cette question d'une manière affirmative, et le jugement dont il adopte les motifs s'appuie principalement sur ce que 1° ce pacte a les caractères de la cession de biens judiciaire (Cod. Nap., art. 1270); 2° il est le résultat fatal d'une situation en vue de laquelle le cautionnement est intervenu. On peut répondre au premier motif que, pour tout commerçant, la cession de biens judiciaire est devenue le concordat, qui ne peut être obtenu qu'avec l'accomplissement des formalités prescrites par le Code de commerce. Or, le traité amiable qui se passe de ces formalités est autre chose que le concordat et ne peut y être assi

l'atteste le paragraphe final dudit art. 1270, Cod. Nap., - Attendu que si une remise est faite par les créanciers, remise consentie à titre de considération personnelle en faveur du débiteur principal et qui n'a d'ailleurs fait aucun grief à ses fidéjusseurs, c'est celle des intérêts de leurs créances qui, à partir de certaines époques, devait cesser de courir ;-Que la remise de cet accessoire serait au besoin la consécration nouvelle de la rétention du principal, c'est-à-dire du capital des créances sur lequel a porté l'atermoiement; que ce capital est dû pour tout ce qui n'a point été acquitté par les répartitions provenant de l'actif réalisé du débiteur, non-seulement au point de vue de l'obligation naturelle, mais même par rapport à son obligation civile, dont l'exécution se trouve simplement suspendue ;-Attendu qu'il est de principe que l'une comme l'autre de ces obligations peuvent servir de fondement à celle des cautions (Pothier, Obligations, no 381);-Attendu que l'absence de la remise de la dette principale qui vient d'ètre établie en fait, suffirait seule à justifier en droit le rejet de l'exception de déchéance de tout recours contre eux, dont Emile et Elise Delecambre excipent contre Licson par invocation de l'art. 1287, Cod. Nap., qui n'a point d'application à la cause ;-Attendu d'ailleurs que dût-on voir une remise non-seulement du terme de paiement, mais encore d'une portion quelconque de la dette dans l'atermoiement consenti par Licson, ainsi que par tous les autres créanciers agissant de concert avec lui, il faudrait décider encore que l'exception de déchéance invoquée par les fidéjusseurs serait mal fondée en ce que, ainsi qu'on l'a vu, cette remise, bien que conventionnelle, n'avait rien eu de volontaire et ne serait que le résultat fatal d'une situation en vue de laquelle le cautionnement est précisément intervenu; Attendu qu'il est en

milé. On peut dire pour le second, qu'aucun contrat n'est présumé s'accomplir sans l'intervention de la volonté libre des contractants. Ou il faut attribuer à l'atermoiement ou traité amiable qui se fait avec le consentement de tous les créanciers le caractère de toute convention, ou il faut lui donner ceux du concordat, ce qui est impossible. La solution de l'arrêt ne nous paraît donc pas inattaquable au point de vue des principes. La Cour de Douai, par un arrêt du 19 juill. 1843 (Delaire C. Dibos) qui n'est rapporté que dans notre recueil (Jurisp., 1, 355), avait jugé dans un sens contraire à cette décision. Elle avait surtout considéré que la caution qui est obligée de payer la totalité de la dette dans le cas de concordat, malgré la réduction consentie par la majorité des créanciers, trouve dans les précautions et les garanties dont la formation du concordat est environnée, l'assurance que rien n'a été fait au préjudice de ses droits; tandis que, dans le cas de la remise conventionnelle, cette remise est volontaire et la caution se verrait à la merci du créancier, si elle ne profitait pas des remises qu'il accorde au débiteur principal, »

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