offre plus d'intention de gaieté que d'esprit et de poésie : LE VOYAGE DE PROVINS. AIR: Un jour de cet automne. Un soir de cet automne, De Provins revenant... Quoi! sur l'air de la Nonne, AIR Des folies d'Espagne. Peuple français, écoutez-moi sans rire, AIR: Des guillotinés, ci-devant, Des pendus. Gravissant rochers et montagnés, AIR: Malbroug s'en va-t-en guerre. Enfin, sans perdre haleine, Mironton, mironton, mirontaine, La fortune inhumaine Me conduit à Provins (bis). O honte, affreux destin! Lequel d'un ton brutal, AIR: De la Carmagnole. Dit Citoyen, vous avez tort (bis), Il vous faut aujourd'hui Coucher dans notre geôle, Comme un larron (bis), Coucher dans notre geôle Comme un larron AIR: Des Marseillais. Malgré votre habit sans culotte, Dans le violon, sauf votre respect. Entendez-vous dans la cuisine On vous a jugé sur la mine; AIR: Que ne suis-je la fougère. Hélas! voudrait-on le croire? AIR: On doit soixante mille francs. Dans un mauvais cabriolet Entre mes deux gendarmes (bis) 1. V Voilà toute la gaieté et tout l'esprit de la Gironde, en face du danger suprême. Ducos résuma en lui ce 1 Mercier, Almanach des prisons, p. 50 à 62. qu'elle avait de ferme, d'insouciant et de viril. Parmi les autres Girondins, les meilleurs ne purent s'élever qu'au courage vulgaire du suicide. Petion et Buzot, traqués de retraite en retraite par les Comités révolutionnaires de Bordeaux, prirent du poison et furent trouvés dans un champ, à moitié putréfiés. Barbaroux, surpris dans sa retraite, se tira deux coups de pistolet et fut porté mourant sur l'échafaud. Vergniaud, qui s'était muni de poison, le jeta, n'ayant pas voulu ou n'ayant pas osé le prendre 1. Valazé, qui avait remis une paire de ciseaux à Riouffe avant de monter au tribunal révolutionnaire, avait conservé un couteau avec lequel il se tua à la dernière audience, ce qui n'empêcha pas Fouquier-Tinville de requérir que le corps mort fût conduit sur une charrette à la place de la Révolution 2. Louvet, dans le récit fort curieux qu'il publia sur sa fuite et sur ses tribulations, se représente comme perpétuellement armé d'une formidable espingole, dont la gueule était appliquée sur son front à tout danger sérieux, et il avait pris la précaution de composer son hymne de mort sur l'air de Veillons au salut de l'Empire! 1 << Vergniaud jeta du poison qu'il avait conservé, et préféra << de mourir avec ses collègues. » (Riouffe, Mémoires d'un détenu, p. 62) 2 Bulletin du Tribunal révolutionnaire, 2e partie, n. 64, p. 255. Des vils oppresseurs de la France Ils sont vainqueurs, et leur vengeance Liberté ! liberté ! reçois donc mon dernier hommage! « Je voulais, dit Louvet, si je tombais aux mains de mes ennemis, le chanter en allant à l'échafaud. »> Cependant la préférence qu'il donnait à la mort sur l'esclavage ne l'empêcha pas de se tenir soigneusement tapi dans une cachette où son amante Lodoïska l'avait maçonné de ses mains . Lidon, trahi à Brives, sa patrie, par un ami auquel il avait secrètement demandé un cheval, et qui, au lieu d'un cheval, lui envoya deux brigades de gendarmerie, se défendit en désespéré et tua trois gendarmes, avant de se tuer lui-même 3. 1 Louvet, Récit de mes périls, p. 91. Les jolies mains de ma Lodoïska, ses délicates mains, n'avaient jamais, comme vous le pensez bien, manié le rabot, ni les clous, ni le plâtre; pourtant, en cinq jours, elle acheva seule, sans mon secours, car mon myopisme me rendait absulument inhabile à cet apprentissage; elle acheva un ouvrage en menuiserie maçonnée, d'un plan si parfaitement conçu et si artistement imaginé, qu'un tel coup d'essai eût passé pour le chef-d'œuvre d'un maitre. A moins qu'on ne fût sûr qu'il y avait quelqu'un dans cette boîte, qui paraissait un mur, je défais le plus habile de me trouver là.» (Louvet, Récit de mes périls. p. 167.) 9 Louvet, Récit de mes périls, p. 153. |