Page images
PDF
EPUB

de l'intérieur; Buzot, député de l'Eure; Barbaroux, député des Bouches-du-Rhône; Salles, député de la Meurthe; Isnard, député du Var; Fauchet, député du Calvados; Carra, député de Saône-et-Loire; Lasource, député du Tarn; Sillery, député de la Somme; Gorsas, député de Seine-et-Oise, et Meillan, député des Basses-Pyrénées.

Deux journalistes, étrangers à la Convention, se faisaient remarquer dans leurs rangs; c'étaient : Girey-Dupré et Marchena.

Dix-huit autres Girondins méritent encore d'être nommés, parce qu'ils périrent sur l'échafaud ou se tuèrent de leur propre main, victimes des principes révolutionnaires qu'ils avaient déchaînés. C'étaient : Lauze-Duperret, Duprat et Mainvielle, députés des Bouches-du-Rhône; Gardien, député d'Indre-etLoire; Dufriche-Valazé, député de l'Orne; LesterptBeauvais, député de la Haute-Vienne; Duchâtel, député des Deux-Sèvres; Lehardy, député du Morbihan; Boileau, député de l'Yonne; Antiboul, député du Var; Vigée, député de Maine-et-Loire ; Cussy, député du Calvados; Valady, député de l'Aveyron; Lidon et Chambon, députés de la Corrèze; Biroteau, député des Pyrénées-Orientales; Rabaud Saint-Étienne, député de l'Aube, et enfin la belle et malheureuse madame Roland.

IV

On ne saurait donner un spectacle plus triste, plus honteux et plus navrant que celui qu'ils offrirent à la France lorsque, vaincus par les Montagnards, ils eurent à exposer et à défendre leurs principes et leur conduite devant le tribunal révolutionnaire, durant leur célèbre procès, commencé le 24 octobre 1793 et terminé le 30. Tout passionné et violent qu'il fût, l'acte d'accusation, dressé par Amar, au nom du Comité de sûreté générale, les accabla moins qu'ils ne s'accablèrent eux-mêmes. Désaveux, dénonciations, reproches, injures, ils se prodiguèrent tout, avec violence et avec cynisme.

L'acte d'accusation lu, et Pache, le premier témoin à charge, entendu, les vingt et un Girondins, présents à l'audience, commencèrent par rejeter tous les faits graves sur leurs amis absents, Roland, Petion, Barbaroux, Louvet.

« Les accusés, interpellés de répondre, aucun des

1 Quoique le procès des Girondins porte habituellement dans l'histoire le nom de Procès des Vingt-Deux, il n'y avait que vingt et un accusés présents à l'audience, savoir: Brissot, Vergniaud, Gensonné, Lauze-Duperret, Carra, Gardien, DufricheValaze, Duprat, Sillery, Fauchet; Ducos, Boyer - Fonfrède, Lasource, Lesterpt-Beauvais, Duchâtel, Mainvielle, Lacaze, Lehardy, Boileau, Antiboul et Vigée. Bulletin du Tribunal révclutionnaire, 2e partie, n. 64.

prévenus ne nie que le parti ne soit coupable de ces faits; mais plusieurs avancent qu'ils n'y ont pas pris part individuellement. Ils s'accordent à rejeter les fautes les plus graves sur leurs complices contumaces, tels que Guadet, Barbaroux, etc. 1. »

Interrogé sur ses liaisons avec les Girondins, ses collègues, assis près de lui au tribunal, Vigée les renie et déclare n'en connaître aucun particulièrement 2.

Interrogé sur ses doctrines, qu'il a défendues en commun avec les Girondins, Boileau se déclare franc Montagnard: « Je ne sortais pas, dit-il, j'ignorais ce qui se passait; j'étais placé entre deux écueils; je voulais, comme la Montagne, toute la liberté... j'avais, ainsi que la Montagne, voté la mort du tyran, et si j'ai quelquefois été opposé aux patriotes qui la composent, je suis maintenant désabusé sur son compte et à présent franc Montagnard'. »

Cette odieuse et inutile lâcheté était écrite; Boileau la lut mot à mot, de crainte de ne pas s'abaisser assez en improvisant. Cependant Boileau ne connaissait pas toutes ses ressources en ce genre; car, à une audience suivante, Léonard Bourdon apporta une lettre dans laquelle Boileau, en le priant de le

1 Bulletin du Tribunal révolutionnaire, 2e partie, n. 40, p. 161. Ibid., 2 partie, n 41, p. 161.

3 Ibid.

défendre devant le tribunal, accusait ainsi ses collègues : « J'ai été un moment dans l'erreur, mais à présent que le bandeau est tombé de mes yeux et que je sais où siége la vérité, je déclare que je suis Montagnard.

« Il est clair à mes yeux qu'il a existé une conspiration contre l'unité de la république, comme il est clair que les Jacobins ont toujours servi la république. Pour finir, je reconnais que tant que le côté droit aurait été en force, il aurait paralysé les mesures les plus vigoureuses 1. >>

Après la lecture de cette honteuse lettre, le président Herman dit à Boileau: « Nommez, Boileau, ceux d'entre les accusés que vous avez entendu désigner dans votre lettre. Je n'ai entendu accuser personne, répondit Boileau, dominé par un reste de pudeur bientôt évanouie; j'ai cherché la vérité, je l'ai trouvée parmi les Jacobins et je suis maintenant Jacobin. » Et pour mettre le comble à cette faiblesse, qui ne pouvait même pas le sauver, ce Girondin avoua que le monstre qui avait tranché les jours de Marat avait été vomi par le côté droit, et que c'était cet événement qui l'avait éclairé 2.

Interrogé sur ses relations avec Petion, son ancien collègue à l'Assemblée constituante et son collègue actuel à la Convention, Sillery répond qu'il n'était

1 Bulletin du Tribunal révolutionnaire, 2a partie, n. 60, p. 238. 2 Ibid., p. 239.

pas intimement lié avec lui jusqu'à la fin de 1791, et qu'il ne l'a pas vu depuis la fin de 1792. Et comme Fouquier-Tinville lisait une lettre intime de Petion, dans laquelle il s'applaudissait du retour de madame de Genlis, qu'il avait accompagnée en Angleterre, Sillery, pris au piége de sa dissimulation, répondait: « Il est vrai que le citoyen Petion a accompagné mon épouse en Angleterre ; mais à son arrivée à Londres, ils se sont séparés 1. »

Interrogé sur ses relations avec Roland, dont il était l'intime ami, le commensal et le directeur, Brissot répond: « Je le regarde comme un homme pur, mais qui peut avoir erré dans son opinion. »

Interrogé sur ses relations avec Brissot et Gensonné, avec lesquels il avait, le 10 août, ajourné et combattu la déchéance de Louis XVI, Vergniaud se défend d'avoir eu des intimités avec Brissot et Gensonné. Il répond ainsi au reproche de s'être obstinément opposé à la déchéance 3, quand on pouvait la décréter *.

1 Bulletin du Tribunal révolutionnaire, 2 partie, n. 63, p. 251. 2 Ibid., 2o partie, n. 46, p. 182.

3 Vergniaud était si bien opposé à la déchéance, qu'il répondit en ces termes aux pétitionnaires qui la demandaient: « Les représentants du peuple ont fait tout ce que leur permettaient de faire les pouvoirs qui leur ont été délégués, quand ils ont arrêté qu'il serait nommé une Convention nationale pour prononcer sur la question de la déchéance. En attendant, l'Assemblée vient de prononcer la suspension, et cette mesure doit suffire au peuple pour le rassurer contre les trahisons du chef du pouvoir exécutif. » Moniteur du 12 août 1792.)

Bulletin du Tribunal révolutionnaire, 2e partie, n. 46, p. 184.

« PreviousContinue »