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» biens, & que j'en ferai dreffer un inventaire : que je rendrai mes comptes » à temps & de la maniere prefcrite; c'est-à-dire, tous les ans, & que » je ne laifferai pas écouler plus de deux mois après l'échéance de cha» que année, fans demander qu'il foit nommé un commiffaire, & fixé » un terme pour recevoir mes comptes, lefquels je remettrai pour cet » effet : que je remettrai auffi à la juftice, tout ce qui rentrera en argent > comptant, appartenant à mon pupille, pour le garder foigneufement moi» même, après que la juftice y aura mis le fceau, ou pour le déposer au greffe, fi elle le juge à propos, jufqu'à ce qu'il puiffe être placé, de fon » confentement, à l'avantage de mon pupille: que je ne ferai pas l'acqui> fition de fes biens, foit par moi-même, foit par des perfonnes tierces. » Mais que je lui délivrerai en fon temps, tout ce qui doit lui revenir, en > rendant un compte exact de toute mon adminiftration: enfin que je me » conduirai en tout & par-tout, ainsi qu'il convient à un tuteur fidele & » honnête homme. "

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Il est inutile de rapporter maintenant toutes les obligations que la loi impose aux tuteurs. Elles font toutes renfermées fommairement dans cette formule; & c'eft un grand art au légiflateur de les y avoir inférées, parce que le tuteur ne peut plus prétexter l'ignorance des loix qu'il a lui-même enoncées. Le tuteur eft obligé de donner caution; & lorfque plufieurs tuteurs veulent gérer ensemble, ils font obligés folidairement les uns pour les autres. Le recours du pupille contre le tuteur pour mauvaise geftion, par exemple pour aliénation, dure trente ans, lefquels expirés il n'a plus rien à réclamer.

L'autorité du tuteur, entant qu'elle doit intervenir dans les actes que le pupille paffe lui-même, & que fon confentement & fa présence y eft néceffaire, appartient au tuteur gérant, & nullement au tuteur honoraire, ni au protuteur. Tout acte paffé par le pupille, fans le confentement du tuteur, eft nul & fans effet. Cependant le pupille peut être actionné dans les deux cas fuivans, lorfqu'il s'eft enrichi au préjudice d'un tiers, lorsqu'après dix ans & demi accomplis, fi c'eft un garçon, & neuf ans, fi c'eft une fille, il a frauduleufement caufé du dommage à quelqu'un.

Lorsque le tuteur n'a fait qu'interpofer fon autorité pour approuver l'acte paffé par le pupille, le pupille feul peut intenter une action ou être actionné mais forfque le tuteur contracte feul au nom du pupille, le tuteur feul peut intenter une action ou être actionné.

Le pupille a une action contre le tuteur pour lui faire rendre compte de fon adminiftration, & réparer tout le dommage qu'il peut lui avoir causé, & cette action s'appelle, action de tutelle directe. Le tuteur a de même, une action pour réclamer toutes les avances qu'il a faites à l'avantage de fon pupille, & cette action s'appelle action de tutelle contraire; le pupille obtient une action contre le protuteur, c'eft-à-dire, celui qui, n'ayant pas été nommé tuteur, n'a pas laiffé de gérer de bonne-foi. La tutelle du pu

pille, & cette action eft appellée actio pro-tutela. La loi accorde encore une action au pupille contre celui qui s'eft fait paffer frauduleufement pour fon tuteur. Cette action s'appelle, actio, quod, falfo tutore autore geftum eft. Cette action eft plus importante que les autres, car la tutelle étant une charge qui ne donne que des foins, fans produire aucun avantage pécuniaire, & qui expofe à des dangers, il eft probable que, celui qui frauduleufement a ufurpé le titre & l'autorité de tuteur, ne l'a fait que dans le deffein de s'enrichir aux dépens de fon pupille.

Les héritiers du tuteur font obligés, après fa mort, de rendre compte & de répondre des négligences du défunt, mais feulement lorfqu'il y aura de fa part ou fraude, ou faute groffiere.

Ceux qui propofent des tuteurs, foit par eux-mêmes, foit par d'autres, font fidé-juffeurs ou répondans de celui qu'ils ont propofé; il en eft de même de ceux qui ont certifié que ce tuteur étoit folvable. Lorfque le pupille ne peut être payé de ce qui lui eft dû par fon tuteur, ni par le protuteur ou les héritiers, ni par les fidé-juffeurs, ou autres répondans, ni par ceux qui, frauduleufement fe font emparés d'un bien appartenant au pupille, alors celui-ci a action contre le magiftrat qui a commis quelque imprudence dans l'établiffement du tuteur, & cette action s'appelle action de tutelle fubfidiaire.

La tutelle finit, 1o. par la puberté du pupille, lorfqu'il a atteint l'âge de quatorze ans accomplis, fi c'eft un garçon, & de douze, fi c'eft une fille, par la mort du pupille (mais dans ce cas le tuteur continuera d'adminiftrer jufqu'à ce qu'il ait rendu compte aux héritiers) par la mort du tuteur, par fa profcription, par l'échéance du temps pour lequel il a été nommé par teftament, par les moyens d'excufes légitimes, par la deftitution du tuteur fufpe&t, par le mariage de la mere, qui convole à de fecondes nôces, par accident lorfque le tuteur tombe en démence ou dans quelques autres infirmités qui le rendent incapable de gouverner fes propres affaires. enfin, par l'acte pour lequel le tuteur a été établi, lorsqu'il n'a été nommé que pour cet acte. Le tuteur, délivré de fa tutelle, n'eft point obligé d'être curateur, mais d'avertir fon pupille d'en propofer un à la justice.

Un tuteur eft fufpect, & peut être deftitué lorsqu'il manque à quelqu'un · des devoirs auxquels il s'eft obligé par ferment.

La fin de la tutelle ne permet pas au pupille d'adminiftrer fes biens, & fi c'eft par la puberté qu'elle finit, on lui donne un curateur. On en donne encore à un homme imbécille ou insensé, à un homme déclaré prodigue par fentence ou par décret, à un homme devenu muet ou fourd à un homme absent depuis long-temps, & dont la résidence eft ignorée, à des créanciers qui ont des droits fur une maffe de biens; enfin à un pupille, dont le tuteur eft devenu fon créancier, ou fon débiteur, & dans d'autres cas.

Le mari n'eft pas le curateur légitime de fa femme, quoiqu'elle foir mineure, & elle demeure fous la direction du curateur ordinaire.

L'autorité du curateur n'eft ni auffi étendue, ni auffi facrée que celle du tuteur; cependant, outre qu'on lui confie l'administration des biens, il est encore chargé de veiller fur la conduite du mineur. Ses devoirs font les mêmes; fes dangers font pareils, ainfi que fes engagemens & fes obligations. La curatelle peut finir avant le temps de la majorité par lettres de dispense d'âge émanées du prince. Mais la liberté que ces lettres accordent au mineur ne s'étend pas jufqu'à l'aliénation des immeubles. Si le mineur fe trouvoit léfé par une difpenfe d'âge obtenue contre fon gré, ou à fon infu, ou même de fon confentement, il peut la faire caffer & forcer le curateur à reprendre la curatelle.

On voit par tous ces réglemens, que le légiflateur a pris le plus grand foin de protéger l'inexpérience, & la foibleffe des pupilles, contre l'avidité & la mauvaife-foi des tuteurs & des curateurs, & que la force & là prudence de la loi, fuppléent à celles qui manquent à ces êtres abandonnés dans d'autres Etats à toute la rapacité de leurs parens.

CODE FRÉDÉRIC, ou corps de droit pour les Etats de Sa Majesté le roi de Pruffe, fondé fur la raifon & fur les conftitutions du pays, dans lequel le roi a difpofé le droit Romain dans un ordre naturel, retranché les loix étran geres, aboli les fubtilités du droit Romain, & pleinement éclairci les doutes & les difficultés, que ce même droit & fes commentaires avoient introduits dans la procédure, établiffant de cette maniere un droit certain & univerfel. Traduit de l'Allemand, par A. A. de C. conseiller-privé du roi.

:

LE E législateur traite d'abord de la divifion des chofes, & par ce mot on entend, tous les biens, dont les hommes peuvent tirer quelque ufage, de quelque nature qu'ils foient les chofes facrées tiennent le premier rang. Ce font celles qui font destinées au culte divin. Nul ne peut, fans la permiffion du fouverain, confacrer une chofe quelconque, par conféquent, élever une églife, &c. les chofes facrées font hors du commerce des hommes. Lorsqu'un particulier commet une action, qui viole la fainteté d'un temple, tout homme a contre lui l'action qu'on appelle , interdictum ne quid in loco facro fiat. Les biens appartenans aux églifes ne font point chofes facrées; & peuvent être aliénés de l'avis des perfonnes intéreffées, s'ils font meubles; par l'autorité du confiftoire, s'ils font immeubles,

Les temples, qui tombent entre les mains de l'ennemi, ceffent d'être facrés, parce qu'ils tiennent leur confécration du fouverain légitime. Les chofes facrées ne font point fujettes à la prescription,

Les chofes religieufes font les tombeaux, où les corps des morts font dépofés. On exclut de la fépulture ordinaire & honorable des citoyens, les criminels punis de mort, les fuicides, condamnés à mort. Suit un article.

que nous citerons en entier, quoiqu'il doive faire rougir les catholiques, dont l'intolérance fouvent pouffée trop loin, après avoir perfécuté pendant leur vie ceux qui ne penfent pas comme eux, leur refufe après leur mort quelques grains de pouffiere.

«Quant à ceux qui ne font d'aucune des trois religions reçues dans » l'empire, il nous paroît injufte & peu chrétien de les laiffer fans fépul»ture, ou de les faire enterrer dans des lieux où l'on ne met que des » infames. C'eft pourquoi nous voulons que leurs corps, fans en excepter » même ceux des païens, qui viendront à décéder dans nos Etats foient » enterrés dans quelque endroit du cimetiere, qui fera réfervé pour cela fans qu'il foit permis cependant de les enterrer avec les folemnités ufitées, >> telles que le fon des cloches, le chant des cantiques, &c.

» On en ufera de même par rapport aux corps des perfonnes qui s'ôte»ront la vie par mélancolie, ou dans les tranfports qui accompagnent » quelquefois les maladies ».

On ne peut, fans le confentement du fouverain, élever un tombeau dans un lieu qui n'eft pas religieux, parce que c'eft ôter un lieu, par conféquent un bien, du commerce des hommes. Nous ne citerons point toutes les autres loix concernant les morts; elles font fages, précifes, mais il nous femble plus important de nous occuper de celles qui regardent les

vivans.

On regarde encore comme chofes faintes, celles qui font conftamment destinées à l'usage public, comme les grands chemins les places, les remparts, les marchés, les portes des villes, &c. & lorfqu'on y fait quelque dommage, tout particulier a contre le délinquant l'action, ne quid in loco fancto fiat.

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, par cela

Il est encore d'autres chofes dont l'ufage eft commun & qui, par même, font hors du patrimoine du particulier, tels que l'air, la mer, les fleuves. Les oifeaux qui volent dans les airs appartiennent au roi ; les droits régaliens s'étendent jufques fur les poiffons que le roi peut feul faire pêcher le long des côtes, fur l'ambre, fur les pierres de chaux, que la mer jette fur fes bords; enfin le roi de Pruffe ne cede à fes fujets, fur la mer, que ce qui peut être inféparable de la navigation. Il en eft de même des fleuves & rivieres navigables.

On diftingue encore des chofes, dont l'ufage moins étendu appartient à une communauté, & qui ne font communes, que pour elle (tels font les pâturages, les places d'arquebufe, &c.) des chofes qui n'appartiennent à perfonne (tels que les biens vacans, les bêtes fauvages, &c.)

Quant à la divifion des chofes corporelles, & incorporelles, mobiliaires, & immobiliaires, voyez l'analyfe des commentaires de Blackstône, fur les loix Angloifes.

On acquiert un droit réel, 1o. par la propriété 3o. par le moyen de la fervitude, 4°. par l'hypotheque.

2o. par l'hérédité,

La

La propriété générale, n'eft autre, que celle du fouverain fur les chofes, qui n'ont point de maître. La propriété particuliere, eft celle du particulier, fur ce qui lui appartient en propre. La propriété eft directe lorfqu'on accorde à un autre la jouiffance d'une chofe pour un temps, fans ceffer foi-même d'en être le maître; elle eft utile pour celui qui jouit ; elle eft vraie, quand le propriétaire en jouit en vertu d'un jufte titre elle eft feinte dans les cas, où il n'y a point réellement de propriété, par exemple, lorsqu'un débiteur a aliéné fon bien en fraude de fes créanciers, dont la propriété n'a plus de réalité. On diftingue encore la propriété naturelle, par exemple, celle d'une femme fur fa dot, & la propriété civile, par exemple, celle du mari fur cette même dot.

De la propriété naiffent en faveur du propriétaire, diverfes actions, telles font la revendication, l'action ad exhibendum, & l'action de communi dividendo. La revendication eft une action réelle, que les loix accordent au propriétaire d'une chofe corporelle, contre quiconque en eft en poffeffion, &, en vertu de laquelle le poffeffeur eft tenu de la lui reftituer avec tout ce qui en dépend. On accorde la revendication directe à celui qui a une propriété vraie, la revendication utile à celui qui n'a qu'une propriété feinte. Celui qui a prêté de l'argent pour acheter une chofe, n'eft pas en droit de la revendiquer, mais feulement l'argent qu'il a prêté.

En vain le poffeffeur allégueroit-il un titre de propriété, fi la tradition ne s'en étoit pas enfuivie.

La revendication n'a point lieu, lorfqu'il s'agit d'une univerfalité de biens ou de droits, par exemple, d'une fucceffion, d'un troupeau ou d'un autre amas de chofes; lorfqu'il s'agit de chofes incorporelles, par exemple, d'un droit honorifique, lorfqu'il s'agit des chofes qui font hors du commerce des hommes, ou de celles qui ont reçu une nouvelle forme, ou font devenues une nouvelle efpece. Le poffeffeur de bonne-foi, forcé de reftituer la chofe & fes dépendances, n'eft point refponfable des dommages qu'elle a pu effuyer entre fes mains. Il peut demander le remboursement des dépenses néceffaires, qu'il a faites pour la confervation de la chofe, & dans ce cas, il a le droit de rétention: il peut de même recouvrer les dépenses utiles qu'il a faites, pour l'amélioration de la chofe; mais il n'a point alors le droit de rétention; quant aux dépenfes de pur agrément, il ne peut les réclamer, à moins qu'il ne les ait faites avec le confentement du propriétaire.

Le poffeffeur de bonne-foi ne reftitue que les fruits exiftans, lors de la demande; mais le poffeffeur de mauvaife-foi eft forcé de reftituer ceux qu'il a déjà confommés. Cependant ce dernier peut réclamer les dépenfes néceffaires à la confervation de la chofe; quant aux dépenfes utiles, il ne peut qu'enlever les améliorations, fi elles peuvent l'être; il eft contraint de réparer les dommages qu'il a faits à la chofe, foit par dol, foit par une faute groffiere. Lorfque l'héritier d'un poffeffeur de mauvaife-foi poffede luimême de bonne-foi, fi le propriétaire a intenté un procès au défunt, l'héTome XX.

I

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