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fieurs mines de plomb & de charbon. Voyez-en le détail dans l'hiftoire naturelle de Childrey, Paris, 1667, in-12.

Son étendue fait à peu près la cinquieme partie de l'Angleterre ; elle comprend cinquante-huit bourgs à marché, & environ trois cents cinquante mille ames, qui payent pour la taxe des terres quarante - trois mille fept cents cinquante-deux livres fterling. Son port de Milford, Milford-Haven, eft un des plus fürs & des plus grands qu'il y ait en Europe, Les douze provinces qui, partagées en provinces du nord, & provinces du midi, compofent la principauté de Galles, font, pour le nord, Anglefea, Carnarvon, Denbigh, Flint, Merioneth, & Montgomery; & pour le midi, Brecknock, Cardigan, Carmarthen, Glamorgan, Pembroke & Radnor. Chacune de ces provinces eft repréfentée à la chambre baffe du parlement, par un chevalier, élu & privilégié à la façon de tous les autres membres de la chambre des communes ; & chacune encore a fa capitale, ou lieu d'affifes, qui envoie de même un député au parlement en forte que les loix générales de la conftitution d'Angleterre, s'étendent fur la principauté de Galles, comme fur toutes les autres parties de la GrandeBretagne. Il en eft de même de fes loix, eccléfiaftiques, civiles, crimi→ nelles & de police. L'on y profeffe la religion anglicane, fous les évêques de Bangor, de Landaff, de S. Afaph & de S. David. Les juges du royaume, qui parcourent les provinces quatre fois l'an, comprennent cette principauté dans leurs circuits; des shérifs y font chargés de l'exécution des fentences pour faits de crime; & des maires y président à la police. L'on a reproché aux Gallois, & même affez récemment encore, beaucoup de grolliéreté en matiere de religion, & beaucoup d'ignorance en matiere de littérature; leur langue même envifagée, on ne fait trop pourquoi, fous un air de mépris, s'eft vue en butte dans fon ufage, finon à des mesures prohibitoires de la part du gouvernement, au moins à des efforts très-foutenus de lui fubftituer abfolument l'angloife: aucun édit ni aucun acte public n'y paroiffent écrits que dans celle-ci, & à la réserve de la Bible, l'on y répand très-peu de livres en langue galloife. Cependant il faut difculper les Gallois du reproche d'ignorance qu'on leur fait en matiere de littérature, fi comme l'affirme l'éditeur anglois de la géographie de Busching, il n'eft que l'Ecoffe qui puiffe difputer à leur pays, l'honneur d'avoir produit plus de gens de lettres, que n'en fourniffent pour l'ordinaire, des contrées de fi peu d'étendue. Quant à la groffiéreté des Gallois en matiere de religion, le reproche n'en a jamais dû tomber à la rigueur que fur le bas peuple du pays, & encore, ce qui eft affez remarquable dans un peuple campagnard, s'agiffoit-il à cet égard, bien moins de groffiéreté que de négligence dans les pratiques religieufes : c'eft plutôt l'irréligion que la fuperftition qui a régné chez ces gens-là; mais depuis un certain temps, les corrections les plus efficaces font apportées à ce défaut : la fociété établie pour la propagation de la foi s'eft fait un

devoir d'y donner fon attention, fes fecours & fes foins des écoles appellées circulantes s'y font fondées par le zele actif & éclairé de M. Griffith Jones, l'un des refpectables eccléfiaftiques du pays; il y exifte actuellement au-delà de 140 de ces écoles dont les frais font foutenus par un certain nombre de bienfaiteurs volontaires, & dont les régens bien choifis vont répandre de lieux en lieux, la femence des lettres & celle du chriftianifme. Et à l'appui d'arrangemens auffi recommandables, vient un clergé, dont les membres inférieurs entr'autres, tenus fous des regles bien conçues & bien données, ne font affurément plus fuppofés, comme autrefois, vivre dans l'indévotion, dans l'ignorance, & dans l'indécence. L'on ne croit pas qu'à la honte de la nation Galloife, les fatyriftes Anglois aient plus lieu de donner aux bals de fes villageois, fes prêtres pour ménétriers. Et pour achever enfin ici de fe former une idée intéreffante de cette nation, l'on obfervera qu'en dépit de l'air univerfellement âpre qu'elle refpire, en dépit du fol généralement ingrat qu'elle cultive, & en dépit encore, fi l'on veut, de la perte, ancienne, à la vérité, de fon indépendance particuliere, en dépit, dis-je, de tous ces défavantages apparens, les Gallois font de tous les peuples Bretons, les plus attachés à leur patrie, ceux qui s'éloignent de leurs foyers avec le plus de regrets, qui y retournent avec le plus de plaifir, & qui, pareils, en ce point fur-tout, aux Lappons & aux Suiffes, favent le moins réfifter aux déchiremens du heimweh.

GASCOGNE, Province de France.

LA Gafcogne, grande & belle province avec titre de duché, occupe

la partie méridionale du gouvernement de Guyenne, & eft bornée au nord par la Guyenne; à l'eft par le Languedoc & le pays de Foix; au fud par les Pyrénées, qui la féparent de l'Espagne, & à l'oueft par l'Océan. Sa longueur eft de 50 grandes lieues fur 40 de largeur, ce qui peut être évalué à 1450 lieues quarrées. Elle a pris fon nom des Gafcons ou Vafcons, aujourd'hui Bafques ou Vafques, qui s'en emparerent, vers l'an 600, malgré les François, qui ne purent les empêcher d'étendre fucceffivement leur domination fur toute la Novempopulanie où ils fe maintinrent indépendants jufqu'au regne de Charlemagne. On comprend fous le nom de Gafcogne différentes provinces particulieres, favoir, le Condomais, le Gabardan, le Marfan, le Turfan, la Chaloffe le pays de Marennes & le Maranfin, les Landes ou Lannes, le duché d'Albret, le vicomté d'Acqs, la terre de Labour, la vallée ou le vicomté de Soule, l'Armagnac, le Commings, le Nebouzan, le Conferans, & le Bigorre,

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LES

GASSENDI, Philofophe Epicurien.

Sa morale.

ES êtres fenfibles agiffent fur notre ame de deux manieres par la voie des fens; par la premiere, ils y excitent des idées, & par la feconde, des affections. Ces deux branches collatérales naiffent des fenfations comme de leur fouche commune, & fe ramifient à l'infini.

On entend par ce mot d'affection, une forte d'inftinct, ou un mouvement naturel qui porte chaque être vivant à rechercher ce qui eft ami de fon exiftence, & à fuir ce qui lui eft contraire. Cet inftin&t eft produit dans nous-mêmes, fans nous-mêmes & fouvent malgré nous-mêmes. La fatisfaction qui naît du befoin rempli, eft ce qui conftitue le plaifir. Pour nous donner une idée jufte du befoin & du plaifir, les philofophes citent ordinairement l'exemple d'un homme tourmenté d'une foif violente qui avale une liqueur fraîche; la premiere fenfation eft le befoin, la feconde eft le plaifir.

C'eft une vérité de fait avouée de tout le monde, que tout être sentant ne fe détermine à aucun acte que felon fon plus grand plaifir. On a répété & expliqué fi fouvent cette maxime dans tant de livres échos les uns des autres, qu'il feroit très-déplacé de s'appefantir ici fur les preuves d'un principe trop clair pour avoir befoin d'être prouvé. Chacun n'a qu'à réfléchir fur lui-même & fur les motifs déterminans de toutes fes démarches, pour fe convaincre que le plaifir eft, pour ainfi dire, l'ame de notre ame qu'il eft, à fon égard, ce que le mouvement eft aux corps, & que de même que ceux-ci perféverent dans leur inertie naturelle, lorfqu'ils ne font point excités par aucune impulfion étrangere; ainfi fans le grand mobile du plaifir, l'homme feroit plongé dans une léthargie éternelle. Il ne fe porteroit à rien, il ne voudroit ni boire, ni manger, ni multiplier fon efpece; fon état, en un mot, ne différeroit point de celui des végétaux. (a) Voici un argument d'Ariftote touchant le plaifir.» Tout ce que » l'animal appete, eft un bien par lui-même, ce qu'il défire avec le plus » d'ardeur, doit être le fouverain bien or, tout ce qui refpire, appete » avec beaucoup d'ardeur la volupté; donc la volupté doit conftituer le » fouverain bien. «

On demande ce que c'eft que le plaifir? Il femble naturel de répondre qu'il eft fait pour être fenti & non pas analyse; cependant on peut dif

(a) Ut in omnibus rebus id quod appetitur bonum eft, ita quod fummè appetitur effe oportet Jummum bonum... Atqui voluptas hujufmodi eft, igitur eam effe fummum bonum oportet. Aristote, cité par Gaffendi, Ethica, liber primus de felicitate

tinguer, avec Gaffendi, le physique & le moral du plaifir. Ce philofophe diloit, avec les (a) épicuriens, que le phyfique du plaifir eft ce fentiment agréable qui résulte de l'impreffion de certains efprits ou atomes très-fubtils & très-doux de leur nature, qui par leur chatouillement affectent délicieusement notre cœur. La douleur, au contraire, eft produite par l'irritation de certains efprits rudes & piquans qui froiffent le cœur. Ce vifcere se refferre à l'approche de ceux-ci, fe dilate quand les premiers agiffent fur lui felon les mêmes épicuriens, le plaifir confifte dans une certaine température ou équilibre des efprits, & la douleur dans leur dérangement ou leur ofcillation.

Qu'est-ce que le moral du plaifir? Socrate l'avoit défini une (b) volupté fans peine; Epicure difoit, corps fans douleur, ame fans trouble. Les plus grands adverfaires d'Epicure n'ont garde de démentir cette maxime, furtout dans la pratique, & fi l'on vouloit approfondir fans préjugé les divers fentimens des philofophes fur ce point important, on pourroit les ramener tous à ce principe commun de l'influence néceffaire de nos plaisirs fur toutes nos actions.

Puifque le cœur humain n'a point d'autre levier, il ne s'agit que de lui donner la raison pour point d'appui. Or, la raison nous démontre que fans les aufpices de la vertu, le plaifir fort de fa fphere, & va directement contre fon but.

Mais qu'est-ce que la vertu? Les ftoïciens la plaçoient dans les extrêmes, les vrais épicuriens dans le milieu.

Zénon dénaturoit l'homme en le concentrant dans une espece d'insenfibilité que fon état ne comportoit point : Epicure fe mettoit au niveau de la nature humaine dont il connoiffoit le foible, il ne vouloit pas anéantir les paffions, il n'afpiroit qu'à les régler. Quand il difoit que la félicité & la vertu font deux fœurs inféparables; il entendoit par vertu l'art de modérer fes paffions fans exclure les plaifirs. On avoit cru pendant long-temps que ce philofophe n'admettoit d'autres plaifirs que ceux de la débauche. Gaffendi fait voir le contraire, & c'est la différence notable qu'il y avoit entre Ariftippe & lui. Le dernier ne prêchoit que les plaifirs des fens; l'autre, au contraire n'entendoit que les plaifirs de l'efprit. Gaffendi (c) cite plufieurs paffages de Cicéron, de Séneque, de Lactance de faint Jérôme, de faint Grégoire de Nazianze & de Gerfon, pour faire voir qu'il ne falloit donner d'autre interprétation à la volupté d'Epicure, que l'idée des plaifirs honnêtes & permis.

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L'on conçoit aifément par l'expofé que l'on vient de faire, qu'Epicure

(a) Gaffend. Phyfica, fectio 3a. memb... poft... lib. 10 de appetitu & affectibus anima. (b) Gaff. Ibid.

(c) Gaffend. ibidem, & dans fa vie d'Epicure.

tenoit un jufte milieu entre Ariftippe & Zénon. Ariftippe & fes difciples reffembloient à des malades aveuglés fur leur état, & qui ne veulent s'allujettir à aucun remède; Epicure prefcrivoit & obfervoit un régime exact, n'affichoit point le charlatanifme, & ne prétendoit point guérir radicalement les maux du genre-humain; il confeilloit le remede palliatif du plaisir, qui, pris avec précaution, pourroit, ce me femble, être comparé à l'opium qui, quoique mortel de fa nature, peut néanmoins, étant fagement adminiftré, fufpendre nos douleurs, & répandre un calme enchanteur dans tous nos fens.

tere,

Les ftoïciens, au contraire, fe flattant de vaincre par leur fageffe aufles maladies incurables de la nature, ne reffembloient pas mal à certains empiriques qui prétendent guérir les maux de l'humanité, avec du fublimé corrofif: la queftion du plaifir mene naturellement à celle du bonheur. On a agité long-temps en quoi confiftoit le folide bonheur : à prendre ce mot dans toute fon étendue, il n'eft pas douteux que le bonheur ne fe trouve que dans celui-là,, feul en qui réfide toute la pléni»tude de la joie, & à la droite duquel il y a des plaifirs fans fin. «Mais fi on entend par ce mot de bonheur, la fituation qui doit procurer le plus de fatisfaction à l'homme, la queftion eft encore indécife.

Les anciens philofophes ont long-temps difputé fur le bonheur; faint Auguftin comptoit deux cents & quatre-vingt fyftêmes différens fur ce feul article. Les uns le faifoient confifter dans les plaifirs, d'autres dans les richeffes, d'autres dans les honneurs, d'autres dans la philofophie. » Ils » auroient fait tout auffi-bien, dit Locke, (a) de difputer entr'eux fur le » goût le plus délicieux des poires, des prunes & des abricots, & de fe » divifer fur ce point en autant de fectes: car, comme la bonté de ces » fruits eft relative à la différente conformation des palais, de même les >> causes morales de la félicité varient fuivant les goûts différens des

>> humains. «<

Chacun fe fait donc des fyftêmes particuliers de bonheur, analogues à fa maniere de penfer. Quoiqu'il n'y ait point de fentiment uniforme & dominant fur les causes efficientes du bonheur, tout le monde tombe d'accord de ce principe fondamental de la volupté épicurienne dont nous avons déjà parlé : corps fans douleur, ame fans trouble. Il n'eft perfonne au monde qui n'ait fort à cœur la confervation de fa fanté, perfonne qui ne cherche à s'affranchir ou à fe diftraire des miferes inféparables de la condition humaine. On voit même des hommes qui préferent l'intérêt de leur repos à celui de leur fanté, perfuadés que le bien-être ne fe trouve que dans une certaine quiétude d'efprit que rien n'altere.

Selon l'opinion populaire, le bonheur parfait confifte dans une fuite non interrompue de fenfations voluptueufes; mais outre qu'un pareil bon

(a) Locke, Eai fur l'entendement humain, lib. 2.

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