Page images
PDF
EPUB

gens y périffent le travail n'en eft pas exceffif, ni les exhalaifons mortelles; & l'on n'y perd pas, en un mot, comme dans bien d'autres, un homme pour gagner un écu. Il eft d'ailleurs des mines d'autre valeur, que l'on fouille encore & avec grand fuccès aux portes de cette ville; l'on y trouve du cuivre, de l'étain & du plomb, & l'on y prépare beaucoup de vitriol & de foufre. Enfin ces divers bienfaits de la nature, jouïs par un peuple actif & ingénieux, tel qu'eft le Saxon, donnent depuis longtemps à Freyberg du luftre & de la profpérité; & il faut dire auffi que de leur côté, les princes du pays ont eu foin d'en favorifer l'accroiffement, par les privileges dont ils ont muni cette ville. Ses bourgeois exercent entr'autres dès l'an 1318, le droit de faire arrêter pendant trois jours toutes les marchandises qui y paffent pour la Boheme, & d'en acheter ce que bon leur femble. Le fléau de la guerre & celui des incendies, l'ont vifitée à plus d'une reprise: aux années 1375, 1471 & 1484 elle fut à peu près confumée par le feu; pendant la guerre de trente ans, les Impériaux s'en emparerent & les Suédois la bombarderent: & de nos jours on l'a vue plufieurs fois entre les mains des ennemis de la Saxe. Le 29 d'O&obre 1762, le prince Henri de Pruffe, héros parmi les héros même, frappant le dernier coup d'éclat d'une guerre où tant d'autres s'étoient donnés, remporta fous les murs de cette ville, une grande victoire fur le prince de Stolberg, qui commandoit l'armée de l'Empire, fortifiée de troupes

Autrichiennes.

FREYE-EMTER.

ON donne ce nom en Suiffe à une étendue de pays affez confidérable

environnée des cantons de Zurich, Berne, Lucerne & Zoug & du comté de Baden. On le nommoit anciennement le comté de Rori ou le Waggenthal. Il appartenoit aux comtes de Habfpourg. Les Suiffes le conquirent fur la maifon d'Autriche en 1415, & le garderent. Le canton de Lucerne en réclama une bonne partie, comme conquis par lui seul, mais les autres cantons fe refuferent à cette demande & condamnerent ce canton en 1426. Le pays fut alors régi par les cantons de Zurich, Lucerne, Schwitz, Underwalden, Zoug & Glaris. Üri n'entra dans la corrégence qu'en 1532, & Berne en 1712. D'abord on partagea ce pays en deux bailliages, il fut réuni enfuite fous un feul, & ce ne fut qu'en 1712 qu'on le fépara de nouveau comme nous l'expliquerons ci-deffous. Les habitans font tous de la religion catholique; la réformation qui y avoit fait de grands progrès, fut fupprimée à la fuite de la guerre civile de 1531. On y cultive beaucoup de bleds & des vignes, & c'eft le feul objet de travail de fes habi

tans. Il y a dans ce pays près de 20,000 habitans, quoiqu'il n'ait que 7 à 8 lieues de longueur fur 3 à 4 de largeur.

La guerre civile de 1712 occafionna un nouveau partage. On tira une ligne de Lunhkofen jufqu'à Faarwanguen. Ce qui étoit au nord de cette ligne fut cédé aux cantons de Zurich & de Berne feuls, en réservant les droits du canton de Glaris, & fe nomme les bailliages libres d'en bas. Cẹ qui fe trouve au midi de la même ligne refta aux fept cantons, mais ils recurent celui de Berne dans la corrégence. Cette partie fe nomme les bailliages libres d'en haut. Nous allons parler de chacune de ces deux parties.

Le bailliages libres d'en haut fe gouvernent, comme nous l'avons dit, par les huit anciens cantons, à cette exception près que Glaris a confervé tous fes droits, tels qu'il les avoit avant que Berne fût reçu dans la corrégence, Les baillis n'étant établis que pour deux ans, il s'enfuit que Glaris en fournit un tous les 14 ans, au-lieu que les autres cantons n'en fournissent que tous les 16 ans. Le bailli n'y réfide pas, il s'y rend de temps en temps pour adminiftrer la juftice; dans les intervalles le fecrétaire baillival, qui réfide à Bremgarten, en remplit les fonctions. Les caufes civiles fe portent d'abord en juftice inférieure, enfuite par appel au feigneur bailli, à la diete des cantons régens, & enfin aux cantons même. Dans les causes criminelles le landgericht prononce la fentence & le bailli a droit de faire grace. Ce bailliage eft partagé en quatre parties, Meyenberg, Hitzkirch, Muri & Bettweil. La baffe juftice de plufieurs endroits appartient à différens cantons, monafteres, &c. Les endroits les plus remarquables font le pont de Sins, fameux en Suiffe par le combat qui s'y donną en 1712, après qu'une partie des cantons avoit figné la paix; Mayenberg étoit anciennement une petite ville, elle fut ruinée par les Suiffes en 1386. Beinweil lieu de pélerinage à l'honneur de S. Burcard, dont les os y font dépofés; Hitzkirch commanderie de l'ordre Teutonique, une des plus anciennes de l'ordre, enrichie par les donations des comtes de Habfpourg & de Buchegg, des barons de Schnabelburg, &c. l'abbaye de Muri; le village de Muri, où on a trouvé plufieurs antiquités très-cu

rieuses.

Les bailliages libres d'en bas font régis par les cantons de Zuric, Berne & Glaris. Le dernier n'a que la 7. partie, en conféquence de quoi dans l'efpace de quatorze ans, Zuric fournit trois baillis, Berne de même, Glaris un feul. La forme du gouvernement eft la même comme dans la partie d'en haut. Ils fe partagent en neuf parties, Boffweil, Sarmenftorf, Krummamt, Vilmerguen, Wohlen, Niderweil, Dottiken, Heglingen & Bublikon. Les endroits les plus remarquables font Sarmenftorf, où il fe fait des pélerinages fort confidérables, le couvent de religieufes d'Hermanschweil de l'ordre de S. Benoit, fondé à Muri dans le Xe. fiecle, par les comtes d'Habfpourg, & transféré ici dans le XII, fiecle. La prieure jouit dès 1636

du titre d'abbeffe. Vilmerguen, village fameux par les deux batailles que les Bernois y livrerent aux cantons catholiques en 1656 & en 1712; dans la premiere les Bernois, quoique plus forts, eurent le deffous, mais ils furent victorieux à leur tour dans la feconde, malgré la fupériorité des forces des cantons catholiques. Gnadenthal, couvent de religieufes de l'ordre de S. Bernard.

Bremgarten & Mellinguen font deux villes de ce bailliage.

FRIBOUR G, l'un des treize Cantons Suiffes, ayant pour capitale une ville du méme nom.

LA ville de Fribourg fut fondée par Berthold IV, duc de Zaringuen,

en 1179; Berthold III fon oncle avoit fait bâtir une ville du même nom dans le Brifgau en Suabe, & Berthold V fon fils devint le fondateur de la ville de Berne. Ces princes, établis vicaires de l'Empire dans les provinces de l'ancien royaume de Bourgogne, ne foutenoient qu'avec peine, dans une petite portion de cette monarchie éphémere, une autorité toujours difputée par les grands vaffaux. Il étoit d'une fage politique de fortifier le parti des communes, pour fervir de contre-poids à l'ambition indocile de la nobleffe. Les fouverains en Europe, voyant leurs droits circonfcrits par ces conftitutions féodales, qui avoient dégénéré en anarchie & defpotifme, privilégioient par-tout les fociétés municipales, dont l'intérêt alloit au même but, d'affoiblir la puiffance divifée des barons & des nobles. Les ducs donnerent aux nouvelles villes des chartres ou bulles, fur le modele de celle de la ville de Cologne. Elles contenoient les formes, les prérogatives & les limites de l'adminiftration publique, & les premieres loix civiles & de police, & furent confirmées par les empereurs. Nous parlerons des conftitutions de la république de Fribourg après avoir donné le précis des événemens que nous offre l'hiftoire de fes progrès.

Après l'extinction de la maison de Zaringuen, par la mort de Berthold V en 1218, les deux villes Berne & Fribourg éprouverent un fort différent. Berne fit un pas important vers l'indépendance, en fe confervant fous la protection immédiate de l'Empire; Fribourg tomba fous la domination du comte Ulrich de Kibourg, de la branche de Berthoud, le mari d'Anne de Zaringuen, fœur du dernier duc. Au fond, cette condition ne dérogeoit point à fes immunités, qu'elle tenoit également du chef de l'Empire. Dès l'année 1243 elle fit une alliance particuliere avec Berne, fuivant un droit que l'ufage général légitimoit, que les fouverains même autorifoient, & que les barons, fouvent trop foibles pour protéger leurs fujets, ou permettoient, ou n'ofoient empêcher. Cette alliance a été fouvent renouvellée dans le cours du XIIIe. & le commencement du XIVe fiecle; mais l'obli

gation impofée aux Fribourgeois de fervir leur feigneur, interrompit auffi fouvent cette union des deux villes; pendant un affez long-temps elles furent plutôt rivales qu'affociées.

Déjà, en 1241, Fribourg prit parti contre les Bernois dans une querelle, fufcitée à l'occafion d'un pont, que ceux-ci entreprirent de conftruire fur l'Aar; entreprise que le comte Eberhard de Kibourg traitoit d'infraction territoriale. C'eft alors que Berne fe mit fous la protection de la maison de Savoie, dont elle fut dégagée peu d'années après. Eberhard, comte de Habfbourg-Lauffenbourg ayant épousé Anne, héritiere de la maifon de Kibourg-Berthoud, vendit fes droits fur Fribourg à fon coufin germain, Rodolphe, comte de Habfbourg, qui devint empereur & chef de l'illuftre maifon d'Autriche. Par cette nouvelle affujettion, les Fribourgeois fe trouverent liés au parti des princes & de la nobleffe, contre ces communautés naiffantes qui combattoient pour la liberté.

En 1288, les milices bourgeoifes de Fribourg & de cette banlieue affez confidérable, que le fondateur de la ville lui avoit annexée, camperent devant Berne, fous les ordres de l'empereur Rodolphe. Dix ans après ces mêmes troupes reçurent un fort échec près de Berne. Les deux villes fe réconcilioient auffi fouvent que le fervice de leurs maîtres n'obligeoit pas les Fribourgeois à exercer des hoftilités contre leurs voifins. C'est ainfi que vers 1338 ils fe virent engagés dans une grande ligue formée contre la ville de Berne. Celle-ci obtint une fupériorité décidée par la victoire que ses troupes remporterent près de Laupen, en 1339, avec le fecours de fes auxiliaires, particuliérement des trois premiers cantons Suiffes. L'année fuivante Rodolphe d'Erlach, le général des Bernois, fit une excurfion jusqu'aux portes de Fribourg, pour venger la perte d'un parti de la garnison de Laupen, que les ennemis avoient furpris en fourrageant, & taillé; il ménagea fi bien fa retraite, que les Fribourgeois, qui le pourfuivoient, donnerent dans une embuscade, où ils perdirent fept cents hommes. Une nouvelle tentative qu'il fit fur cette ville n'aboutit qu'à brûler le fauxbourg. Dans la guerre des Suiffes contre le parti Autrichien de 1385 jufqu'à 1389, les Fribourgeois ne furent pas plus heureux; leurs troupes furent défaites près de Berne, & leur territoire ravagé.

Ces mauvais fuccès firent enfin revenir les Fribourgeois d'un efprit de rivalité, qui avoit pris fon origine dans des 'querelles étrangeres, & que l'habitude des hoftilités & le reffentiment des pertes réciproques avoit fait dégénérer en une animofité également nuifible aux deux villes, que des rapports plus naturels devoient unir, Elles fe lierent en 1403, par un traité de combourgeoifie perpétuelle, & en 1405, les Fribourgeois donnerent à leurs alliés une preuve généreufe de leurs vrais fentimens, à l'occafion d'un incendie dans lequel la moitié de la ville de Berne avoit été confumée, & environ cent perfonnes avoient péri.

Fribourg fe faifoit reconfirmer fes immunités par les empereurs. SigifTome XX.

R

mond lui accorda en 1414, le droit de battre monnoie, & ce qui parolt affez fingulier, ce don du chef de l'empire fut ratifié par le pape Martin V à fon paffage en Italie, après la clôture du concile de Conftance. Les Fribourgeois n'eurent point l'ambition de profiter de la difgrace qu'effuyoit alors la maison d'Autriche, pour s'affranchir de leur domination. Cette fidélité louable les mettoit fouvent dans l'embarras de tenir un milieu entre le parti de leurs feigneurs & celui de leurs alliés. Pendant la premiere guerre civile entre les Suiffes, dans le XV fiecle, Voyez CORPS HELVÉTIQUE & ZURIC, ils fournirent des fecours aux cantons contre la ville de Zuric, protégée par les Autrichiens; mais leurs troupes cefferent de marcher contre Louis, dauphin de France, qui venoit au fecours des ducs. Une conduité fi prudente, mais fi inconféquente, caufa de nouveaux mécontentemens aux alliés, & en même temps des convulfions intérieures mirent Fribourg dans de plus grands dangers encore.

L'impulfion alors générale en Europe, & qui tendoit à une révolution progreffive par l'émancipation des communes & l'abaiffement de la noblesse ne pouvoit manquer de produire une divifion des efprits, dans les circonftances où se trouvoit la ville de Fribourg. L'attachement pour les anciens maîtres, l'habitude de militer pour leur caufe, le reffentiment des dommages ou des offenfes reçues par les Bernois & leurs alliés, formoient les principes & les préventions d'un parti encore dominant. L'exemple des fuccès des peuples ligués pour la défense de la liberté, le défir fi naturel de l'indépendance, encouragé par l'épuifement fenfible des forces & du crédit de la maifon d'Autriche dans la Suiffe, l'intérêt puiffant de la paix avec les voifins, tous ces motifs agiffoient à la fois fur un autre parti, plus nombreux peut-être, mais moins appuyé par les perfonnes en place. D'un autre côté, la maifon de Savoie avoit des vues pour gagner fur cette ville, l'autorité que la maifon d'Autriche étoit prête à perdre, du moins l'événement nous autorife à leur fuppofer ces vues. Une caufe affez légere mit tous ces différens refforts en mouvement.

Un avoyer de Fribourg, de la famille d'Aflentfchen, ayant été dépofé, pour avoir favorifé l'évafion d'un prifonnier, duquel on l'accufoit d'avoir tiré une fomme d'argent, fe réfugia auprès de Louis, duc de Savoie, son fuzerain par rapport à divers fiefs. Enhardi par cette protection, il dressa des embûches à fes accufateurs; un de fes émiffaires fut pris & écartelé. Le duc Albert d'Autriche députa à Geneve pour calmer le duc de Savoie; celui-ci forma diverfes plaintes & rien ne fut terminé. Menacés par ce nouvel antagoniste, & fentant la foibleffe de la protection de leur maître, les Fribourgeois s'adrefferent inutilement aux cantons Suiffes & au faint fiege. Enfin, les hoftilités étant prêtes à commencer, Albert, pour tout fecours, envoya un officier de confiance pour commander les milices de Fribourg; fous ces aufpices elles détruifirent les châteaux de quelques vaffaux des ducs de Savoie. Les Bernois, en qualité d'alliés de cette maifon, prirent

« PreviousContinue »