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pendant cinq ans, a conspiré contre la liberté ! Je ne crains rien : Paris n'a pas fait trois révolutions pour en laisser échapper le fruit. Les Parisiens feront executer votre décret. Je ne crains rien: la calomale restera sans effet, l'aristocratie restera sans effet. Ils sont connus ceux qui répandent la calomnie. Paris, vouloir un nouveau tyran! Paris se levera tout entier pour écraser tous les tyrans, tous les complices des tyrans. Je ne crains pas de le dire, toutes ces petites ruses n'ont pour but que de sauver la tyrannie. Quelle est donc l'étrange déraison de ceux qui montent à la tribune, qui ne veulent pas la mort du tyran, et veulent chasser les Bourbons qui n'ont rien fait contre la liberté! Est-ce donc ainsi qu'on rend hommage à la vertu (On murmure)? Il y a quatre ans que le même plan d'attaque existe, et se renouvelle sans cesse. Quoi! vous croiriez encore qu'il existe une faction! La faction existe là seulement où il y a de làches intrigans qui veulent faire des ministres. On veut faire un roi! Si vous croyez ce projet possible, pourquoi n'auroitil pas été exécuté le 14 juillet, le 5 octobre, le 10 août! Ah! vous calomniez par le besoin de calmnier, parce que vous êtes assez monstres pour faire couler le sang de l'imocent. On doit être libre de dire son opinion à la tribune, mais on ne doit jamais l'être de calomnier. Depuis quatre mois je ne vois pas ces hommes changer de système contre cette ville. Que feroientils donc contre elle, s'ils étoient les plus forts? La livreroient-ils aux flanimes, au pillage! On parle des puissances de l'Europe! Est -ce que nous ne nous sommes pas attendus à la guerre contre elles? Ne nous sommes-nous pas déclarés les protecteurs des peuples qui secoueroient le joug des tyrans ? Croyez-vous qu'avant-hier je fusse dupe de cette prétendue lettre du roi d'Espagne? Non, il n'en existe pas. C'est une Tome II.

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petite ruse de guerre; elle est d'un homme qui est ici sans mission pour cet objet. Citoyens, vous la lirez, cette lettre; elle vous prouvera combien est misérable la tactique de nos adversaires. Il y a encore de la différence entre l'expression de la volonté d'un roi et l'imagination d'un agent sans caractère, sans mission connue. Attachons-nous à la question en elle-même; elle est simple. Le peuple vous a intimé sa volonté; il vous a dit jugez le tyran. Vous n'avez fait qu'appliquer la loi. Il ne vous appartient pas de déroger à la loi. Qu'espérez-vous d'un délai de huit, de quinze jours ? Le crime en existera-t-il moins reconnu ! Vous ne feriez que donner au tyran les moyens de s'évader. Je deniande que, conformément aux principes, la convention décrète que dans les vingt-quatre heures le pouvoir exécutif fasse exécuter le jugement,

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No. 432. Thomas Payne, dép, du Pas-de-Calais. Bancal, secrétaire, fait lecture de son opinion. Citoyens, je vous ai déjà présenté mes raisons contre la résolution d'infliger la peine de mort à Louis. Le manuscrit contenant ces motifs, fut remis entre les mains du président aussitôt après que la première discussion fut ouverte; mais comme beaucoup de membres avoient la parole avant moi, et que la discussion fut fermée avant que mon tour fût arrivé, je n'ai pu faire connoître à l'assemblée les motifs de mon opinion. Je le regrette aujourd'hui, non pas seulement parce que mon discours contenoit des motifs particuliers qui m'a◄ voient engagé à préférer à la mort la réclusion de Louis pendant la guerre, et son bannissement après la paix, mais par rapport à ce que j'ai à dire sur la question nouvelle. La question de sursis aura moins d'effet sur ceux qui ne m'ont pas lu, et paroîtra peut-être obscure.

Citoyens, tout ce qui s'est passé depuis n'a servi qu'à me prouver la bonté des motifs qui m'ont décidé. Je regrette très-sincèrement le vote qui a été adopté hier dans la convention pour la peine de mort.

J'ai pour moi l'avantage de quelque expérience: il y a 20 ans à peu près que je me suis engagé dans la cause de la liberté, en contribuant à la révolution dés ÉtatsUnis d'Amérique. Mon Pangage a toujours été le langage de la liberté et de l'humanité, et je sais par experience que rien n'exalte tant l'ame d'une nation que l'union de ces deux principes dans toutes les circonstances. Je sais que l'esprit public de France, et particulièrement celui de Paris, a été échauffé et irrité par les dangers aux quels on y a été exposé; mais si nous portons nos idées en avant et vers le terme où ces dangers et l'irritation qu'ils ont produite, seront oubliés, alors nous serons à portée de voir que ce qui nous paroît aujourd'hui un acte de justice, ne paroîtra alors qu'un acte de vengeance. (Des murmures s'élèvent dans l'une des extré mités de la salle.)

Mon anxiété pour la cause de la France est devenue maintenant mon anxiété pour son honneur; et s'il m'é toit réservé, après mon retour en Amérique, d'écrire l'histoire de la révolution française, j'aimierois mieux avoir à rappeler mille erreurs dictées par l'humanité qu'une seule inspirée par une justice trop sévère.

J'ai voté contre l'appel au peuple, parce qu'il m'a paru que l'assemblée, pour cette question, s'étoit fa tiguée inutilement; mais j'ai voté aussi, dans l'espoir que l'assemblée prononceroit contre Louis la même punition qu'auroit votée la nation, au moins dans mon opinion; c'est-à-dire, réclusion pendant la guerre, et bannissement après la paix : c'est en effet la punition la plus efficace, puisqu'elle comprend toute la famille en

même temps, et qu'aucune autre peine ne peut opérer. Je suis encore contre cet appel aux assemblées primaires, parce qu'il existe une meilleure méthode.

La convention actuelle a été élue pour former une constitution qui doit être soumise à l'acceptation de ces assemblées. Lorsque cette acceptation sera faite, il existera, par une conséquence nécessaire, une autre assemblée, une autre élection; car nous ne devons pas supposer que la durée de la convention actuelle doit s'étendre au-delà de 5 à 6 mois. Un nouveau choix de députés pourra donner l'opinion de la nation entière, sur la convenance ou la disconvenance de la punition prononcée, et avec autant d'efficacité que si vous aviez consulté à présent les assemblées primaires sur cet objet. Comme la durée de nos fonctions ici ne peut pas être très-longue, c'est une partie de notre devoir de considérer l'intérêt de ceux qui doivent nous remplacer ; car, si par un acte qui dérive de nous, le nombre de nos ennemis étrangers est inutilement augmenté, et le nombre de nos amis considérablement diminué, dans un temps où les finances de la nation seront plus épuisées qu'elles ne le sont aujourd'hui, nous serions injusti fiables d'avoir ainsi, sans nécessité, accumulé les obstacles sur les pas de nos successeurs. Ne précipitons donc pas nos décisions.

La France n'a maintenant qu'un seul allié, les ÉtatsUnis de l'Amérique; et cet allié est la seule nation qui puisse lui fournir des provisions navales; car les royaumes du nord de l'Europe, qui les lui procurent ordinairement, sont ou seront bientôt en guerre avec elle. Or, il arrive malheureusement ici que la personne qui est objet de la présente discussion, est regardée, dans les États-Unis, comme leur meilleur ami, comme celui qui leur a procuré leur liberté. Je puis vous assurer que son exécution y répandra une affliction universelle; et il est

en votre pouvoir d'épargner cette affliction à vos meilleurs amis. Si je pouvois parler la langue française, je descendrois à votre barre, et au nom de tous mes frères d'Amérique, je vous présenterois une pétition pour surseoir à l'execution de Louis. (Murmures dans l'une des extrémités.)

Votre conseil exécutif vient de nommer un ambassadeur près des États-Unis, qui doit faire voile sous quelques jours. Rien ne seroit plus doux pour vos alliés, que s'il pouvoit leur tenir, à son arrivée, ce langage, qu'en considération de la part que Louis Capet a eue à la révolution américaine, et de l'affliction que les Américains pourroient ressentir de son exécution, vous avez sursis à la peine de mort. Ah! citoyens, ne donneź pas au despote d'Angleterre le plaisir de voir monter sur l'échafaud l'homme qui a aidé à retirer de ses fers mes frères chéris d'Amérique.

No. 433. Guffroy, dép. du Pas-de-Calais.

Je monte à cette tribune avec le sentiment de la plus profonde indignation. La patrie est en pleurs. Une partie des représentans trahit ses devoirs et l'intérêt de ses commettans (On murmure. ). Hier, l'agitation du crime a fait tomber son masque. Depuis l'élan patriotique qui a fondé la république, nous n'avons rien fait de plus grand pour la liberté de notre patrie. Depuis quatre mois nous nous traînons dans les décombres du trône.

Louis avoit été presqu'unanimement convaincu de crime. Nous l'avons reconnu comme juges, la loi l'ordonnoit; comme juges, nous n'avons que l'application de la loi à faire. On avoit répandu que la majorité étoit d'une seule voix; vîte un ancien garde du roi, qui sous prétexte de maladie étoit absent, se présente à la tribune et vote pour la détention (On murmure).

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