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rentre dans son camp, et les mineurs retournent à leurs travaux : ceux qui ont fait de belles actions, ou qui montrent de l'aptitude au service militaire, sont admis au concours pour les emplois vacans. Mais il reste une démarcation naturelle et nécessaire entre les exploitateurs de la mine, servant temporairement dans le camp, et ceux qui l'habitent toujours. Que direzvous maintenant, si l'on prétendoit vous prouver qu'il n'y a point d'autre camp que la mine, et qu'il ne faut point d'autres gardes que les mineurs ? Voilà cependant ce qu'on vous propose, et les grands mots d'aristocratie, de constitution, d'égalité de droits, qui se prêtent à tout, viennent à l'appui des sophismes.

Telles sont, messieurs, les vérités que je vous devois. Contradicteur depuis longtemps, et sur plusieurs points, de l'ancien régime de la marine, j'en connois tous les abus, et je ne les dissimulai jamais. Vous ferez bien de les réformer; vous ferez mal de détruire le corps militaire. Quoiqu'on puisse vous dire, vous n'en remplacerez pas facilement l'instruction. Laissez au commerce son esprit, ses mœurs, ses habitudes; Laissez à l'état militaire une sorte de fierté

nécessaire, mais défendez-vous de son influence sur l'état civil: ne dédaignez pas les principes, les exemples de l'Angleterre, de la Hollande; leurs institutions navales doivent avoir pour vous plus d'autorité que les discours de vos orateurs. Quand on vous dira qu'on peut supprimer les intendans de marine, ou les remplacer par d'autres employés, je ne m'y opposerai pas; car je suis convaincu qu'on peut toujours se passer d'un homme et d'une place. Mais quand on vous propose de tout changer, de tout bouleverser dans le systême de l'armée navale, tous les hommes sages et qui ont quelqu'expérience des choses maritimes doivent se réunir pour vous préserver de cette grande erreur.

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Hé quoi! au milieu des esprits ardens qui vont toujours en avant, n'en trouverons-nous plus qui sachent douter, qui accordent à ceux qui nous ont précédé le mérite de quelques vues raisonnables? Sommes-nous donc les seuls sages, les seuls habiles dans l'art du gouvernement, dans les moyens de conquérir et de conserver la liberté ? Souvenez-vous, messieurs, que son point de contact avec votre sys

tême

tême militaire est la pierre angulaire de l'édifice, et que l'armée navale est précisément la partie de la force publique que vous pouvez le plus vigoureusement constituer, sans qu'il en résulte aucune atteinte pour la liberté; car elle n'agit et ne peut agir qu'au-dehors.

Instituez donc l'armée navale comme l'artillerie et le génie, puisque les mêmes études, et de plus étendues, sont nécessaires à la navigation militaire.

Ayez non-seulement des écoles gratuites pour tous les marins, mais des écoles militaires dans les grands ports.

Instituez des élèves ou aspirans en nombre limité; qu'ils soient admis au concours; qu'après le temps de navigation prescrit, ils passent encore au concours pour le grade d'enseigne; que tous les officiers du commerce aient la liberté de se présenter aussi à ce concours.

Que tous les capitaines de navires aient le rang d'officiers dans l'armée quand ils y sont appellés; qu'ils conservent le brevet d'enseigne quand ils en ont reinpli le service, mais non autrement.

Que tous ceux qui ont été oubliés, qui se année. Tome XII. ·

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ont droit à des récompenses, soient honorablement traités. Tel est mon avis.

Le rapport publié par le comité des finances vous expose dans le plus grand détail toutes les dépenses de la marine et celles des colonies; ce travail, dont nous releverons quelques inexactitudes, vous fait connoître les différens objets de dépenses qui s'élevent, pour la marine, à 31,236,366 livres, pendant l'année 1786, non compris les dépenses extraordinaires; et pour les colonies à 10,484,416 livres, non compris celle de 7,173,333 livres, provenant des impôts perçus dans les colonies. Nous pensons done qu'il convient de commencer notre rapport là où finit celui du comité des finances; et comme il ne vous a rendu compte que des dépenses estimées de l'année courante, telles qu'elles ont été réduites par le ministre actuel, au commencement de l'année, nous avons dû rechercher d'abord à combien s'élevoit, dans les années antérieures, cette masse de dépenses, et ce qui reste dû par le département de la marine.

A partir du premier janvier 1784, époque adoptée par le comité des finances pour distinguer celles de la paix, celles occa

sionnées par la guerre, jusqu'au premier septembre 1789, nous trouvons que la marine a dépensé 380,683,137 livres; ce qui donne une année commune de 63,447,172 livres. Nous appercevons que dans cette somme, les colonies ont annuellement absorbé seize à vingt millions (1), et la marine quarante à quarante-six ; et qu'il restoit dû au premier septembre dernier, par le département, la somme de 73,008,665 liv.— Mais cette dette, par le paiement fait jusqu'au premier janvier 1790, se trouvoit réduite, à cette époque, à 49,923,345 livres. Ces résultats n'ont d'autre authenticité que celles des bordereaux et des états qui nous ont été communiqués par l'administration; car les comptes sont arriérés de onze années.

D'après ce premier apperçu, nous avons dû entrer plus avant dans les détails économiques de cette administration; en examiner la forme et les principes; comparer le passé au présent, et vous mettre en état de prononcer sur l'avenir.

Le plan de notre travail se trouve donc déterminé par l'ordre naturel des objets que

(1) On n'a pu obtenir des états distincts de la dé. pense des colonies par chaque année.

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