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contentement et de murmure, autant nous devons de patience, de discussion et d'exhortation aux doutes des ames timorées.

Le prétexte politique de cette espece d'insurrection sacerdotale, c'est, messieurs que la même puissance qui a changé l'ancienne distribution du royaume ne pouvoit rien changer à l'ancienne démarcation des dioceses, sans le concert de la puissance spirituelle. Ils disent que le corps législatif n'ayant nul caractere pour restreindre ou pour étendre la jurisdiction des évêques ceux-ci ont besoin d'une nouvelle institution pour se remettre au cours de leurs fonctions.

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J'avouerai volontiers que la théologie n'entra jamais dans le plan de mes études; mais sur le point dont il s'agit ici j'ai eu quelques entretiens avec des ecclésiastiques instruits et d'une raison exacte et saine. En fondant leurs réflexions dans les principes qui appartiennent aux seuls procédés d'un bon esprit et d'une logique inflexible, j'ai acquis le résultat que je vais mettre sous vos yeux.

Le premier des quatre articles qui servent de base aux libertés de l'église gallicane énonce que les évêques tiennent im

médiatement de Dieu la jurisdiction spirituelle qu'ils exercent dans l'église ; paroles qui ne signifient rien du tout, si elles ne signifient que les évêques reçoivent dans leur inauguration la puissance de régir les fideles dans l'ordre spirituel, et que cette puissance est essentiellement illimitée; car elle est le fonds de l'essence de l'épiscopat, et ne sauroit par conséquent connoître d'autres bornes que celles de l'univers entier. Un caractere divin qui perdroit son existence au-delà d'une circonférence donnée seroit un caractere chimérique et illusoire ; un pouvoir fondé sur une mission divine et absolue ne se peut ni restreindre ni circonscrire en sorte que chaque évêque est solidairement, et par l'institution divine, le pasteur de l'église universelle. Aussi le fondateur du christianisme n'a-t-il point partagé entre les apôtres la jurisdiction à exercer dans les différentes contrées du monde, et n'a-t-il assigné à aucun d'eux le cercle où il devoit se renfermer? Mais chacun d'eux a reçu la puissance de tous; tous ont été indivisiblement établis les recteurs et les chefs de tout le troupeau de Dieu. Répandez-vous, leur dit-il, dans tout le monde, annoncez l'évangile à toute

créature; je vous envoie comme mon pere m'a envoyé. Voilà une décision évidente on il faut dire que notre épiscopat est d'une antre nature que celui que Jésus-Christ a institué.

La division de l'église universelle en diverses sections ou dioceses est une économie d'ordre et de police ecclésiastique établie à des époques fort postérieures à la détermination de la puissance épiscopale; un démembrement commandé par la nécessité des circonstances et par l'impossibilité que chaque évêque gouvernât toute l'église n'a pu rien changer à l'institution primitive des choses, ni faire qu'un pouvoir illimité par sa nature devînt précaire et local.

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Sans doute le bon ordre a voulu que la démurcation des diocèses une fois déterminée, chaque évêque se renfermât dans les limites de son église; mais que les théo logiens, à force de voir cette discipline s'observer, se soient avisés d'enseigner que jurisdiction d'un évêque se se mesure sur l'étendue de son territoire diocésain que hors de là il est dépouillé de toute puissance et de toute autorité spirituelle, c'est là uue erreur absurde erreur absurde qui n'a pu

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et

naître que de l'entier oubli des principes élémentaires de la constitution de l'église.

Sans rechercher en quoi consiste la supériorité du souverain pontife, il est évident qu'il n'a pas une jurisdiction spécifiquement différente de celle d'un autre évêque; car la papauté n'est point un ordre hiérarchique: on n'est pas ordonné ni sacré pape; or une plus grande jurisdiction spirituelle possédée de droit divin ne se peut conférer que par une ordination spéciale, parce qu'une plus grande jurisdiction suppose l'impression d'un caractere plus éminent, et la collation d'un plus haut et plus parfait sacerdoce. La primauté du pape n'est donc qu'une supériorité extérieure, et dont l'institution n'a pour but que d'assurer au corps des pasteurs un point de ralliement et un centre d'unité. La primauté de S. Pierre ne lui attribuoit pas une puissance d'une autre espece que celle qui appartenoit aux autres apôtres, et n'empêchoit pas que chacun de ses collegues ne fût comme luj l'instituteur de l'univers et le pasteur né du genre humain. Voilà une regle sûre pour déterminer le rapport à maintenir entre nos évêques et le souverain pons

tife (1); il n'y a là, messieurs, ni subtilités, ni sophismes; et tout esprit droit et

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(1) Tout ceci se résume en un raisonnement qui est sans réplique, et que j'énonce de cette maniere : Une jurisdiction qu'on ne tient que de Dieu, et qui en dérive immédiatement, ne peut être limitée et affectée à certains lieux qu'en vertu d'une dispensation divine. Or, partition de l'église universelle en des sections ou dioceses séparés n'est pas une institution divine: donc cette partition n'apporte aucune restriction à l'universalité de la jurisdiction épiscopale.

Si nous jettons un coup-d'œil sur les temps apestoliques et sur les premieres époques de la fondation des églises particulieres, nous serons pleinement convaincus que l'idée d'une jurisdiction illimitée étoit insépa→ rablement attachée à celle de l'épiscopat, et que ce n'étoit qu'accidentellement et par des vues de position et de circonstances qu'un évêque s'attachoit à un territoire déterminé. Nous lisons dans les actès des apôtres, chap. 20, que Saint Paul, après avoir établi un nombre d'évêques dans l'Asie, leur dit, en leur faisant ses adieux: Veillez votre conduite et celle du troupeau sur lequel le seigneur vous a établis évêques, en vous donnant la puissance de regir l'église de Dieu que Jésus-Christ a fondée par son sang. Voilà des paroles assurément bien concluantes et bien précises. Voulons-nous savoir dans quel sens Timothée étoit évêque d'Ephese? écoutons comment Saint Paul lui écrit, peu de temps après qu'il lui eût remis la conduite de cette église : JE VOUS AI PRIE (1. Timoth. 1. 3) de rester à Ephese pendant que

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