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d'un monarque l'a seul dicté; et la nation; qui en est l'unique garant, n'y prend aucune part. Il n'en seroit pas ainsi d'un pacte vraiment national qui assermenteroit en quelque sorte deux pays l'un à l'autre, et qui réuniroit tout-à-la-fois de grands intérêts et de puissans efforts. Ce pacte seul lie chaque individu par la volonté générale, produit une alliance indissoluble, et a pour base inébranlable la foi publique.

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Tel est le résultat du travail de votre comité. Il renferme trois points distincts ́ l'un de l'autre, quoiqu'indivisibles, comme vous le voyez le développement des deux principes qui doivent être la base de votre systême politique; une décision qui conserve une alliance utile en assurant le roi d'Espagne que nous remplirons nos engagemens; la demande d'un décret qui charge votre comité des modifications qu'exige cette alliance lorsqu'il faudra la renouveller. Mais cette détermination, si vous l'adoptez, indique nécessairement d'autres mesures; le maintien de notre alliance avec l'Espagne seroit illusoire si même au sein de la paix, et en nous bornant à ajouter tout le poids de notre inBluence aux négociations qui doivent as

surer le repos d'une partie de l'Europe, nous n'augmentions pas nos armemens dans la même proportion que ceux de nos voisins. Ce n'est pas lorsqu'on a des posBessions éloignées, ce n'est pas lorsqu'on croit avoir de grandes richesses à une grande distance, qu'on peut se résoudre à ne prendre les armes qu'au moment même de l'agression. Le commerce a besoin d'être garanti, non-seulement des dangers réels, mais de la crainte des dangers; et il n'a jamais été plus important d'apprendre à nos colonies qu'elles seront protégées. Voilà les maux où çonduit cette exécrable défiance qui porte des peuples voisins à se surveiller, à se redouter, à se regarder comme ennemis. Pourquoi faut-il que la nécessité même d'assurer la paix force les nations à se ruiner en préparatifs de défense? puisse cette affreuse politique être bientôt en horreur sur toute la terre !

UN membre de l'assemblée a demandé que le comité d'imposition fût chargé de faire à jour fixe un rapport à l'assemblée nationale sur la portion d'imposition que doivent supporter les rentes viageres et constituées sur le trésor public; et l'assem

blée a ordonné, en conséquence, que ce rapport lui seroit fait dans la huitaine.

J'ai demandé à prouver en trois minutes que cette proposition est tout-à-la-fois indécente, répréhensible et destituée de rai

son.

Indécente, puisqu'il ne s'agit pas moins que de démentir et d'effacer nos déclaras tions les plus solemnelles sur la foi publique.

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Répréhensible, en ce qu'elle est insidieuse et subreptice. Avant de savoir si l'assemblée nationale imposera les créanciers de l'état dans la matiere même de leurs créances, il faut lui proposer d'expliquer ce qu'elle a entendu, non-seulement lors, qu'elle les a mis sous la sauvegarde de la loyauté françoise, mais lorsqu'elle a déclaré, que, sous aucun prétexte, il ne seroit faits de réduction dans la dette publique. On atteste la déclaration des droits derklomme. que chacun doit payer suivant ses facultés: et moi j'atteste que tout homme adroit de réclamer ce qui lui a été promis librement,

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Destituée de raison sous deux rapports, dans le fait particulier et dans le fait généa ral. Dans le fait particulier, on propose a la nation d'acheter quelques millions au prix

d'une infamie, et en tarissant la riche ressource du crédit public; dans le fait géné ral, rien de plus absurde que d'imposer les capitaux prêtés à intérêt; c'est l'emprunteur et non le prêteur qui paie l'impôt : comme en général les prêteurs sont les riches, l'impôt retombe sur les pauvres ; et comme le pau vre ne peut jamais faire la loi, il faut qu'il supporte l'impôt par les privations les plus tristes pour lui et les plus désastreuses pour la chose publique.

QUE sous les derniers temps d'un gouver nement qui, follement prodigue et systé matiquement corrupteur, étoit sans cesse aux expédiens, et ne convoitoit le despotisme que pour se procurer de l'or, et l'or pour conserver le despotisme, de prétendus hommes d'état n'aient pas rougi d'écrire et d'imprimer que la loterie pouvoit être regardée comme un impôt libre, volontaire, on s'indigne plus qu'on ne s'étonne; mais qu'aujourd'hui, à l'aurore de la liberté na tionale, on essaie d'intéresser les fondateurs de la morale publique au perfectionnement d'une institution qui précipite dans toutes les calamités du vice et de la misere les classes industrieuses du peuple, voilà ce qui

fait horreur.... C'est un impôt... quel impôt, qui fonde son plus grand produit sur le délire ou sur le désespoir! quel impôt, que le plus riche propriétaire est dispensé de payer, et que les hommes sages, les meilleurs citoyens ne paieront jamais! un impôt libre! étrange liberté! chaque jour, à chaque instant , on crie au peuple qu'il ne tient qu'à lui de s'enrichir avec un peu d'argent; on propose un million pour vingt sols au malheureux qui ne sait pas compter, qui manque du nécessaire...... et le sacrifice qu'il fait à ce fol espoir, du seul argent qui lui reste, de cet argent qui appaiseroit les cris de sa famille, est un don libre et volontaire!..... C'est un impôt qu'il paie à la souveraineté (1).

Certes, lorsque les yeux de l'assemblée nationale se porteront sur les loteries, elle appercevra dans un instant que cette invention exécrable, destinée à chaquer tous les principes de la morale au même degré où elle viole toutes les proportions de l'arithmé tique honnête, frappe le peuple, dont les mœurs et la subsistance sont incessamment

(1) Lettre à Frédéric-Guillaume.

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