Page images
PDF
EPUB

ne pourra-t-il pas être distingué, par le testament de son pere, d'un fils rebelle et sans conduite! quoi! ce qu'un enfant aura dissipé en folles dépenses, son pere ne pourra en indemniser ses autres enfans, et rétablir ainsi l'équilibre !

[ocr errors]

Messieurs, ne faisons pas ce sophisme trop commun, de supposer dans un renouvellement de choses tous les vices naissant de l'ancien régime, et de croire nécessaires dans l'état de force et de santé les mêmes mesures, les mêmes préservatifs que dans l'état de foiblesse et de maladie. En créant des meilleures loix, en instituant une éducation vraiment nationale, en rappellant par-tout l'égalité, en rendant l'estime publique nécessaire, que ne faisons-nous pas pour les bonnes mœurs et pour en inspirer le goût au jeune âge?

Tout est lié dans l'état civil. Si l'on voit la jeunesse se corrompre, c'est que le's sources de corruption lui sont ouvertes. Le fils privilégié n'est pas toujours séduit le premier par ses espérances de fortune: souvent cette perspective appelle de bonne heure les faux amis; elle provoque les offres des avides séducteurs, des complaisans mercenaires.

mercenaires. Établissez l'égalité dans les familles ; vous écartez le piege; vous attaquez le désordre dans les premiers fermens qui l'excitent. Prévenir le mal, c'est mieux faire qu'y remédier.

Eh! dira-t-on encore, les peres ne pourront-ils pas échapper également à l'intention de la loi par des dons arbitraires, faits de leur vivant aux objets de leur prédilection ?

Messieurs, quand la loi a tout fait pour le bon ordre, on ne peut pas s'en prendre à elle, si les hommes sont encore plus adroits pour l'éluder qu'elle n'est puissante

les contenir : mais, dans un gouverpour nement libre, osons croire à l'amour des loix et à leur empire sur le cœur de l'homme. Osons croire qu'un bon citoyen rougira de transgresser les loix dans le sein même de sa famille, et qu'il ne se permettra pas pendant sa vie des préférences injustes, qui lui sont interdites après sa mort. Enfin, il y a toujours une grande différence entre l'état des choses où le mal est permis, favorisé par la loi, et celui où il est commis malgré la loi même.

Croyez-le, messieurs : l'éducation domestique, pour être bonne, doit être fondée 2 année. Tome XI.

[ocr errors]

sur des principes d'exacte justice, de douceur et d'égalité : moins les loix accorderont au despotisme paternel, plus il restera de force au sentiment et à la raison. Dites aux peres que leur principal empire doit être resserré dans l'autorité de leurs vertus, dans la sagesse de leurs leçons et les témoignages de leur tendresse. Faites-leur sentir que ce sera là désormais leur premiere puissance domestique, et vous verrez qu'ils seront d'autant plus excités à faire usage de ces douces armes, à les aiguiser en quelque sorte, à les rendre sûres et irrésistibles. Ainsi l'union, les soins réciproques, l'amour fraternel et filial, s'enrichiront de tout ce qu'aura perdu l'esprit de domination et d'intérêt. Il n'existera plus alors qu'une sorte d'enfans privilégiés, d'enfans qui recueilleront ce qu'il y a de plus précieux dans l'héritage de leurs peres; ce seront ceux qui emporteront le plus de fruit de la bonne éducation qu'ils auront reçue.

Je conclus donc à ce que l'assemblée nationale adopte les dispositions qui sont la base du projet soumis à son examen; ŝavoir: 1o, qu'à l'avenir toutes institutions de préciputs, majorats, fidéi-commis par contrat ou testament, soient prohibées entre

[ocr errors]

toutes personnes; et qu'à l'égard de ces institutions actuellement existantes, il soit statué des mesures convenables pour assu→ rer la jouissance de celles échues, et l'abolition des autres: 2°. que toute personne ayant des descendans en ligne directe ne puisse disposer par testament que d'une quotité déterminée de ses biens.

Mais je m'oppose, autant qu'il est en moi, à ce que cette quotité soit le quart des biens du testateur, selon le projet du comité; cette proportion beaucoup trop forte étant contraire aux principes que j'ai développés, et reproduisant en grande partie les vices d'inégalité dont il faut ici extirper la racine, ce qu'il sera aisé de démontrer, quand la 'discussion aura atteint cet article. Je demande donc que cette que tité, dont les chefs de famille pourront disposer par testament, soit bornée à la dixieme partie des biens. C'est assez pour ceux qui desirent laisser après eux quelques témoignages d'affection, de reconnoissance particuliere, et c'est trop peu pour ceux qui sont animés d'autres sentimens.

Je demande donc que l'ordre et le partage des successions en ligne directe ascendante et descendante soient invariable

ment fixés par la loi ; qu'il soit assuré aux héritiers dans cette ligne les neuf dixiemes de la masse des biens de celui auquel ils succéderont; et qu'en conséquence, l'usage des donations entre-vifs, institutions contractuelles, dispositions testamentaires sans charges de rapports, et généralement toutes autres dispositions tendantes à déranger l'ordre de succéder et à rompre l'égalité dans les partages, soient prohibés aux ascendans envers leurs descendans, et respectivement, jusqu'à concurrence de neuf dixiemes de ladite masse, sauf la libre disposition de la dixieme partie en faveur des personnes étrangeres à la ligne.

2°. Que les substitutions et fidéi-commis soient à l'avenir prohibés entre toutes personnes; et qu'à l'égard des substitutions qui ont commencé d'avoir leur exécution, ou sous la foi desquelles il a été contracté des alliances, elles ne conservent d'autre effet que dans un degré et par une seule mutation; toute extension au-delà d'un degré étant révoquée et abolie.

QUAND (1) les angoisses du despotisme,

(1) Ce discours sur l'instruction publique ne se trouve

« PreviousContinue »