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les arrêtés des directoires du district de Dijon, et du département de la Côte-d'Or, des 7 décembre et 28 janvier derniers; considérant les avantages que présentent les réunions des municipalités et le désir qu'elle a, pour l'intérêt général des citoyens, de multiplier et de faciliter ces réunions, autant qu'il sera en son pouvoir, décrète ce qui suit :

« Art. 1er. Les communes de Sepois, Saint-Vivant et Vergy, ensemble les hameaux ou écarts qui en font partie, ne formeront provisoirement qu'une seule et même municipalité dans le lieu et sous le nom de municipalité Vergy, jusqu'à ce qu'il soit porté une loi sur la réduction des municipalités, l'étendue et la nature de leurs circonscriptions, conformément à l'instruction de l'Assemblée nationale, du 14 décembre 1789. « Art. 2. Les titres, papiers et registres des trois municipalités réunies, seront transférés dans le greffe municipal de Vergy, soit pour pourvoir à leur conservation, soit pour y avoir recours au besoin.

« Art. 3. Il sera fait, par chacune des communes, un état ou inventaire séparé, signé de leurs anciens greffiers et officiers municipaux, visé et certifié par les officiers municipaux nouvellement élus; cet état demeurera annexé au dossier de chaque commune, et sera transcrit sur le registre des délibérations de la municipalité de Vergy, à la suite du procès-verbal de remise du dépôt des pièces.

« Art. 4. Les élections du maire et des cinq officiers municipaux qui ont eu lieu le 24 novembre, sont autorisées jusqu'à l'époque fixée par l'article 42 du décret sur les municipalités, lors de laquelle et d'après les formalités qu'il prescrit, il sera procédé au renouvellement de la moitié des membres qui la composent. »>

(L'Assemblée ordonne l'impression du rapport et du projet de décret et ajourne la seconde lecture à huitaine.)

M. Baignoux, au nom du comité de l'ordinaire des finances, présente un projet de décret (1), relatif aux dépenses du camp de Jalès. Ce projet de décret est ainsi conçu:

« L'Assemblee nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de l'ordinaire des finances, relativement à la demande faite par le département du Gard, du remboursement des dépenses occasionnées par les expéditions du camp de Jalès; vérification faite des pièces justificatives et états visés et certifiés par le directoire du département du Gard;

« Considerant qu'il est instant de pourvoir au remboursement des sommes dues depuis le mois de février dernier, tant à différentes caisses publiques dont l'apurement de compte se trouve suspendu, qu'à différents fournisseurs qui réclament la rentree des fonds qu'ils ont avancés, décrète qu'il y a urgence.

L'Assemblée nationale, après avoir rendu le décret d'urgence, décrète que les commissaires de la tresorerie nationale feront parvenir, au payeur general du département du Gard, la somme de 80,141 1. 4 s. 9 d., montant de la dépense faite par les gardes nationales, pour l'expédition du camp de Jalès, au mois de février dernier.

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toire du département du Gard, qui délivrera les ordonnances nécessaires pour l'acquittement des avances et fournissements qui ont été faits pour cet objet.

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(L'Assemblée décrète l'urgence puis adopte le projet de décret.)

Un membre, au nom du comité de l'ordinaire des finances, présente un projet de décret, tendant à autoriser la ville de Montluçon, département de l'Allier, à s'imposer extraordinairement pour la construction d'une halle de boucherie; ce projet de décret est ainsi conçu :

« L'Assemblée nationale, considérant qu'il importe, pour la commune de Montluçon, d'établir une halle de boucherie qui assure, dans cette ville, la salubrité de l'air, et que la saison des ouvrages ne permet pas de tarder plus longtemps, vu l'avis du district de Montluçon, et celui du département de l'Allier, décrète qu'il y a urgence.

» L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de l'ordinaire des finances, et décrété l'urgence, décrète ce qui suit:

Art. 1er.

"La municipalité de Montluçon est autorisée, sous la surveillance des directoires du département de l'Allier, et du district de la même ville, à faire construire une halle de boucherie, conformément au devis qui sera annexé à la minute du présent décret, et à la charge que la dépense de cette construction ne pourra s'élever au delà de la somme de 5,210 1. 13 s.

Art. 2.

<< La municipalité de Montluçon est autorisée, sous la surveillance exprimée en l'article premier, à imposer, sur tous les contribuables de son territoire, par addition aux rôles des contributions foncière et mobilière de l'année 1792, la somme de 5,210 I. 13 s., sur laquelle viendra en atténuation celle de 2,810 1. 13 s., provenant de dons volontaires. En conséquence, il sera tenu compte, sur les rôles, à chacun des contribuables, des sommes qu'il aura données volontairement; et s'il s'en trouve qui ait donné plus que le montant de leur quote-part d'imposition, cet excédent tournera en moins imposé sur la totalité des contribuables.

Art. 3.

Le présent décret ne sera envoyé qu'au seul département de l'Allier. »

(L'Assemblée décrète l'urgence, puis adopte le projet de décret.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une lettre de M. Ramond, député de Paris, qui demande un congé pour des raisons que nécessite l'état de sa santé.

(L'Assemblée accorde le congé).

M. Gossuin. J'exprime de nouveau à l'Assemblée mes inquiétudes sur les incursions, brigandages et assassinats que commettent les Autrichiens aux frontières du Nord. Je demande que le ministre de la guerre rende compte, par écrit, dans le jour, des mesures qu'il a prises pour la défense de ces frontières.

(L'Assemblée décrète cette motion).

M. Lacombe-Saint-Michel, au nom du comité militaire, présente un projet de décret relatif au

mode d'avancement du corps de l'artillerie

dant la guerre; ce projet de décret est ainsi

conçu :

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité militaire, considérant combien il est instant que les remplacements des officiers de l'armée de ligne n'éprouvent aucun retard, décrète qu'il y a urgence.

L'Assemblée nationale, après avoir décrété l'urgence, décrète que, sans avoir égard à la seconde partie des articles 11, 16 et 19 du titre II de la loi du 27 avril 1791, l'avancement pour l'artillerie aura lieu, en temps de guerre, suivant le même mode décrété pour l'avancement en temps de paix.

(L'Assemblée décrète l'urgence, puis adopte le projet de décret sauf rédaction).

M. Amy, au nom du comité de liquidation, fait la troisième lecture (1) d'un projet de décret relatif aux indemnités dues aux fermier général et sous-fermiers des anciennes messageries dont le bail a été résilié; ce projet de décret est ainsi conçu :

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« L'Assemblée nationale, sur le compte rendu par le commissaire du roi, liquidateur, et sur le rapport de son comité de liquidation, après avoir entendu les trois lectures du projet de décret, en ses séances des........., et reconnu qu'elle était en état de délibérer;

Décrète que les indemnités dues aux fermier général, sous-fermiers et arrière-sous-fermiers des anciennes messageries, conformément à la loi du 29 août 1790, sont liquidées ainsi qu'il suit :

«Art. 1. L'indemnité pour la résiliation du bail général des messageries, est fixée à 1 million 201,000 livres, fermages de 2 années sur les 6 restant à courir; à la charge par Durdan, fermier général, d'y faire participer les sous-fermiers; et ceux-ci, les arrière-sous-fermiers, à raison du prix et de la durée des sous-baux et dans la proportion du bail actuel, comparé à celui du bail résilié, sans que Durdan ni les sousfermiers puissent réclamer aucune autre indemnité résultant de pertes quelconques par le fait de résiliation.

« Art. 2. L'indemnité résultant des non-jouissances, pendant les six derniers mois 1789 et l'année 1790, est fixée à 749,250 livres, savoir : pour les six derniers mois 1789, 249,750 livres; et pour l'année entière 1799, 499,500 livres; à la charge, par Durdan, d'y faire participer les sousfermiers; et ceux-ci, les arrière-sous-fermiers; savoir pour 1789, à raison d'un huitième et

(1) Voy. Archives parlementaires, 1 série, t. XLIII, séance du 14 mai 1792, page 329, la seconde lecture de ce projet de decret.

pour 1790, à raison d'un quart, sur le prix des sous-baux.

« Art. 3. Attendu que le décret du 20 décembre 1790, qui a prorogé le service des messageries depuis le 1er janvier jusqu'au 1er avril 1791, n'a obligé le fermier au payement d'aucun fermage, il n'y a lieu à liquidation de l'indemnité demandée à cet égard.

Art. 4. Sur la demande du fermier général à ce que la nation se charge du recouvrement des débets des sous-fermiers, il n'y a lieu à délibérer.

« Art. 5. Sur les bordereaux qui seront arrêtés entre le fermier général et les sous-fermiers, il sera délivré par le commissaire du roi, liquidateur, à chacun des sous-fermiers individuellement, des reconnaissances de liquidation, imputables sur l'indemnité totale, sans que les oppositions existantes sur le fermier général, puissent arrêter le payement desdites reconnaissances à la caisse de l'extraordinaire.

Art. 6. Sur la somme de 4,960,250 livres, cidessus fixée, il sera fait prélèvement au profit du Trésor public, de la sommne de 1,043,465 1. 10 s. 8 d., dont 1,033,465 1. 10 s. 8 d., dus par Durdan sur le prix de son bail, ainsi qu'il résulte du certificat des commissaires de la trésorerie nationale du 30 août 1791; et 10,000, prix d'une maison située à Châlons-sur-Marne, acquise du roi par Durdan, sauf, néanmoins, nouveau compte, s'il y a lieu, avec les commissaires de la trésorerie nationale, et sous leur responsabilité.

«Art. 7. Les reconnaissances de liquidation seront expédiées à chacune des parties prenantes, en satisfaisant, par elles, aux formalités prescrites par les lois.

«Art. 8. Le présent décret sera publié dans l'étendue du département de Paris seulement. * M. Le Breton commence la lecture d'un discours sur les postes et messageries.

Cette lecture est interrompue.

(L'Assemblée ordonne l'impression du discours de M. Le Breton (1), ainsi que celle des tableaux de la régie Bergaut, établie par M. Turgot, et ajourne la discussion.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une lettre des administrateurs au département de police de Paris relative à la détention des sieurs Charles et Allier, arrêtés à cause de leur identité de nom avec les complices du sieur du Saillant (2),

M. Merlin. J'observe à l'Assemblée que ces deux citoyens portent le même nom que deux des accusés de complicité dans les coniplots de M. du Saillant et qu'ils sont du mênie pays. J'ajoute qu'ils ne donnent d'autres preuves de l'erreur commise sur leur personne que leur propre assertion. Dans ces conditions, je crois qu'il serait téméraire de se prononcer sur leur mise en liberté, et je demande que l'Assemblée passe à l'ordre du jour jusqu'à ce qu'elle ait pris de plus amples renseignements.

M. Dongois. De ces deux citoyens détenus, je ne connais que le sieur Allier, et c'est pour lui que je veux parler.

Le sieur Allier a été fait capitaine dans la garde nationale d'Embrun, où il s'est fait ins

(1) Voy. ci-après aux annexes de la séance, page 29, l'opinion de M. Le Breton sur les postes et messageries. (2) Voy. Archives parlementaires, 1° série, t. XLVI, séance du 18 juillet 1792, au soir, page 638, le décret d'accusation rendu par l'Assemblée à ce sujet.

crire dès les premiers jours de la Révolution. La ville d'Embrun n'est pas voisine de Jalès, elle en est distante de 70 lieues. M. Allier, qui y est né, n'en est sorti que momentanément. Il y était encore à l'époque du 16 mai dernier. Il est venu à Paris pour y suivre la liquidation d'une charge de son père et solliciter la commission de payeur général du département; il n'est pas sorti de la ville depuis le moment où il y est arrivé. Les membres de la députation du département l'ont yu fréquemment. Ils l'ont vu notamment le 15 juin, jour où il leur dit qu'étant allé à la Comédie-Française, on lui avait volé son portefeuille dans lequel était son passeport. Tous mes collègues le connaissent; ils savent tous qu'il s'est bien prononcé depuis le commencement de la Révolution; qu'en 1790, il fut envoyé comme député à la Fédération, qu'il est venu à Paris pour des affaires importantes. Je demande, en conséquence, qne l'affaire, quant à ce qui regarde ce jeune homme, soit renvoyée à un comité devant lequel je produirai les preuves de ce que j'avance devant vous. Si le comité ne les trouve pas suffisantes, M. Allier ira alors à Orléans attendre que de meilleures preuves soient arrivées.

M. Morisson. J'observe à l'Assemblée que cette affaire est plutôt du ressort du pouvoir exécutif et je demande qu'elle lui soit renvoyée.

M. Chabot. Je pense, au contraire, que c'est plutôt à l'Assemblée à corriger l'erreur au moyen de laquelle un décret pouvait, par la conformité des noms, être appliqué à différentes personnes. Je demande le renvoi au comité de surveillance avec mission d'en faire le rapport à la séance de ce soir.

(L'Assemblée renvoie la lettre au comité de surveillance.)

Un membre donne lecture d'une lettre de MM. Fragonard, Delieux et Andrieux, anatomistes célèbres, qui font l'offrande d'une découverte unique et importante dans leur art, avec près de 2,000 pièce injectées, d'après leur méthode. Ils expriment leur vou pour la création, dans la ville de Paris, d'un établissement destiné à utiliser leur secret et à le consacrer au profit de la nation.

(L'Assemblée décrète la mention honorable de cette offrande et le renvoi du mémoire qui l'accompagne au comité d'instruction publique.)

Un de MM. les secrétaires annonce les dons patriotiques suivants :

1o Les citoyens de la petite ville d'Arnay-sur-Ar· raux ont fait parvenir par les maires et officiers municipaux de la même ville une somme de 465 livres en assignats.

2° M. Turbuarc, de Reims, envoie un assignat de 5 livres et promet pareille somme tous les mois.

(L'Assemblée accepte ces deux offrandes avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal, dont un extrait sera remis aux donateurs.)

M. Durin. J'ai reçu, Messieurs, des administrateurs composant le directoire du district de Decize la pièce suivante, qu'il me paraît important de communiquer à l'Assemblée :

«Par devant nous s'est présenté le sieur Claude, marchand taillandier, citoyen, demeurant au faubourg de... lequel a exposé qu'il avait à donner communication au directoire d'une pièce propre à découvrir les manoeuvres des ennemis de la Constitution; que jeudi 12 de ce mois, à sept

heures du matin, il avait trouvé à terre vis-àvis la porte du sieur....., commissaire du roi, un papier plié en quatre; que n'ayant pas le temps de le lire dans le moment, il a mis ce papier dans sa poche; que rentré chez lui, et ayant voulu l'examiner, il avait vu un acte d'association dont le contexte annonçait une coalition combinée par les ennemis du bien public; que ce papier n'était pas signé, mais que l'écriture lui était connue; que sur le revers de ce papier il y avait une liste des confédérés tous habitants de Decize, et à la tête duquel se trouvait le sieur Renaud, chevalier de Saint-Louis; que pour remplir son devoir de bon citoyen il croyait devoir déposer cette pièce au directoire pour être par lui pris telle précaution qu'il jugera convenable. »>

Je vais, Messieurs, vous faire lecture de cet acte de coalition; l'intitulé est ainsi :

Coalition des véritables amis du roi et de la patrie, M. Renaud, chevalier de Saint-Louis, adjudant; M. Carroué, perruquier.

Nous, soussignés, amis de l'ordre et de la paix, profondément affligés des progrès destructeurs de l'affreuse anarchie, et craignant de voir pénétrer jusqu'ici les troubles que partout les mal intentionnés cherchent à répandre, avons résolu de nous réunir et de former entre nous une coalition, pour mettre un frein aux projets des intrigants qui soufflent de toutes parts le feu des discordes publiques. Nous jurons notre honneur de ne jamais troubler la tranquillité publique, de rester étroitement unis, et de vivre ensemble comme des frères; de défendre mutuellement nos vies et nos propriétés contre toute espèce d'attaque et d'invasion, et de voler, au premier signal, au secours de ceux de nos concitoyens qui se trouveront exposés aux fureurs des brigands. Nous jurons de garder le secret le plus inviolable sur notre confédération, sur les résolutions que les circonstances critiques pourraient nous faire prendre, et sur le mot d'ordre et les avis qui nous seront donnés par le chef que nous reconnaitrons. »

« Fait à Decize, le 17 mars 1792. »

Le district a renvoyé cette pièce aux officiers de police. Nous sommes déjà informés qu'il y a déjà deux de ces particuliers arrêtés. Le département a donné des éloges à la conduite de la municipalité, du district, de la garde nationale et du juge de paix de la ville de Decize. Je demande, en conséquence, que l'Assemblée nationale veuille confirmer les éloges, et renvoie ces pièces au comité de surveillance.

(L'Assemblée renvoie ces pièces au comité de surveillance.)

Un membre: Je demande que la discussion de l'affaire concernant MM. Jouneau et Grangeneuve soit ajournée à ce soir.

(L'Assemblée prononce l'ajournement.)

M. Cambon. Députés par l'Assemblée nationale pour assister au convoi de M. Paul Jones, (1) nous nous y rendimes, et nous n'avons pas été peu surpris d'y trouver un commissaire du roi, faisant les fonctions pour cet enterrement, et remplissant en même temps la double fonction de procureur du roi. Il exigeait un salaire des

(1) Voy. Archives parlementaires, 1° série, t. XLVI, séance du 19 juillet 1792, page 669, le décret ordonnant qu'une deputation de l'Assemblée assistera aux funérailles de Paul Jones.

citoyens, et prétendait avoir un privilège exclusif pour ces cérémonies. Il exige 136 livres pour les enterrements ordinaires. Pour ceux qui sont plus riches, ordinairement cela se monte à une somme plus considérable. Dans cette somme de 136 livres, il y a une somme de 3 louis pour le procureur du roi, qui n'existe pas. Il est en discussion avec les commissaires de police, et prend le titre de commissaire du roi. Nous avons cru, en voyant cet abus, qu'il était de notre devoir de le dénoncer à l'Assemblée, et il me paraît que lorsque toutes les charges sont supprimées, que les commissaires de police existent, que le pouvoir judiciaire s'exerce gratuitement, il ne doit point y avoir de solde pour le procureur du roi qui n'existe pas, et qu'au moins il faudrait faire rendre compte à ce commissaire du roi des revenus qu'il se fait par l'exercice d'une fonction qui n'est pas reconnue par la loi.

M. Masuyer. Je demande que le ministre de la justice soit tenu de rendre compte, par écrit, de ce brigandage-là.

(L'Assemblée décrète que le ministre de la justice rendra compte demain, par écrit, de l'existence et des fonctions de commissaire du roi et des salaires qu'il exige pour les exercer.)

M. Albitte. Un citoyen pauvre, mais patriote, qui n'a pas l'honneur d'être de la classe des honnêtes gens... (Applaudissements des tribunes.)

M. Jahan. Je demande que les mots honneur et vertu soient rayés du dictionnaire français par un décret.

M. Albitte. Ce patriote m'a chargé de faire une offrande consistant en une médaille d'argent qui fut frappée dans le temps de l'idolâtrie, en faveur de M. Moitié, ci-devant La Fayette, actuellement La Fayette malgré vos décrets; il en fait l'hommage. Je prie l'Assemblée nationale de la convertir en pièces de 15 sols, afin qu'au moins l'effigie soit utile à la patrie; et je jure en remettant ce don, de briser les idoles, et de ne plus croire aux héros qu'après leur mort. (Vifs applaudissements des tribunes.)

M. Dalloz. Les jeunes élèves du collège national de Saint-Claude, département du Jura, ont prié la municipalité de destiner aux frais de la guerre de la liberté, la somme qu'elle consacre chaque année pour une distribution de prix dans ce collège. La municipalité s'est empressée d'accueillir une offrande si patriotique. Cette somme est, je crois, de 25 louis. Les habitants de ce district, qui se piquent d'être honnêtes gens, ont payé leurs contributions patriotiques, toutes ieurs contributions publiques sont payées.

M. Clavières, ministre des finances, leur avait promis de les donner en exemple à tous les autres districts du royaume; ce district, l'un des plus petits de la frontière du Rhin, quoiqu'il ait à pourvoir à sa défense, a fourni à lui seul un bataillon et demi de gardes nationales. (Vifs applaudissements.)

M. Jouffret. Je demande mention honorable, et que l'extrait soit envoyé pour être distribué en prix.

(L'Assemblée nationale décrète la mention honorable de l'offrande au procès-verbal dont l'extrait sera envoyé aux élèves du collège de Saint-Claude pour être distribué en prix,)

M. Crestin. Au lieu de vous offrir un don patriotique, je vous annoncerai qu'un seul canton très peu peuplé, celui de Mercey-sur-Saône,

district de Gray, département de la Haute-Saône, vient de fournir 100 hommes à la patrie; cela est autant dû au zèle de M. Gan, commissaire qui a présidé la formation, qu'au civisme des habitants. Je demande la mention honorable.

(L'Assemblée décrète la mention honorable de la conduite de ce canton.)

Un membre, au nom de la commission chargée de l'examen des comptes des ministres de la guerre, présente un projet de décret portant qu'il n'y a lieu à délibérer sur la lettre du ministre de la guerre, du 26 juin dernier, relative à la réclamation du sieur Espagnac, et chargeant le comité de législation de présenter des mesures sur les formes des marchés qui doivent être passés par les ministres; ce projet de décret est ainsi conçu :

"

L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de sa commission militaire, tant sur la lettre du ministre de la guerre du 26 juin dernier, par laquelle il demande que l'Assemblée lui prescrive la conduite qu'il doit tenir vis-àvis du sieur d'Espagnac, qui réclame, en qualité de caution des sieurs Henrion et Masson, une avance de 1,420,000 livres, en vertu des marchés passés entre le gouvernement et ces particuliers, que sur lesdits marchés en date des 8 et 10 du mois dernier, et le cautionnement passé devant Chaudot, notaire, le 12 du même mois; considérant qu'il n'appartient point au pouvoir législatif de connaître des conventions particulières passées entre le gouvernement et les citoyens, et que c'est le pouvoir judiciaire seul qui peut les résilier, les modifier, en procurer ou en arrêter l'exécution, dans les cas déterminés par les lois, décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la demande du ministre de la guerre, portée par sa lettre du 26 juin dernier, sauf au gouvernement à se pourvoir devant les tribunaux contre les marchés susdatés, et à y procéder suivant le mode qui sera incessamment déterminé.

L'Assemblée nationale charge le comité de législation, réuni à sa commission militaire : 1° de lui présenter, dans vingt-quatre heures, un projet de loi sur le mode de poursuivre et de défendre devant l'ordre judiciaire les actions qui intéressent le gouvernement; 2o de lui présenter, sous trois jours, un projet de loi sur les formes des marchés qui doivent être passés par les ministres, sur les moyens d'en assurer les dates, d'en prévenir les altérations, et de donner aux ministres des coopérateurs qui soient leurs contrôleurs nécessaires en cette partie. »

(L'Assemblée adopte le projet de décret.)

M. Gastellier. J'observe à l'Assemblée qu'il est plus de midi et je demande que l'affaire de M. La Fayette soit jugée sans désemparer.

M. Brival. Et moi je demande que le décret d'accusation soit porté sans désemparer.

M. le Président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion (1) du rapport de la commission extraordinaire des Douze sur la pétition du général La Fayette.

M. Lasource. Messieurs (2), je viens briser une idole que j'ai longtemps encensée. Je me ferais d'éternels reproches d'avoir été le partisan et l'admirateur du plus perfide des hommes, si je ne me consolais en pensant que la publicité

(1) Voy. Archives parlementaires, 1 série, t. XLVI, séance du 20 juillet 1792, au matin, page 686, le commencement de cette discussion.

(2) Bibliothèque nationale: Assemblée législative, Le 34, n° 112.

de mon opinion expiera ma trop longue erreur. Des témoins irréfragables accusent M. La Fayette: sa lettre du 16 juin à l'Assemblée nationale, son ordre à l'armée, du 26, et sa pétition lue à votre barre le 28 du même mois. Je vais retracer à vos yeux les dépositions de ces témoins. Il faut les avoir entendus avant de prononcer sur le sort du coupable.

Je n'entrerai point dans la discussion à laquelle aurait pu donner lieu le premier rapport de votre commission extraordinaire, rapport où l'on examine si M. La Fayette est coupable d'avoir présenté une pétition à l'Assemblée nationale, n'y ayant point de loi qui interdise aux généraux de faire des pétitions. J'observerai seulement qu'il ne s'agissait pas de savoir s'il y avait une loi qui défendît à un général de faire une pétition, mais qu'il s'agissait de savoir si la pétition de M. La Fayette était inconstitutionnelle et attentatoire à la liberté; s'il avait parlé au Corps législatif un langage menaçant; s'il avait laissé délibérer son armée, s'il en avait présenté le vœu, après l'avoir recueilli et si, en un mot, il était coupable, non pour avoir fait une pétition, mais pour l'avoir faite d'une manière qui violait la Constitution; car, eut-il le droit de la faire, il ne serait pas moins coupable de l'abus qu'il aurait fait de ce droit.

Je laisserai M. La Fayette appeler qu'il présenta à l'Assemblée nationale une déclaration des droits qui ne fut pas très accueillie; qu'il épousa, en Amérique, la cause de la liberté, avec laquelle il a, depuis lors, fait divorce. Je laisserais faire son éloge et suppléer prudemment à l'inaction des panégyristes et au silence de l'opinion; s'il n'avait commis d'autre crime que de se livrer au délire d'une vanité ridicule, échappant à vos regards par sa petitesse même, il ne mériterait point d'occuper le moins précieux de vos ins

tants.

Mais, ce n'est point une folie, c'est un crime qu'il a commis. Ce crime, je ne le chercherai point dans les calomnies qu'il vomit en insultant à un de vos décrets rendu, à la presqu'unanimité, contre des ministres intègres auxquels il lui est très permis de rendre le mépris qu'ils ont pour lui. Mais je le chercherai, ou plutôt je vous le montrerai, peint en traits ineffaçables dans l'insolence mensongère avec laquelle il attaque les représentants du peuple, dans l'audacieuse perfidie avec laquelle il les accuse et cherche à les déshonorer et à les perdre dans l'opinion.

་་

Sous quel aspect présente-t-il l'Assemblée des élus et des mandataires du souverain? Sous l'aspect d'une réunion confuse d'hommes également méprisables, quoique divisés en deux parties, sous l'aspect d'un monstrueux assemblage d'intrigants et de dupes, de factieux et de lâches, de tyrans et d'esclaves. Ouvrez sa lettre, vous y trouverez ces expressions dont le sens n'est pas équivoque « Portez vos regards sur ce qui se passe dans votre sein et autour de vous. Pouvezvous dissimuler qu'une faction, et pour éviter les dénominations vagues, que la faction jacobite a causé tous les désordres ? C'est elle que j'en accuse hautement. » Et où est cette faction que M. La Fayette accuse? Ce n'est pas seulement autour de vous, comme il a l'adresse perfide de l'ajouter. S'il ne l'avait vu que hors de votre sein, que pourraient importer à la nation et ses visions, et ses calomnies, et ses injures, et ses fureurs. Mais cette faction qu'il accuse, c'est ici qu'il la voit d'abord; c'est dans votre sein qu'il la trouve.

S'il ajoute et autour de vous, cette addition machiavélique n'est qu'un voile qu'il jette sur la noirceur de son âme, un bandeau dont il couvre à demi l'empreinte du coup sacrilège qu'il a frappé, et une porte qu'il s'ouvre pour échapper à la loi insolemment provoquée.

Ce que M. La Fayette appelle faction jacobite, c'est cette masse imposante d'amis de la liberté, qui n'ont jamais voté que pour elle; c'est cette fière majorité qui, en consentant que César fùt grand, a toujours voulu que Rome fùt libre (Applaudissements à gauche), qui s'est fortement prononcée quand il a fallu opter entre les droits sacrés du peuple et les prérogatives usurpées ou conventionnelles des rois; qui s'est constamment levée tout entière pour l'égalité contre des privilèges, pour des opprimés contre des oppresseurs, pour tous contre quelques-uns. C'est donc la majorité de l'Assemblée nationale que le général La Fayette présente comme une faction. C'est elle qu'il accuse hautement d'être la cause de tous les désordres. Quelle affreuse conséquence ne laisse-t-il point à déduire! C'est qu'il faut frapper et détruire cette majorité qu'il désigne, et que ce n'est qu'à ce prix que l'ordre et la tranquillité renaîtront. Je poursuis la lecture de cet impudent libellé; et non loin des expressions que je vous ai déjà citées, je vois une nouvelle preuve de perfidie et de conspiration. C'était peu d'avoir présenté une partie de l'Assemblée comme une faction que rien n'arrête; il présente l'autre partie comme une masse inerte et molle qui ne sait s'opposer à rien; il ne craint pas d'avancer que ce qu'il appelle la secte, la corporation jacobite, subjugue les représentants et les mandataires du peuple françois; ainsi les représentants et les mandataires du peuple sont donc courbés sous le joug de quelque chef de parti, à genoux devant quelques intrigants, prosternés bassement aux pieds de quelques séditieux; ainsi les représentants et les mandataires du peuple sont donc des hommes sans caractère, sans énergie, sans respect pour leur mission, sans amour pour leurs devoirs, sans vertus, sans mœurs, sans probité; ainsi les représentants et les mandataires du plus grand de tous les peuples sont donc ce qu'il y a de plus vil et de plus méprisable dans l'univers. Oui, c'est ainsi qu'il les peint, cet horrible conspirateur, qu'on a le courage, dirai-je, ou l'impudence d'excu

ser.

En vain, voudrait-on persuader que le tableau qu'il trace n'est que le fruit de l'étourderie ou du délire. J'y vois toutes les combinaisons d'une méchanceté réfléchie, d'une perversité paisible, d'une scélératesse froide. J'y vois l'intention bien marquée de dissoudre le Corps législatif et d'étouffer la liberté. Eh! qui pourrait s'aveugler jusqu'au point de ne pas l'y voir. Supposer une faction puissante dans le sein du Corps législatif, c'est exciter des insurrections, ou préparer des assassinats, montrer une grande masse d'hommes subjugués et nuls, c'est appeler le mépris public; ainsi le traître que j'accuse a su disposer les choses de manière à perdre à la fois tout le Corps legislatif. Si je ne présente qu'une faction, s'est-il dit à lui-même, je ferai tomber quelques têtes, mais le peuple se réunira autour de celles qui auront échappé à mes coups; assurons un projet unique, par l'emploi d'un double moyen; ici, montrons des factieux dont l'audace ne sait point connaître de frein, et je les ferai tomber sous le tranchant d'un fer homicide; là, montrons des hommes ineptes, des âmes lâches, et ils seront

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