Page images
PDF
EPUB

pire des lois, sans lequel il n'y a que confusion, désordres, malheurs, et une anarchique tyrannie plus cruelle mille fois que celle du despotisme.

La loi vous met tous en état de surveillance permanente; profitez-en pour donner du poids à l'autorité, du ressort au gouvernement; profitez-en pour rétablir l'ordre et secourir la France qui ne peut résister, si tous les pouvoirs, toutes les volontés, tous les courages ne se réunissent pour la sauver. C'est le roi qui vous appelle; c'est un roi fier de commander à un peuple libre, qui vous conjure, au nom de la liberté qu'il aime et de l'égalité qu'il est comme vous résolu de maintenir, de vous rallier tous sous les drapeaux de la patrie, de l'aider à donner force à la loi contre les rebelles du dedans et du dehors, de jurer avec lui de vaincre ou de mourir pour les droits de la nation, et de vous ensevelir sous les débris de l'Empire, plutôt que de souffrir qu'il y soit porté atteinte, que des étrangers ou des rebelles puissent donner des lois à la France, et que de flétrir par une capitulation honteuse l'honneur du nom Français.

Par ces considérations, le roi partageant la sollicitude de l'Assemblée nationale, qui par son acte du 11 juillet, a déclaré la patrie en danger; profondément convaincu que le moment où la liberté publique est menacée, est celui où il importe le plus de rappeler les citoyens et les magistrats à l'exacte observation des lois qui la garantissent, et notamment de celle du 8 juillet, qui fixe les mesures à prendre quand la patrie est en danger, Sa Majesté s'empresse de retracer aujourd'hui à tous les Français les devoirs que ces différentes lois leur imposent. En conséquence:

Art. 1er.

Sa Majesté invite tous les citoyens en état de porter les armes, et particulièrement ceux qui ont déjà eu l'honneur de servir la patrie dans quelque grade que ce soit, à se faire inscrire sur-le-champ, pour compléter l'armée de ligne.

Art. 2.

Invite tous les citoyens réunissant les conditions requises, qui ne se sont pas encore fait enregistrer sur le rôle de la garde nationale, à satisfaire sans délai à cette obligation.

Art. 3.

Enjoint à tous les corps administratifs et à toutes les municipalités, de se conformer surle-champ aux dispositions de la loi du 8 juillet, relatives à la formation des bataillons de gardes nationales destinés à la défense de l'Etat.

Art. 4.

Leur recommande d'instruire tous les citoyens des devoirs particuliers que les circonstances actuelles leur imposent, de ranimer leur zèle, et de les exciter à voler partout où les appelleront les dangers de la patrie.

Art. 5.

Leur recommande pareillement de ne rien négliger pour hater leur armement et accélérer

leur marche, et de leur fournir à cet effet toutes les facilités qui seront en leur pouvoir.

Art. 6.

Exhorte tous les citoyens qui obtiendront l'honneur de marcher les premiers au secours de la patrie, à la subordination envers leurs chefs, à l'exactitude dans le service, à un zèle digne de la noble cause qu'ils sont appelés à défendre, et les engage à honorer autant le nom Français par leur humanité envers les ennemis désarmés, que par leur courage dans les combats.

Art. 7.

Exhorte aussi les citoyens qui demeureront à la garde de l'intérieur du royaume, à donner des preuves de leur patriotisme, en faisant personnellement leur service, à maintenir la sùreté des personnes et des propriétés, l'exécution des jugements, et le respect dû aux autorités constituées.

Art. 8.

Rappelle à tous les fonctionnaires publics, l'obligation de résidence qui leur est imposée par les lois, et que les périls de l'Etat rendent plus étroite encore et plus indispensable. Enjoint à ses commissaires près les tribunaux, aux procureurs généraux syndics près les départements, et procureurs syndics près les administrations de district, de tenir la main, chacun en droit soi, à l'exécution rigoureuse de cette loi, et de lui dénoncer les infractions qui pourraient y être faites.

Art. 9.

Recommande enfin à tous les administrateurs et autres fonctionnaires publics, civils et militaires, de redoubler d'ardeur et d'assiduité dans l'exercice de leurs fonctions, et à tous les citoyens de se souvenir que ce n'est qu'en faisant tous les sacrifices, et en montrant un respect inviolable pour la loi, qu'ils peuvent se montrer dignes de la liberté.

Ordonne que la présente proclamation sera envoyée aux corps administratifs et judiciaires, imprimée, lue, publiée et affichée partout où besoin sera.

Fait au conseil d'Etat, le 20 juillet 1792, l'an IV. de la liberté.

Signé LOUIS. Et plus bas, DEJOLY.

Certifié conforme à l'original.

DEUXIÈME ANNEXE (1)

A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE DU DIMANCHE 22 JUILLET 1792.

PÉTITION DE JEAN-FRANÇOIS CARION, curé d'Issyl'Evêque, à l'Assemblée nationale (2).

<< Messieurs,

« Détenu au Châtelet de Paris pour une fausse accusation de crimes de lèse-nation, j'obtins le 17 mars 1791, le décret suivant de l'Assemblée constituante:

« L'Assemblée nationale, ayant ouï son comité des rapports, décrète que le sieur Jean-François Carion, curé et maire d'Issy-l'Evêque, sera élargi des prisons où il est détenu et renvoyé devant les tribunaux ordinaires pour y être jugé.

[ocr errors]

« Ce décret fut sanctionné le 18 mars, et je fus mis sur-le-champ en liberté.

« Je me suis pourvu en réparation, satisfaction et dommages-intérêts contre mes accusateurs; les tribunaux du district d'Autun en première instance, et du district de Chalon-surSaône, par appel, ont jugé, l'un, par sentence du 9 septembre 1791, l'autre, par jugement du 28 janvier 1792, que j'étais non recevable dans ma demande en dommages et intérêts, attendu, ont-ils dit,« que la loi du 18 mars ne me déchargeait pas d'accusation. »

« L'Assemblée constituante, Messieurs, a fait à mon égard les fonctions de grand juré; elle n'a pu déclarer autre chose, sinon que j'étais, ou que je n'étais pas criminel de lèse-nation.

Le juré ne pourra donner de déclaration sur un délit qui ne serait pas porté dans l'acte d'accusation, quelle que soit la déposition des témoins article 37, titre VII de l'examen de la conviction. »

«Je n'étais accusé, Messieurs, que de crimes de lèse-nation, l'Assemblée constituante n'a pu donner la déclaration sur d'autres délits; et comme, sur le rapport de son comité, elle a reconnu que je n'étais pas criminel de lèse-nation, elle m'a mis en liberté.

Lorsque l'accusé aura été déclaré non convaincu, le président prononcera qu'il est acquitté de l'accusation, et ordonnera qu'il sera mis surle-champ en liberté. Tout particulier ainsi acquitté, ne pourra plus être repris, ni accusé pour raison du même fait. » (Ibidem.)

« Qu'a donc voulu dire, Messieurs, l'Assemblée constituante, en ajoutant dans la loi du 18 mars, qu'elle me renvoyait devant les tribunaux ordinaires pour y être jugé?

Renvoie-t-on devant les tribunaux, pour y être jugé, celui que l'on décharge d'accusation? et si en le déchargeant des crimes dont il est accusé, on le trouve coupable d'autres crimes, n'est-on pas tenu au moins de les énoncer?

« Si l'accusé est déclaré non convaincu du fait porté dans l'acte d'accusation, et qu'il ait été inculpé sur un autre par les dépositions des témoins, le président d'office, ou sur la demande

(1) Voy. ci-dessus, même séance, page 53, l'admission de M. Carion à la barre pour demander le rapport du comité de législation sur cette pétition. Les procèsverbaux de l'Assemblée ne mentionnent nulle part la date où elle fut déposée.

(2) Bibliothèque nationale: Lb, n° 10512.

de l'accusateur public, ordonnera qu'il soit arrêté de nouveau, il recevra les éclaircissements que le prévenu donnera sur ce nouveau fait, et renverra le prévenu, ainsi que les témoins, devant un juré d'accusation, pour être procédé à une nouvelle instruction. »> (Ibidem.)

« L'Assemblée constituante, en me déchargeant des crimes de lèse-nation, n'a pas dit, Messieurs, que je fusse inculpé d'autres faits; elle ne m'a pas mis en état d'arrestation; elle ne m'a pas accusé; elle ne m'a pas interrogé sur aucun délit; elle n'a donc pu me renvoyer pour qu'il fût procédé contre moi à aucune nouvelle instruction. Et ces mots de la loi du 18 mars 1791: renvoyé devant les tribunaux ordinaires pour y être jugé » ne signifient absolument rien.

་་

Je suis, Messieurs, déchargé de l'accusation de crime de lèse-nation; la loi du 18 mars 1791 met cette vérité en évidence; j'ai donc le droit, sans que l'on puisse exciper de ces mots : « être renvoyé devant les tribunaux pour y être jugé, de poursuivre en réparation, satisfaction, dommages-intérêts ceux qui m'ont calomnié dans l'exercice de mes fonctions de curé et de maire, en m'imputant des crimes de lése-nation; et aucune autorité constituée ne peut m'enlever ce droit sacré chez un peuple libre.

« Je demande donc à l'Assemblée nationale législative, qu'en interprétant, en tant que besoin sera, la loi du 18 mars 1791, elle ordonne aux tribunaux de recevoir ma demande en dommages et intérêts, contre ceux qui, par d'horribles calomnies, m'ont fait détenir pendant sept mois dans les fers, pour mon civisme et les faits patriotiques de la commune d'Issy-l'Evêque, et ce sera justice.

Signé CARION, curé d'Issy-l'Evêque.
Paris, ce 31 mars 1792. »

ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE.
Séance du lundi 23 juillet 1792, au matin.
PRÉSIDENCE DE MM. AUBERT-DUBAYET
ET LAFON-LADEBAT.

PRÉSIDENCE DE M. AUBERT-DUBAYET.
La séance est ouverte à dix heures.

M. Marant. J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de l'Assemblée une adresse de la commune de Dieuze, remplie des sentiments de patriotisme les plus énergiques. Cette commune annonce aussi qu'elle a ouvert une souscription pour subvenir aux frais de la guerre. Elle demande qu'il lui soit fourni des armes et pose la question de savoir si un membre d'une administration, suspect d'incivisme et ayant ses deux fils officiers déserteurs, peut, dans les circonstances actuelles, conserver sa place d'administrateur. Je demande qu'il soit fait mention honorable de cet acte de civisme au procès-verbal, dont un extrait sera envoyé à la commune de Dieuze. Je demande qu'on renvoie au comité militaire la demande des armes, et que le comité de législation soit tenu de rendre compte si des pères de famille qui entretiennent leurs enfants à Coblentz et qui leur ont fourni les moyens d'émigrer, sont susceptibles d'être nommés aux emplois publics.

(L'Assemblée décrète ces trois propositions.)

Un de MM. les secrétaires annonce les dons patriotiques suivants :

1o Les citoyens de la ville et paroisse du Château, ile d'Oléron, envoient un reçu du directeur des postes de l'île d'Oléron, qui constate qu'ils ont versé dans sa caisse, pour être envoyée à l'Assemblée nationale, une somme de 973 1., 13 s., 9 d., dont 300 livres en assignats et le reste en argent et plusieurs effets d'argent.

2° MM. Jacquier, Lerier, Philibert Goffret et Lambert, citoyens Savoisiens, résidant à Paris, offrent en assignats 85 livres et deux billets patriotiques de 2 livres.

3o Les administrateurs du directoire du district d'Auch font parvenir à l'Assemblée l'extrait du registre des dons patriotiques de leur ville, qui constate qu'ils ont, à la disposition de la nation, une somme de 2,447 1., 16 s., 8 d.

(L'Assemblée accepte ces offrandes avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal dont un extrait sera remis aux donateurs.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture des lettres, adresses et pétitions suivantes :

1° Lettre de M. Dejoly, ministre de la justice, qui envoie l'expédition d'un arrêté pris le 17 juillet dernier par le directoire du département de la Côte-d'Or, relativement à la question qui lui a été proposée par le commandant en chef d'un bataillon de la garde nationale de Dijon sur la création d'un conseil de discipline.

(L'Assemblée renvoie la lettre et l'arrêté au comité militaire.)

2° Adresse du sieur Michel Nicolas Cousin, qui envoie le prospectus d'un nouvel établissement de loterie.

(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

3o Adresse du conseil général de la commune de Valenciennes qui demande quelques explications sur la loi du 8 du présent mois, relative aux armes et munitions de guerre, dont chaque citoyen qui en est pourvu doit faire sa déclaration.

(L'Assemblée renvoie la lettre au comité militaire.)

4° Lettre du sieur Mauboussin, juge au tribunal du district de Château-du-Loir, qui prie l'Assemblée nationale d'agréer la remise qu'il fait, sur ses appointements, de la somme de 300 livres, pendant tout le temps de la guerre.

(L'Assemblé accepte cette offrande avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal dont un extrait sera remis au donateur.)

5° Lettre du sieur Ricard, fédéré de la HauteLoire, qui écrit tant en son nom qu'au nom de 60 de ses camarades de Loir-et-Cher et de la Côte-d'Or, pour déclarer à l'Assemblée qu'ils ne sont pas venus à Paris pour faire le mal, mais pour partir aux frontières, et que si on ne les enrôle pas avant peu, ils vont retourner dans leurs départements. Cette lettre est ainsi conçue :

[ocr errors][merged small][merged small]

venus que dans de bonnes intentions, que nous ne désirons rien tant que d'être envoyés aux frontières où nous aimerions mieux être qu'à Paris, et nous déclarons que si on ne nous fait pas partir incessamment nous retournerons dans nos départements respectifs, plutôt que de rester dans une ville où l'on cherche à nous égarer par des propositions atroces. (Murmures à gauche et dans les tribunes). Nous désirons que tous nos camarades venus également dans des intentions louables, aient le courage de résister à tous les moyens de séduction qu'on emploie pour les faire entrer dans des complots.

[ocr errors]

Signé

[ocr errors]

RICARD, fédéré, autorisé par soixante de ses camarades du département de la Haute-Loire, du Loir-et-Cher et de la Côte-d'Or, tous se disant du nombre des honnêtes gens. »

M. Chéron-La-Bruyère. Je demande que l'on insère dans le procès-verbal cette lettre, les signatures et le titre « des honnêtes gens » que prennent les signataires, et qu'on ne parviendra jamais à avilir. (Murmures à gauche et applaudissements à droite).

M. Léopold. Comme cette lettre prouvera à la France, qu'il n'y a que des hommes profondément immoraux qui aient renoncé à la qualité d'honnêtes gens, je demande que cette lettre soit imprimée et envoyée aux 83 départements, afin de servir de contre-poison aux opinions immorales qui ont été proférées jusque dans le sein de cette Assemblée, et qui tendent à faire tomber en dérision le mot d'honnêtes gens. (Murmures à gauche et applaudissements à droite).

M. Goujon. Je m'oppose quant à présent à l'impression. Il faut savoir auparavant si cette lettre est écrite au nom des fédérés. Elle est signée Ricard », fédéré, pour ceux de la Côted'Or, et aucune autre signature n'est jointe à la lettre. Il est nécessaire de vérifier toutes ces lettres dans un moment où l'on emploie toutes les manœuvres, toutes les intrigues pour pervertir les fédérés.

M. Marant. Je rends justice aux sentiments très constitutionnels contenus dans cette lettre ; mais comme la signature peut être apocriphe, je demande qu'on vérifie la signature avant d'imprimer la lettre.

M. Lecointe-Puyraveau. Il y a erreur de principes. Mon avis est que vous ne pouvez pas imprimer cette lettre sur les motifs qui vous ont été énoncés. M. Léopold vous dit qu'il est à propos de détruire l'erreur que des gens immoraux ont répandue au sujet du mot honnêtes gens. Je dis moi, que Du Saillant, que tous les contrerévolutionnaires de l'Ardèche ont pris le titre d'honnêtes gens; et je ne sais pas si l'on peut s'honorer d'un titre qu'on partage avec de tels hommes. Applaudissements des tribunes.)

M. Thévenet. Oui, comme vous prenez le titre de patriotes que vous partagez avec tous les factieux du royaume.

Plusieurs membres : La discussion fermée ! D'autres membres : L'ordre du jour! (L'Assemblée ferme la discussion et décrète qu'il y a lieu à délibérer sur l'impression.)

M. Lejosne. Je demande, pour l'honneur des pétitionnaires, que l'on raye le mot infâme d'honnêtes gens. (Murmures.)

(L'Assemblée décrète qu'on imprimera la lettre après vérification de la signature.)

M. le Président, s'adressant aux tribunes : Citoyens, il est défendu aux personnes qui assistent aux séances de l'Assemblée nationale de donner aucun signe d'approbation ou d'improbation. Citoyens, c'est au nom de la loi que le Président du Corps législatif vous recommande le silence et le respect.

M. le secrétaire continue la lecture des lettres, adresses et pétitions.

6o Lettre de M. Dejoly, ministre de la justice. qui rend compte à l'Assemblée, conformément à un de ses décrets, de l'existence et des fonctions d'un commissaire du roi, qui assiste aux funérailles des citoyens protestants et des salaires qu'il exige pour l'exercice de ces fonctions (1).

(L'Assemblée renvoie la lettre au comité de législation).

7° Lettre de M. Dubouchage, ministre de la marine,' qui expose à l'Assemblée combien il est instant qu'elle veuille bien statuer sur les fonds demandés pour les travaux de Cherbourg.

(L'Assemblée renvoie la demande au comité de marine et décrète qu'il lui fera son rapport à la séance du soir.)

8° Lettre de M. Lajard, ministre de la guerre, qui rend compte, en exécution d'un décret de l'Assemblée, des motifs qui ont déterminé les derniers mouvements des armées. Cette lettre est ainsi conçue :

[blocks in formation]

"Des circonstances impérieuses, et qui tiennent au salut de l'Empire, sont les motifs qui ont déterminé à renforcer les frontières de la Meuse et de la Moselle. Il a été reconnu, pour l'utilité de la défense, que les mouvements de l'armée qui occuperait le centre, devaient être combinés avec ceux de l'armée du Rhin. Sa majesté, en conséquence, a jugé convenable de confier le commandement supérieur de l'une et de l'autre à M. Luckner, et de donner à M. Lafayette celui de l'armée du Nord.

Ces deux généraux ont ordre de se concerter sur tout ce qui est relatif à ce mouvement, et de déterminer, sur la frontière, les limites de leur commandement respectif. J'ai communiqué d'ailleurs à l'Assemblée, l'arrêté du conseil sur le mouvement des armées, et les ordres donnés aux deux généraux.

(1) Voy. ci-dessus, séance du samedi 21 juillet 1792, page 7, le décret rendu sur la motion de M. Cambon.

(2) Voy. Archives parlementaires, 1 série, t. XLVI, séance du 19 juillet 1792, page 662, le texte du décret rendu sur la motion de M...

(3) Voy. ci-dessus, séance du 21 juillet 1792, page 5, le texte du décret rendu sur la motion de Gossuin.

« M. le maréchal Luckner m'a rendu compte' de vive voix, qu'ils avaient jugé nécessaire d'étendre le commandement de l'armée du Nord jusqu'à Montmédy, et qu'il n'y avait aucun inconvénient à ce que chaque général en chef conservât la majeure partie des troupes qu'il commandait, parce que, jugeant d'après les mouvements des ennemis, qu'il était nécessaire de rapprocher et de mener vers leur droite les deux armées du nord et du centre, elles marchaient dans le même sens, sans se croiser ni s'embar

rasser.

«M. le maréchal Luckner m'a ajouté que M. La Fayette, s'occupant principalement de son armée active pour la porter vers sa droite, sur tous les points de la forteresse qui pourraient être attaqués, ils avaient cru nécessaire de confier à M. Arthur Dillon, le plus ancien des lieutenants généraux de l'armée du Nord, le commandant particulier, depuis Dunkerque jusqu'à Givet, et notamment celui des camps de Maubeuge, de Famars et de Maulde, qui couvrent la frontière depuis l'Escaut jusqu'à la Sambre.

Le bruit public m'a appris que M. Dumouriez, commandant par intérim sur la frontière de l'Escaut, avait adressé à l'Assemblée nationale plusieurs détails dont je ne puis juger l'importance. J'en attends de plus positifs de M. Arthur Dillon, qui, comme je l'apprends indirectement, est rendu à Maubeuge, et a pris le commandement qui lui est dévolu. J'ai eu hier des dépèches de M. La Fayette, par lesquelles il me communique les détails que lui a donnés M. Dumouriez, de l'affaire d'Orchies. J'en ai aussi reçu de M. Labourdonnaie, officier général, employé à Lille. Quoique la relation de cet événement soit déjà connue de l'Assemblée nationale, et que d'ailleurs les comptes rendus par les deux généraux ne soient pas parfaitement d'accord, je les adresse néanmoins à l'Assemblée nationale.

«Je reçois aujourd'hui de M. Lanoue, officier général à Maubeuge, une lettre dont le post scriptum est relatif aux mouvements des ennemis. J'en fais joindre ici la copie pour compléter tous les renseignements qui me sont parvenus sur cette partie de nos frontières.

"

Je suis avec respect, etc...

[ocr errors][merged small][merged small]

Copie de l'extrait de la lettre de M. Labourdonnaie, lieutenant général commandant à Lille, en date du 16 juillet 1792, l'an IVe de la liberté.

« Monsieur, Orchies fut attaqué hier par les Autrichiens au nombre de 3,000 hommes, 10 bouches à feu, à deux heures du matin : nous n'en eûmes la nouvelle ici qu'après la retraite des Autrichiens, qui n'étaient campés qu'à trois lieues de ce poste.

« Le bataillon des volontaires de la Somme et 50 hommes d'infanterie de ligne défendirent le poste trois heures, et l'évacuèrent en se retirant par la porte Saint-Amand.

« Les Autrichiens y entrèrent après avoir détruit deux portes à coup de canon, et ils retournèrent à leur camp sans s'arrêter plus d'une heure dans cette petite ville. Ils prirent huit chariots dans un village voisin pour emporter les blessés à Tournay, et ils laissèrent 21 morts

aux portes de la ville, et 5 chevaux, dont 3 d'artillerie. Le bataillon des volontaires n'a laissé, en se retirant, que 4 hommes tués, et les Autrichiens ont tué 6 habitants non armés, y compris un homme tué dans un village voisin. Après cette défense dans une ville qui n'avait que de mauvaises portes, et la retraite en bon ordre de ce bataillon, il est vraisemblable que les ennemis n'attaqueront plus aussi légèrement nos postes. Ils continuent de piller sur les frontières, et de préférence les maisons des officiers municipaux dans les endroits où l'on ne peut pas laisser de troupes.

« Signé LABOURDONNAIE, lieutenant général commandant à Lille.

« Pour copie confome.

Signé LAJARD, ministre de la guerre. » Copie du post-scriptum de la lettre de M. Lanoue.

"Maubeuge le 18 juillet 1792.

« P. S. Quoique vous receviez, Monsieur, par M. La Fayette le compte que je lui ai envoyé hier sur le mouvement des ennemis, je crois devoir vous instruire directement de l'arrivée du corps de troupes autrichiennes qui s'est établi à Bavay, Tenières et Malplaquet, à peu près dans la position prise en dernier lieu par M. La Fayette. On estime que ce corps est au moins de 10,000 hommes; il est commandé par M. le duc de Saxe-Teschen en personne, dont le quartier général est à Bavay.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

Monsieur, M. Dumouriez m'a rendu compte que, dans la nuit du 14 au 15, les ennemis ont attaqué le village d'Orchies; que le bataillon de la Somme s'y est défendu vaillamment pendant 2 heures. Les ennemis étaient au nombre de 7 à 8,000 hommes, avec douze pièces de canons et des obusiers. Les Français étaient 600, avec deux pièces de 4 ils ne se sont retirés qu'après avoir épuisé toutes leurs cartouches. Nous avons perdu une pièce de canon et quatre hommes. Huit carabiniers venant de Lille ont été pris; on a trouvé sur la route de Tournay 21 morts des ennemis et l'on a amené plusieurs chariots de blessés. M. Marassé, officier général, commandant à Douai, a fait reprendre le poste dès le matin. Le lieutenant général Dumouriez, conjecturant, par le mouvement des ennemis, qu'ils voulaient se porter au camp de Maulde, y a marché avec sa division, et pris les mesures et occupé les postes qui pouvaient le mieux contribuer à sa défense.

"

Le général d'armée,

« Signé : LA FAYETTE.

« Pour copie conforme à l'original,

« Signé LAJARD. »

(L'Assemblée renvoie toutes ces pièces à la commission extraordinaire des Douze.)

M. Lejosne. J'ajoute au fait dont on vient de vous rendre compte, que dans le pays, depuis Lille jusqu'à Bergues, les troupes autrichiennes fourragent toutes les plaines. (Murmures.) Il est des hommes qui se font ici un espoir de ce qui fait nos craintes.

M. Gossuin. Les Autrichiens entrant dans le royaume, se sont rendus maîtres du pont de Sambre, situé à une distance égale de près de trois lieues, des villes d'Avesnes, Landrecies, Maubeuge et Quesnoy; c'est là qu'ils projettent un point d'attaque. M. Arthur Dillon a passé dans Avesnes il y a deux jours; il a prévenu les habitants de se tenir sur leur garde. Il n'est pas sans inquiétude sur le plan des ennemis; M. La Fayette a dit lui-même, lorsqu'il s'est rendu à son armée, qu'il craignait que bientôt il se fasse une trouée; qu'il y avait grand danger à courir pour le pays. Messieurs, nos villes sont peu fortifiées; il y a peu de troupes. Peut-être, dans ce moment-ci, la ville d'Avesnes n'est-elle plus à la France; je sais qu'on la palissade en face de l'ennemi, et que le commandant ayant une trop faible garnison pour la défendre, a annoncé à la municipalité qu'il se verrait forcé de se rendre en cas d'attaque. Je demande que vous vous fassiez rendre un compte plus exact, que celui que Vous venez d'entendre du ministre de la guerre; car, lisez sa lettre, et vous verrez qu'il ne correspond pas directement. Toutes les querelles entre les ministres et les généraux nous perdront; il est important que, dans la séance d'aujourd'hui, votre comité militaire vous fasse un rapport relativement aux clefs des villes qui sont actuellement entre les mains de gens en qui nous ne pouvons avoir de confiance.

Vous savez que les colonels sont commandants nés des villes; nous ne pouvons pas leur laisser les clefs davantage. Il faut que les officiers municipaux qui sont les élus du peuple, concourent à ce commandement qu'ils défendent eux-mêmes leurs foyers. Je demande qu'aujourd'hui votre comité militaire vous fasse un rapport sur cet objet, et que le ministre de la guerre soit tenu de vous rendre un nouveau compte sur les soins qu'il prend de la garantie de nos frontières.

M. Lacombe-Saint-Michel. L'Assemblée nationale a décrété que l'on pourrait nommer des commandants militaires à temps; il est essentiel que ce choix soit bien fait et malheureusement on a déjà des suspicions. Je demande que l'Assemblée déclare que celui des commandants des places qui aura rendu une place avant que tous les ouvrages extérieurs soient pris, et qu'il y ait une brêche aux remparts, soit puni de mort.

M. Delacroix. Je crois qu'il faut reprendre la discussion qui a été commencée sur les dangers de la patrie. Il faut que nos commettants sachent quels sont tous les dangers que court la patrie, et il faut que la patrie sache qu'elle peut et doit encore se sauver en dépit du pouvoir exécutif. (Applaudissements à gauche et dans les tribunes.) Il n'est plus temps de se le dissimuler si nous attendons encore quelque temps, nous sommes perdus. Il ne faut plus nous dissimuler que nous nous sommes endormis trop longtemps, il faut que nous nous réveillions, et que la nation tout entière se réveille avec nous. Il faut que nous lui mettions dans les mains les moyens de se sauver, malgré les mal intentionnés, malgré, j'ose dire, le pouvoir exécutif, les ministres et les généraux qui paraissent se coaliser pour précipiter la patrie dans l'abime sur les bords duquel elle se

« PreviousContinue »