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pays où la pièce a été frappée appartient à ce souverain, et que c'est sous ce sceau seul que ce pays fera ses échanges monétaires avec les autres contrées. Le rapport leur rappellera encore qu'aucune émission de monnaies sous le titre d'auxiliaire ou d'échange ne peut être faite au nom de particuliers; car ces pièces auxiliaires dans ce cas deviennent principales, et leur fabrique compromet la souveraineté. Enfin, il leur rappellera que les métaux en masse comme en détail, sont des objets de commerce, des articles d'échanges représentatifs des valeurs, mais qu'ils ne peuvent être, dans aucun cas, représentatifs de la souveraineté, et être marqués du cachet de la nation par la main d'un particulier. Je demande l'impression du rapport pour éloigner de la discussion toute déclamation de l'ignorance, et pouvoir statuer en parfaite connaissance de cause. (Murmures.)

Plusieurs membres : L'ordre du jour !

(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la motion de M. Laureau et n'ordonne que l'impression du projet de décret.)

M. Meunier, au nom du comité de l'extraordinaire des finances, présente un projet de décret (1) relatif à l'échange de l'église paroissiale de Ferrières, département du Loiret, contre l'église des ci-devant Bénédictins de la même ville; ce projet de décret est ainsi conçu :

« L'Assemblée nationale, sur la demande formée par la commune de Ferrières, département du Loiret, relative à l'échange de son église paroissiale, vu l'avis du ministre de l'intérieur, et après avoir entendu son comité de l'extraordinaire des finances, décrète ce qui suit :

Art. 1er.

La commune de Ferrières est autorisée à échanger son église paroissiale et les cloches en dépendant contre l'église des ci-devant Bénédictins de ladite ville, ensemble les reliques, ornements et cloches qui en dépendent.

Art. 2.

«La plus-value de l'église paroissiale se trouvant compensée par l'excédent du poids des cloches dépendantes de l'église des ci-devant Bénédictins, ledit échange se fera sans qu'il y ait lieu à aucun retour.

Art. 3.

"En conséquence du présent échange, l'église paroissiale actuelle de Ferrières sera vendue dans la même forme et aux mêmes conditions que les biens nationaux.

Art. 4.

Le présent décret ne sera envoyé qu'au département du Loiret. »

(L'Assemblée ordonne l'impression du projet de décret et ajourne la seconde lecture à huitaine.)

Un membre, au nom du comité de l'extraordinaire des finances, présente un projet de décret (2),

(1) Bibliothèque nationale. Assemblée législative. Domaines nationaux, Aa.

(2) Nous n'avons pu retrouver ce projet de décret.

tendant à faire payer par l'administration de la caisse de l'extraordinaire, 1 0/0 pour les frais d'estimation des domaines nationaux dans les districts dont les bordereaux d'estimation n'étaient pas encore parvenus au comité d'aliénation à l'époque du 15 mai 1791.

Un autre membre : J'observe à l'Assemblée que ce taux est excessif; il serait préférable que le payement des experts fût fait à raison de tant par jour. Je demande le renvoi de ma proposition au comité de l'extraordinaire, en le chargeant de présenter un projet de décret conforme à ce principe, si l'Assemblée veut bien l'adop

ter.

(L'Assemblée adopte cette proposition.)

M. Oudot, au nom du comité des décrets, fait un rapport et présente un projet de décret tendant à confier au comité des inspecteurs de la salle la surveillance de l'expédition des discours, instructions, déclarations, rapports, extraits de son procès-verbal, adresses ou pétitions, dont l'Assemblée aura décrété l'envoi aux corps administratifs ou judiciaires, ou à l'armée ou aux particuliers; ce projet de décret est ainsi conçu :

« L'Assemblée nationale décrète que son comité de l'inspection de la salle surveillera l'expédition des discours, instructions, déclarations, rapports, extraits de son procès-verbal, adresses ou pétitions dont elle aura décrété l'envoi aux corps administratifs ou judiciaires, ou à l'armée, ou aux particuliers; en conséquence, il y aura un registre au bureau de correspondance, dans lequel il sera fait une mention exacte de tous les envois qui seront ordonnés, de la date de leur expédition et de chacune des réponses et accusés de réception des objets qui auront été envoyés. »

(L'Assemblée adopte le projet de décret.)

Un membre: Je viens, au nom du comité des décrets, proposer à l'Assemblée une rectification dans l'article 3 du décret du 31 juillet dernier (1), qui accorde le traitement entier des administrateurs du département des Bouches-du-Rhône, à ceux qui les ont remplacés. Je demande que ce soit seulement les droits d'assistance et que le traitement fixe soit conservé aux administrateurs en titre.

(L'Assemblée adopte cette proposition et décrète que la rectification sera faite dans le décret non encore expédié.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture des lettres et adresses suivantes :

1° Lettre de M. Champion, ministre de l'intérieur, pour annoncer à l'Assemblée qu'il a reçu le décret qui met à sa disposition 3 millions pour le besoin des départements frontières, et qu'en conséquence, il a donné des ordres pour que les départements du Haut et du Bas-Rhin touchent les sommes dont le Corps législatif a décrété l'avance.

(L'Assemblée renvoie la lettre au comité de l'extraordinaire des finances.)

2o Lettre de M. Champion, ministre de l'intérieur, qui adresse à l'Assemblée copie d'une lettre du procureur général syndic de l'Ardèche, de laquelle il résulte que six particuliers des cinquante-sept complices de Du Saillant, compris

(1) Voy. ci-dessus, séance du 31 juillet 1792, p. 327, le texte de ce projet de décret.

dans le décret du 18 juillet 1792 (1), ont été arrêtés.

(L'Assemblée renvoie la lettre à la commission extraordinaire des Douze et au comité de surveillance réunis.)

3o Lettre de M. Dejoly, ministre de la justice, qui informe l'Assemblée que les députés nommés par le district d'Avignon et de Louvèze, sont MM. Rovère, Duprat le jeune et Ferrand.

4° Lettre du conseil général du département de l'Isère, qui instruit l'Assemblée des divisions qui ont éclaté à Grenoble entre le 101° régiment d'infanterie et les volontaires nationaux. Cette lettre est ainsi conçue :

« Législateurs,

« La déclaration de la patrie en danger augmente l'audace de ses ennemis, et ils redoublent d'efforts et d'intrigues pour augmenter les désordres. La ville de Grenoble, placée sur une frontière, paraît être un point où les malveillants trament leurs plus odieuses manœuvres. Dans le temps que le directoire cherchait à arrêter le progrès du fanatisme, ceux qui ne respirent que le trouble et le pillage cherchaient à animer les uns contre les autres les défenseurs zélés de la patrie.

» Une dispute entre les volontaires nationaux et quelques soldats du 101 régiment, ci-devant Liégeois, a failli avoir les suites les plus désastreuses. Grâce à la vigilance et à la fermeté de la municipalité, des gardes nationales et aux précautions prises par les corps administratifs, qui furent secondés par le zèle du commandant de la ville, la fureur des soldats, prêts à en venir à un combat sanglant, fut apaisée. Ils reconnurent la voix de leurs officiers, et les officiers municipaux, en se mettant entre eux, parvinrent à les séparer et à les faire retirer dans leurs quartiers. Dans des circonstances aussi fâcheuses, le directoire du département prit sur lui de requérir le commandant de la ville d'éloigner de Grenoble le 101 régiment qui, depuis longtemps, portait le trouble et le désordre dans tous les lieux où il a été en garnison. Le 101 régiment partit dans la nuit, et par les précautions prises par la municipalité, qui ordonna de nombreuses patrouilles de gardes nationales, la tranquillité de la ville ne fut pas troublée. On se félicitait de ce départ, malgré le besoin que nous avons de soldats, nos frontières étant menacées, lorsque le département a appris, par une pétition de la municipalité, que nombre de soldats avaient quitté leurs drapeaux et s'étaient présentés à la municipalité. Ils disaient que leur intention n'était pas de déserter, mais qu'ils étaient pénétrés de l'amour de la patrie et qu'ils avaient le désir ferme de la servir contre tous les ennemis; que les officiers professaient des principes contraires; qu'il leur était impossible de soutenir les vexations auxquelles ils étaient exposés pour la bonne cause; et ils demandaient d'être incorporés dans les volontaires nationaux ou dans tout autre régiment.

« L'assemblée générale du conseil du département se trouvait en surveillance permanente; elle arrêta qu'il serait pourvu à la subsistance des soldats du régiment qui se présenteraient à

(1) Voy. Archives parlementaires, 1r série, t. XLVI, séance du lundi 18 juillet 1792, au matin, page 621, le texte de ce projet de décret.

la municipalité, et que le commandant de la place serait tenu de donner à ces soldats un officier pour les maintenir dans la discipline. Cette mesure a été exécutée, et ces soldats soumis à ce chef qui les commande sont un modèle d'obéissance militaire.

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Nous avons l'honneur de joindre à la présente copie de l'arrêté que l'assemblée générale a cru devoir prendre dans la circonstance, et celle du procès-verbal de la municipalité de Grenoble, contenant une pétition pour le licenciement du 101° régiment, à laquelle nous avons donné notre assentiment.

« Vous trouverez ci-joint, au procès-verbal de la municipalité, une espèce d'assignat, nouveau moyen imaginé par nos honnêtes ennemis. Ce moyen, quoique atroce en même temps que ridicule, peut détacher de la Constitution et même armer contre elle des personnes simples que l'appât du bénéfice peut séduire, et dont la moralité est dans la bourse. Vous sentez avec quel prodigalité cette fausse monnaie peut être répandue, et c'est à votre sagesse d'en arrêter le cours et les funestes effets qu'elle pourrait produire sur les administrateurs du département de l'Isère.

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Signé : Les membres du conseil général du département de l'Isère. »

(L'Assemblée renvoie cette lettre aux comités militaire, de surveillance et des assignats et monnaies réunis.)

M. Aubert-Dubayet. Je demande la mention honorable de la conduite des administrateurs.

(L'Assemblée décrète cette proposition.)

"

5o Adresse du conseil général du département de la Meuse, dans laquelle il exprime son attachement à la Constitution et son étonnement sur l'audace des pétitionnaires qui invitent l'Assemblée à y porter atteinte. Cette adresse est ainsi conçue: Législateurs, nos concitoyens volent aux armes et déploient la plus courageuse énergie. C'est au milieu des transports que fait naître leur dévouement généreux que nous vous renouvelons le serment de ne pas souffrir qu'il soit porté la moindre atteinte à la Constitution et à ses bases éternelles la liberté, l'égalité. Déterminés à lui demeurer fidèles, nous vous devons exprimer la douleur profonde dont nous pénètre l'audace avec laquelle des pétitionnaires osent l'attaquer jusque dans son sanctuaire auguste. La nation française est trop grande, sans doute, pour ne pas triompher des efforts étrangers qui

menacent; mais elle succomberait sous le découragement et elle périrait par la discorde, si les dépositaires de la Constitution ne repoussaient avec fermeté tout ce qui tend à la détruire.

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Législateurs, résistez courageusement aux clameurs des partis et à l'influence fatale dont on vous environne; couvrez de votre égide le pacte social c'était beaucoup faire sans doute, de le former; ce sera faire beaucoup plus de le

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titution, faites au Corps législatif lui-même : l'incivisme leur sourit avec impudence. Il ne craignait que la Constitution, et il calcule déjà les derniers jours de son existence.

« Législateurs, la licence qui l'attaque est un des poisons qui la tuent; c'est elle qui verse avec impunité l'avilissement sur le Corps législatif et le roi. Pourquoi faut-il qu'à ces impressions profondes qu'ont fait couler des larmes si douces lors de la conquête de la liberté, se soient substitués des sentiments factices, des exagérations ridicules, des déclamations insensées! Une effervescence qui pourrait se porter à des intérêts si chers, si pressants, s'exhale de la capitale dans les départements, en dénonciations, bouleverse toutes les idées, dénature tous les principes, décrie les hommes publics les plus estimables, travestit toutes les actions et accuse tous les citoyens; semblable aux torrents dévastateurs qui ne laissent ni maisons, ni espérance, cette effervescence calomniatrice renverse tous les objets de notre culte; elle ne laisse que désordre et anarchie partout où l'on adorait la Constitution.

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Législateurs, hâtez-vous de combler ces canaux corrupteurs qui infectent la terre de la liberté; ramenez sans cesse par la concorde tous les esprits au respect des pouvoirs constitués. Une heureuse impulsion les avait ralliés à l'exécration de la République et des deux Chambres; mais ces fantômes se recréent encore par les imaginations alarmées; des esprits ardents et inquiets, en se couvrant du prétexte du combat de ces chimères, travaillent bien plus réellement à détruire l'ordre social. Cependant existat-il jamais dans un grand Empire un besoin plus pressant de l'union de tous les cœurs, du concert de tous les sentiments et surtout de l'accord des deux premiers pouvoirs? Sans cet accord, une nation faite pour obtenir l'admiration du monde, déchirée par les factions, sera livrée à la tyrannie de ses oppresseurs; sans cet accord, la liberté française succombera; et le peuple le plus généreux pleurera bientôt sur elle et sur tous les sacrifices qu'il lui a prodigués.

« Les administrateurs du conseil général au département de la Meuse: « Ternaux, président; Jeannot, Bertrand, Doucet, Collas, Magron, Hardy, Jeantin, Pollin, Simonet, Michel, Arnould, Lenfant, Martin, Latixerant, Verdun, Maillet, Liouville, Bouchon, Sauzy, Lequeux, Collin, procureur général syndic, Aubry, secrétaire général. » « Bar, le 3 août 1792, l'an IV de la liberté. »

Plusieurs membres : L'impression et l'envoi aux 83 départements!

D'autres membres: L'ordre du jour! (L'Assemblée décrète qu'il y a lieu de délibérer.)

Plusieurs membres : La question préalable sur l'envoi!

(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'envoi aux départements et ordonne l'impression.)

M. Moreau. Je demande la mention honorable du zèle des administrateurs du département de la Meuse et le renvoi à la commission extraordinaire des Douze.

(L'Assemblée décrète la mention honorable et le renvoi.)

M. Lemalliaud, au nom du comité féodal,

fait la troisième lecture (1) d'un projet de décret relatif au rachat successif et séparé des redevances fixes, même solidaires, et droits casuels conservés; au mode de conversion du champart et autres redevances de même nature, en une rente annuelle d'une quotité fixe de grains; à la prescription des redevances fixes à l'avenir, et au payement de celles arriérées depuis et y compris 1789 jusqu'en 1791, inclusivement; ce projet de décret est ainsi conçu:

PROJET DE DÉCRET.

L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité féodal, considérant que l'affranchissement des propriétés, en assurant l'indépendance absolue des citoyens, peut seul leur procurer la jouissance pleine et entière de la liberté que la Constitution de l'Empire leur a rendue; que cet affranchissement n'est pas moins impérieusement commandé par l'intérêt précieux de l'agriculture, dont une multitude de droits onéreux arrête depuis trop longtemps les progrès, et fait naître une foule de contestations et de procès ruineux pour les habitants des campagnes ;

Considérant qu'il est de son devoir de hâter le temps de cet affranchissement général en facilitant le rachat des droits ci-devant féodaux et autres prestations foncières, décrète ce qui suit:

TITRE PREMIER.

Du rachat successif séparé des droits fixes ou casuels et du mode de conversion du champart en une rente annuelle.

Art. 1. Tout propriétaire de fief ou de fonds ci-devant mouvants d'un fief en censive ou roturièrement, sera admis à racheter séparément soit les droits casuels conservés, soit les cens ou autres redevances annuelles et fixes, de quelque nature qu'ils soient, et sous quelque dénomination qu'ils existent, sans être obligé de faire en même temps le rachat des uns et des autres.

Il pourra aussi racheter séparément et successivement les différents droits casuels, détaillés dans la seconde et troisième disposition de l'article 11 du titre III du décret du 15 mars 1790.

Art. 2. Les propriétaires de ci-devant fiefs, qui auront reçu le rachat en tout ou en partie des droits seigneuriaux fixes ou casuels, dépendant de leurs fiefs, et qui seront soumis euxmêmes à des droits casuels envers un autre fief, seront tenus de se conformer exactement à l'égard du fief dont ils relèvent, à tout ce qui leur est prescrit par les articles 44, 45 et 46 dù décret du 3 mai 1790.

Art. 3. Tout propriétaire de ci-devant fief ou de fonds solidaire ou non solidaire qui voudra s'affranchir des droits casuels, aura la faculté de payer partiellement le capital du rachat desdits droits, ainsi qu'il suit :

Deux dixièmes dans le mois, à compter du jour de la liquidation définitive, dans le cas où elle doit avoir lieu, ou du jour de l'offre qu'il en fera dans les cas prévus, par les art. 37, 38, 39, du décret du 3 mai 1790.

(1) Voy. Archives parlementaires, 1 série, t. XLVI, séance du vendredi 20 juillet 1792, au matin, page 676, la seconde leeture de ce projet de décret.

Un dixième dans le second mois, un dixième dans chacun des deux suivants, et les cinq autres dixièmes, de six mois en six mois, de manière que la partie totalité du payement soit effectuée dans le cours de deux aus et 10 mois, conformément à ce qui a été précédemment décrété à l'égard des droits fixes et casuels provenant des biens nationaux, par le décret du 14 novembre 1790.

Il aquittera en même temps l'intérêt au taux de 4 0/0 sans retenue, cet intérêt diminuant au prorata du capital.

Art. 4. Le redevable remettra au propriétaire des droits casuels, lors du premier payement, une reconnaissance devant notaire, portant l'obligation de payer aux termes fixés par le précédent article, avec l'intérêt à 4 0/0.

Le propriétaire desdits droits pourra, en vertu de cette reconnaissance, huitaine après une sommation de payer, faite au redevable aux frais de ce dernier, user envers lui, ses héritiers acquéreurs ou ayants-cause de toutes voies de contrainte et exécution autorisées par les lois, sans qu'il ait besoin d'obtenir de jugement préa lable, à moins qu'il ne veuille saisir les immeubles du redevable.

Cette reconnaissance ne sera soumise qu'à un droit d'enregistrement de quinze sols.

Art. 5. Pourront néanmoins les redevables accélérer leur libération, par des payements plus considérables et plus rapprochés, ou même se libérer entièrement à quelque échéance que ce soit, auquel cas les intérêts diminueront également à proportion des payements, ou s'éteindront avec l'entier remboursement du capital.

Art. 6. Les champarts, tasques, terrages, arage, agrier, complant, foëte, dimes féodales, dans les lieux où elles existent et autres redevances de même nature, pourront être rachetés par les redevables, et leurs capitaux remboursés, de même que les droits casuels, ainsi et de la manière établie par les articles 3, 4 et 5 cidessus.

A compter du jour de l'offre, comme du premier payement fait en conséquence de la liquidation définitive, le propriétaire desdites redevances ne pourra les exiger, ni les lever en nature; l'année lors courante sera payée au prorata du temps écoulé depuis la récolte précédente, sur le pied de l'intérêt à 4 0/0 sans retenue.

Art. 7. Néanmoins, le décret du 14 novembre 1790 continuera d'avoir la pleine et entière exécution à l'égard du rachat, soit des droits casuels, soit des cens et redevances annuelles, et fixes ci-devant seigneuriales, de quelque nature et espèce qu'ils soient, dus au ci-devant fief appar

tenant à la nation.

Art. 8. Tout propriétaire de fonds grevé de rente foncière perpétuelle, créée irrachetable ou devenue telle par convention ou prescription, et déclarée rachetable par le décret du 18 décembre 1790, qui remboursera la rente avant que le rachat des droits casuels en ait été fait, sera tenu de remplir ce qui est prescrit par l'article 10 du titre IV du même décret.

Art. 9. Chaque quittance de rachat, soit de droits fixes soit de droits casuels, sera sujette au droit d'enregistrement de 15 sous, établi par l'article unique du titre VII du décret du 18 décembre 1790.

Les frais en seront à la charge de celui qui fera le rachat.

Art. 10. Tout redevable de champart, tasque, terrage, agrier, complant, foëte, dime féodale,

dans les lieux où elles existent, et autres redevances de même nature, pourra exiger, quand bon lui semblera, la quotité fixe de grains, payables aux termes ordinaires jusqu'au rachat.

Art. 11. A cet effet le redevable fera notifier au propriétaire de la redevance, ou à son dernier domicile, sa demande de conversion.

Elle contiendra la quotité de la redevance, la nature et l'étendue de chaque pièce de terre qui y est sujette, par arpents, journaux ou autres mesures locales et connues, ainsi que les confins tenants et aboutissants de chacune desdites pièces de terre.

Art. 12. Il sera procédé, par des experts que les parties nommeront, ou qui seront nommés d'office par le juge, à une évaluation de ce que le fonds produit habituellement en chaque espèce de grains, dans une année commune.

Ils inséreront à la suite leur avis motivé, sur la quotité fixe et l'espèce de la rente en grains qui doit remplacer annuellement la redevance jusqu'au rachat; cette quotité devra être déterminée dans la proportion du produit de l'année commune du fonds en grains (1).

Art. 13. En cas de diversité d'avis de la part des experts, le juge nommera un tiers d'office, si les parties n'en choisissent pas un de concert. Les frais de l'expertise seront à la charge du redevable.

Art. 14. L'Assemblée nationale déroge à l'article 62 du décret du 3 mai 1790; en conséquence, tout propriétaire qui a racheté les droits seigneuriaux, casuels et autres, dont son fonds était grevé, même postérieurement au délai de deux ans, fixé par ledit article 62, ou qui les rachètera par la suite, pourra aliéner le même fonds, sans être soumis à aucun droit de mutation, qui demeurera irrévocablement éteint par le rachat antérieur, à quelque époque que l'aliénation se fasse postérieurement.

TITRE II.

Mode du rachat des cens, rentes et autres redevances solidaires.

Art. 1r. Les codébiteurs solidaires de cens ou redevance annuelles fixes, ou de droits casuels conservés, même de rente foncière perpétuelle irrachetable, ou devenue telle par convention ou prescription, pourront racheter à l'avenir divisément, suivant ce qui est décrété par les articles premier et suivants du titre précédent, leur portion contributive desdites redevances, rentes, droits fixes et casuels, en se conformant à ce qui sera prescrit par les articles suivants, sans que, sous prétexte de la solidarité, ils puissent être contraints à rembourser au delà de leur quote-part.

Art. 2. Ceux qui possèdent divisément partie d'un fonds grevé solidairement d'un ou plusieurs des droits mentionnés en l'article précédent, seront obligés de vérifier, par reconnaissance ou autres actes faits avec les possesseurs desdits droits, ou leurs receveurs et agents, la quotité dont ils sont tenus dans la totalité des droits.

Les quittances données par les possesseurs des droits, leurs receveurs ou agents et les collecteurs des rôles et rentiers, serviront également à constater la quotité des droits solidaires

(1) Voyez l'article 17 du décret du 3 mai 1790.

qu'on voudra racheter, lorsque cette quotité y sera déterminée.

Art. 3. Les codébiteurs qui possèdent indivisément un fonds grevé d'un ou plusieurs des susdits droits, seront tenus de faire préalablement constater et vérifier, à frais communs et proportionnellement à la portion qui appartient à chacun dans le fonds grevé, la quotité desdits droits solidaires à laquelle ils sont individuellement soumis, contradictoirement avec le propriétaire desdits droits, ou lui dùment appelé.

Il en sera de même des codébiteurs qui, quoique possédant divisément, ne pourront point vérifier de la manière présente par l'article précédent, la quotité dont ils sont tenus dans la totalité des mêmes droits.

Art. 4. Un seul pourra contraindre les autres codébiteurs à concourir à la vérification exigée par l'article précédent dans les cas qui y sont prévus.

Cette vérification préalable, faite contradictoirement ou sur défaut, ou arrêtée de gré à gré, servira à chacun des autres codébiteurs lorsqu'ils voudront, par la suite, affranchir leurs propriétés, sans qu'il soient tenus d'en faire une nouvelle.

Art. 5. A l'égard des mêmes droits solidaires dus à la nation, la vérification de la quotité dont le possesseur du fonds grevé pourra se libérer, sera faite et constatée suivant les règles prescrites par les articles 2, 3 et 4 ci-dessus, contradictoirement avec le proposé de la régie, sous l'inspection du directoire du district.

Art. 6. Les autres codébiteurs des droits, redevances et rentes dont une ou plusieurs portions seulement auront été rachetées continueront d'être tenus solidairement du surplus jusqu'au rachat qu'ils pourront en faire partiellement suivant les règles ci-dessus prescrites.

TITRE III.

De la prescription des redevances fixes à l'avenir et du payement de celles arriérées depuis et y compris 1789 jusqu'en 1791 inclusivement.

Art. 1er.

Les arrérages à échoir de cens, redevances, même de rentes foncières, ci-devant perpétuelles, se prescriront à l'avenir par cinq ans, à compter du jour de la publication du présent décret, s'ils n'ont été conservés par la reconnaissance du redevable, ou par des poursuites judiciaires.

Art. 2. Néanmoins la prescription pour les droits corporels et incorporels, appartenant à des particuliers, est et demeurera suspendue, depuis le 2 novembre 1789, jusqu'au 2 novembre 1794, sans qu'elle puisse être alléguée pour aucune partie du temps qui sera écoulé pendant le cours desdites cinq années, soit pour le fonds desdits droits, soit pour les arrérages, conformément à ce qui a été décrété à l'égard des mêmes droits appartenant à la nation par le décret du 1er juillet 1791.

Art. 3. Les redevables d'arrérages de cens, rentes, champarts et autres redevances annuelles, de quelque nature que ce soit, échus en 1789, 1790 et 1791, auront la faculté de se libérer en trois payements égaux, de la manière suivante :

«Ils seront tenus de payer, dès cette année, un tiers du montant des susdits arrérages à

l'échéance du terme ordinaire, un tiers au même terme de 1793 et le dernier tiers à pareil terme de 1794, sans préjudice de l'année courante et de celles à échoir, qui se payeront aux termes fixés.

« Toutes les dispositions du présent décret seront également communes à tous les droits fixes ou casuels, de quelque nature que ce soit, ap-· partenant ou qui appartiendront à la nation, ou qui dépendraient des domaines ci-devant dits de la Couronne.

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Tous les décrets antérieurs, relatifs au rachat des cens, redevances et autres droits fixes ou casuels, ainsi que des rentes foncières ci-devant perpétuelles, auxquels il n'est point dérogé par le présent décret, continueront d'être exécutés. »

M. Mailhe. L'Assemblée ne peut pas s'occuper du mode de rachat des droits féodaux avant d'avoir fixé quels sont ceux de ces droits qui seront rachetables. Le comité des domaines est chargé de faire un rapport sur cet objet. Je demande que le projet dont on vient de faire lecture soit ajourné après le rapport du comité des domaines et que le rapport soit ajourné à huitaine.

(L'Assemblée décrète la proposition de M.Mailhe.) M. Louvet, au nom du comité de législation, fait un rapport et présente un projet de décret sur les délits et attroupements qui ont eu lieu dans le district d'Evron, département de la Mayenne, le 2 avril dernier (1); il s'exprime ainsi :

Messieurs, c'est encore la turbulence de quelques prêtres factieux qui a donné lieu au trouble dont je vais avoir l'honneur de vous entretenir.

Vous avez, Messieurs, été instruits, dans le temps, de l'arrêté pris par le département de la Mayenne, contre les prêtres séditieux.

Cet arrêté, mais plus encore que lui, un penchant naturel pour les troubles, une haine ardente contre les prêtres assermentés, firent concevoir à plusieurs ecclésiastiques dissidents du district d'Evron, département de la Mayenne, le dessein d'exciter, s'il était possible, une sédition dans ce district.

Ce complot se forma au village de Chatres; à sa tête étaient un abbé Lemétayer, un abbé Foschard, ci-devant curé de Pimuré; Ripaud, chapelain de Montelet; Burabé et Davour, curé et vicaire de Chaumes, et Morin, ci-devant maire de Chatres.

Dans ce complot entrèrent beaucoup de béats imbéciles, d'illuminés ardents qui ne raisonnent pas, et de bons villageois des paroisses voisines, trompés par les séductions de ces ecclésiastiques pervers, et par les mots de religion, de pape, de paradis, qui, pendant douze ou treize siècles, n'ont cessé de couvrir la terre de crimes et de sang.

C'est le dimanche, 1er avril dernier, que ce complot fut rendu public ce jour l'abbé Lemetayer annonça, et fit annoncer par ses agents qu'il fallait aller, le lendemain, en armes à Evron, pour assurer la tranquillité des prêtres, porter des demandes au district, et dans le cas où ces demandes ne seraient pas accueillies, exterminer les administrateurs, mettre la ville en feu, piller la caisse du trésorier et partager les assignats. Ces faits sont consignés dans la lettre qui vous

(1) Voy. Archives parlementaires, 1re série, t. XLI, séance du 10 avril 1792, page 414, la lettre des administrateurs de la Mayenne.

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