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dans laquelle il témoigne des inquiétudes, quoiqu'il ne soit qu'en seconde ligne et qu'il soit séparé de la Savoie par le département de l'Ain. Nous avons remis cette lettre à la commission des Douze.

M. Beugnot. Il ne faut pas qu'on attende, pour nous prévenir des hostilités imminentes, que les colonnes soient prêtes à entrer en France comme on l'a fait à l'égard de la Prusse. Je demande donc que demain le ministre des affaires étrangères rende compte de notre situation politique avec la Savoie.

M. Dumolard. Je demande, en outre, que le ministre nous dise s'il est vrai qu'il y ait 12,000 Autrichiens dans le Piémont. Ce fait est attesté par l'état-major de l'armée du Midi et par le résident français près la république de Gênes.

M. Koch. Le ministre a fait remettre hier au comité diplomatique l'état des troupes que le roi de Sardaigne à sur pied.

M. Lasource. Je demande que l'on renvoie à la commission extraordinaire des Douze l'examen de la question de savoir si le ministre des affaires étrangères n'est pas coupable d'avoir laissé ignorer au Corps législatif les inentions hostiles de la cour de Turin qu'il doit connaître depuis longtemps.

M. Beugnot. Je conviens que le ministre des affaires étrangères serait coupable si, connaissant les hostilités immédiates de la cour de Turin, il n'en avait pas donné connaissance à l'Assemblée; mais avant de rien préjuger, il me semble qu'il faut demander au ministre des explications, afin que le comité puisse établir son rapport sur des bases certaines; c'est pourquoi je demande que le ministre rende compte demain si, oui ou non, nous avons à craindre des hostilités de la part du roi de Sardaigne.

Un membre: Je ne suis qu'à une journée de Turin et je sais qu'il y a déjà 8,000 Autrichiens campés entre Alexandrie et Turin. On y attend encore 8,000 Hongrois.

J'ajoute que des négociants français qui étaient en Savoie et en Piémont ont reçu l'ordre d'en sortir.

M. Albitte. J'insiste pour qu'on mette d'abord aux voix la proposition de M. Lasource; les comptes rendus des ministres ne sont que des contes bleus.

M. Delacroix. La proposition de M. Lasource et celle de M. Beugnot ne sont pas incompatibles, je les appuie toutes les deux.

(L'Assemblée ordonne le renvoi, à la commission extraordinaire des Douze, de la question de savoir si le ministre des affaires étrangères est coupable d'avoir laissé le Corps législatif ignorant des dispositions hostiles de la Savoie. Elle décrète ensuite que ce dernier rendra compte par écrit de notre situation politique avec la cour de Turin. Elle décide, enfin, que le projet de décret, présenté par M. Kersaint, sur la nécessité d'assurer au peuple des moyens de défense, en cas d'invasion, sera soumis le lendemain à la discussion) (1).

Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une lettre de M. Lafaye des Rabiers, député de la Charente, qui sollicite un congé de trois se

(1) Voy. Archives parlementaires, 1 série t. XLVI, séance du 13 juillet 1792, page 440, le projet de decret de M. Kersaint.

maines pour se rendre auprès de son père à toute extrémité.

Cette lettre soulève de vifs débats. Un grand nombre de membres, observant qu'au moment où la patrie est en danger, le devoir impérieux d'un fonctionnaire public est de rester à son poste, demandent l'ordre du jour.

(L'Assemblée, sur cette demande, passe à l'ordre du jour.)

Une députation de la gendarmerie nationale de Paris est admise à la barre.

L'orateur de la députation sollicite, au nom de ses camarades, un supplément de solde en raison des frais extraordinaires que ce corps a été obligé de faire, soit dans les détachements qu'il fournit pour la sûreté des marchés et la circulation des grains, soit pour les changements d'uniformes que la loi luí a prescrits.

M. le Président répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance. (L'Assemblée renvoie la pétition aux comités militaire et de l'ordinaire des finances réunis.) Un de MM. les secrétaires annonce les dons patriotiques suivants :

1° M. Pilloy, citoyen de Clermont, département de la Meuse, offre à la patrie, pour les frais de la guerre, la somme de 40 livres, faisant le tiers de celle qu'il a reçue pour son engagement dans le premier régiment des chasseurs à cheval, ci-devant Alsace.

2° M. Auguste Isoard, procureur-syndic du district d'Embrun et député suppléant à la législature, offre à la patrie 150 livres pour les frais de la guerre.

(L'Assemblée accepte ces deux offrandes avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal dont un extrait sera remis aux donateurs.)

M. Delacroix. Il est impossible que le décret d'hier soit exécuté s'il n'est complet. Outre les explications à demander à M. Luckner et à M. La Fayette, M. Gensonné avait encore demandé que M. Bureaux de Pusy fùt mandé à la barre pour donner lui-même les renseignements; il faut que l'Assemblée se détermine sur ce point. Je demande que l'Assemblée décrète que MM. La Fayette et Luckner répondront précisément sur la dénonciation, dont copie leur sera envoyée, et qu'elle mandé à sa barre M. Bureaux de Pusy.

(L'Assemblée décrète la proposition de M. Delacroix.)

Suit le texte définitif du décret rendu :

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:

avec lesquelles il existe un traité particulier sur le pied de 8 deniers par livre autrefois le traité était de 6 deniers jusqu'à la distauce de 80 lieues, et un sou au-delà de cette distance.

Suivant la note que m'a procurée M. Clavière sur la fin de son ministère, l'état des frais de transport d'espèces et assignats, dont le payement a été fait aux fermiers des messageries, est de 848,169 1. 2 s. 3 d. pour les neuf derniers mois de 1791 et les trois premiers de 1792; et j'ai la certitude que ce compte n'est pas rigoureusement exact on m'en a fait l'aveu dans les bureaux de la Trésorerie nationale; et quand on ne m'en aurait pas fait l'aveu, l'état qui m'a été remis prouve assez qu'il y avait encore des comptes à apurer dont on ne parle pas. J'ose affirmer, sans craindre de me tromper, que ces transports d'espèces en assignats ou en numéraire métallique, coùtent au moins un million par an avec les messageries, tandis qu'il n'en couterait rien du tout si elles étaient en régie.

J'ajouterai que les voyageurs des diligences intéressés à se défendre en cas d'attaque, sont les défenseurs naturels des deniers publics et préviennent les craintes qui empêchent les administrateurs de la caisse de l'extraordinaire et de la Trésorerie nationale, de confier de fortes sommes aux courriers des malles. Ainsi, je concilie la sûreté du gouvernement avec l'économie, lorsque je conseille de faire ces chargements aux voitures des diligences, et de leur passer d'ailleurs tout le service des malles.

Messieurs, ne vous y trompez pas; la mise des messageries en régie est plus intéressante que Vous ne pensez. Le prix de la ferme n'est que de 613,000 livres et elles sont d'un produit immense. Vous devez en juger sur le seul état de frais de transport des deniers publics, sur le transport des deniers des particuliers qui se remettent à peu près tous à la messagerie, parce que le tarif de la poste qui autorise un droit de perception de 5 0/0 est excessif, et parce que d'ailleurs la régie de la poste ne répond des paquets simplement chargés, que jusqu'à la concurrencede 300 livres.

Si le produit du transport des deniers nationaux est d'un million pour les messageries, il est probable qu'il est du double pour les partiticuliers qui payent 30 francs par 1,000 livres, dans la distance de 20 lieues.

Ajoutez à ces produits ce qui est payé par les voyageurs dans les diligences, ce qui provient du roulage des marchandises et ballots, et sur ce dernier article calculez que les 6 deniers pour le poids de chaque livre dans la distance de 10 lieues, donnent en somme totale, pour un roulier chargé de 6 milliers, 150 livres; alors vous aurez une idée de la valeur des messageries. Elle est telle, que plusieurs sous-fermiers, dans la première année, se sont déjà mis à couvert pour la durée entière de leurs baux qui sont de 6 ans ; des personnes fort instruites me l'ont assuré il importe donc à la nation de s'en emparer et de les mettre en régie avec la poste aux lettres.

Ici je prévois une objection que l'on ne manquera pas de me faire s'il y a tant d'avantages à mettre les messageries en régie et à les reunir à la régie de la poste aux lettres; si cela est évident; si la ferme des messageries, passée à 613,000 livres, est à vil prix, comment l'Assemblée constituante, qui s'en est fortement occupée, a-t-elle pu s'y laisser tromper? Par quelle singularité l'opinion générale, que l'on croit fondée sur l'expérience, est-elle encore opposée

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Et nous, Messieurs, cette expérience doit nous servir de leçon. Le passé, caution presque infaillible de l'avenir, promet la même coalition, les même intrigues qui ont induit en erreur l'Assemblée constituante, à chaque fois que l'expiration d'un bail nécessitera une ferme nouvelle.

Mais dût-on ne pas éprouver cet inconvénient, toujours je soutiendrais, par les grandes considérations de l'ordre social qui est le premier de tous les intérêts, qu'il est de nécessité pour ainsi dire absolue d'établir les messageries en régie? En effet, il n'est aucune partie du service public qui n'exige une surveillance immédiate, ou bien il sera possible à ceux qui seront chargés de cette partie du service de lui donner une direction convenable à leurs intérêts particuliers, et préjudiciable à la nation. Déjà vous avez une expérience acquise à cet égard, et précisément dans le service des messageries. Vous devez vous rappeler la dénonciation que vous a portée un commis des messageries contre les fermiers, à raison de l'exportation du numéraire; dénonciation que les fermiers ont punie en expulsant de leurs bureaux ce commis attaché à la chose publique.

A cet exemple on pourrait en ajouter mille dont je ne doute point qu'un grand nombre ne se soient réalisés : j'insiste donc, par toutes sortes de motifs, à demander que les messageries soient mises en régie, malgré les faussetés qui ont égaré l'Assemblée constituante, et les insinuations des fermiers actuels.

Si je les interrogeais, eux qui ont obtenu une si aveugle confiance dans l'Assemblée nationale, quand ils ont représenté une régie au profit de la nation comme impossible; si je rappelais à leur souvenir, que beaucoup d'entre eux ont été successivement fermiers et régisseurs; si je les pressais de m'expliquer par quelle étrange combinaison le même objet dût être sans valeur entre leurs mains s'ils étaient régisseurs, et qu'il dut acquérir une grande valeur s'ils étaient fermiers, je doute qu'ils pussent me donner une réponse satisfaisante sans compromettre leur honneur.

Mais je sens l'inutilité de vous présenter de nouveaux développements: je me hâte de vous dire que les frais d'établissements ne doivent par excéder 7 millions, puisqu'ils ne coûtèrent à M. Turgot, en 1775, que 2,548,289 livres, dont 917,189 livres étaient pour achats de chevaux, dépense que l'on n'aurait point à faire en chargeant du service les maîtres des postes aux chevaux.

Je résume ce que j'ai dit :

La base principale et à laquelle se réfère mon travail est la nécessité de fortifier, en les réunissant sous une seule administration, les trois services de la poste aux lettres, de la poste aux chevaux et des messageries; c'est-à-dire de réunir dans une seule régie la poste aux lettres et les messageries, et d'appliquer la poste aux chevaux au service de l'une et de l'autre.

Ce point fondamental admis, je croirais à propos d'enjoindre au pouvoir exécutif de fournir, dans un délai précis, les instructions nécessaires à l'organisation des parties qui ne sont point achevées, ainsi qu'il lui est ordonné de le

messageries; la preuve s'en tire de ce qui arriva dix-neuf mois après qu'elle eut cessé, lorsque les fermiers manquèrent du soutien de M. de Clugny et de celui de M. Maurepas.

Älors M. Necker, à la tête des finances, donnait lieu de penser que toutes offres utiles à l'Etat seraient écoutées. En conséquence, une compagnie qui avait appris les succès de la régie Bergant, fit une soumission de 2,200,000 liv. et les fermiers qui, après un bail à 302,020 liv. avaient eu connaissance de ce qui s'était passé pendant la durée de la régie Bergant, et qui avaient l'assurance que pouvait inspirer une jouissance nouvelle de dix-neuf mois, s'estimèrent heureux de continuer leur bail, sous le nom de Claude Laure, & 1,800,000 livres.

Il est vrai qu'en finances et en affaires, comme en guerre, il y a des retours. Ces mêmes fermiers qui s'étaient mis à l'abri de l'éviction, par une offre de 800,000 livres au-dessus du prix de leur bail, trouvèrent le secret, vingt-sept mois après, de ne compter que sur le prix du bail primitif. Le prétexte, qui leur réussit fut le défaut d'exécution de quelques réunions qui leur avaient été promises.

M. Necker qui n'aimait pas à recevoir de pareilles leçons résilia les baux et rétablit les messageries en régie.

Cette seconde régie sous le nom de Dupin, a commencé au 1er juillet 1780, et elle a fini au 1er octobre 1782.

Je ne saurais dire quel a été le produit de ces vingt-sept mois. S'il j'en crois le mémoire des fermiers qui ont persuadé l'Assemblée constituante, le gouvernement n'a retiré en ces vingtsept mois que 883,388 livres d'un objet qui avait régulièrement produit un million par an, depuis qu'il avait été en ferme après la régie Bergant.

Mais quelle confiance accorder à des hommes dont le mémoire est composé dans l'intention spéciale d'écarter toute idée d'une régie? Ne sontils pas ces mêmes fermiers qui calomnient la régie Bergant de la représentent en perte de 2,038,880 livres quant j'ai à la main la preuve de ses bénéfices? Ceux qui trompent sciemment sur la régie Bergant de M. Turgot, doivent aussi tromper sur la régie Dupin de M. Necker.

Si la régie Bergant fut si malheureuse, par quelle singularité, eux qui la critiquent, furent-ils les premiers à se présenter pour obtenir un bail, lorsqu'il fut décidé qu'elle ne subsisterait plus? Par quelle autre singularité, eux qui avaient joui à 302,020 livres avant la régie, élevèrent-ils alors leurs offres à un million, la renonciation aux indemnités dues à cause de la résiliation de leur premier bail, avec des conditions de plus de 70,000 livres par an? Parquelle singularité encore après dix-neuf mois de jouissance de cette dernière proposèrent-ils 700,000 livres d'augmentation, lorsqu'il fut question de résilier leur bail? Certes voilà des contrats passés ou proposés avec le gouvernement qui s'accordent peu avec leurs affections sur les différentes régies.

Frappé par ces considérations, il m'est impossible d'adopter des erreurs visibles qui n'auraient pas dû obtenir le crédit qu'elles ont eu dans l'Assemblée constituante; et je suis persuadé, quoiqu'on en dise, que la régie de M. Necker a pleinement réussi.

Je suis fondé au moins à penser que les 883,388 livres de produit reconnu, formèrent le résidu net au profit de la nation, après l'acquit entier des frais d'établissement, et la réduction des sommes avancées. Alors la régie aurait pro

duit 5 à 6 millions dans vingt-sept mois, ce qu n'est ni malheureux, ni hors les bornes de la probabilité.

S'il en était autrement, les détracteurs de la régie de M. Necker n'auraient donc pas adopté à son égard les mêmes bases de calcul que pour la régie Bergant, et je serais en droit de critiquer cette variation dans le système de leurs calculs.

Après tout, il faut laisser les fermiers se démasquer eux-mêmes : vous les avez vus les premiers se présenter aussitôt après la cessation de la régie Bergant de M. Turgot: eh bien! ils sont encore les premiers à faire leurs soumissions lors de la cessation de la régie Dupin de M. Necker.

Mais ayant forcé M. Necker à un compte sur pied d'un million, malgré un bail de 1,800,000 1., c'était pour eux un motif de bienséance, de ne pas exprimer en termes précis la valeur qu'ils donnaient à la ferme des messageries. En conséquence, ils masquèrent la valeur juste de leur offre, par des conditions particulièresa. Ils en proposérent 800,000 livres et le partage des produits au-dessus de cette fixation.

Cette offre ne fut point acceptée; celle de 1,100,000 livres de M. d'Hauteville, fut préférée, ce qui donne matière aux fermiers de se récrier à à la folie, à la prodigalité contre le gouvernement d'alors, qui devait sentir combien leur proposition excédait les 1,100,000 livres de M. d'Hauteville.

C'est en 1782, sous le ministère de M. Joly de de Fleury, que ce nouveau bail, sous le nom de Ducessois, a commencé. Avant de vous entretenir des succès de cette ferme, il est à propos de vous dire deux mots de la personne de M. d'llauteville.

On le représente comme un des plus habiles intrigants qui aient contribué à désoler nos finances on lui reproche d'avoir le crédit de quelques-uns, des principaux personnages de la cour, afin de se procurer la préférence qu'il a obtenue et de n'y avoir réussi que par cette odieuse manoeuvre.

Voici l'énumération des sommes qu'il a distribuées 1° un contrat de 25,000 livres de rente pendant la durée de son bail, sans mise de fonds, à M. Roullet, bailli de Malte, par acte d'Alleaume, notaire, du 18 octobre 1782.

M. Roullet toucha sur-le-champ les deux premières années, et revendit les sept autres à une dame pour 75,000 livres.

2o. Dans les premiers jours de sa gestion, il passe pour constant que M. d'Hauteville fit une distribution de plus de 300,000 livres à ses pro

tecteurs.

Plus les sacrifices de M. d'Hauteville étaient considérables, plus il se promettait de s'en dédommager ses spéculations ne l'ont pas trompé.

Des hommes tels que celui-là sont toujours en mesure avec les événements; il n'en arrive aucun qui puisse tourner à leur profit qu'ils ne saisissent l'occasion. L'entrée de M. de Calonne au contrôle général le servit merveilleusement bien. Voici le parti qu'il en tira:

Après deux ans et demi de jouissance, pour lesquels il n'avait encore payé que 720,000 livres, après avoir obtenu à 1,763,211 livres le mobilier de la régie Dupin, qui valait plus de 2,000,000, il obtint une remise de 443,211 livres sur le montant de l'inventaire, et l'avantage de ne payer le surplus qu'en cession de bâtiments construits sur un terrain tenu à simple loyer;

et ces générosités de M. de Calonne furent comblées ensuite par une indemnité de 1,150,000 livres.

Les pièces qui le constatent sont le résultat du conseil du 22 septembre 1782, un bon du roi (il en signait alors si légèrement) du 3 octobre 1784, un arrêt du conseil du 10 mars 1785, et un bon du roi du 24 décembre 1786.

Cependant M. Lambert, arrivé en 1787 au contrôle général, voulut approfondir les motifs de ces indemnités et de ces réductions de prix. Que fit alors M. d'Hauteville? Il en employa encore les moyens de réussite qui lui étaient particuliers; ils produisirent leur effet; il obtint la paix avec un nouveau bail à 1,100,000 livres chargées de conditions qui réduisaient son offre à 900,000 livres, et il parvint à écarter une compagnie dont la soumission était de 1,200,000 livres.

Ce nouveau bail de M. d'Hauteville, commencé au 1er janvier 1788, existait lorsque la Révolution, qui abolit tous les privilèges, a nécessité la résiliation de ce bail pour le 1er janvier 1791.

Je crois que M. d'Hauteville a cependant joui jusqu'au 1er avril 1791: ce sont des arrangements avec les fermiers actuels qui n'intéressent que faiblement la nation; je n'ai d'ailleurs à cet égard que des conjectures; mais j'ai la certitude qu'il a déjà commencé à tromper l'Assemblée nationale, et qu'elle est sur le point de consacrer les erreurs qu'il lui a présentées. Votre comité de liquidation vous a fait un rapport tendant à lui accorder une indemnité de 1,950,250 livres. Je n'ai pas encore connu d'intrigants dont les succès aient été plus constants et plus répétés. J'espère qu'enfin le dernier qu'il sollicite lui sera refusé, et que l'Assemblée nationale, avant d'accorder aucune indemnité, lui fera tenir compte des sommes dont il a frustré le gouvernement par des actes de faveur et d'autorité.

Telles ont été les variations qu'a éprouvées l'administration des messageries, mises successivement en ferme et en régie.

Sur une série de faits aussi peu concordants entre eux, et d'expériences aussi extraordinaires, ceux qui aspiraient à la ferme des messageries avaient une belle occasion d'exercer leurs intrigues, en semant les défiances et en multipliant les erreurs. La circonstance de l'abolition des privilèges, qui semblait changer la nature de cette administration, leur était d'ailleurs d'un grand secours. Tous les intéressés l'ont bien senti, tous ont dirigé leur attaque sur ce point, et ils l'ont emporté. C'est ainsi que l'Assemblée constituante a été égarée et qu'elle a été détournée d'une régie.

Mais il est évident, pour quiconque veut réfléchir, que si la nation, sous l'ancien régime, n'a pas retiré des messageries ce qu'elles auraient dû rapporter, il faut s'en prendre à l'inconstance des ministres qui rompaient d'un instant à l'autre les baux ou les régies, à l'intrigue qui faisait adopter ou rejeter les différentes offres, sans considérer l'intérêt national. Si l'on a calomnié les régies de M. Turgot et de M. Necker, il n'en est pas moins vrai qu'elles ont réussi, qu'elles n'avaient que de plus grands succès à attendre si elles avaient été continuées et perfectionnées; en un mot, que l'intrigue et l'intérêt privé en défigurant la vérité, ou en l'outrageant, ont jeté dans les esprits le préjugé mal fondé et nuisible au bien de nos finances, que les messageries ne peuvent subsister avantageusement en régie. Les difficultés que les compagnies prétendantes se plaisaient à multiplier, n'avaient pas eu lieu

à l'égard de la poste aux lettres, annoncée dès le premier moment pour être en régie. Cette circonstance aurait dû être observée, elle aurait dû ouvrir les yeux les moins exercés, et inspirer aussi à l'égard des messageries, l'idée d'une régie qui aurait confondu toutes les intrigues.

Et nous, Messieurs, cette expérience doit nous servir de leçon. Le passé, caution presque infaillible de l'avenir, promet la même coalition, les même intrigues qui ont induit en erreur l'Assemblée constituante, à chaque fois que l'expiration d'un bail nécessitera une ferme nouvelle.

Mais dût-on ne pas éprouver cet inconvénient, toujours je soutiendrais, par les grandes considérations de l'ordre social qui est le premier de tous les intérêts, qu'il est de nécessité pour ainsi dire absolue d'établir les messageries en régie? En effet, il n'est aucune partie du service public qui n'exige une surveillance immédiate, ou bien il sera possible à ceux qui seront chargés de cette partie du service de lui donner une direction convenable à leurs intérêts particuliers, et préjudiciable à la nation. Déjà vous avez une expérience acquise à cet égard, et précisément dans le service des messageries. Vous devez vous rappeler la dénonciation que vous a portée un commis des messageries contre les fermiers, à raison de l'exportation du numéraire; dénonciation que les fermiers ont punie en expulsant de leurs bureaux ce commis attaché à la chose publique.

A cet exemple on pourrait en ajouter mille dont je ne doute point qu'un grand nombre ne se soient réalisés : j'insiste donc, par toutes sortes de motifs, à demander que les messageries soient mises en régie, malgré les faussetés qui ont égaré l'Assemblée constituante, et les insinuations des fermiers actuels.

Si je les interrogeais, eux qui ont obtenu une si aveugle confiance dans l'Assemblée nationale, quand ils ont représenté une régie au profit de la nation commie impossible; si je rappelais à leur souvenir, que beaucoup d'entre eux ont été successivement fermiers et régisseurs; si je les pressais de m'expliquer par quelle étrange combinaison le même objet dût être sans valeur entre leurs mains s'ils étaient régisseurs, et qu'il dut acquérir une grande valeur s'ils étaient fermiers, je doute qu'ils pussent me donner une réponse satisfaisante sans compromettre leur honneur.

Mais je sens l'inutilité de vous présenter de nouveaux développements: je me hâte de vous dire que les frais d'établissements ne doivent par excéder 7 millions, puisqu'ils ne coûtèrent à M. Turgot, en 1775, que 2,548,289 livres, dont 917,189 livres étaient pour achats de chevaux, dépense que l'on n'aurait point à faire en chargeant du service les maîtres des postes aux chevaux.

Je résume ce que j'ai dit :

La base principale et à laquelle se réfère mon travail est la nécessité de fortifier, en les réunissant sous une seule administration, les trois services de la poste aux lettres, de la poste aux chevaux et des messageries; c'est-à-dire de réunir dans une seule régie la poste aux lettres et les messageries, et d'appliquer la poste aux chevaux au service de l'une et de l'autre.

Ce point fondamental admis, je croirais à propos d'enjoindre au pouvoir exécutif de fournir, dans un délai précis, les instructions nécessaires à l'organisation des parties qui ne sont point achevées, ainsi qu'il lui est ordonné de le

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