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Nous sommes au mois d'août, et, à 400,000 livres près qui ont été envoyés à la foire de Beaucaire, on n'en voit encore aucun. Je demande, pour qu'on ne retarde pas encore cette répartition, que le comité des assignats et monnaies nous fasse un rapport demain sur l'état de cette fabrication et sur le mode de répartition dans tous les départements. Je demande que vous fassiez rendre compte de la conduite du commissaire du roi, et pourquoi il n'a pas pressé la fabrication des assignats, car il est nécessaire que cet agent du pouvoir exécutif soit puni s'il est coupable. (Applaudissements.)

(L'Assemblée décrète que son comité des assignats et monnaies sera entendu à cet égard.)

5o Lettre de M. Pétion, maire de Paris, qui envoie copie d'un arrêté pris par le conseil général de la commune, par lequel il ordonne qu'à compter du 3 août il ne sera porté d'autre cocarde que la cocarde militaire, et qui prie le Corps législatif de vouloir bien lui faire connaître si le conseil général n'est pas tombé dans l'erreur; cette lettre est ainsi conçue :

« Monsieur le Président,

« Le conseil général de la commune, instruit des divisions que la différence des cocardes a fait naître entre les citoyens, pénétré de la nécessité de prévenir ces principes de discorde, surtout dans ces temps orageux, où les plus légères étincelles peuvent allumer le plus grand incendie, a pris l'arrêté que j'ai l'honneur de joindre à la présente.

"

Quelques instants après, l'Assemblée nationale s'est occupée de cet objet. Plusieurs membres ont observé qu'il était indifférent que la cocarde nationale fût en rubans ou en laine, pourvu qu'elle fût aux trois couleurs; et l'Assemblée a passé à l'ordre du jour. Les motifs qui ont déterminé sa conduite ont été envisagés diversement et n'ont pas paru assez certains. Le conseil général a fondé son arrêté sur une raison: il a dit qu'il ne pourrait être porté d'autres cocardes que la cocarde militaire, attendu que tous les citoyens, dans les dangers de la patrie, sont en état de réquisition permanente. Le conseil général a pensé, en outre, que la mesure était une simple mesure de police; il me charge de demander à l'Assemblée nationale s'il était tombe dans l'erreur; il attend sa décision. Il espère qu'elle la rendra promptement, et il s'empressera de lui donner des preuves de sa soumission et de son zèle. »

M. Delacroix. L'Assemblée nationale a rendu son décret. Je ne crois pas que le conseil général de la commune puisse faire un règlement ou une loi sur cet objet; car autrement, il y aurait autant de sortes de cocardes et de règlements qu'il y aurait de conseils généraux de communes. Il serait possible qu'ici on fut en sûreté avec une cocarde, et qu'à Saint Denis ou à Versailles on fùt arrêté avec la même cocarde. L'Assemblée constituante avait fait différentes lois sur les cocardes; vous les avez confirmées, vous les avez expliquées par votre décret de mardi, en disant que ces lois ne s'étant pas expliquées sur l'étoffe et sur la manière dont seraient faites les cocardes, mais seulement sur les couleurs qui devaient composer les cocardes, il était libre à tout individu de porter des cocardes de telle étoffe qu'il voudrait, pourvu qu'elles fussent aux trois couleurs. Je m'étonne que le pouvoir exécutif, à

qui cet acte du Corps législatif a dû être adressé le même jour, ne l'ait pas fait passer.

Un membre: Il ne l'a pas.

M. Delacroix. Mais tant pis; s'il ne l'a pas, le conseil général de la commune a bien fait, pour empêcher le trouble dans Paris, de prendre cette précaution. Si cette loi-là n'a pas été envoyée au pouvoir exécutif, il faut la lui envoyer, afin que ceux qui veulent s'ériger à faire la police dans Paris et ailleurs, qui veulent arracher une cocarde parce qu'elle est en ruban, apprennent que la loi permet ces sortes de cocardes.

M. Becquey. Comme il est nécessaire que cette loi soit notifiée au public, il faut que la motion de M. Delacroix, qui a été mal à propos rédigée en ordre du jour motivé, soit rédigée en un décret qui portera positivement que les cocardes, de quelque étoffe qu'elles soient, sont des cocardes nationales, pourvu qu'elles aient les trois couleurs; alors votre décret sera présenté au pouvoir exécutif, sanctionné et exécuté. (L'Assemblée après avoir décrété l'urgence adopte la proposition de M. Becquey.)

Suit le texte définitif du décret rendu :

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« L'Assemblée nationale, quand elle a formé la France, n'a pas eu sans doute l'intention d'en laisser une clef entre les mains du ministre des affaires étrangères. Il a cependant délivré deux passeports, l'un à un négociant, l'autre à un plénipotentiaire qui se rend à Venise. J'ai rappelé ces deux citoyens à la loi, j'ai demandé à l'un sa commission du roi, à l'autre sa patente et à tous deux le certificat de leur section.

« C'est à vous, législateurs, à décider, si par une exception qui n'est pas dans votre sage décret, si, contre son vou formel, les ministres peuvent commander la confiance aux municipalités.

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Je suis avec respect.

Signė MANUEL, procureur de la commune de Paris.

(L'Assemblée renvoie la lettre au comité diplomatique.)

M. Pierre Roland est admis à la barre.

Il fait part à l'Assemblee de son dévouement à la Constitution et offre 12 livres en argent pour subvenir aux frais de la guerre.

M. le Président répond au donateur et lui accorde les honneurs de la séance.

(L'Assemblée accepte cette offrande avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal, dont un extrait sera remis au donateur.)

Un de MM. les secrétaires annonce le don pa

triotique des secrétaires-commis au comité des pétitions, de la commission ordinaire des Douze et de la commission extraordinaire, qui déposent, en vertu de leur soumission, 30 livres pour le mois de juillet.

(L'Assemblée accepte cette offrande avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal, dont un extrait sera remis aux donateurs.)

M. Brémontier, au nom de la commission chargée de surveiller la fabrication des assignats et en remplacement de M. Mosneron, fait un rapport et présente un projet de décret au sujet du retard qu'a éprouvé la fabrication du papier des assignats de 50 sols.

Il annonce que la cause de ce retard est la refonte qu'il faut faire du papier déjà fabriqué, attendu son épaisseur et sa nébulosité. Il attribue à M. Desmarets, commissaire du roi, préposé à la fabrication de ce papier, toute sa défectuosité. C'est lui, dit-il, qui a voulu qu'il pesât 23 livres la rame, malgré les observations que lui a faites M. Didot, que ce poids lui donnerait trop d'épaisseur, empêcherait de distinguer les filigranes et les transparents. Il fait lecture du projet de décret dont M. Mosneron était chargé du comité des assignats et monnaies (1) et il en propose ensuite un second en son nom.

Ce second projet est ainsi conçu :

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de sa commission de surveillance de fabrication des assignats sur la défectuosité du papier fabriqué jusqu'à présent à la papeterie d'Essonne pour les coupures des assignats de 50 sols; considérant qu'il est utile de rectifier cette fabrication reconnue défectueuse, et dont la suspension ne peut être plus longtemps prolongée sans inconvénients pour la chose publique, décrète qu'il y a urgence.

« L'Assemblée nationale, après avoir décrété l'urgence, décrète ce qui suit:

«Art. 1er. Tout le papier fabriqué jusqu'à présent à Essonne, pour les coupures d'assignats de 50 livres, sera retiré incessamment des archives et reporte à celle des manufactures qui seraient indiquées par le ministre, ou le directeur de la fabrication, pour ledit papier et celui fabriqué à Essonne pour le même usage, être refondus en totalité, et en présence de MM. les commissaires de l'Assemblée et du roi qui constateront cette refonte.

"Art. 2. Le pouvoir exécutif est chargé de faire procéder sans aucun délai à une nouvelle fabrication du papier destiné aux coupures d'assignats de 50 sols, et d'informer le Corps législatif des nouvelles dispositions qui auront été adoptées à cet effet.

Art. 3. Sera également tenu le pouvoir exécutif, de donner connaissance à l'Assemblée, et par écrit, des mesures qu'il aura jugé convenable de prendre concernant les indemnités auxquelles l'inexécution du marché passé pour cette fabrication, et ce qui s'en suivra, pourraient donner ouverture.

(L'Assemblée accorde la priorité au projet de décret de M. Brémontier, en ordonne la discusslon et décrète l'urgence.)

M. Brémontier, rapporteur, donne lecture

(1) Nous n'avons pu retrouver le projet de décret de M. Mosneron.

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« Le pouvoir exécutif est chargé de faire procéder, sans aucun délai, à une nouvelle fabrication de papier destiné aux coupures d'assignats de 50 sols, et d'informer le Corps législatif des nouvelles dispositions qui auront été adoptées. "

M. Carez. Je rappelle à l'Assemblée la dénonciation que j'ai déjà faite contre M. Desmarets, comme ayant favorisé un marché frauduleux avec Me Lagarde. J'espère qu'à cette heure et après avoir entendu le rapport de son comité, l'Assemblée n'hésite plus à me donner raison. Je dénonce ce commissaire comme coupable de la défectuosité du papier des assignats et je demande qu'il soit tenu de payer les rames défectueuses, dont la perte est évaluée à 144,000 livres.

M. Delacroix. J'appuie la motion de M. Carez, mais, comme la responsabilité pécuniaire opposée à la protection d'une liste civile de 25 millions n'est qu'une faible barrière aux prévarications ministérielles, je demande que ce commissaire soit décrété d'accusation.

M. Aubert-Dubayet. Il y aurait précipitation, je crois, de la part de l'Assemblée de décréter d'accusation un homme sans l'entendre. Il vaudrait mieux, à mon avis, mander à la barre M. Desmarets et le prier de s'expliquer à cet égard.

Un membre: On pourrait également citer le ministre des contributions publiques, qui était en place à l'époque où la fabrication dont il s'agit a été exécutée!

(L'Assemblée adopte ces deux dernières propositions et décrète que l'ex-ministre Tarbé et l'ex-commissaire du roi Desmarets comparaitront demain soir à la barre, pour être entendus sur les clauses contradictoires du marché passé le 26 février dernier pour la fabrication du papier destiné aux coupures d'assignats de 50 sols. Elle décrète, en outre, que ledit Desmarets rendra compte également des causes qui ont occasionné la mauvaise fabrication et de sa négligence à l'arrêter ou rectifier, ainsi que de l'existence du marché qu'il a dû passer avec la dame Lagarde, pour la fabrication des assignats de 5 livres de la première création ordonnée par cette législature.)

M. le Président cède le fauteuil à M. Lemontey, ex-président.

PRÉSIDENCE DE M. LEMONTEY, ex-président.

M. Guadet, au nom de la commission extraordinaire des Douze, fait un rapport et présente un projet de décret sur le traitement à faire aux militaires étrangers qui se réuniront sous les drapeaux de la France; il s'exprime ainsi :

Messieurs, votre commission m'a chargé de vous présenter un projet de décret relatif aux militaires étrangers qui ont déjà passé ou pourraient passer à l'avenir sous les drapeaux de la nation française. L'adoption de ce projet de décret a paru à votre commission tellement pressante, qu'elle ne m'a pas permis de le faire précéder d'un rapport. Ce rapport, au reste, n'aurait eu d'autre objet que de développer les principes sur lesquels le projet de décret est fondé. Or, indépendamment de ce que le considérant énonce ces principes, vous les connaissez assez sans que j'aie besoin de vous les indiquer. Voici le projet de loi :

« L'Assemblée nationale, considérant que tout ce qui tient au succès des armes de la nation française et au triomphe de la cause de la liberté ne peut souffrir aucun retardement, décrète qu'il y a urgence.

« L'Assemblée nationale, après avoir décrété l'urgence, considérant que les hommes libres ont seuls une patrie; que celui qui a abandonné une terre asservie pour se réfugier sur celle de la liberté ne fait qu'user d'un droit légitime, et qu'il ne peut exister aucune obligation entre l'homme privé de ses droits naturels et celui qui les lui a ravis;

« Considérant qu'elle ne doit négliger aucun moyen de terminer une guerre que la nation française n'a entreprise que pour maintenir sa Constitution et son indépendance, et que parmi ces moyens elle doit surtout préférer ceux qui, par cela seul qu'ils épargnent le sang des hommes, s'accordent plus avec les principes;

« Considérant, enfin, que si la cause de la liberté appartient à tous les hommes, et que s'il est de leur intérêt à tous de se vouer à sa défense, la nation française n'en doit pas moins donner, à titre d'indemnités, des marques de sa reconnaissance aux guerriers étrangers qui viennent se ranger sous ses drapeaux, ou qui abandonnent les drapeaux ennemis pour n'être pas forcés à tourner leurs armes contre un peuple dont tous les vœux et tous ses principes appellent la paix universelle et le bonheur de tous les hommes;

« Voulant d'ailleurs faire connaître aux nations étrangères les principes de justice qui dirigeront toujours sa conduite, décrète ce qui suit:

« Art. 1er. Les sous-officiers et soldats des armées ennemies qui, jaloux de vivre sur la terre de la liberté et de l'égalité, abandonneront les drapeaux d'une puissance actuellement en guerre avec la France, et se présenteront soit à un poste militaire, soit à une des autorités constituées, soit à un citoyen français, seront accueillis avec amitié et fraternité, et recevront d'abord comme signe d'adoption une cocarde aux trois couleurs. (Applaudissements.)

« Art. 2. Ces sous-officiers et soldats, après avoir manifesté l'intention de vouloir embrasser la cause de la liberté, recevront, à titre d'indemnité des sacrifices qu'ils auront pu faire, un brevet de pension viagère de la somme de 100 livres, laquelle leur sera annuellement payée pendant tout le temps qu'ils résideront en France, de trois en trois mois, et d'avance, par le receveur du district dans lequel ils résideront. Ils seront, en outre, admis à prêter le serment civique, et il leur sera délivré une expédition du procès-verbal de la prestation de leur serment. (Applaudissements.)

Art. 3. Lesdits sous-officiers et soldats recevront, en outre, une gratification de 50 livres, qui leur sera payée sur les ordres du chef militaire ou de l'officier civil en présence duquel ils auront fait la déclaration prescrite par l'article 2.

« Art. 4. Lesdits sous-officiers et soldats ne seront point forcés de contracter un engagement militaire. Ceux qui voudront contracter un tel engagement seront indifféremment admis, à leur volonté, soit dans les bataillons de volontaires nationaux, soit dans les différents corps de troupes de ligne, soit dans les légions, soit dans les compagnies franches.

« Art. 5. Ceux desdits sous-officiers et soldats qui contracteront un engagement militaire recevront, au moment de leur engagement, en sus de la gratification et de la pension viagère cidessus énoncée, le prix fixé par les lois antérieures pour les différentes armes.

« Art. 6. Il sera formé un tableau général des sous-officiers et soldats étrangers qui auront embrassé la cause de la liberté et de l'égalité, et une masse générale des sommes qui leur auront été accordées en vertu de l'article 2 du présent décret. Les pensions, à mesure de leur extinction, seront reversées sur les survivants, et ce, jusqu'au moment où ils jouiront tous de 500 livres de pension viagère. (Applaudissements.)

« Art. 7. La pension viagère de 100 livres sera reversible sur la tête de la veuve du sous-officier ou soldat étranger qui sera marié en France. La veuve ne concourra pas à l'accroissement progressif porté par l'article 4.

« Art. 8. Pendant la durée de la guerre actuelle, les sous-officiers et soldats étrangers qui ne voudront point contracter d'engagement militaire, se retireront dans l'intérieur du royaume, et au moins à 20 lieues des frontières. Il leur sera, de plus, indiqué des villes où ils trouveront des interprètes, et où ils pourront, s'ils le veulent, fixer leur résidence.

« Art. 9. Ceux des sous-officiers ou soldats qui contracteront un engagement militaire seront, par les soins des généraux et des chefs de corps, répartis avec égalité dans ces différentes compagnies des corps dans lesquels il seront entrés, afin qu'ils puissent plus aisément former des liaisons de fraternité et d'amitié avec les défenseurs de la Constitution et de la liberté française. (Applaudissements.)

Art. 10. Ceux desdits sous-officiers et soldats qui auraient contracté un engagement militaire, obtiendront pour leur service, leurs actions d'éclat ou leurs blessures, les récompenses et les retraites accordées aux citoyens français, dont ils seront, dès ce moment, censés faire partie. (Applaudissements.)

« Art. 11. L'Assemblée nationale recommande à la sollicitude de tous les fonctionnaires publics et à la fraternité des officiers et soldats des des armées françaises, les sous-officiers et soldats étrangers qui se réuniront à eux pour servir et défendre la cause des peuples et de la liberté. (Applaudissements.)

Art 12. Les sous-officiers et soldats étrangers qui sont entrés en France depuis la déclaration de guerre, recevront, immédiatement après la publication du présent décret, les indemnités prescrites par l'article 2. En conséquence, il sera, par la trésorerie nationale, mis pour cet objet 2 millions à la disposition du ministre de la guerre.

"Art. 13. La pension viagère de 100 livres et son accroissement progressif auront lieu, même pour ceux des sous-officiers et soldats étrangers qui auraient refusé de contracter un engagement, et qui préféreront de se retirer dans l'intérieur du royaume. L'Assemblée regardant comme indigne de la générosité française de n'offrir qu'à ce prix une indemnité aux étrangers qui abandonneront les drapeaux ennemis.

« Art. 14. L'Assemblée nationale hypothèque le produit de la vente des biens des émigrés dont la vente est décrétée (Vifs applaudissments), et, subsidiairement, les revenus de l'Etat, au payement des pensións viagères ci-dessus promises et accordées.

« Art. 15. Dans le cas où, contre son vœu et ses espérances, la France se trouverait engagée dans une guerre contre une nation libre et souveraine, les citoyens de cette nation ne seront point admis à jouir des avantages du présent décret.

« Art. 16. Le présent décret sera porté, dans le jour, à la sanction. »

(L'Assemblée décrète l'urgence.)

M. Guadet, rapporteur, donne lecture de l'article 1er qui est adopté sans discussion, puis de l'article 2 qui est ainsi conçu :

Ces sous-officiers et soldats, après avoir fait la déclaration de vouloir embrasser la cause de la liberté, recevront, à titre d'indemnité des sacrifices qu'ils auront pu faire, un brevet de pension viagère de la somme de 100 livres, laquelle leur sera annuellement payée, et pendant tout le temps qu'ils résideront en France, de trois mois en trois mois et d'avance, par le receveur du district dans lequel ils résideront. Ils seront, en outre, admis à prêter le serment civique, et il leur sera délivré une expédition du procèsverbal à la prestation de leur serments. »

M. Kersaint. Je demande, par amendement, que les 100 livres de gratification accordées à chaque militaire étranger qui se présentera ne lui soient pas remise sur-le-champ.

M. Aubert-Dubayet. J'appuie l'amendement de M. Kersaint, car j'ai la conviction que les généraux ennemis qui voudront abuser des dispositions de votre décret, ne manqueront pas de favoriser, quand ils le trouveront bon, la désertion de leurs soldats. (Murmures.) Cette désertion simulée épuisera nos finances sans être utile à

la patrie. Il ne faut pas, dans un décret aussi bon, une disposition qui puisse devenir illusoire.

Plusieurs membres : La question préalable!

(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'amendement de M. Kersaint, et adopte l'article 2 du projet de décret du comité.)

M. Guadet, rapporteur, donne lecture des articles 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13 et 14 qui sont adoptés sans discussion, puis de l'article 15, qui est ainsi conçu:

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Dans le cas où, contre son vou et ses espérances, la France se trouverait engagée dans une guerre contre une nation souveraine, les citoyens de cette nation ne seront point admis à jouir des avantages accordés par le présent décret. »

M. Gérardin. Je demande la suppression du mot souveraine, parce que toutes les nations le sont.

M. Guadet. Dans l'intention du comité, on ne voulait mettre que nation libre. C'est sur l'observation de quelques-uns de mes collègues, que j'ai ajouté le mot souveraine, dans la crainte que le mot libre n'exprimât pas assez le sens de l'article. Cependant, il faut se rendre à l'observation de M. Gérardin, et mettre dans l'article: toute nation libre ou exerçant sa souveraineté.

(L'Assemblée adopte l'article ainsi rédigé.) M. Guadet, rapporteur, donne lecture de l'article 16, qui est adopté sans discussion.

M. Kersaint. Je demande que l'Assemblée décrète la traduction de ce décret en allemand. Plusieurs membres : L'ordre du jour!

(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette proposition.)

Suit le texte définitif du décret rendu:

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L'Assemblée nationale, considérant que tout ce qui tient au succès des armes de la nation française et au triomphe de la liberté ne peut souffrir aucun retardement, décrète qu'il y a urgence.

L'Assemblée nationale, considérant que les hommes libres ont seuls une patrie, que celui qui abandonne une terre asservie pour se réfugier sur celle de la liberté, ne fait que d'user d'un droit légitime, et qu'il ne peut exister aucune obligation entre l'homme privé de ses droits naturels et celui qui les lui a ravis;

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« Considérant qu'elle ne doit négliger aucun moyen de terminer une guerre que la nation française n'a entreprise que pour défendre sa Constitution et son indépendance; et que, parmi ces moyens, elle doit surtout préférer ceux qui, par cela seul qu'ils épargnent le sang des hommes, s'accordent le plus avec ses principes;

"Considérant enfin que si la cause de là liberté appartient à tous les hommes, et s'il est de leur devoir et de leur intérêt à tous de se dévouer à sa défense, la nation française n'en doit pas moins, ne fùt-ce qu'à titre d'indemnité, des marques de sa reconnaissance et de son intérêt aux guerriers étrangers qui viennent se ranger sous ses drapeaux, où qui abandonnent ceux de ses ennemis, pour n'être pas forcés à tourner leurs armes contre un peuple dont tous les vœux et tous les principes appellent la paix universelle et le bonheur de tous les hommes;

« Voulant d'ailleurs faire connaître aux nations étrangères les principes de justice qui dirigeront toujours sa conduite, décrète ce qui suit :

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« Ces sous-officiers et soldats, après avoir fait la déclaration de vouloir embrasser la cause de la liberté, recevront à titre d'indemnité des sacrifices qu'ils auront pu faire, un brevet de pension viagère de la somme de 100 livres, laquelle leur sera annuellement payée et pendant tout le temps qu'ils résideront en France, de trois mois en trois mois et d'avance, par le receveur du district dans lequel ils résideront ils seront en outre admis à prêter le serment civique, et il leur sera délivré une expédition du procès-verbal de la prestation de leur serment.

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Art. S.

« Pendant la durée de la guerre actuelle, les sous-officiers et soldats étrangers, qui ne voudront pas contracter d'engagement militaire, se retireront dans l'intérieur du royaume; ils pourront choisir le lieu où ils voudront fixer leur résidence, mais il leur sera indiqué des villes où ils trouveront des interprètes.

Art. 9.

Ceux desdits officiers ou soldats qui contracteront un engagement militaire, seront, par les soins des généraux et des chefs de corps, répartis avec égalité dans les différentes compagnies du corps dans lequel ils seront entrés, afin qu'ils puissent plus aisément former des liaisons d'amitié et de fraternité avec les défenseurs de la Constitution et de la liberté française.

Art. 10.

« Ceux desdits sous-officiers et soldats qui auront contracté un engagement militaire, obtiendront pour leurs services, leurs actions d'éclat ou leurs blessures, les récompenses et les retraites accordées aux citoyens français dont ils seront, dès ce moment, censés faire partie.

Art. 11.

« L'Assemblée nationale recommande à la sollicitude de tous les fonctionnaires publics et à la fraternité des officiers et soldats et des armées françaises, les sous-officiers et soldats étrangers qui se réuniront à eux pour servir et défendre la cause des peuples et de la liberté.

Art. 12.

« Les sous-officiers et soldats étrangers qui sont entrés en France depuis la déclaration de guerre, recevront, immédiatement après la publication du présent décret, les indemnités prescrites par l'article 2; en conséquence, il sera, par la trésorie nationale, mis pour cet objet 2 millions à la disposition du ministre de la guerre.

Art. 13.

«La pension viagère de 100 livres et son accroissement progressif auront lieu même pour ceux des sous-officiers et soldats étrangers qui refuseront de contracter un engagement militaire et qui préféreront se retirer dans l'intérieur du royaume, l'Assemblée nationale regardant comme indigne de la générosité d'un peuple libre de n'offrir qu'à ce prix une indemnité aux étrangers qui auraient refusé de combattre contre lui.

Art. 14.

"L'Assemblée nationale hypothèque le produit des biens des émigrés dont la vente est décrétée, et subsidiairement les revenus de l'Etat, au payement des pensions viagères ci-dessus promises et accordées.

Art. 15.

« Dans le cas où, contre son vœu et ses espérances, la France se trouverait engagée dans

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