Nanni fils du premier écuyer de S. S., à sept ans de réclusion dans la citadelle Civita Castellana, quelques autres à la prison pour plus ou moins de temps, peines qu'on espérait voir adoucir à la fin de l'année du jubilé. Ces procédures et leurs résultats ont fait une profonde impression. Les feuilles libérales ont représenté les associations secrètes formées en Italie, comme n'ayant d'autre but que de lui faire donner des institutions conformes aux mœurs, aux besoins du temps, analogues aux progrès de la civilisation, telles qu'en avaient obtenu récemment les Pays-Bas, la France et quelques états de l'Allemagne méridionale. Elles signalaient ces procédures tantôt comme l'œuvre du jésuitisme, dans le but d'étouffer toute liberté publique, tantôt comme une combinaison politique du cabinet autrichien, dans l'intérêt qu'il avait de faire croire à des conspirations pour motiver la continuation de son système en Lombardie, et la prolongation du séjour de ses troupes dans le royaume des Deux-Siciles. En même temps qu'elle recherchait avec tant d'activité les carbonari, la police romaine s'occupait de dissoudre les bandes de brigands qui infestaient toujours les montagnes du côté de Sonnins. Un de leurs chefs, connu par un grand nombre d'attentats audacieux, nommé Gasbarone, ayant manifesté quelque disposition à se rendre sous conditions, un vicaire général de Sezze s'était rendu dans les montagnes, et il avait réussi, au péril de sa vie, par ses discours pleins d'onction, à persuader à la troupe entière des brigands de le suivre à Rome, en leur assurant leur pardon, mais la plupart l'abandonnèrent en route et retournèrent à leur métier; il n'en resta que sept d'entre eux avec leur chef, et ils se laissèrent conduire au château Saint-Ange. Gasbarone avait une maîtresse fort belle qui l'avait suivi dans ses expéditions, on le détermina à cesser une liaison illégitime, et il l'épousa le lendemain de son arrivée dans sa prison; on espérait beaucoup de cette soumission singulière; elle n'a pas eu d'autres résultats. Entre les mesures de l'administration pontificale, on a remarqué une ordonnance qui remet en vigueur les anciens édits contre les juifs, qui les obligeaient à demeurer dans un quartier particulier (le Ghetto), qui leur enjoignaient de porter des signes distinctifs (un ruban jaune au chapeau ou sur la poitrine) pour les faire reconnaître, et qui annullaient tous les contrats commerciaux passés entre des chrétiens et des juifs. En général, hors des matières politiques ou religieuses, le gouvernement pontifical montrait partout une douceur paternelle; il avait réduit l'impôt financier; la célébration du jubilé avait attiré beaucoup de pélerins, la plupart d'Italie (environ cent mille, dont un tiers de femmes); on avait répandu à cette occasion d'abondantes aumônes. Le Saint-Père avait encore fait au mois de septembre une maladie qui semblait devoir lui interdir les fonctions ecclésiastiques, mais, contre toute espérance, il se trouva assez de force ou plutôt de courage pour faire la fermeture de la porte sainte, la veille de Noël, à l'expiration du jubilé. Cette imposante cérémonie avait attiré des personnages de la plus haute distinction et une foule de fidèles. On en trouvera ailleurs la description (V. la Chronique), mais nous remarquerons ici qu'il fut publié à cette occasion, sous la date du 25 décembre, une bulle pontificale adressée à tout le clergé catholique, écrite dans le style le plus sévère contre la propagation des doctrines anarchiques et impies, par la voie de la presse. C'est dans ce même temps que les journaux de Rome s'élevaient contre les arrêts de la Cour royale de Paris dans les procès du Constitutionnel et du Courrier français, et surtout contre la plaidoirie de M. Dupin, qui avait signalé la puissance sacerdotale « comme une épée dont la poignée « est à Rome et la pointe partout. >> Nous avons parlé dans les chapitres précédens de difficultés qui s'étaient élevées entre la cour de Rome et quelques puissances étrangères, nous renvoyons les autres à l'article des pays qu'elles concernent, et on y trouvera une preuve des progrès que l'autorité du Saint-Siége a faits dans ces derniers temps. Plusieurs souverains catholiques avaient sollicité l'extension du jubilé à leurs états. Il leur a été accordé par des bulles où le clergé catholique a reçu les recommandations les plus pressantes « de combattre avec une ardeur nouvelle, pour faire disparaître du milieu des fidèles les livres qui pervertissent les mœurs et sappent les fondemens de la foi. » De toutes les puissances chrétiennes, aucune ne cultivait l'amitié de la cour pontificale avec plus de zèle et de succès que la France. C'est à la faveur de sa médiation que le dey d'Alger avait ordonné aux corsaires algériens de respecter le pavillon pontifical et les bâtimens de commerce romains. On peut citer entre autres preuves de la bonne harmonie qui existait entre les deux cours, l'envoi que fit le Saint-Père à M. le Dauphin, d'un bonnet doublé d'hermine et d'une épée à poignée d'or, distinction rare accordée par quelques papes à des généraux qui avaient remporté des victoires sur les hérétiques et les infidèles, comme à don Juan d'Autriche après la bataille de Lépante. DEUX-SICILES. Le roi Ferdinand Ier éprouvait, depuis quelques jours, les atteintes d'un léger catarrhe, sans fièvre et sans affection morbifique. Le 3 janvier, il s'était endormi tranquillement. A six heures du matin, on l'entendit tousser deux fois. A huit heures, n'ayant point appelé, comme c'était sa coutume, les officiers de sa chambre, ceuxci accompagnés des médecins, y entrèrent, et trouvèrent le Roi mort, avec tous les signes d'une convulsion violente. Les médecins employèrent à l'instant tous les moyens de l'art, pour s'assurer si la mort était apparente ou réelle; mais toutes leurs espérances furent douloureusement trompées. Cette mort inopinée, que les personnes de l'art chargées d'ouvrir le corps, ont reconnu être l'effet d'une attaque d'apoplexie, jeta la cour dans la consternation. Dès qu'elle eut été légalement constatée, S. Exc. M. de Medici, président du conseil des ministres, présenta à S. M. François Ier un testament olographe du feu roi Ferdinand, sous la date du 6 février 1822, auquel était joint un codicille du 4 novembre 1824, actes qui, clos et scellés de trois cachets du monarque défunt, lui avaient été remis par le prince lui-même, en sa qualité de président du conseil des ministres. Ferdinand Ier, qui venait d'accomplir un règne de soixante-cinq ans (il était né en 1751), traversé par tant de vicissitudes, laissait en mourant des preuves de la bonté d'âme qui le distinguait. D'abord, en se conformant aux institutions de son père Charles III, il appelait au trône son fils aîné, François, duc de Calabre, roi actuel. Il lui recommandait de maintenir la religion chrétienne-catholique, et d'aimer ses sujets comme ses enfans. Il maintenait et augmentait l'établissement de son second fils, le prince de Salerne, ainsi que l'apanage de la duchesse de Floridia. Il laissait des souvenirs à chaque membre de la famille royale, particulièrement à la reine de Sardaigne et à la duchesse d'Orléans. Ses anciens amis, ses serviteurs fidèles, enfin les pauvres avaient chacun leur article dans son testament. En ordonnant de nombreuses messes pour le repos de son âme, il donnait la préférence aux églises les moins riches. Les premiers devoirs remplis envers son auguste père, le nouveau roi François Ier, éprouvant le besoin de cacher sa profonde douleur, se retira dans la résidence royale de Capo di Monte avec S. M. l'Impératrice, ses enfans, et LL. AA. RR. le prince et la princesse de Salerne il voulut que S. Exc. la duchesse de Floridia, veuve de l'auguste défunt, vînt dans la même résidence mêler sa douleur à celle de la famille royale... : On ordonna, par suite de ce triste événement, la clôture de la Bourse, des théâtres, de tous les divertissemens publics; un deuil d'une année et des funérailles qui eurent lieu le 14 janvier, avec une magnificence royale. Les premiers actes du nouveau Roi, à son avénement, furent de nommer son premier fils (duc de Noto) prince héréditaire, duc de Calabre, et le prince de Salerne lieutenant - général des troupes. Le Roi avait déclaré qu'il ne paraîtrait dans aucune cérémonie publique avant deux mois. Il ne fit donc son entrée solennelle à Naples que le 5 mars; il l'avait fait précéder par la publication d'une amnistie, en exceptant seulement les délits du ressort de la justice ordinaire et ceux dont le jugement était accompli. Il fut reçu avec un enthousiasme général, surtout du parti qui attenAnnuaire hist. pour 1825. 29 dait plus qu'une amnistie, c'est-à-dire des institutions dont le temps n'était pas venu. Bientôt se répandit le bruit du voyage que l'empereur d'Autriche devait faire en Italie, et de l'invitation qu'il avait adressée au nouveau Roi de venir à Milan. Il consentit à s'y rendre, mais si l'on en croit les feuilles libérales, avec quelque répugnance. Comme on s'attendait à une évacuation prochaine totale des troupes autrichiennes, la convention du 28 mai fit d'abord une impression fâcheuse dans le public, mais on l'attribuait à un manque de fermeté de la part des anciens ministres du feu Roi qui avaient conservé leurs emplois et leur crédit sous celui-ci, et l'on n'en célébra pas avec moins de joie le retour du nouveau Roi dans ses états. LL. MM. qui avaient fait le voyage de Naples à Milan, par terre, et visité Rome, Florence et Gênes, s'embarquèrent à Livourne et firent leur rentrée à Naples le 17 juillet. Le jour suivant il fut publié trois décrets d'amnistie, ou plutôt d'atténuation de peines en faveur des condamnés pour délits politiques ou pour avoir fait partie d'associations secrètes. S. M. commuait la peine de mort ou des fers perpétuels et à temps, en peine de rélégation à vie et à temps dans les îles d'Ischia et de Caprée, dans lesquelles ils devaient être libres; d'ailleurs S. M. voulait que les juges compétens s'occupassent sans délai du jugement des individus encore sous le poids d'accusation pour avoir fait partie des associations secrètes; jugemens qui devaient être soumis à sa décision personnelle, avant d'être mis à exécution. Par d'autres décrets publiés le 17 août, un nombre considérable de personnes bannies par suite de la révolution, la plupart militaires, députés ou simples citoyens qui s'étaient distingués dans la révolution, furent rappelés dans le royaume, et enfin pour signaler la fête de la reine (octobre), le Roi accorda encore des commutations de peines à plusieurs individus récemment condamnés par les grandes cours spéciales de Salerne et de la Calabre ultérieure. Ainsi, disait la gazette officielle, le nouveau Roi ne semblait occupé que de l'idée de voir promptement se cicatriser toutes |