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Ryleïeff était d'accord avec lui sur ce pondu avec un sourire ironique: « Oui! point, tantôt il lui répondait : « Quand « il est d'une belle taille. » Boulatofi * même il ne viendrait quc ciuquante sortit avec Yakoubovitch, et, chemia « hommes, je me placerai dans leurs faisant, il lui dit : « Qu'en pensez-vous ? a rangs.» Cependantil n'a pas tenu parole. « le projet de nos collègues est-il réelle

Malgré les incertitudes et les terreurs « ment utile ? est-il bien combiné ? soot. qui l'agitaient, le prince Trubetzkoy ils enx-mêmes assez forts? - Je ne ne renonça pas ouvertement à l'exercice « vois pas l'utilité du projet, répliqua de son pouvoir dictatorial, et il fut « Yakoubovitch, ils me sont presque toss arrêté qu'il se porterait le lendemain sur « suspects. Eh bien! reprit Boulatoff, la place du Séuat, pour se mettre à la « comme tout doit se découvrir demain, tête des troupes qui refuscraient de promettons-nous de ne pas nous joiodre prêter serinent à V. M.; le capitaine «a eux si leurs moyens ne répondent pas Yakoubovitch et le colonel Boulatoff « à leur entreprise, et si leur projet devaient commander sous ses ordres. Bou. « n'offre pas une utilité véritable. o falatoff, homme faible et non dépravé, koubovitch y consentit. Ainsi, tons eedi ignorait peu de jours auparavant jusqu'à que les conjurés avaient désignés pour l'existence d'une Société secrète, mais être leurs chefs pendant la journée décion l'avait jugé nécessaire, parce qu'ayant sive, se disposaient d'avance à les abanservi dans le régiment des grenadiers du donner, corps, il y avait laissé des souvenirs ho- Pour commencer les opérations, Ry. norables, et que beaucoup de soldats leieff envoya aux casernes de bataillos lui conservaient une sincère affection, de marine de la garde, le lieutevant Le 6 décembre, Panoff, licutepant dans Arbouzoff, qui dès le 12 décembre arait ce même régiment, l'invita à diner avec tenté de faire répandre dans sa compaquelques autres officiers. Là, comblé de guie, par le sergent Bobroff et par le caresses , échauffé par le vin et par la sous-officier Arkadieff, des bruits didispute (on avait à desseia fait en sa pré- vers : qu'on allait exiger des troupes to sence l'éloge d'un des premiers fonction serment illégal, que Mer le Césaréritch naires de l'empire , contre lequel il nour- s'avançait avec la première armée et rissait une haine profonde), Boulatoff celle de Pologne pour exterminer tous prononça le sermeut de tout sacrifier ceux qui prêteraient serment à V. M.; aux intérêts de la patrie; aussitôt on lui que déjà il se trouvait au quatrième relai confie qu’upe Société s'est formée pour de poste en avant de Narva ; enfin, que opérer d'utiles changemens dans l'État; les autres régimens de la garde se refuse on lui représente que son patriotisme raient, sans le moindre donte, à la pres. lui fait un devoir de s'affilier à cette So- tation du serment, Mais Bodruff et Are ciété, et l'infortuné prononce presque kadieff n'avaient pas exécuté ses ordres, sans la comprendre la promesse de et lui avaient répondu que les matelots prêter son appui à des conspirateurs ne croyaient à aucune de ces nouvelles. qu'il connaissait à peine. Rvleïcff lui Le 13 décembre , en sortant de chez Ryrévéla leurs projels; Boulatoff ne ces- leieff, il alla directement chez les frères sait de demander : « Mais où donc est le Beléieff, tous deux enseignes; là il troura

bien de la patrie? Je ne vois qu'un les deux Bodisco, Divoff et le sous-lieu« changement de gouvernement; an licu tenant Goudimoff, du régiment des

d'empereur, vous voulez avoir un dic- gardes izmailovsky. - Messieurs, leur « tateur dans la personue du prince dit-il, connaissant votre façon de pen« Trubetzkoy. Toutefois il faisait es- « ser, je crois pouvoir vous parler sans pérer sa coopération; et, comme s'il détour: demain, on nous derpandera avait eu le pressentiment de sa perte, il « votre sermeut. Refusez-le et préparez disait adieu à ses enfans au berceau , en « vos compaguies à suivre votre exemple. versaut des larmes; mais il refusa déci- « Nons les conduirons sur la place de dément de se rendre aux casernes da « Pierre-le-Graad, où se réuniront les régiment des grenadiers du corps , pour « autres régimeos, et nous obligerous le y insurger les soldats. Dans la soirée du u sevat à sanctionner un projet de cod. 13, ayant remarqué que, sur l'exclama- a stirution préparé depuis long-temps, tion de Ryleieff, qui s'ecriait, ca parlavt « pour mettre des bordes a l'artorité de du prince Trubetzkoy : N'est-il pas « l'Empereur. » [] ajouta en s'adressant « vrai que nous avons choisi un chef au lieutenant Bodisco : «J'espère que vous a admirable? Yakouboritoa asait rea vieadrez aussi. Now, répoadit

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« celui-ci, je n'amènerai pas ma compa- sernes, malgré les efforts du capitaine

gnie. M'est-il possible d'agir sans con- Kotchaloff, qui tenta d'arrêter les matea naitre votre plan et vos associés ? Pour lots à la porte. Les officiers qui n'avaient « vous, c'est différent; vous fréquentez pris jusqu'alors aucune part aux désor. « les anteurs du complot et peut-être dres marchérent à la suite du bataillon * même êtes-vous persuadé de sa réus- quand il fut sorti. En chemin, les ma« site. » Arbouzoff" s'efforça de lui dé- telots rencontrèrent auprès du manége montrer que sous ce dernier rapport, de la garde à ebeval le lieutenant Tsébriil n'y avait aucun doute à former; il koff, du régiment de Fivlande, qui leur l'assura qne lui-même n'était pas entière. cria : En carré contre la cavalerie! ment dans le secret, et l'engagea de Dans le régiment de Moscou, la rébel. nouveau à venir : cependant il sortit sans lion commença de meilleure heure. Le avoir reçu la promesse qu'il désirait. Ce prince Stchepine-Rostoffsky, le capitaine fot alors que ces jeunes officiers, à l'ex-en second, Michel Bestoujeff, son frère ception de Goudimoff, qui s'était déjà Alexandre , et deux autres officiers du retiré, se décidèrent tout d'un coup à même régiment ( Broke et Volkoff ), prendre part à l'insurrection, à se porter parcoururent les 6,5°, 3° et je compadès le matin vers leurs compagnies, et à guies, s'efforçant d'égarer les soldats, faire naitre dans l'esprit des soldats des les détournant de prêter serment à V.M. doutes sur la réalité de la renonciation et leur répétant saus cesse : « On nous au grand-duc Constantin. Vers mionit, trompe cu exigeaut de nous ce serment; Yakoubovitch et Alexandre Bestoujeff car le grand-duc Constantin n'a point rearrivèrent chez. Arbouzoff. En faisant noncé à la couronne, il est dans les fers, connaissance avec les Bélaieff, Yakoubo, ainsi que le grand-duc Michel, chef de vitch leur dit : « Je ne doute pas de votre notre régiment. » Alexandre Bestoujeff « bravoure , mais vous n'avez pas encore ajoutait qu'il arrivait de Varsovie, avec « vu le feu; réglez votre conduite sur la ordre de s'opposer à la prestation du ser. « mienne. Au reste il n'y a pas d'échec à ment. Michel Bestoujeff dit aux soldals : & craindre; toute la garde est pour nous.» L'empereur Constantin aime notre réCes officiers et plusieurs autres vinrent giment, et il augmentera votre solde. dans la matinée du 14 décembre trouver Main-basse sur tous ceux qui ne lui resles matelots; l'aîné des Bodisco leur dit: teront pas fidèles. » Lui et le prince « Prêtez serment ou non, je n'ai ni ordre, Stebépine ordonnèrent aux compagnies a ni conseil à vous donner ; n'écoutez en de prendre des cartouches à balle et de e cela que votre conscience. » Nicolas charger leurs armes. « Je ne reconnais Bestonjeff et Kalovsky se joignirent à pas l'autorité du général , répondit eux. Le premier proposa de mettre de Stchepine à l'aide-de-camp Vérigbine , côté tout amour-propre et de prendre qui était venu appeler les officiers chez Arbouzoff pour chef : On peut avoir con- le commandant du régiment, et aussitôt fiance en lui, dit-il, nous sommes tous il ordonna aux soldats qu'il avait insurréunis ici pour une conmune eutreprise. gés, d'enlever le drapeau des mains des Kabovský s'écriait: Plutot mourir que de grenadiers et de les repousser à coups de ne point y participer, et demandait si crosse ; lui-même il se précipita le sabre personne n'avait besoin de poigoard. à la main sur le général-major Frédricks, Arbouzoff proposa de se rendre sur la qu'Alexandre Bestoujeff menaçait déjà place du sépat, Bodisco lui répondit : Je du pistolet. Le prince Stchepine blessa n'irai qu'avec le butaillon entier. le général Frédricks à la tête et le fit Messieurs, vous n'êtes libéraux qu'en tomber sans connaissance; il se jeta égaa paroles , répartit Arbouzoff. A l'arrivée lement sur le général-major Schenscbine, du major-général Scliipoff, chef de la commandant de la brigade, qui était ac, brigade, les matelots, déjà égarés par couru, lui porta une profonde blessure, leurs officiers, refusèrent de prèter ser- et, à terre, il continua long. temps enment. Le général fit arrêter les com- corc à le sabrer ; ensuite il donpa plumandans de compagnies; mais Nicolas sieurs coups de sabre au colonel KbvostBestoujeff engagca les Bélaieff, Bodisco, chinsky, au grenadier Krassoffsky, an Divoff et Spéier à délivrer ces officiers. sous - officier Mosséieff, et criant aux Dans cet instant, un cri part: Soldats ! soldats : « Je vons tuerai tous ! » Il parentendez-vous ces décharges ? Ce sont vint enfin à s'emparer du drapeau et à vos camarades que l'on massacre ! et le mettre les compagnies mutinéis en moubataillon entier s'élance hors des ca. Fement vers la place du Sénat. Au sortir

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des casernes, sur le quai de la Fontaka, il d'obéir : « Rendons-nous plutôt à ceux dit à Alexandre Bestoujeff, qu'il aperçut qui défendent Constantin », leur dit-il

. auprès de lui : « Au diable la constitu- Voyant alors qu'un grand nombre de soltion, d'est-ce pas ? — Certainement, au dats ajoutait foi à ses discours, il se prédiable ! » répondit Bestoujeli, et de tout cipita au milieu de la colonne, donna le son cæur, à ce qu'il assure. Il affirme signal de la révolte par le cri hourra! et également que, malgré sa conduite dans se mit à la tête de plusieurs compagnies les caserues du régiment de Moscou, et qu'il conduisit en désordre vers la place quoiqu'il y eût provoqué la revolte, déjà du Sénat. En passant devant le palais sa conscience commeoçait à l'agiter ; que d'hiver , Panoff fit un mouvement pour même en se levant le matin, il avait entrer dans la cour avec une partie des adressé à Dieu , avec des larmes, la prière grenadiers du corps; mais s'aperceraut suivante : « O mon Dieu ! si notre entre que ce poste était occupé par les sapeurs, prise est juste , accorde-nous ton appui; il s'écria : Ils ne sont pas des nôtres ! et sinon , que ta volonté s'accomplisse å arrivé sur la place du Sénat, quand pinnotre égard ! »

sieurs soldats reconnurent leur erreur, il La révolte s'opéra par les mêmes moyens les assura que Constantin allait incessamdans le régiment des grenadiers du corps. ment arriver, qu'il punirait l'infidelite Quand les soldats sortirent pour préter des gardes, et que pour eux ils seraient serment, le sous-lieutenant Kojevnikoff récompensés. Finalement il réunit ses s'approcha d'eux dans un état d'ivresse compagnies à celles qu'avait amenées dont il convient lui-même. « Ayant ap- Stchepine : plusieurs individus en frae, pris par Suthoff que l'instant fixé par la armes de poignards, de pistolets, de saSociété secrète pour l'insurrection était bres, se mélèrent dans leurs rangs. arrivé, il avait, dit-il, voulu se donner du La commission ne retracera point ici courage, eten prenant une boissonforte, il tous les événemens de cette journée, par avait égaré ses sens. Kojevnikoff demanda quée par la rébellion d'un petit nombre anx soldats : « Pourquoi oubliez - vous le et par le dévouement de tous, par des serment que vous avez prêté à l'empereur preuves d'attachement unanime au trône Constantin? Puis il leur cria encore de la et par d'éclatans témoignages des vertus galerie : A qui prêtez-vous serment? Tout héréditaires dans cette maison anguste ce qu'on vous dit est faux. » Cependant qu'avaient osé menacer la haine avengle l'ordre ne fut pas troublé par ces interpel- des artisans de désordre. lations; la prestation du serment s'effec- Ces événemens vous sont connus, Sire: tua et les soldats se mirent à table pour di- ils le sont de la Russie. Elle a appris avec ner; alors, le lieutenaut Sutboff, qui avait douleur, avec indignation, les attentats aussi prêté serment, vint trouver sa compa. de quelques hommes qui voulaient déshognie, et dit : « Mes amis, nous avons eu norer le nom russe; elle a va avec l'entort d'obéir; les autres régimens se sont thousiasme de la reconnaissance leurs refusés au serment et réunis sur la place complots et leur criminel espoir anéantis du Sénat; habillez-vous, chargez vos en un seul instant, en cet instant de bé armes, suivez-moi, ne m'abandonnez nédiction divine. Les mesures prises arpas ! J'ai votre solde dans ma poche , et rêtèrent bientôt les progrès de la révolte. je vous la distribuerai sans en attendre Déjà l'anarchie dont les rebelles meua. l'ordre. » Malgré les exhortations du co- çaient l'empire, régnait dans leurs prolonel Stürler, commandant du régiment, pres rangs. Les plus fougueux continue presque toute la compagnie suivit Suo rent à se signaler par des assassinats. I thoff, qui ne cessait de répéter : En résulte d'un grand nombre de depositions, avant! ne m'abandonnez pas ! Sur ces confirmées en dernier résultat par les entrefaites , un autre lieutenant, nommé avaux mêmes de Kabovsky, qu'il blessa Panoff, qui avait prêté serment comme

mortellement d'un coup de pistolet le Suthoff, courait de compagnie en com- comte Miloradovitch , au moment où pagnie, excitait les soldats, les assurait ce général s'avancait seul vers les soldats qu'on les avait trompés, et que l'empe- égarés pour les désabuser et les exhorter reur Constantin et les autres régimens à rentrer dans le devoir. Le prince Eugène leur feraient un mauvais parti. Enfin, Obolensky lui porta aussi un coup de lorsque le commandant du régiment s'a- bayonnette, en cherchant, à ce qu'il prédressant aux bataillons, leur douna l'or- tend, à frapper son cheval pour le forcer dre de charger leurs armes pour le sui- de s'éloigner. D'après la déclaration da yre con de les rebelles, Panoffles dissuada prince Odoievsky et son propre area,

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Kaborsky, après avoir également tué le devoir de le chercher et ne revint plus. colonel Stürler, jeta són pistolet en di- La conduite de Bateukoff pendant cette sant: C'est assez! aujourd'huij'en ai deux journée fut à peu près semblable. « Il se sur ma conscience. Ce fut eucore lui qui réveilla en pensant à sa grandeur future blessa d'un coup de poignard un officier comme membre du gouvernement sude l'état-major ( le capitaine en second prême, mais l'arrivée du billet qui l'inHastfer ). le prince Stchepine donoa le vitait à se rendre à la prestation da premier à la troupe rebelle l'ordre de faire serment, fit évanouir ces illusions. » Il feu. Le colonel Velho et plusieurs soldats s'efforça encore d'apprendre ce qui se furent blessés par cette décharge. Eufin, passait : il chercha Alexandre Bestoujeff Guillaume Küchelbecker osa tourner son et Ryleïeff; mais ce dernier lui ayant dit pistolet vers Mgr le grand-duc Michel, que des officiers d'une batterie de l'artilmais, dans le tumulle même de l'insur- lerie de la garde s'étaient révoltés et parrection, les matelots de la garde , au mi- couraient la ville avec leurs pièces , cette lieu desquels il se trouvait, épouvantés nouvelle mensongère jeta "l'épouvante du crime qu'il allait commettre, arrétè- dans son esprit ; il se båta de prêter serrent son bras. Küchelbecker assure qu'il ment sans plus songer à la réforme de n'affecta l'inteution de tirer , sur l'invita- l'état, ni à la gloire de devenir un des tion de Jean Poustehine, que pour em- chefs du gouvernement, et de soupirant pêcher d'autres de le faire, sachant bien qu'après la prompte arrestation des réqne sou pistolet, mouillé par la neige, ne belles. Cependant vers le soir, lorsque pouvait partir : à l'appui de cette asser- l'ordre et la tranquillité furent rétablis tion il ajoute que lorsqu'il voulut ensuite partout, il passa chez Ryleieff; mais sans tirer sur le général Voinoff, ce même entrer dans sa chambre, il se contenta, pistolet ne fit pas feu.

en y jetant un regard furtif, de demander Cependant de tous ceux qui avaient été do seuil de la porte qu'il tenait entre oul'ame de la conspiration, de tous ceux verte : Eh bien! qu'a-t-on fail ? Jean qui avaient promis de prendre le com- Pontschine, qui se trouvait chez Ryleïeff mandement des troupes induites en er- avec quelques autres rebelles échappés renr, Yakoubovitch parut seul au lieu du de la place du Sénat, se tournaut à demi rendez-vous et n'y demeura pas long. vers lui, répondit : « Ah! c'est vous, temps. Il abandonna les rebelles soit par lieutenant-colonel, dites vous-même cc suite de ses conventions avec Boulatoff, que vous avez fait ! » Aussitôt que Ba. soit qu'il ait, comme il le dit, reconnu tenkoff l'aperçut, ainsi qne le baron sou égarement et sa faute. Boulatoff était Steinheil, il se retira , et, se fiant à la sur la place, mais seulement comme spec- courte durée de ses relations antérieures tateur, quoiqu'il se fat écrié, en char- avec les membres de la Société secrète, geant ses pistolets au moment de sortir il espéra pendant quinze jours échapper de chez lui : On verra peut-être aujour- aux recherches du gouvernement. Dans d'hui qu'il existe en Russie des Brutus et ses premiers interrogatoires, il assura des Riego, personnages dont il ne con- même avec persévérance qu'il était fort naissait, au reste, que les noms, ainsi éloigné de connaitre à fond les projets qu'il en est convenu lui-même avec une des conspirateurs; que ces projets lui paentière franchise. Le prince Troubetze raissant impraticables, n'avaient presque koy se cacha à ses complices; il vint en point attiré son attention; qu'il ne se sentoute bâte à l'état-major-général prêter taient coupable que de propos incousisermeut à V.M., se flattant d'effacer par dérés et de désirs audacieux : mais les cetempressement nne partie de son crime, preures accumulées contre lui, ou peutet persuadé que les conspirateurs ne pour- être les remords de sa conscience, I'emraient l'y découvrir; il s'y trouva mal à portèrent enfiu , et il confirma les dépoplusieurs reprises : on le vit ensuite pen- sitions à sa charge par un sincère et dant toute la journée courir de maison complet aveu. Tous les autres individus en maison, excitant partout l'étonnement qui avaient plus ou moins pris part à la de ses connaissances par sa conduite ; rébellion on trempé dans les complots du enfin il alla passer la nuit dans la demeure Directoire du Nord, se dénonçant récidu ministre d'autriche, beau-frère de sa proquement, ne tardèrent pas à être confemme, demeure où le comte de Nessel- nus de la commission, arrêtés et interrope le réclama par ordre de V. M. Ry- rogés. Quelques - uns se constituèrent leieff déclare que, ne voyant pas le prince prisonniers spontanément, et dans ce Troubetzkoy sur la place, il se mit en nombre le colonel Boulatoff. Digne d'attention par ses singularités et de pitié par La tranquillité parfaite que la ferset ses infortunes, attaqué depuis long-temps de V. M. venait de rendre à la capitale, d'un mal incurable, Boulatoff qui, de ne fut troublée sur aucun autre point de prime-abord, avait reconnu et l'impru- l'empire, si ce v'est à Vassilkoff et aux dence des conspirateurs et le caractère environs. Dans la ville de Moscou, doct illégal de leur cutreprise, qui même la population entière avait prononcé avec leur avait positivement refusé son assis- enthousiasme le serment de fidélité a tance, et qui avait admiré les dispositions V. M. ainsi qu'à l'héritier de son tror, ordonnées par V. M. pendant la journée quelques-uns des membres de la Société du 14 decembre , Boulatoff, le lende- secrète et de ceux qui avaient cessé d'en main, lorsque les plus fougueux conjurés faire partie, se réunirent pour parler des commençaient à sentir l'éuormité de leur événemens du 14 décembre. L'un, domme crime, sé livra tout-à-coup à une espèce Moukhanoff, connu de tous les autres de rage. La pensée qu'on s'était servi de par l'indiscrétion de ses propos, s'écra son nom pour tromper et entrainer à sa dans un accès de fureur : « Nos eamaraperte un régiment qui l'aimait ( celui des des sont perdus, il n'y a que la mort de grenadiers du corps ), et la fable absurde l’Empereur qui puisse les saurer, et je répandue soit par légèreté, soit par mal conpais un bomme qui est prêt au moies veillance, que tous les soldats de ce ré- à les venger. Ses complices mene ve giment qui s'étaient trouvés sur la place l'écoutèrent qu'avec mépris. Daus le Midi, du Sénat seraient punis de mort, trou- l'arrestation des principaux conspirateurs blèrent entièrement sa raison. « J'étais s'effectua d'après les ordres apportés de dans cette situation, dit-il dans une lettre Tagaorog par l'aide-de-camp-general adressée à Mgr. le grand-duc Michel, Tchernycheff, et provoqués par la de lorsque je me rendis à l'état-major-gépé- nocciation du capitaine Mayborada. En ral pour prêter serment : j'avais l'imagi- apprenant que leurs trames étaient de vation égarée, ma tête était en feu, il couvertes, la rage des autres conjurés me semblait voir couler de toutes parts le s'exhala de meme en rains propos. Pogo sang des compagnons d'armes que j'af- gin dit à Basile Darydoff : « Il faut aller fectionnais , et tandis qu'autour de moi à Pétersbourg assassiner l'empereur on jurait fidélité à l'Empereur, je levai la Constantin (car ils igaoraient encore que main et baisai la croix, en prononçant V. M. I. fût montée sur le trône). J'offre au fond du cæur l'affreux serınent de lui mes deux mains. » Il en fant six, lai arracher la vie ; tout lomme qui verra répondit Davydoff. Poggio comptait sur mon nom au bas de la formule du ser- l'assistance de Mitkoff, du prince Valemeot, y distinguera la signature d'un rien Galitzin , du prince Obolenskr et de scélérat. » Cependant Boulatoff n'était Mathieu Mouravieff. point un scélérat , du moins il n'était loformé de l'arrestation de Pestel et de pas endurci dans le crime : bientôt les plusieurs antres, le général-major privee passious orageuses qui l'agitaient se cal- Serge Volkonsky trouva moyeu d'avoir inèrent; il reconnut la fausseté des bruits une entrevue avec lui; Pestel Ini dit : qui l'avaient abusé, eufin il vint au pa. « Ne craigocz rien, saurez seulement lais , fut admis en la présence de V.M., « mon Code rosse (Pycckar upansa) et désarmé par le premier regard qu'elle « pour ma part je ne ferai aucune révé. daigaa jeter sur lui. Depuis ce jour jus- « lation. » Cependant il a tout avoué et qu'au moment où l'emporta une nouvelle nommé tous ses complices, qui tous ont attaque de son ancienne maladie (le 17 été saisis et envoyés à Pétersbourg par janvier de la présente année ), Boulatoff les autorités locales, à la requéte de la ne cessa d'être tourmenté par le souvenir cominmission. de son horrible dessein , ignoré jusqu'à- Dès le 29 décembre, Serge et Mathica lors, et par la mémoire même de la noble Mourarieff avaient été arrétés par le chef clémence dont il avait été l'objet ; il s'ef- , du premier, le lieutenant-colonel Gebei, força d'apaiser ses remords par des bien que Serge Mouravieff ne se trourât aveux entièrement libres, car il ne subit point à son régiment, et que, sur la conaucuu iuterrogatoire, et en mourant il velle qui lui avait été transmise par Beslégua avec confiance le sort de ses enfaus toujeff-Rumine, qu'on avait ordre de au monarque que sa main devait assas- s'assurer de sa persone, il cherehát a siper.

sc cacher avec son frère (1). Malheu

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(z) Il est digne de remarque que les principaur d'entre eus, et nocimément le colegel Pes. tel, ont été arrêtés précisémeni le 14 décembre.

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