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autres nations en maintenant les droits de la patrie; de diminuer la dette nationale aussi promptement que possible; de réduire dans les justes proportions de son utilité la force militaire; d'améliorer l'organisation et la discipline de l'armée; de former des écoles de science militaire; d'étendre une protection égale à tous les grands intérêts de la nation; de travailler à la civilisation des tribus indiennes, et de poursuivre le système d'améliorations intérieures dans les limites du pouvoir constitutionnel de l'Union: tel avait été le but des travaux de son honorable prédécesseur, et M. Adams témoignait, en terminant son discours, de suivre ses traces glorieuses.

Ce discours terminé au milieu des applaudissemens qui se prolongèrent des galeries à toute l'assemblée, le président de la cour suprême (chief of justice) présenta au nouveau président le livre des constitutions où M. Adams lut d'une voix haute le serment de son office, et la prestation du serment, suivie des mêmes acclamations que le discours, fut immédiatement annoncée au peuple par une salve d'artillerie.

Une foule considérable se pressait autour du président, le général Jackson fut des premiers à lui adresser ses félicitations, et la manière amicale des deux compétiteurs rassura les amis de la paix domestique.

Cette cérémonie achevée, M. Monroë quittta la résidence du gouvernement, ét se retira dans une ferme qu'il possède en Virginie: quelques jours auparavant le vénérable magistrat avait demandé au congrès qu'il fût fait une enquête sur son administration, trait digne de l'ancienne Rome, et auquel on ne pouvait répondre que par des remerciemens au nom de la patrie.

La suite de la session législative des États-Unis n'offre rien d'intéressant à remarquer que l'acte du congrès adopté le lendemain de l'installation du nouveau président pour un emprunt de 12 millions de dollars à quatre et demi pour cent d'intérêt, destiné au remboursement qui devait se faire en 1826, d'une portion équivalente de la dette publique portant intérêt à six pour cent. Il a été intégralement rempli.

On ne s'étendra point ici sur les actes du gouvernement dont il

devait rendre lui-même à la fin de l'année un compte si satisfaisant. Il s'élevait pourtant dans l'intérieur une querelle dangereuse et de nature à amener tôt ou tard la dissolution du parti fédéral. Les actes du congrès, les mesures du gouvernement relativement à l'interdiction de la traite des noirs, les opinions émises pour amener l'extinction graduelle de l'esclavage, avaient été mal reçues dans les états méridionaux de l'Union, où les esclaves employés à la culture des terres composant une partie de la fortune des propriétaires, restaient soumis à un régime à peu près aussi rigoureux que dans les Antilles...

A ce sujet de division commun à tous les états du Sud et où se rattachait encore la querelle des élections, il s'en joignait un autre particulier au gouvernement de l'état de Géorgie, qui avait voulu s'emparer des terres que la tribu indienne des Creeks possédait dans ses limites, le gouvernement central ne voulant pas que la Géorgie acquît ces terres autrement que par voie de négociation, un des chefs indiens avait bien en effet consenti à céder le territoire réclamé par l'état de Géorgie, moyennant une somme d'argent peu considérable: mais les autres chefs avaient protesté contre le traité et mis à mort celui qui l'avait conclu sans le consentement de la majorité des chefs de la tribu. De là s'étaient élevés de nouveaux débats. Les Indiens avaient réclamé la protection du gouvernement central; le gouvernement de la Géorgie prétendait que la cession ayant été faite, le gouvernement général n'avait plus le droit d'intervenir. On disputait sur la légalité de l'acte, lorsque le gouvernement de l'état de Géorgie fit à la législature de cet état un message dans lequel il rassemblait en masse les griefs qu'il croyait avoir contre le gouvernement de Washington. Ce message, renvoyé à un comité spécial, fut l'objet d'un rapport qui ne tendait à rien moins qu'à séparer les états du Sud de l'Union et à soutenir, s'il était nécessaire, cette séparation par la force des armes; on en jugera par les fragmens et le projet de résolution qui suivent.

« Le comité auquel on a renvoyé la partie du message du gouverneur, qui se rattache à la disposition qui s'est malheureusement manifestée si souvent dans les différentes branches du gouvernement général, de contrôler les af

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faires intérieures et de mettre en danger la paix, la tranquillité et la concorde qui règnent parmi les états du sud, après avoir délibéré sur cet objet avec les plus profonds sentimens de douleur et de regrets, doit proclamer que le moment est arrivé, ou qu'il approche avec rapidité, où les états, depuis la Virginie jusqu'à la Géorgie, depuis le Missouri jusqu'à la Louisiane, devront se confédérer et dire à l'UNION: « Nous ne voulons plus soumettre nos droits « aux insinuations des pervers qui siégent au congrès, aux interprétations obscures des malintentionnés; nous protestons contre la doctrine, et nous repoussons le principe d'une soumission absolue au gouvernement général, » Le grand but de l'UNION américaine était aussi simple dans la pratique que beau dans la théorie; il était aussi facilement compris qu'il était important. Les relations avec les nations étrangères étaient confiées au gouvernement uni. On ne lui avait donné que les pouvoirs nécessaires pour protéger les états confédérés contre les ennemis intérieurs et extérieurs. Les différens états, comme étant séparés et souverains, conservèrent tous les autres droits. Ils ne doivent pas être usurpés par des interprétations législatives, exécutives ou judiciaires.

«S'il ne peut exister de paix dans l'UNION, si le pacte est devenu trop pesant pour être supporté plus long-temps, que nos frères du nord cherchent la paix chez eux; qu'ils jouissent de leur élysée en faisant un tableau hideux de tout ce qui est au sud du Potomak. Nous serons comme Athènes, comme Sparte, comme Rome; elles avaient des esclaves, nous en avons. Que le nord établisse des routes nationales, qu'il s'entoure de tarifs, qu'il augmente sa dette jusqu'à ce qu'il en sorte une fière aristocratie, nous ne voulons aucun de ces bienfaits; mais dans la simplicité du gouvernement patriarcal, nous nous reposerons, nous et nos esclaves, à l'ombre de nos vignes et de nos figuiers, et, pour notre salut, nous nous confierons à celui qui de tout temps a vu cet état de choses sans courroux.

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« En conséquence, il est résolu, par le sénat et la chambre des représentans de Géorgie réunis en assemblée générale, que nous approuvons sincèrement les sentimens manifestés à ce sujet par S. Exc. le gouverneur : « Qu'ayant épuisé les argumens, nous opposerons la résistance », et, pour l'exécution de cette résolution, nous engageons mutuellement notre existence, nos fortunes et notre honneur sacré.

« Il est de plus résolu que S. Exc. le gouverneur est invité à envoyer une copie de ces résolutions au pouvoir exécutif de chaque état de l'UNION, avec prière de les soumettre aux différentes législatures, que S. Exc. en enverra également une copie à chacun de nos représentans et sénateurs au congrès, en donnant aux premiers les instructions nécessaires pour coopérer à toutes les mesures nationales qui tendraient à combattre le principe contre lequel on s'est élevé, et en l'enjoignant aux derniers. »

Heureusement le temps et l'esprit conciliateur du président de l'Union calmèrent un peu cette incandescence d'opinions et la législature de Géorgie se sépara sans prendre le rapport violent en considération. Les chefs des Indiens Creeks se contentèrent de protester contre le dernier traité d'après lequel ils avaient cédé une portion de territoire, par une résolution qui mérite d'être mentionnée,

bien qu'elle n'ait pas le caractère d'un document incontestable. Elle portait cela en substance :

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« I° Qu'ils ne recevront pas un dollar de la somme stipulée par le dernier traité, comme devant leur être payée pour la cession de leur pays;

2° Qu'ils ne feront pas la guerre aux blancs, et ne verseront pas une goutte du sang de ceux qui seraient envoyés pour s'emparer de leur pays;

3° Que, s'ils étaient chassés de leurs maisons, ils mourraient au coin de leurs haies, afin d'engraisser le sol plutôt que d'abandonner la terre de leurs ancêtres. »

Au milieu des intérêts politiques du temps, nous avons omis de parler des chaleurs extraordinaires qui se firent sentir cette année dans tout l'hémisphère boréal, des tropiques jusqu'au pôle. Dans plusieurs contrées elles firent manquer la récolte des céréales. Mais elles occasionèrent des accidens plus fâcheux aux États-Unis où elles furent accompagnées de brouillards épais qui affectaient les poumons et les yeux, des arbres desséchés sur pied s'embrasèrent spontanément, et l'incendie dévora des forêts entières. Tout le pays (état du Maine) des deux côtés de la rivière Penobscot en fut dépouillé; et la population y fit des pertes immenses en maisons, en bestiaux, en grains. Ensuite vint une mortalité considérable, occasionée par l'abus des boissons froides, le cholera morbus qui enleva beaucoup d'enfans et la fièvre jaune qui ravagea plus qu'à l'ordinaire encore les environs de la nouvelle Orléans et de la Mobile.

Puisqu'on a signalé l'année dernière le voyage du général La Fayette aux États-Unis comme un événement historique, il faut achever d'en dire les circonstances principales et le dénoûment. Il avait continué au retour de la belle saison sa tournée par les provinces du sud-ouest, et il remontait l'Ohio sur un bateau à vapeur (the Mechanic) qui toucha sur un écueil caché et coula bas à cent cinquante milles environ de Louisville, où il devait se rendre. Le général et les passagers purent heureusement être transportés sur le rivage avant que le bâtiment ne s'engloutît avec tous ses bagages et ses papiers (1). Un autre bateau à vapeur le Parangon se trouva

(1) On est parvenu à les retirer du bâtiment, et on les a renvoyés au général.

prêt pour prendre le général, et il continua ainsi son voyage jusqu'à Louisville, d'où il alla par Pittsburg et par la route d'Albany, à Boston, à New-York, où son passage fut célébré comme sa première visite. Enfin après avoir passé de nouveau quelques semaines à Washington, après plus d'une année de séjour qui n'avait été qu'une suite de fêtes triomphales, le 7 septembre il quitta Washington pour retourner dans sa patrie. Les ministres, tous les chefs civils et militaires du pays, plusieurs membres du congrès, une foule considérable de citoyens distingués, s'étaient réunis dans l'hôtel du président pour lui faire leurs adieux. Le président (M. Adams) lui adressa à ce sujet un discours qui a fait quelque sensation en Europe, où il rappelait avec la chaleur qu'inspirent des services récens, ceux que le général avait rendus, il y a plus de quarante ans, à la cause de l'indépendance américaine, et qu'il terminait par les adieux les plus touchans.

Une frégate lancée le 16 juin des chantiers de Washington avait été destinée par le gouvernement à reconduire en France l'hôte de la nation: on lui avait donné le nom de Brandywine, en commémoration de la bataille qui eut lieu sur les bords de ce petit ruisseau, où le général avait été blessé. Pour cette fois, il n'avait pu se dérober à un honneur accompagné d'égards si généreux. Il s'embarqua au milieu des salves d'artillerie et des acclamations populaires, et mit à la voile le lendemain. On sait qu'il arriva après une heureuse traversée en France, où la police fit dissiper les rassemblemens qui se formaient pour célébrer son retour.

Nous n'avons point parlé des transactions du gouvernement des États-Unis avec les autres nations, elles sont suffisamment exposées dans le message que le nouveau président adressa au congrès à l'époque ordinaire de l'ouverture de la session. Ce document que nous rapportons in extenso, donne une idée complète de la sittuation du pays. On y remarquera une exposition franche du système que les États-Unis doivent suivre dans leurs relations de commerce; l'annonce du traité fait avec la Colombie, comme devant être suivi d'autres avec les nouveaux états de l'Amérique du Sud, et la notification faite aux États-Unis d'envoyer des représentans au congrès

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