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duquel les deux parties contractantes prirent, avec la plus franche loyauté, les mesures nécessaires.

Tout important, tout nécessaire qu'il fût aux deux pays, on ne peut douter pourtant qu'il ne laissât encore des mécontentemens et des inquiétudes aux deux parties contractantes. On n'y voyait aucune stipulation relative au cas qui devait écheoir bientôt de la mort du roi de Portugal contre la réunion éventuelle des deux couronnes. Des gens, qui se disaient bien informés, assuraient qu'il existait un article secret d'après lequel don Pédro renonçait en ce cas à ses droits héréditaires sur le Portugal. Mais si ces bruits rassuraient les Brésiliens sur la possibilité de la réunion éventuelle des deux couronnes, ils inquiétaient beaucoup de Portugais sur le danger de voir tomber le pouvoir à ceux-là même qui avaient fait des tentatives odieuses pour l'usurper. D'autres étaient tentés de reprocher au Roi d'avoir accepté un traité qui semblait dicté par un gouvernement étranger sans prendre l'avis d'un conseil national, et d'avoir sacrifié les intérêts substantiels de son peuple à un vain titre; ainsi ce malheureux monarque déjà frappé des atteintes de la maladie à laquelle il a bientôt succombé, s'éteignait, triste et retiré dans son palais de Mafra, sans avoir satisfait aucun parti, et sans trouver dans sa famille de ces consolations qui soulagent toutes les infortunes.

GRANDE-BRetagne.

Affaires d'Irlande.

CHAPITRE X.

Reconnaissance des nouveaux états de l'Amérique.
Onverture de la session du parlement. — Discours du

trône.-Suppression de l'association catholique en Irlande.—Budget.— Bill
proposé pour l'émancipation des catholiques.
quête sur l'état de l'Irlande.

Rapport du comité d'enAdoption du bill d'émancipation par la chambre des communes. — Rejeté par la chambre des lords. Bill en faveur

du commerce des colonies anglaises

Changemens au tarif des douanes.

— Objets divers. - Clôture de la session du parlement.

L'année 1825 s'ouvre en Angleterre par un des actes de gouvernement les plus mémorables des temps modernes ; c'est-à-dire par la reconnaissance de plusieurs colonies espagnoles comme des états indépendans, reconnaissance qui n'était encore ni générale, ni explicite, mais qui était virtuellement consacrée par les traités de commerce négociés ou déjà conclus avec la Colorabie, le Mexique et Buenos-Ayres; cette résolution, annoncée depuis près de deux ans comme une conséquence nécessaire des événemens et vivement sollicitée par le commerce anglais, n'avait pourtant point passé dans le cabinet sans contradiction... On assure que plusieurs des membres du conseil, (M. Peel, ministre de l'intérieur, M. Robinson, chancelier de l'échiquier, le duc de Wellington, lord Westmoreland, et le lord chancelier Eldon) s'y étaient d'abord fortement opposés, mais que l'appui de lord Liverpool en' faveur de l'opinion décidée de M. Canning, y avait ramené M. Peel et le duc de Wellington. Quoi qu'on puisse penser de ces bruits toujours incertains, la résolution, bien qu'annoncée depuis deux ans, fit grande sensation en Angleterre où elle excita l'esprit de spéculation à des entreprises dont on verra le résultat, et en Europe où l'on crut qu'elle allait amener la rupture du système politique suivi depuis 1814 et 1815. Cependant on a déjà vu qu'elle n'y produisit aucune altération sensible, si ce n'est dans les relations du cabinet espagnol dont les protestations furent sans effet. La réponse que M. Canning y fit ( 25 mars ) nous dispense d'entrer dans plus de détails à cet égard.

Tandis que le cabinet anglais offrait à ses spéculateurs l'exploitation du commerce et des mines du Nouveau-Monde; tandis que l'Angleterre était tout occupée de ces brillantes illusions, l'Irlande gémissait toujours sous le poids de ses misères et de ses dissensions; l'association catholique que nous avons déjà fait connaître, (V. Ann. pour 1824, pag. 527;) formée au mois de mai 1823, pour porter remède, faire des remontrances, employer toutes voies légales afin de faire cesser l'oppression qui pesait alors sur les catholiques d'Irlande, mis hors de la loi commune, avait augmenté l'aigreur des querelles. L'acquittement de M. O'Connell, prononcé le 1er janvier, lui avait donné plus de crédit que jamais dans l'association, et à l'association elle-même, une idée exagérée de sa puissance. On ne se bornait plus à la question de l'émancipation: on aspirait visiblement à la réforme, des liaisons intimes commençaient à s'établir entre les chefs de l'association irlandaise et les prédicateurs du radicalisme anglais... Il se tenait dans les séances de l'association des discours plus séditieux que celui qui avait donné lieu à la mise en accusation de M. O'Connell; un autre orateur (M. Sheil) voulant effrayer le gouvernement anglais sur les suites de l'oppression qu'il exerçait « sur six millions d'hommes crédules, grossiers et « stupides », s'écriait (séance du 13 janvier): « Gardez vous de pous«< ser au désespoir des hommes d'une bravoure indomptable. Le premier de vos ennemis qui parviendrait à jeter cent mille mous«quets dans le pays, susciterait à votre porte un auxiliaire que vous auriez peine à vaincre ou qu'il vous faudrait noyer dans une mer « de sang. »

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A

Quoique la tranquillité publique n'eût pas été troublée par ces déclamations fougueuses, elles étaient peu propres à concilier les esprits opposés à l'émancipation qu'il était question de remettre sur le tapis à la prochaine session; mais les membres du cabinet qui y étaient favorables avaient dessein d'y joindre des mesures propres à faire croire qu'ils ne cédaient pas aux menaces séditieuses des orateurs de l'association.

Telle était la disposition des esprits lorsqu'arriva l'époque indiquée pour l'ouverture de la session du parlement (3 février). La

santé du Roi ne lui permettant pas de la faire en personne, S. M. avait délégué le lord chancelier, l'archevêque de Cantorbéry et les lords Harrowby, Westmoreland et Shaftesbury, pour le représenter.

Le discours de la couronne lu par le lord chancelier (comte Eldon) exprimait la satisfaction du Roi sur l'accroissement progressif de la prospérité publique, même quant à l'Irlande où les désordres avaient cessé au point de permettre la suspension des pouvoirs extraordinaires confiés à S. M. dans la plupart des districts jusqu'ici les plus agités. Mais il faisait entendre qu'il était nécessaire d'aviser aux moyens de porter remède aux dangers résultans pour la tranquillité publique, de l'existence d'associations qui avaient adopté des mesures incompatibles avec l'esprit de la constitution, et qui, en excitant les alarmes, en exaspérant les animosités, compromettaient la paix de la société, et retardaient le cours des améliorations nationales.

Dans le reste du discours, S. M. déplorant l'interruption de la tranquillité dans l'Inde, annonçait qu'il serait nécessaire de faire quelque augmentation dans l'établissement militaire; mais que, malgré le surcroît de dépense, telle était la condition florissante et l'accroissement progressif du revenu, qu'il serait au pouvoir du parlement sans affecter le crédit public, de donner des facilités nouvelles à l'industrie, et d'opérer une réduction ultérieure dans les charges du peuple.

S. M. informait ensuite les deux chambres du maintien des relations pacifiques, entre les puissances, du succès des négociations suivies à Constantinople par l'ambassadeur britannique entre l'empire de Russie et la Porte ottomane et de la conclusion de plusieurs traités de commerce notamment « avec les contrées d'Amérique qui * ont paru avoir établi leur séparation avec l'Espagne. »

S. M. terminait son discours par assurer le parlement qu'il pouvait compter sur sa coopération cordiale « pour favoriser et étendre le commerce qui, en même temps qu'il était la source capitale de la force et de la puissance de la Grande-Bretagne, contribuait au honheur et à la civilisation du genre humain. >>

Ce discours, qui embrassait toutes les grandes questions nationales,

ne pouvait manquer d'exciter, au sujet de l'adresse à voter en cette occasion, une discussion et des explications intéressantes...

Le vicomte Dudley et Ward qui proposa l'adresse au Roi dans la chambre des lords, commençait par féliciter le gouvernement sur une position, « heureuse au-delà de tout exemple. >>

« La paix, la gloire, la première place parmi les nations du monde, dit le noble orateur, voilà la loi de l'Angleterre... Pour combler nos prospérités, un nouveau monde long-temps fermé par une politique absurde s'ouvre tout entier à notre activité; les dernières voiles tombent, les dernières barrières disparaissent.

>>

Venant à la situation de l'Irlande, et à la question de savoir s'il faut accorder aux catholiques la plénitude des droits politiques, le noble lord était sur ce point, de l'avis de la minorité de la chambre qui voulait l'émancipation de l'Irlande catholique, mais qui ne voulait pas qu'on employât des moyens illégaux pour arriver à ce but.

« La conduite de l'association catholique, dit S. S., est très nuisible à la cause qu'elle prétend servir. Elever un état dans l'état, percevoir des impôts indépendans de ceux établis par l'état, ce sont des tentatives qui ressemblent à des hostilités. Quelle idée funeste que celle de prétendre à l'égalité des droits par une rébellion? Supposons qu'au milieu de quelque calamité nationale, à l'aide des armées étrangères, des factieux fussent vainqueurs d'un gouvernement qui, dans l'état naturel des choses, leur est très supérieur, qu'est-ce qu'ils y auraient gagné? Ces droits dont ils réclameut le partage égal auraient perdu presque toute leur valeur, la liberté serait à moitié éteinte, l'indépendance serait précaire, et ils ne partageraient que les débris d'un état ruiné... C'est par le moyen d'une discussion calme, qu'ils doivent obtenir le peu qui leur reste à demander après tant de concessions successives. Leur cause doit triompher par le consentement libre et raisonné de leurs frères protestans dont on a calomnié auprès d'eux les sentimens et les motifs. Les protestans n'ont pour eux ni haine ni esprit d'exclusion; ils ont seulement des inquiétudes pour leur église, pour leur propre religion, inquiétudes que je crois mal fondées, mais que je sais être sincères et que je dois respecter parce que l'église protestante est liée à l'établissemeut de nos libertés nationales.

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Quant à la résolution prise par S. M., d'envoyer des ministres à quelques nouveaux états américains, lord Dudley la considérait comme une sanction réelle de leur existence politique; il observait que le gouvernement avait agi envers l'Espagne avec toute la bonne foi qu'on doit à un allié, avec toute la délicatesse qu'on doit à un ami dans le malheur... On avait attendu aussi long-temps qu'il y avait

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