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drie, et de vingt-sept transports européens (sept anglais, huit autrichiens, trois sardes, un napolitain, cinq espagnols, trois lorcans, un américain) et dix brûlots armés à Alexandrie: en tout, cent trente-trois voiles portant environ mille homme de cavalerie, et dix mille d'infanterie dont elle devait débarquer deux mille à Candie.

Cette flotte, partie d'Alexandrie le 17 octobre, jeta en passant à Candie, environ deux mille hommes et arriva sans être inquiétée par les Grecs, le 5 novembre à Navarrin.

Ibrahim, informé du départ de l'expédition, s'y était porté pour la recevoir et concertér ou diriger les opérations... Il prit une partie des troupes régulières qu'il joignit aux siennes, et le capitan-pacha conduisit le reste à Reschid pacha qui avait eu ordre de ne pas quitter ou de reprendre le siége de Missolunghi.

Ainsi furent encore trompés les Grecs qui supposaient la flotte du capitan-pacha destinée contre Hydra...

D'après les calculs les plus modérés, Ibrahim avait perdu environ trois mille hommes depuis son premier débarquement; mais avec le renfort qu'il venait de recevoir il n'en avait pas moins de dix-sept a dix-huit mille, dont huit à neuf d'infanterie régulière, et quinze cents de cavalerie. C'est avec ces forces qu'il commença une campagne d'hiver, et l'on ne doutait pas que s'il profitait de la terreur des Grecs, il ne vînt à bout de les soumettre dans cette saison où les troupes irrégulières rentraient toujours dans leurs foyers.

Son premier soin avait été de mettre Tripolitza en bon état de défense; ensuite il courut l'intérieur des provinces occidentales de la presqu'île, soumettant ou dévastant tout sur son passage: son projet était de se joindre à Jussuf pacha qui commandait à Patras; quelques corps grecs voulurent l'arrêter dans l'Arcadie et furent battus; il nettoya toute la côte et semblait vouloir se reporter sur Corinthe, pour s'emparer de la citadelle et des passages de l'isthme, quand, après quelques petites affaires de postes dans les défilés de

(1) On voit par cette lettre qu'il ne se trouvait pas un seul bâtiment français dans cette expédition.

sainte Irène et de l'isthme, il revint établir son quartier général aux petites Dardannelles, ou commença un autre cercle d'opéra

tions...

La Porte ottomane attachant un grand prix à la prise de Missolunghi, et voyant les efforts de Reschid échouer contre le courage opiniâtre des Grecs, avait résolu de donner à Ibrahim pacha la direction absolue des affaires : elle venait d'appeler Jussuf pacha en Natolie afin qu'Ibrahim ne trouvât aucun obstacle du côté de Patras. Reschid eut ordre de se concerter avec lui sur les opérations du siége, et il en reçut bientôt deux à trois mille hommes d'élite qui traversèrent le golfe, et furent débarqués à Crionèro près de l'embouchure de l'Événus.

Le capitan-pacha arrivé sur ces entrefaits devant Missolunghi le 19 novembre, y avait retrouvé Reschid en mesure de recommencer les travaux, et débarqua ses troupes sans opposition. L'escadre grecque de Miaoulis l'avait suivi autant que la mauvaise saison pouvait le permettre sans pouvoir engager que de petites actions d'arrière-garde. Elle emmenait avec elle un renfort de quinze cents hommes et un convoi considérable de provisions destinées pour la garnison de Missolunghi; il n'y arriva qu'après le capitan-pacha mais il n'en débarqua pas moins ses renforts et ses provisions à Vasiladès, et prit son mouillage sur la ligne des bas-fonds de Procopamistos pour attendre les événemens.

L'arrivée de ces secours donna aux braves de Missolunghi un nouveau courage; ils attendaient impatiemment l'assaut général dont ils étaient menacés. Il eut lieu le 27 décembre presqu'à la vue des deux flottes qui n'y furent point engagées, celle du capitanpacha étant obligée de se tenir au large à cause des bas-fonds et dans la crainte des brûlots.... Reschid pacha plein de confiance dans les troupes égyptiennes disciplinées, les mit au premier rang et les fit appuyer par les Albanais et les Turcs: elles se battirent avec le plus grand ordre et pénétrèrent sur plusieurs points jusque dans les retranchemens des Grecs: mais ceux-ci soutenus par les soldats exercés envoyés d'Hydra, parvinrent à les repousser avec une perte considérable.

Quelques jours après cette action, les pluies qui tombaient en abondance ayant occasioné le débordement de l'Achéloüs et de l'Événus, les Turcs furent encore obligés d'abandonner leurs travaux pour se retirer sur les hauteurs du mont Aracynthe. La flotte ottomane se retira du côté de Patras, l'héroïque garnison respira un peu de ses travaux, rétablit ses batteries en attendant la reprise du siége dont le dénoûment funeste n'a pas été moins glorieux que la résistance.

Telle était, à la fin de l'année, la situation de la Grèce menacée par un ennemi plus habile, par des troupes plus aguerries, par des dispositions plus sages, lorsqu'on y reçut la nouvelle de la mort de l'empereur Alexandre. Les Grecs devaient la regarder comme un événement dont les conséquences pouvaient tourner à leur profit, et cependant ils la déplorèrent comme une calamité : ils rendirent les honneurs funèbres à la mémoire de l'empereur, ils invoquèrent pour lui les miséricordes divines, et ne se souvinrent plus que des intentions généreuses qu'il leur avait jadis manifestées... On parlait en même temps de l'arrivée au camp d'Ibrahim de commissaires turcs dont la mission n'était pas bien connue; mais il faut le dire, à l'honneur éternel des Grecs, c'est qu'au milieu de leurs jalousies, de leurs discordes, de leurs passions, si contraires au repos et à l'organisation du gouvernement, il ne s'échappait aucune voix pour parler de soumission. Le peuple, en proie à l'anarchie', au commandement arbitraire de ses capitani, ne pouvait souffrir l'autorité légale : une révolution nouvelle allait renverser les deux corps constitués qui régissaient les affaires d'après la loi fondamentale d'Épidaure pour remettre tout le pouvoir à une junte militaire: la malheureuse Grèce était divisée, dévastée, ensanglantée, se déchirait elle-même les entrailles : elle était prête à supporter tous les fléaux, excepté le joug ottoman.

SUISSE.

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CHAPITRE VII.

Ouverture et travaux de la Diète helvétique. Affaire Keller. PIEMONT. Conduite du gouvernement pendant le voyage de l'empereur d'Autriche en Italie. Expédition contre le bey de Tripoli. - États Ro

mains. Associations secrètes de Carbonari.

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Jugemens rendus à Ra

- Soumission d'un brigand fameux.

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Actes de l'admiFermeture de la Porte Sainte. Mort du roi Ferdinand Ier.

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nistration. Expiration du Jubilé. Balles pontificales. DEUX-SICILES. Avénement de Francois Ier. - Amnistie. Voyage du Roi à Rome et à Milan. Convention pour la rédaction des troupes d'occupation. — Re tour du Roi à Naples. - Nouvelle amnistie pour délits politiques. Rappel d'un grand nombre d'exilés.

SUISSE.

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L'ouverture de la sesssion de la haute-diète a eu lieu à Lucerne, le 4 juillet, avec la solennité accoutumée, sous la présidence de M. Amrhyn, avoyer en charge de Lucerne. On a remarqué dans son discours l'invitation qu'il adressait aux gouvernemens des cantons de ne pas contracter d'engagemens avec les puissances étrangères pour leur fournir plus de troupes que la population de leurs cantons respectifs ne le permet.

La délibération la plus importante dont la diète se soit occupée est celle relative au maintien des lois extraordinaires rendues en 1823, d'après la demande des ministres des puissances alliées sur la police de la presse et la surveillance des étrangers. Aucun canton ne s'opposait à la continuation de ces lois, mais la grande majorité demandait qu'elles ne fussent maintenues provisoirement que pour une année. M. Perrot, député de Neufchâtel (on sait que le titre de cette principauté appartient encore au roi de Prusse), a prétendu, dans un discours très-animé, que les gouvernemens suisses ayant accédé aux principes de la Sainte-Alliance, devaient être fidèles à ces principes dans leur administration, et qu'il leur fallait exercer la surveillance la plus scrupuleuse sur les feuilles publiques, afin que rien ne fût imprimé de contraire à ces principes, ou qui pût même

les offenser; qu'enfin on ne pouvait ni tolérer des étrangers suspects, ni les employer de quelque manière que ce fût. « Je suis muni d'instructions, a dit l'orateur, pour insister sur des mesures plus étendues et plus efficaces que les mesures actuelles. Cependant, quant à présent, je me contente de voter pour la continuation des mesures prises par la diète en 1823 ». Cette proposition a été adoptée à une majorité de 21 voix.

D'autres discussions ont eu lieu sur les rapports commerciaux avec le Wurtemberg; on a dit qu'il en était résulté un traité de commerce; et sur les négociations pendantes avec les gouvernemens étrangers pour la réciprocité de domiciles : elles étaient embarrassées, à l'égard de la France, par des difficultés provenant de la différence ou même de la contradiction des principes suivis en cette matière par les autorités administratives, à l'égard des Français qui s'établissent à l'étranger; mais le directoire a été autorisé à reprendre, en temps opportun, les négociations interrompues, et elles ont été reprises, au mois d'octobre, à l'arrivée du nouvel ambassadeur, M. le baron de Rayneval.

Dans l'une des sessions précédentes, la diète suisse avait, par voie de concordat, admis en principe que désormais le changement de religion d'un citoyen suisse ne lui ferait pas perdre son domicile. Beaucoup de cantons avaient suspendu leur décision à cet égard, mais ils y ont successivement adhéré, de manière que le canton de Berne restait le seul qui n'eût pas encore fait connaître sa résolution définitive. Dans la présente session, le président de la diète a manifesté le désir que cet objet fût enfin réglé. Alors le premier député du canton de Berne a pris la parole, en portant à la connaissance de la diète la décison de son gouvernement, renfermant en substance, qu'à la suite des faits récens, et qui avaient fait une vive impression, on avait acquis la certitude que des prêtres catholiques des cantons voisins s'occupaient à faire des prosélytes, et qu'ils dirigeaient préférablement leurs vues sur des mineurs; que par cette considération principalement, le canton de Berne ne pouvait pas accéder au concordat, en se réservant de prendre les garanties nécessaires dans les circonstances.

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