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ter les colléges des villes où ces maisons d'éducation seront établies, pour y recevoir l'instruction dans tout ce qui se rattache aux sciences et aux lettres; mais que la préparation à ces leçons, et les répétitions qu'elles exigent, auront lieu dans l'intérieur des maisons d'éducation, et enfin que l'enseignement de la doctrine et de la discipline chrétienne y sera donné sous la direction de l'évêque.

Le second arrêté ordonnait qu'un collége philosophique serait établi auprès de l'une des universités du royaume (à Louvain). Il déterminait les sciences qui y seraient enseignées (les langues, la partie élémentaire de la physique, de l'histoire naturelle et de la médecine, de l'histoire sacrée et profane, la philosophie, la métaphysique, la morale, et même le droit canon).

S. M. se réservait la nomination de ces professeurs, mais elle voulait que les chaires de philosophie, de droit canon, de thèses ecclésiastiques fussent confiées à trois professeurs catholiques, à des prêtres de préférence, sous la surveillance de l'archevêque, nommé curateur de droit de l'université. S. M. réglait avec la plus bienveillante sollicitude tout ce qui tient aux frais d'entretien des élèves, aux bourses à affecter à l'établissement; et quant au service de la milice, aux dispenses dont les étudians seront admis à jouir.

Elle déclarait enfin que deux ans après l'organisation dudit collége, les leçons en philosophie, dans les séminaires épiscopaux, viendront à cesser; qu'à dater de cette époque il faudra avoir passé deux ans au collège philosophique, et justifier y avoir fait des études suffisantes pour pouvoir être reçu dans lesdits séminaires.

Un autre arrêté, pris deux mois après, porte qu'aucun jeune Belge qui, après le 1er octobre, aurait étudié l'humanité hors du royaume ne pourrait être reçu au collége philosophique de Louvain, ni même à l'une des universités, ni nommé à aucun emploi du gouvernement, ni admis à exercer aucune fonction ecclésiastique.

Ces arrêtés, les deux premiers d'abord, présentés comme devant améliorer l'éducation cléricale et augmenter la considération due aux ministres chrétiens, furent mal reçus par les prélats de la Belgique, et surtout à la cour de Rome, qui envoya des réclama

tions au gouvernement des Pays-Bas, en enjoignant aux chefs des diocèses de se tenir purement passifs si le gouvernement belge procédait à l'exécution de ses ordres, de faire une réclamation commune, modelée sur celle qui avait été faite par les ordinaires de la Belgique en 1787, contre le séminaire général érigé à Louvain par l'empereur Joseph II, et de réclamer l'effet de la déclaration donnée par S. M. le roi des Pays-Bas, le 18 juillet 1815, pour assurer à la religion catholique son état et sa sûreté. (Lettre de monseigneur Mazio à M. l'archevêque de Malines, en date du 10 septembre.)

Il se mêlait malheureusement à ces difficultés d'autres circonstances désagréables au Saint-Siége dont il faut dire l'origine.

Il existait depuis plus d'un siècle un schisme dans l'église d'Utrecht, dont la cour de Rome avait aboli le siége métropolitain, à la suite des querelles sur les écrits de Jansénius. Mais malgré cette abolition, des chanoines réfractaires aux décisions de l'église avaient élu pour archevêque Cornelius Stenoven, qui, frappé des censures de l'église par Benoit XIII (21 février 1725), n'en soutint pas moins la validité de son élection, et qui, pour donner plus de relief à son siége métropolitain, créa même de son autorité deux évéchés, l'un à Harlem, l'autre à Deventer, dont les évêques n'ont pas cessé de demander leur institution canonique à Rome, sans jamais en recevoir que des brefs de censure et d'excommunication, ce qui ne les empêchait pas de se regarder comme élus canoniquement, de se sacrer respectivement, et de diriger ce qu'on appelait la petite église, ou, suivant le titre qu'elle s'était elle-même donné, «l'église catholique de l'ancienne liturgie. »

Ainsi l'évêque de Deventer et l'archevêque d'Utrecht (Willibrod Van Os), étant venus à mourir, le chapitre de Deventer élut encore pour le premier siége un Hollandais nommé Wilhem-Vet (13 juin), et quelque temps après les chanoines d'Utrecht nommèrent pour leur archevêque M. Jean Van Santen. L'un et l'autre s'empressèrent encore d'informer le Saint-Siége de leur election par des lettres pleines de respect et de soumission: La cour de Rome leur répondit comme on avait fait à leurs prédécesseurs, en décla

rant que leur élection était illicite, vaine, nulle, et leur sacre illégitime et sacrilége; elle leur interdisait tous actes épiscopaux, et les frappait d'anathème (bulle du 19 août 1825, 13 janvier 1826), ce qui ne les empêcha point d'exercer le ministère épiscopal sous la protection du gouvernement. Nous rassemblons ici ces faits pour n'être pas obligés d'y revenir; ils servent à éclaircir les autres.

Malgré les représentations déjà connues du Saint-Siége et de l'archevêque de Malines, le gouvernement des Pays-Bas, un peu choqué de ce qu'on rappelait les événemens de 1787 comme une provocation à la révolte, poursuivait ses desseins; il faisait fermer les petits séminaires, renvoyait les frères des écoles chrétiennes, et organisait le college philosophique établi à Louvain, où la plupart des professeurs nommés étaient des prêtres catholiques (car l'institution avait trouvé des partisans, surtout dans le clergé du duché de Luxembourg), et qui fut ouvert le 17 octobre avec un grand cérémonial.

Session des états. Le jour même de cette installation, le 17 octobre, le roi faisait en personne à La Haye l'ouverture de la session des états-généraux par un discours prononcé dans la langue nationale. Les querelles religieuses dont nous venons de parler n'y tiennent pas une place proportionnée à leur importance; S. M. se contente d'annoncer l'établissement de l'école philosophique comme une institution que réclamaient depuis long-temps les besoins des catholiques romains, qui donnerait aux jeunes gens qui se destinent au ministère des autels le moyen d'acquérir les connaissances générales que l'état actuel de la civilisation rend indispensables, et dont on devait attendre les plus heureux résultats pour la splendeur de l'église catholique belge.

D'ailleurs le Roi rappelait avec satisfaction le mariage de sou fils; T'exposition des produits de l'industrie nationale qui venait d'avoir lieu à Harlem, comme une preuve éclatante des progrès de l'industrie belge. Il annonçait des améliorations opérées dans l'administration des provinces et des communes, et dans le système des impôts, l'établissement du système monétaire, la suppression des monnaies françaises qui s'était opérée sans troubles et sans embarras dans la Annuaire hist. pour 1825.

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circulation, la perspective d'une diminution dans les impôts, et quelques-uns des travaux qui allaient occuper cette session. « Je « l'ouvre, dit S. M., dans la confiance qu'elle servira, non moins << que les précédentes, à augmenter le bien-être de l'état. J'éprouve << un sentiment bien vif de satisfaction en voyant le trône des Pays« Bas entouré de plus en plus de l'amour et de la confiance de nos compatriotes. Ainsi secondés, NN. et PP. SS., nos efforts réunis ne peuvent manquer, sous la protection divine, et en continuant de jouir du bienfait de la paix, d'atteindre leur but, la prospérité de << la patrie... >>

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On peut observer, à chaque session des états-généraux des PaysBas, une amélioration sensible dans les rapports du gouvernement avec les deux chambres, et des deux chambres entre elles; le système représentatif y fait des progrès évidens; c'est ce que le nouveau président de la deuxième chambre (M. Saudberg), nommé par le roi entre les candidats présentés à S. M., faisait observer dans son discours d'installation le 20 octobre. « La représentation nationale, disait-il, s'est montrée fidèle au but de son institution; elle accepte avec satisfaction les lois proposées, et quand elle croit devoir les soumettre à un examen ultérieur, elle le fait avec regret, mais sans faiblesse. Nous n'avons pas ici de partis prêts à se servir de tout pour semer la discorde; nous ne connaissons pas de haines enracinées qui élèvent une muraille de séparation dans cette assemblée; quelquefois nos sentimens diffèrent, mais notre but est toujours le même, l'honneur et la prospérité de la patrie.

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Ainsi, les deux chambres votèrent presque sans discussion, en réponse au discours du roi, une adresse où respiraient les sentimens exprimés par S. M.

De tous les projets présentés au commencement de la session, celui qui ordonne l'introduction d'une pièce de monnaie d'or ne souffrit aucune opposition; celui qui règle la répartition de la contribution foncière excita d'assez vifs débats. Plusieurs députés se plaignirent de son inégalité qui ajoutait dans beaucoup de provinces à une charge considérable; mais la plupart exprimaient en même temps leur confiance dans les efforts du gouvernement, pour y

mettre un terme et pour venir au secours de l'agriculture; ils saisaissaient cette occasion pour donner à la marche générale de la haute administration les éloges qui lui étaient dus.

« Liberté de commerce, liberté de conscience, liberté, tolérance, que ces mots soient à jamais chers à tous les Belges! disait M. Fabry Longrée; que la maxime laissez faire, qui nous a long-temps divisés en fait de douanes, nous réunisse sous tous les autres rapports; qu'elle soit notre devise sous une dynastie qui s'identifie avec nos libertés! » (Séance du 14 novembre.)

Le budget annuel ou des dépenses extraordinaires, composé de quatre projets de loi, présenté par le ministre des finances dans la séance du 27 octobre, s'élevait à 20 millions de florins, qui, joint au montant du budget décimal (59,875,052 flor. 89 cent.) décrété en 1820 (1), composait une charge totale de près de 80 millions de florins. Mais elle avait subi successivement une réduction d'environ 3 millions. Les dernières années, depuis 1823, offraient un excédant de recettes toujours croissant.

« C'est par suite de cet état favorable des choses, disait le ministre, et nonobstant l'augmentation des dépenses que Vos Nobles Puissances ont accordées pour remédier aux désastres des inondations, que les cents additionnels ne seront pas augmentés, et qu'il a même été possible de réduire ceux sur la mouture, de 13 à 5, et d'opérer par conséquent un dégrèvement de 8 cents. »

S. Exc. annonçait aussi que la somme destinée à l'amortissement de la dette serait augmentée de 200,000 flor., et par conséquent portée à 2,200,000 flor...

La discussion du budget, qui s'ouvrit dans la séance du 13 décembre, avait attiré une foule de personnages distingués: S. A. R. le prince d'Orange, presque tout le ministère, le corps diplomatique et un concours de députés plus nombreux qu'on ne l'avait vu depuis long-temps. On s'attendait à y voir traiter l'objet général de l'attention publique, les querelles religieuses.

(1) Voy. pour l'intelligence du système financier des Pays-Bas, les discussions qui eurent lieu en 1819, l'Annuaire historique de cette année, pag. 349, 350 et celai de 1820, pag. 286.

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