sane Métanira, compagne d'esclavage de cette Nééra; depuis il épousa la fille de son frère Brachyllus. VI. Platon, dans son Phèdre, parle de Lysias comme d'un orateur plein de talents, et plus ancien qu'Isocrate. Philiscus1, disciple de celui-ci, et ami de Lysias, a fait pour ce dernier une épigramme qui confirme ce qu'en dit Platon. La voici : Docile à mes desirs, célèbre dans tes chants Et qu'il soit honoré des âges à venir. VII. Il composa deux discours pour Iphicrate, l'un contre Harmodius, et l'autre contre Timothée, accusé de trahison; il gagna ces deux causes. Dans le second de ces discours, Iphicrate avait exposé la conduite de Timothée. Dans la suite, il fut accusé de trahison, et prononça pour sa défense un discours que Lysias lui avait composé 2. Lysias prononça dans les jeux olympiques une harangue dont le but était de persuader aux Grecs de faire trêve à leurs querelles, et de se réunir pour détruire la puissance tyrannique de Denys. 1 Philiscus était un rhéteur de Milet. 2 La fin de cette Vie est encore très altérée et presque inintelligible. J'ai suivi les corrections faites par Taylor dans sa collection des fragments de Lysias, qui est dans le sixième volume des orateurs de Reiske. Iphicrate t Timothée, deux généraux athéniens, se distingurent dans la guerre sociale. 1. Naissance et parents d'Isocrate.-II. Ses maîtres. III. Son éloignement des affaires publiques. - IV. Il ouvre une école de rhétorique. V. Nombre et qualité de ses disciples. VI. Époque de sa mort. VII. Temps où il a composé ses discours. VIII. Ses richesses lui font des envieux. IX. Lieu de sa sépulture. - X. Honneurs qu'on lui rend après sa mort. — XI. Nombre de ses oraisons. XII. Ses bons mots. XIII. Son penchant à l'amour. - XIV. Procès qu'il eut à soutenir. XV. Ouvrages de son fils adoptif. I. Isocrate était fils de Théodore, du bourg d'Erecthée, citoyen d'un état médiocre, et marchand d'instruments de musique, qu'il faisait fabriquer par ses esclaves. Il s'enrichit tellement dans ce commerce qu'il fut en état de faire les frais des jeux publics, et de donner à ses enfants une bonne éducation. Outre Isocrate, il avait deux autres fils, Télésippus et Diomnestus, et une fille. Aristophane et Stratis l'ont plaisanté dans leurs comédies sur l'état de son père. Il naquit la quatre-vingt-sixième olympiade, sous l'archontat de Lysimaque, du bourg de Myrrhinuse 2, vingt-deux ans après Lysias, et sept avant Platon. II. Il fut aussi bien élevé qu'aucun autre Athénien, et eut pour maîtres Prodicus de Céos, Gorgias de Léontium, Tisias de Syracuse, et le rhéteur Théramènes. Ce dernier, que les trente tyrans voulaient faire arrêter, s'était réfugié dans le temple de Vesta. Tous ses amis, effrayés, n'osaient ouvrir la bouche. Isocrate seul se leva pour prendre sa défense. Après quelque temps de silence, comme il se disposait à parler, Théramènes le pria de n'en rien faire, en lui disant qu'il sentirait bien plus vivement ses malheurs s'il voyait quelqu'un de ses amis les partager. On dit qu'Isocrate avait rédigé des préceptes sur 1 Il y a dans le texte : grand-prêtre, tandis que Théodore n'était qu'un simple luthier. Étienne de Byzance dit formellement qu'Isocrate était du bourg d'Erecthée. 2 C'était un bourg de la tribu Pandionide. 3 Ce trait est attribué par d'autres au philosophe Socrate. l'art oratoire, dont il fit usage pour se défendre dans les tribunaux. Ces préceptes portent le nom de Boton'. III. Parvenu à l'âge viril, il ne voulut prendre aucune part au gouvernement, parcequ'il avait la voix faible, qu'il était naturellement timide, et que la guerre du Péloponnèse l'avait dépouillé de ses biens 2. Il s'occupa donc à composer des plaidoyers pour des citoyens. Mais il ne prononça jamais en public qu'un seul discours, celui de l'échange des biens 3. Il ouvrit une école d'éloquence, et partagea son temps entre l'étude de la philosophie et la composition. Ce fut alors qu'il écrivit son Panégyrique *, et d'autres discours du genre délibératif. Il les lisait luimême dans son école, ou les faisait déclamer par d'autres. Ils avaient pour objet d'exciter ses concitoyens à la vertu et à la pratique de leurs devoirs. 4 IV. Mais trompé dans son attente, il abandonna ce genre d'occupation, et ouvrit, dit-on, une école de rhé 1 Ce traité d'Isocrate n'existe plus. 2 C'est ce qui l'obligea de composer des plaidoyers pour gagner de quoi vivre. 3 Tout citoyen d'Athènes contribuait de son bien à l'entretien des galères. Celui dont le bien montait à dix talents (environ quarante-huit mille livres de notre monnaie) pouvait être nommé triérarque, ou capitaine de galère; auquel cas il était obligé d'équiper une galère, et avait droit de la commander. Ceux dont le bien était au-dessous de dix talents se joignaient plusieurs ensemble, jusqu'à la concurrence du nombre nécessaire, et contribuaient à frais communs à l'armement d'une galère. La charge de triérarque étant fort onéreuse, il était permis à ceux qui étaient nommés d'indiquer quelqu'un qui fût plus riche qu'eux, et de demander qu'on le mît à leur place, pourvu qu'ils fussent prêts à changer de bien avec lui, et à faire la fonction de triérarque après cet échange. Cette loi était de Solon, et s'appelait la lo ces échanges. Je doute, au reste, qu'Isocrate ait jamais prononcé ce discours devant ses juges. Ce discours est généralement regardé comme le chef-d'œuvre d'lsocrate. C'est le panégyrique de la ville d'Athènes, qui fut publié dans une de ces assemblées solennelles que les Grecs nommaient panégyries, dit M. de Bréquigny, Vie d'Isocrate, traité sur la Gloire d'Athènes. Plutarque reproche avec beaucoup de dureté à Isocrate d'avoir été quinze ans à composer ce discours. D'autres n'en mettent que dix, ce qui est encore beaucoup. Le savant académicien que je viens de citer prouve très bien qu'il n'y travailla tout au plus que quatre ans. T. IV. 10 torique d'abord à Chio, où il n'eut que neuf disciples. Lorsqu'en comptant ce qu'il avait reçu, il vit le peu de profit qu'il en tirait, il ne put s'empêcher de dire, les larmes aux yeux « Voilà donc le prix pour lequel je me suis vendu à ces gens-là! » Il admettait à ses entretiens tous ceux qui étaient curieux de l'entendre. Il est le premier qui ait séparé les discours contentieux du barreau des harangues politiques, auxquelles il s'attacha de préfé— rence. Il établit à Chio les mêmes magistratures et la même forme de gouvernement qu'à Athènes 1. Il s'enrichit tellement dans cette profession, qu'il amassa plus d'argent que n'avait fait aucun autre maître avant lui, et qu'il fut en état d'équiper une galère. V. Il eut dans la suite jusqu'à cent disciples, au nombre desquels était Timothée, fils de Conon, qui le prit pour l'accompagner dans une de ses expéditions, pendant laquelle Isocrate écrivit toutes les dépêches de ce général aux Athéniens. Timothée lui donna pour récompense un talent sur ce qui lui revint de la prise de Samos. Il eut aussi pour disciples Théopompe de Chio, Ephore de Cumes, Asclepiade et Théodecte de Phasélis, tous deux poëtes tragiques. (Le tombeau de ce dernier est auprès de Cyamite 3, le long du chemin sacré qui mène à Eleusis; 1 Ce que l'auteur dit ici paraît destitué de tout fondement, et je crois, comme M. de Bréquigny, qu'il a imaginé cette prétendue réforme d'après un passage mal entendu de Cicéron, qui dit que l'école d'Isocrate était une image d'Athènes, et qu'à l'exemple de cette république, qui envoyait sou vent ses sujets former au loin des établissements nouveaux, il partait chaque année de l'école d'isocrate, pour toutes les parties de la terre, des colonies de savants. 2 les deux premiers écrivains furent de célèbres historiens. Photius dit qu'Isocrate leur conseilla d'embrasser le genre de l'histoire, et qu'il leur proposa à chacun des sujets conformes à leur génie. Asclepiade était de Tragile, ville de Thrace; et Théodecte, de Phasélis en Pamphylie, avait com_ posé cinquante tragédies dont il ne nous reste rien. L'auteur s'exprime assez obscurément sur ces deux poëtes. J'ai traduit d'après Photius. 3 Pausanias parle aussi du tombeau de Théodecte; mais il avoue son ignorance sur l'origine du mot Cyamite. Il ne sait si c'était le nom d'un heros honoré par les Athéniens, ou de la personne qui, la première, leu mais il n'en reste plus que des ruines. Il y avait fait placer sa statue avec celles des poëtes les plus célèbres. Celle d'Homère est la seule que le temps ait respectée.) On compte encore parmi ses disciples Léodamus d'Athènes, Lacritus, qui donna des lois aux Athéniens1, enfin Hypéridès et Isée. On prétend que pendant qu'il tenait école d'éloquence, Démosthènes vint le trouver et lui témoigna le plus grand desir de prendre ses leçons, en ajoutant que dans l'impuissance où il était de lui payer les mille drachmes qu'il prenait de ses disciples, il lui en offrait deux cents 2 pour apprendre de lui la cinquième partie de l'art oratoire : « Mon ami, lui dit Isocrate, nous ne morcelons pas notre art, comme on ne vend pas les gros poissons par morceaux. Si vous voulez l'apprendre, il faut l'acheter tout entier 3. >> VI. Il mourut l'année que Chéronidas était archonte. Ayant appris dans le gymnase d'Hippocrate la défaite de Chéronée, il s'obstina à ne prendre aucune nourriture, et il expira au bout de quatre jours, après avoir prononcé les premiers vers de trois tragédies d'Euripide. Danaüs, roi d'Égypte, avait cinquante filles. avait enseigné à cultiver les fèves. Élensis était éloignée d'Athènes de quatre lieues. Comme on y célébrait les mystères de Cérès, on donnait le nom de sacré au chemin qui y conduisait. 1 Ce Lacritus ne m'est point connu d'ailleurs. Fabricius, dans le catalogue des anciens légistateurs, ne le cite que sur la foi de notre auteur et de Photius, qui ne sont pas de sûrs garants. Il est étonnant qu'un législateur soit ignoré dans une époque aussi rapprochée que celle-là. Peut-être qu'il n'avait fait qu'écrire ses lois, et que les Athéniens ne les avaient pas adoptées. 2 Les 1,000 drachmes valaient environ 800 livres. 3 Ce fait, qui contraste si fort avec les principes de morale répandus dans tous les ouvrages d'Isocrate, va être démenti par l'auteur lui-même, qui nous dira que cet orateur ne recevait aucun salaire de ceux de ses disciples qui étaient citoyens d'Athènes. Je ne puis dire à quoi Isocrate faisait allusion en récitant ces trois |