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les galleries ont donné les applaudissemens les plus vifs, & réitérés plusieurs fois.

L'ajournement des autres articles est demandé par M. Emeri.

M. Alexandre de Lameth. Les articles que vous avez décrétés, Messieurs, ne suffisent pas encore pour que le pouvoir exécutif puisse organiser l'armée, & cependant il est de la plus haute importance de ne plus perdre un moment. D'ailleurs, il nous reste à voter l'augmentation de solde, & nous ne voudrons pas retarder d'un seul instant ce grand acte de justice. J'invite donc instamment tous les membres de cette assemblée à ne pas se séparer que tous les articles ne soient décrétés.

Quoiqu'il soit quatre heures, la proposition est applaudie & adoptée.

M. Alexandre de Lameth a insisté pour qu'on votât la suppression de la vénalité des emplois militaires. On a été de cet avis.

L'augmentation de la paye du soldat a souffert quelque difficulté. MM. Bouteiller & de Tracy représentoient que le département de la guerre ayant été fixé à 84 millions, on seroit obligé de le porter à 86 millions 500 mille livres, parce qu'un sou en-sus de l'augmentation que le co

a

mité militaire avoit proposé, donnoit pour 42 mille hommes 2 millions 500 mille livres. M. Dubois de Crancé à rassuré l'assemblée, en ce que l'économie de la maison du roi donnoit une marge de 5 millions à répartir. L'assemblée, après avoir entendu M. Dubois de Crancé, a décrété l'article.

La séance s'est levée à cinq heures & demie.

Suite du discours de M. de Laméth sur l'organisation de l'armée.

Nous devons donc préparer des moyens dignes d'une grande nation, & qui nous mettent à même d'en user rarement. Quand il s'agira de déterminer quel nombre de troupes est nécessaire à la position géographique de la France & aux circonstances politiques dont elle est environnée; il sera facile de prouver que les cent dix mille hommes demandés par le comité militaire, ne sont pas, en tems de paix, un nombre trop considérable, & ne forment pas, en tems de guerre, la moitié des forces qui peuvent être

nécessaires à notre défense.

La constitution doit s'assurer que la nécessité de se procurer des forces extraordinaires en tems de guerre ne sera pas un prétexte pour violer les

droits des citoyens & entreprendre sur leur liberté ; elle auroit donc à prescrire les regles qui devront être suivies. Un moyen facile se présente naturellement pour nous assurer que la patrie ne manquera pas de défenseurs; & ce moyen se trouve dans l'établissement des milices nationales. En effet, Messieurs, quoique j'ignore sur quelles bases votre comité de constitution se propose de les instituer, il n'est pas douteux cependant qu'ils n'établissent une conscription nationale, où tous les citoyens en état de porter les armes devront être compris ; c'est dans cette masse importante de la meilleure espece d'hommes, qui presque tous auront déjà quelques notions d'évolutions militaires, ou au moins ne seront pas étrangers au manîment des armes, que devront être pris ceux que vous destinez à servir d'auxiliaires en tems de guerre. Il ne s'agira plus alors que de savoir combien chaque département renfermera d'hommes inscrits, & de répartir, d'après cette proportion, le nombre de ceux que les circonstances exigeoient.

de

Je pense qu'il ne peut y avoir aucun inconvénient, & que vous trouverez, au contraire, grands avantages à demander préalablement au pouvoir exécutif; une communication qui, sans, pouvoir gêner votre liberté, me paroît indispen

sable pour éclairer votre décision. Vos intentions, Messieurs, sont connues. Je pense que le роцvoir exécutif aura soin de ne vous présenter que des mesures qui soient compatibles avec les diverses améliorations que vous avez résolues de faire.

Vous avez aboli les privileges, & vous ne souffrirez pas qu'il en subsiste parmi les corps militaires. Ainsi, les avantages & les préférences accordés jusqu'à ce jour à certains religieux, disparoîtront devant les principes de justice & d'équité qui doivent régner dans toutes les parties de l'organisation sociale.

Des régimens entretenus par la nation & destinés à la défendre, ne seront plus la propriété des particuliers, transmise de génération en génération, & donnée en dot à leurs filles. Aucun citoyen, fût-il prince du sang, ne pourra prétendre aux grades sans en être reconnu digne par son mérite, ou l'ancienneté de ses services.

Les chefs des régimens ne se feront plus un titre d'honneur d'être affranchis pendant la plus grande partie de l'année du service militaire & de la surveillance des corps qui leur sont confiés; le tems de leur service sera le même que celui des autres officiers civils; ils acquerront par le même nombre d'années, la récompense honorable attachée à la valeur & à l'ancienneté.

Une nouvelle organisation de l'armée augmentera sa force réelle en supprimant le luxe des emplois inutiles, qui loin d'augmenter son autorité, l'embarrassent & la surchargent d'un poids ruineux.

Les commandans de provinces remplacés dans leurs fonctions civiles par les assemblées administratives seront supprimés.

Les officiers généraux seront réduits au nombre strictement nécesaire, & les grades supérieurs en cessant d'être prodigués, recevront un nouvel éclat.

Les colonels, mestre-de-camp & commissaires généraux, dans les différentes armées, ces places si avantageuses à ceux qui les possédoient, & si inutiles au service, toujours condamnées & toujours ménagées sous l'ancien régime, disparoîtront avec les autres abus que votre sagesse a proscrits.

Toutes ces suppressions indispensables serviront encore, Messieurs, à faciliter l'accomplissement de vos intentions en faveur des soldats, des bas-officiers & des divers grades dont la paie est reconnue insuffisante.

La suite une autrefois.

LE HODEY DE SAULTCHEVREUIL.

De l'Imp. du RÉDACTEUR, place du Palais-Royal.

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