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détruite, & tous les effets civils qui en résultoient sont abolis.

Dans les successions légitimes directes ou collatérales, toutes inégalités de partage ci-devant fondées sur les qualités attribuées aux personnes ou aux biens, sur la diversité de l'âge ou du sexe, ou sur toute autre distinction sont supprimées.

Les opinans se croisoient, mais cependant en général on étoit assez d'accord sur le principe. La motion de M. Chapelier a eu assez de partisans pour faire oublier quelques instans celle du comité. M. Martineau a blâmé la rédaction de M. Chapelier, & il a proposé pour amendement : sans que le présent décret puisse porter atteinte aux droits des puinés dans les coutumes qui ne les appellent qu'au partage des biens féodaux.

Un amendement fait & proposé à l'égard des fiefs masculins, şis en Alsace, reversibles à la couronne, c'est-à-dire, à la nation, on a demandé qu'il fût inséré une clause particuliere pour la conservation de ce droit. Cet amendement a été appuyé par M. Emeri, qui a observé que puisqu'il étoit dans l'intention de l'assemblée d'imdemniser les princes allemands pour les préjudices apportés à leurs droits féodeaux en France; il étoit juste que la nation ne laissât point échapper le droit de reversibilité. Cette question a été ajournée.

On a a proposé une infinité d'amendemens qui successivement ont été rejettés par la question préalable. Celui de M. Martineau a été présenté sous une nouvelle forme, & adopté ; il fait la derniere clause de l'article, & commence ainsi : déclaré néanmoins que les puinés & les filles &c., ainsi qu'on l'a vu dans le corps de l'article même. Il a fallu gagner pied à pied le terrein pour parvenir jusqu'au décret. La priorité a été demandée par le comité, qui ne l'a pas obtenue & elle a été accordée à la rédaction de M. Chapelier; on a même été obligé d'écarter la division proposée; enfin on a voté sur l'article qui a été adopté tel que nous l'avons inséré.

La séance s'est levée à trois heures & demie..

Séance du 25, au soir.

Adresses de différentes villes du royaume. La commune de Châlons prête le serment civique; les gardes nationales de la Rochefoucault jurent de défendre la constitution jusqu'au dernier soufile de leur vie; des villes de Normandie, de Bretagne, du Lyonnois, font remise de la contribution des ci-devant privilégiés ; la commune de Rhodès rend compte des désordres du Rouergue, qu'elle attribue à la falsification des décrets de

l'assemblée nationale. Les colons de la Martinique, par une adresse, en date du 2 décembre, annoncent que la paix regne dans leur isle : les habitans font le plus grand éloge de leur commandant. La commune de St.-Marcellin en Dauphiné, qui la premiere a dénoncé la commission intermédiaire de cette province, dont les intentions étoient plus que suspectes, présente une adresse fœdérative de plus de 19 mille hommes armés, pénétrés des principes de l'assemblée nationale, & prêts à verser leur sang pour les faire observer.

Un député de Saint-Domingue offre de la part des citoyens de la contrée du sud de cette isle pour les veuves & enfans de ceux qui ont périaux journées du 13 & 14 juillet 4400 liv. Il a annoncé de la même part une somme plus considérable, dont on laissoit l'emploi à sa discrétion; il a demandé à être autorisé à la remettre entre les mains de M. Bailli; il a fini par annoncer que la paix regnoit dans ce canton de l'isle. Quel est donc le démon qui souffle l'esprit de discorde en France, & pourquoi la tranquillité & la sécurité que les adhésions & le patriotisme des difdifférens peuples font naître dans l'ame d'un citoyen,sont-elles continuellement empoisonnées par les récits effrayans d'évenemens qui font craindre une contre-révolution.

Les députés extraordinaires du commerce de France se sont présentés à la barre, pour communiquer leurs alarmes sur l'affranchissement des negres & l'abolition de ce commerce injuste, mais lucratif, & par cela même nécessaire, si ce qui est injuste peut jamais être utile, je veux dire la traite des negres. Tout est perdu dans les colonies, si l'on ne favorise ce commerce. Nos colonies, qui rapportoient à la France deux cents quarante millions par an, seront nulles pour ncus; delà la langueur, l'inertie & l'anéantissement du commerce, la licence des negres, le désordre de nos colonies: elles attribuent ces embarras, ces contre-tems aux plans insidieux des Anglois qui veulent, à notre préjudice, continuer ce commerce, en nous suscitant les plus grandes difficultés. Ces députés ont conclu à ce que la traite des negres continuât.

M. le président a répondu :

L'assemblée nationale connoît les rapports du commerce avec la prospérité des François ; elle a accordé au commerce les encouragemens dont il est susceptible. Vos alarmes ne sont point étrangeres à sa sollicitude; elle les pésera dans sa justice & dans sa sagesse, & tâchera de les concilier avec les principes de la liberté, qui font

la base de la constitution. « La réponse du président a excité des murmures à la droite du président, & les députés de la Guyenne y ont contribué autant que qui que ce soit. On a trouvé mauvais que le grand-prêtre de la liberté osât, dans son sanctuaire, proférer & prononcer les principes de la liberté. Qu'en doit-on conclure? Que les partisans de la liberté doivent être aux aguets & ne pas se lasser de porter le bonnet qu'ils ont arboré les journées du 13 & 14 juillet:

Les députés de la commune de Paris ont demandé , par l'organe de l'abbé Mulot, d'accorder aux Juifs de Paris la même faveur qu'on avoit accordé aux Juifs Portugais, Avignonois, &c. c'es-à-dire, le droit d'être citoyens actifs. Dans. le cours de sa harangue, il a lâché cette phrase: Il y a beaucoup de Juifs dans cette ville. La force naïve de cette vérité a fait beaucoup rire. S'il eût dit il existe dans cette assemblée beaucoup d'ennemis de la révolution, on eût applaudi, & à coup sûr ce n'eût pas été à la droite du président.

:

M. le président a répondu : L'assemblée nationale s'est fait un devoir sacré de rendre à tous les hommes leurs droits; elle examinera dans sa

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