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quantité de terreins libres, & possédées par d'autres hommes que ceux qu'on appeloit serfs. L'enclave n'étant donc qu'un droit de seigneurie dans un terrein circonscrit, ne doit pas frapper également tous les héritages compris dans cet enclave, sous prétexte qu'ils ont été originairement des concessions de fonds. Une délibération des états de Bloit, sous Henri III, vient à l'appui de ce que j'avance. La chambre de la noblesse demanda que la maxime nulle terre sans seigneur fût érigée en loi du royaume; le roi s'y refusa, & la loi ne fut point consacrée.

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M. Tronchet n'a point cru devoir entrer dans les détails de l'origine ni de la création de la féodalité il s'est demandé à lui-même sur quoi est fondé le droit d'enclave? Sur un titre en vertu duquel, a-t-il répondu, un seigneur jouit d'un droit universel dans un terrein circonscrit & limité Or, comment ce seigneur auroit-il eu ce titre, s'il n'avoit point concédé le fonds? Il a donc droit d'exiger un droit quelconque sur un héritage enclavé dans sa seigneurie. Après toutes ces discussions, l'amendement, ainsi que l'article, ont été décrétés comme ci-dessus.

L'article second a été totalement refondu & décrété dans les termes suivans:

DÉCRET.

<< Lorsqu'il y aura, pour un même héritage, plusieurs titres ou reconnoissances, les moins onéreuses aux tenanciers seront préférées, sans avoir égard au plus ou moins d'ancienneté de leurs dates, sauf l'action en blâme ou réformation contre les titre ou reconnoissances qui ne sont point encore hors de la prescription, sans rien innover dans le pays où un usage contraire a eu lieu jusqu'à présent.

L'article a été divisé. La premiere disposition été décrétée d'abord; mais la seconde a souffert beaucoup de difficultés. M. Goupil de Préfeln, auteur de la clause sauf l'action en blâme ou réformation, &c. l'a défendue ainsi : C'est un acte de justice auquel vous ne pouvez vous refuser. Il est, a-t-il dit, des pays où le seigneur siste en personne ou par procureur aux actes de reconnoissances; mais il en est où ils se font sans la participation du seigneur. Le débiteur pourroit donc, dans ces derniers pays, diminuer à son gré sa dette ou sa redevance, sans que le seigneur puisse avoir aucun recours contre lui. Ainsi un titre, fruit de la mauvaise foi, militeroit contre un légitime propriétaire. Ces discussions finies, le rapporteur du comité féodal a

annoncé que c'étoit-là tous les articles qu'ils avoient à proposer à l'assemblée, sauf le mode du rachat des droits supprimés sans indemnité, qu'il a annoncés être plus qu'à moitié fait.

M. Dupont, membre du comité des finances, a lu un long mémoire, dont la lecture a duré trois heures. De grandes idées, de bonnes vues, des expressions heureuses, ont fait applaudir une infinité de fois le rapporteur. Ce mémoire contient les moyens de remplacer la gabelle & de rétablir le niveau entre les recettes & les dépenses de l'année 1790.

Il a débuté par annoncer que la partie des finances qu'on l'on alloit commencer à traiter étoit celle qui devoit consolider tout le travail de l'assemblee ; que du succès des finances dépendoit le succès de la révolution. Tous les sacrifices que l'on a faits jusques aujourd'hui, les miracles de patriotisme qui se sont opérés ; les événemens incroyables qui se sont passés sous nos yeux; les mouvemens que les citoyens de toutes les classes se sont donnés pour amener & soutenir la révolution ; tout cela ne seroit que des rêves, si l'on ne venoit à bout de rétablir de l'ordre dans les finances, & d'attraper le niveau 1. entre la dépense & la recette, Les nations sont comme les particuliers, elles ne peuvent se sous..

tenir que par l'ordre, l'ordre ne peut subsister que par la force publique, qui devient nulle & s'anéantit sans finances. Ainsi une nation qui diroit je ne veux pas payer d'impôt, diroit: je veux être la proie des brigands. ... Le plus économique de tous les établissemens pour maintenir l'ordre est les revenus publics. Il y auroit impossibilité à chaque individu de pourvoir à sa propre protection. On ne sauroit trop répéter au peuple qu'il doit payer sa quote part des revenus. publics, puisqu'il participe aux bienfaits de la force protectrice....

L'année prochaine sera préparée à recevoir & recevra réellement les heureux effets de la constitution. Elle sera dégagée de tout l'odieux du régime ancien; mais dans la crise actuelle, où nous nous trouvons pressés par les circonstances, il faut trouver moyen d'assurer le service de l'année courante, les difficultés de remplacer un impôt de 62 millions, de faire cesser la suspension. de l'arriéré. Le discrédit où l'on est tombé en passant rapidement d'un état à un autre, ont donné des espérances aux ennemis du bien public, de voir arriver une contre-révolution. Leur espoir coupable sera déçu. Ils n'avoient pas calculé votre zele opiniâtre, votre courage infatigable, le patriotisme de notre excellent roi, les

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vertus & le civisme d'une grande nation de 25 millions d'hommes, dont la franchise, la loyauté & l'honneur font le caractere distinctif. Une nation telle que la nôtre, placée dans un sol riche, a toujours des ressources. Il ne faut qu'attraper le niveau si désiré les peuples équitables, géné reux & reconnoissans, paieront une contribution juste, & vous y parviendrez. . . . . Les momens sont urgens, la moindre lenteur mettroit tout en danger; il faut que tout soit prêt. Le premier jour où les assemblées de département se mettront en activité, sans quoi tout est perdu.

Le rapporteur ne s'est pas contenté de présenter un plan de remplacement pour l'impôt de la gabelle, il a proposé la suppression de la marque des cuirs, de la marque des fers, de l'imposition sur les amidons, les huiles & savons. L'impôt de la gabelle produisant sous l'ancien régime entre 61 & 63 millions de revenu net, sera entiérement suprimé, mais les deux tiers de cette somme, c'est-àdire, 42 millions, seront répartis au marc la livre, proportion gardée entre les différentes provinces de grandes gabelles, petites gabelles, de quart bouillon & de franchise. La vente libre du sel, confiée par le gouverment ès mains des fermiers généraux en concurrence avec les autres marchands de cette denrée, produira, d'après un

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