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est inféodée, même à titre gratuit des simples droits d'usage dans les terres vagues du fief, le seigneur n'a jamais pu prétendre les réduire au cantonnement, suivant le droit commun du royaume ; il étoit réduit au triage par la jurisprudence très-constante des arrêts antérieurs & postérieurs à l'ordonnance de 1669; plus anciennement, il ne pouvoit rien afféager. M. le Chapelier a soutenu cette proposition ; & pour lever la difficulté, M. Merlin a proposé de retrancher le mot appartenans; l'article a été adopté avec ce léger changement; il réduit aux termes simples sus-énoncés. L'assemblée s'est retirée à trois heures dans les bureaux, pour procéder à la nomination des 12 membres qui doivent former le nouveau comité.

Suite du Discours de M. de Lameth sur l'orga nisation de l'armée.

M. de Lameth, en parlant de la conscription militaire, a dit: Il ne s'agit plus que de savoir combien chaque département renfermera d'hommes inscrits, & de répartir, d'après cette proportion, le nombre de ceux que les circonstances exige'roient.

Je sais qu'au premier regard il peut paroître difficile de concilier cette mesure avec la liberté individuelle dont tous les citoyens doivent jouir; mais je sais aussi qu'en y réfléchissant il sera facile de trouver des moyens de convertir cette obligation commune en une distinction honorable, avantageuse, & faite pour exciter l'émulation des citoyens.

Je pourrois, Messieurs, mettre sous vos yeux plusieurs idées propres à remplir ces vues ; mais votre comité de constitution ayant été chargé de vous soumettre un plan sur l'institution des milices. nationales, dans le sein desquelles les soldats auxiliaires seront nécessairement choisis, je m'abstreins de vous les développer en vous proposant de charger ce comité de se concerter avec le comité militaire pour vous présenter incessamment ses vues à cet égard.

Les loix qui protegent l'honneur, la vie, les propriétés des citoyens devant être d'une égale impartialité pour tous, le pouvoir constituant devra diriger avec soin l'établissement des tribunaux militaires, régler leur compétence, distinguer les cas qui doivent y ressortir de ceux qui sont purement civils; déterminer ce qui doit appartenir à la loi, & ce qui doit être abandonné à la

simple police. Un préalable nécessaire sera, sans doute, de supprimer le tribunal des maréchaux de France; mais vous penserez aussi, Messieurs, que les citoyens dévoués à la défense de la patrie doi vent trouver dans la législation qui leur est propre les mêmes avantages qui sont assurés à ceux qui exer¬ cent d'autres professions. Vous croirez donc de votre justice d'introduire dans le jugement des délits militaires, comme vous l'avez fait dans la jurisprudence criminelle ordinaire, les formes les plus propres à protéger l'innocence. Une autre conséquence de ce principe, c'est que les militai res ayant le même droit que tous les autres cit toyens à appeller du jugement qui les condamne, l'établissement d'une cour' martiale instituée pour revoir les jugemens du conseil de guerre se roit de la plus stricte équité. sull

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De l'Imprimerie du RÉDACTEUR, au coin de la rue Fromenteau, Place du Palais-Royals

ASSEMBLÉE NATIONALE

PERMANENT E.

Séance du 4 mars.

M. de Champagni a fait lecture du procèsverbal de la veille; point de réclamation sur la rédaction, & sur le champ on est passé à l'ordre du jour.

M. Merlin s'est présenté à la tribune pour continuer son rapport sur les féodalités. Le premier objet soumis à la discussion de l'assemblée étoit le second article qu'il avoit présenté hier à la fin de la séance, relatif aux droits de triage. Ce second article étoit conçu en ces termes : Abolira-t-on, pour l'avenir seulement, le droit de triage?

M. Cochard a gratifié l'assemblée d'une longue je dirois presque d'une éternelle harangue, à force de se répéter & de présenter, sous différentes formes, des vérités que tout le monde connoît; il a encouru la peine d'un harangueur ennuyeux, je veux dire qu'on a fini par ne point l'écouter; mais moi, qui me fais un devoir d'écouter tout le monde, je vais répéter M. Cochard ; mais en le réduisant.

Le droit de triage est un droit affreux, enfanté par la tyrannie féodale; mais c'est un rafinement d'injustice, dont l'origine ne remonte qu'au regne de Louis XIII. Ce droit s'exerça dans toute sa plénitude sur la fin du regne de ce monarque dont la misantropie & le marasme influoient si Tome IX. N°. 9.

I

puissamment sur le physique, qu'il laissa à ses ministres despotes, Richelieu & Mazarin, le soin de porter son sceptre, & sous la minorité de Louis XIV dans des tems de troubles & d'horreurs. En 1667, ordonnance qui fait rentrer les communautés dans tous leurs droits sur les biens triagés injustement; mais deux ans après, autre ordonnance qui donne une telle extension aux droits de triage du seigneur, que la plupart des communautés se sont trouvées expoliées du tiers de leurs communaux.

La premiere ordonnance étoit conforme à la justice, aussi étoit-elle émanée du cœur du roi, s'est écrié M. Cochard. Celle de 1669 porte le caractere du despotisme ministériel, toujours intéressé à favoriser les pétitions & les demandes des grands, quelques injustes qu'elles fussent, pour se faire des créatures. L'opinant auroit parlé plus vrai s'il eût dit les deux ordonnances ont été dictées par les mêmes motifs. Puisque la premiere, c'està-dire celle de 1667, servit au ministre de prétexte pour retirer des communautés une certaine somme pour les réintégrer dans leurs droits; la seconde n'eut pas d'autre motif. Ceux qui étoient intéressés au droit de triage fournirent des fonds, ou ce qui revient au même, on leur fournit l'occasion d'en donner, en fomentant & protégeant leur injustice contre les peuples. Ces tours sont des finesses innées, presque depuis deux siecles, dans l'ame des ministres de nos rois. Il seroit facile de prouver ce que j'avance; mais cette digression me jetteroit trop loin. Il suffit de dire que dans ces places éminentes, où l'on meurt farement, la France a eu plus de joueurs de gobleets que de ministres. >>

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