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les féchant à un feu modéré, quarante parties d'une fubftance qui reffembloit à du foufre. Ayant mis ces quarante parties fur un fer rouge, foufre fe reconnoiffoit à une flamme bleue & une odeur pénétrante. Quand la flamme fe fut éteinte, il refta fur le fer vingt-fix parties d'une chaux grisâtre qui n'avoit point été confumée. Le poids du foufre confumé doit donc avoir été de quatorze parties, ou entre la huitième ou la neuvième partie du poids de la mine. J'ai obfervé que le poids de la fubftance qu'on obtenoit de la mine de plomb par la diffolution dans l'acide nitreux alloit quelquefois au-delà, quelquefois en -deçà d'un tiers du poids de la mine. Cette variété, autant que j'ai pu l'obferver, ne s'étend pas à la quantité de foufre contenue dans une quantité donnée de mine de plomb; elle dépend de la quantité de chaux qui refte après que le foufre eft confumé. Différentes mines de plomb contiendront fans doute différentes quantités de foufre; mais je fuis prefque sûr, d'après un grand nombre d'expériences, que le foufre contenu dans la mine de plomb que j'ai examinée, fait entre la huitième & la neuvième partie du poids de la

mine.

Il fe prépare tous les ans dix mille tonnes ou environ de mine de plomb dans les Fonderies du Derbyshire. Si l'on pouvoit inventer, ce qui me paroît très-poffible, un moyen d'obtenir le foufre contenu dans dix mille tonnes de mine de plomb, en fuppofant que la mine ne donnât que la dixième partie de fon poids, quoiqu'elle en contienne certainement davantage, le Derbyshire feul fourniroit tous les ans mille tonnes de foufre, dont la valeur feroit un objet de quinze mille livres fterling ou environ

par an.

Je parle publiquement de cette circonftance, afin d'engager ceux qui s'occupent de ce travail à la recherche de ce moyen; car s'ils pouvoient retirer le foufre contenu dans la mine de plomb, non - feulement ils y trouveroient leur profit, mais ce feroit encore une grande épargne pour la Nation en général Le foufre que nous employons actuellement, nous le faifons venir de l'Etranger, & la confommation en est considérable foit pour les Manufactures des poudres, foit pour former le mêlange dont on enduit le fond & les parois des vaiffeaux, foit enfin pour l'ufage des différens Arts. Les Fondeurs n'ont pas à craindre de gâter la qualité du plomb, en en féparant le foufre. Ue quintal & demi de mine, dont on a retiré le foufre, donneront autant de plomb que deux quintaux de mine dont on ne l'auroit pas enlevé; & il eft à préfumer qu'ils en donneront davantage. On obtient de l'arfénic d'une mine particulière en Saxe, par la torréfaction, dans un fourneau qui a une cheminée horizontale: la cheminée, qui eft large, a plufieurs détours & angles, afin que la vapeur arfénicale, qui s'élève de la mine, puiffe fe condenfer plus facilement; l'arfénic s'attache comme de la fuie aux parois de la cheminée,

dont

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dont on le retire de temps en temps. Il y a lieu de croire que, par le même moyen, on pourroit recueillir le foufre contenu dans une mine de plomb. Ceux qui préparent le plomb appellent du nom de foufre tout ce qui fe volatilife pendant la torréfaction & la fufion; mais de tous ceux avec lefquels j'ai converfé fur cet article, aucun ne foupçonnoit qu'on pourroit dépouiller une mine de plomb de fon foufre.

› peut

J'ai mis fur un charbon allumé la chaux grisâtre qui eft reftée fur le fer après que le foufre avoit été confumé: ayant augmenté la chaleur du charbon en foufflant deffus, j'ai vu qu'un grand nombre de globules s'étoient formés fur fa furface; ce qui donne lieu de croire que cette chaux n'eft point une terre pure, exempre d'alliage métallique, indiffoluble à l'acide nitreux, mais une chaux de plomb, produite apparemment par l'action violente de l'acide, & qui, par l'addition du phlogistique reprendre fa forme métallique. La quantité de cette chaux dépend beaucoup de l'action de l'acide fur la mine de plomb; fi elle eft violente, la chaux eft en plus grande abondance que fi elle étoit modérée. Je ne fais pas même trop fi l'on ne pourroit pas conduire l'opération de manière qu'il ne reftât que peu ou point de chaux; c'est-à-dire, qu'une quantité donnée de mine de plomb pourroit tellement fe diffoudre par l'acide nitreux, qu'il ne reftât rien que le foufre. Mais je ne me fuis pas encore parfaitement assuré des parties conftitutives de la mine de plomb; je fais, à n'en point douter, qu'elle contient du plomb, du foufre, une liqueur & de l'air. D'après ce que je viens de dire, on ne peut révoquer en doute l'existence des trois premiers; celle de l'air eft clairement démontrée par l'expérience fuivante.

Prenez de la mine de plomb réduite en poudre fine; mettez-la dans un verre à boire à fond étroit, que vous remplirez aux trois quarts d'eau: enfuite ajoutez-y de l'acide nitreux fort concentré, jufqu'à ce que vous voyiez commencer la diffolution. Vous obferverez la mine toute couverte de bulles d'air, qui en foulèvent les petits fragmens jufqu'à la furface. L'air continuera de fe dégager de la mine, jufqu'à ce que l'acide foit faturé de plomb. Le fel, qui fe forme de l'union de l'acide nitreux avec le plomb, paroît fouvent, dans cette expérience, cryftallifé fur la furface du menftrue; & fi, tandis que ce menftrue eft dans cet état, on y ajoute du nouvel acide, ce fel fe cryftallife fur le champ & tombe au fond du verre, l'acide ayant abforbé l'eau qui fe tenoit en diffolution. Quand on diffout, de cette manière, du plomb par de l'acide nitreux étendu dans une grande quantité d'eau, on n'obferve point de foufre fur la furface du menftrue; il s'y trouve au fond une matière noire, c'eft le foufre.

Mais quoique le plomb, le foufre, une liqueur & l'air foient, fans contredit, parties conftitutives de la mine, je ne prétends pas dire pour cela qu'ils en foient les feules parties conftitutives. Il eft certain que la

mine de plomb perd, on ne fait comment, un tiers ou plus de fon poids pendant la fonte; car de vingt- un quintaux de mine, on obtient rarement au-deffus de quatorze quintaux de plomb. Ce qui fe perd confifte, en partie, en fcorie qui nage fur la furface du plomb pendant l'opération de la fonte, & en partie en ce qui fe fublime dans la cheminée & fe diffipe dans l'air. Je crois qu'une tonne même de mine ne donneroit qu'une très-petite quantité de fcories, fi la mine étoit entièrement exempte de Spath; c'eft au fpath, avec lequel elle eft mêlée, qu'eft due la plus grande partie de la fcorie. J'ai entre les mains une maffe folide de fcorie, qui s'écoula accidentellement d'un fourneau, & qui, en couleur & confiftance, reffemble parfaitement à une pierre calcaire grife. Elle eft fufceptible d'un auffi beau poli que le marbre; & peut-être pourroit - on, avec profit, la jetter en moule pour fervir de pierres à paver, de pièces de cheminée, enfin à un grand nombre d'autres ufages. Comme elle provient du fpath contenu dans la mine, on pourroit, à très peu de frais, en augmenter la quantité dans telle proportion que l'on voudroit, en ajoutant du fpath fufible à la mine en fufion. Cette partie de la mine, qui fe fublime & fe difperfe dans l'air, eft formée, en partie, du foufre qui s'est confumé, & en partie de plomb. Une portion de ce plomb fublimé s'attache aux parois de la cheminée; le refte s'élève dans des airs, d'où il retombe fur la terre, & empoifonne l'eau & l'herbage qu'il touche. On pourroit recueillir ce plomb sublimé, en lui préfentant, fur fon paffage, de l'eau ou de la vapeur d'eau pendant qu'il monte, ou en le faisant passer par une cheminée horizontale d'une longueur fuffifante.

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Il n'eft pas poffible de déterminer avec précision la quantité de ce plomb volatilifé; cependant une conjecture générale pourroit répandre du jour fur ce fujet. Dans une Fonderie on a coutume de préparer foixante quintaux de mine de plomb toutes les vingt-quatre heures; nous fuppoferons que le foufre contenu dans foixante quintaux de mine monte à fept quintaux, le plomb à quarante : dans cette fuppofition, l'air, la liqueur, la fcorie, le plomb fublimé doivent monter à treize quintaux. Suppofons à préfent que de ces treize quintaux il y en ait trois de plomb volatilifé, il eft clair que fi on le pouvoit recueillir, chaque Fonderie en fourniroit tous les ans plus de cinquante tonnes; ce qui, à 4 livres fterling la tonne, fait un objet de 200 liv. fterling par an. Il eft à préfumer que j'ai fuppofé la quantité de plomb fublimé & le prix qu'il coûte beaucoup au - deffous de ce qu'ils font dans le fait ; mais j'ai voulu donner cet avis à ceux qui y font intéreffés, afin qu'ils le mettent à profit.

Je me flatte que les expériences fuivantes, quoique fur un fujet différent, pourront faire plaifir aux Amateurs de la Chymie. Comme je ne me fouviens point de les avoir jamais ni vues ni lues dans aucun Ouvrage, je vais les faire connoître.

la

C'eft un fait affez connu que la furface du plomb fondu fe couvre d'une pellicule de diveries couleurs. J'ai fait quelques expériences l'hiver dernier, dans la vue de m'affurer de l'ordre dans lequel elles fe fuccédoient les unes aux autres. Ayant, par hafard, fous la main du plomb qui fert à doubler les boîtes dans lelquelles le thé nous vient de la Chine, j'en ai fondu une partie dans une cuiller-à pot de fer. Mais quelle fut ma furprife, en voyant que, quoique la furface fe fût bientôt couverte d'une pellicule fombre, il n'y paroiffoit point de couleurs! M'imaginant que chaleur n'étoit pas affez forte pour rendre les couleurs visibles, j'ai augmenté le feu jufqu'à ce que la cuiller fût rouge : la pellicule, calcinée fur la furface du plomb, étoit rouge auffi, mais je n'y voyois pas de couleurs. J'ai mis bouillir pendant un temps confidérable ce même plomb dans un creufet; pendant l'ébullition, il en fortit une fumée copieuse, & la furface du plomb fe couvrit, comme c'est l'ordinaire, d'une fcorie à demi-vitrifiée. J'ai examiné le plomb qui ne s'étoit point vitrifié, & j'ai trouvé qu'il avoit acquis la propriété de former une fucceffion de pellicules colorées pendant tout le temps qu'il étoit en fufion.

J'ai expofé, pendant un temps confidérable, une autre portion de cette même espèce de plomb à un feu calcinant très-fort; la partie qui résista à la calcination acquit, à la fin, la propriété d'avoir des couleurs affez

vives.

Ces expériences me firent conclure que le plomb de la Chine étoit allié avec quelque fubftance dont il falloit le dépouiller avant de pouvoir lui rendre fes couleurs. Il feroit inutile de rapporter toutes les expériences que j'ai faites avant que j'euffe découvert la fubftance hétérogène que j'avois fuppofé être mêlée avec le plomb de la Chine. A la fin pourtant, j'ai eu le bonheur d'en faire une qui me paroît expliquer affez bien le phénomène. Ayant fondu, dans une cuiller-à-pot, une portion de plomb du Derbyshire, qui avoit une fucceffion des plus vives couleurs, j'y ai ajouté un petit morceau d'étain; j'ai obfervé qu'auffi-tôt que l'étain fe fut fondu & mêlé avec le plomb, on ne voyoit plus de couleurs. Je ne peux pas déterminer au jufte quelle eft la plus petite quantité d'étain poffible qui fuffiroit pour priver une quantité donnée de plomb de la propriété qu'il a de former des pellicules colorées; mais j'ai lieu de croire qu'elle n'excède point la cinq millième partie du poids du plomb.

Le plomb du Derbyshire, qui, par fon mêlange avec l'étain, a perdu fa propriété de former des pellicules colorées, la reprend comme le plomb de la Chine dont je viens de faire mention, en l'expofant, pendant un temps suffisant, à une chaleur calcinante. Il y a apparence que l'étain fe fépare, par la calcination, d'avec le plomb, avant que celui-ci foit entièrement réduit en chaux.

J'ai rendu fa forme métallique au plomb de la Chine calciné, en brû

lant du fuif pardeffus. Le plomb réduit ayant été fondu, donna des pellicules colorées : la chaux d'étain, que je fuppofe avoir été mêlée avec le plomb calciné, ne se reffuscite pas avec autant de facilité que celle de plomb.

Le zinc eft une autre fubftance métallique, qui, ainsi que l'étain, a la propriété d'empêcher le plomb de former des pellicules colorées ; mais il ne l'a pas dans un degré auffi éminent que l'étain. J'ai mis auffi de petites portions de bifmuth dans du plomb fondu : cela ne l'empêcha pas de fe colorer. J'ai fondu ensemble de l'argent & du plomb; mais le plomb n'en brilloit pas moins.

Un peu d'étain, ajouté à un mêlange de plomb & de bismuth, ou à un mêlange d'argent & de plomb, les prive fur le champ de la faculté de former des pellicules colorées.

Je ne crois pas que cette propriété de l'étain ait été, jusqu'ici, observée par perfonne; mais chaque fait qui a rapport à l'action des corps les uns fur les autres, doit être consigné. L'altération caufée dans le plomb par le mêlange d'une petite portion d'étain, eft vivement sentie par les Plombiers, qui ont toutes les peines du monde à laminer ce métal, tant il est rendu dur & caffant par l'étain. Si leur vieux plomb n'eft ni fi facile à traiter ni auffi prompt à former des pellicules colorées, cette différence n'eft due qu'à la petite quantité d'étain contenue dans la foudure, dont le vieux plomb ne peut jamais être entièrement débarraffé.

Quant à l'ordre dans lequel les couleurs fe fuccèdent les unes aux autres, le voici, autant que j'en ai pu juger par l'obfervation que j'en ai faite: jaune, pourpre, bleu, jaune, pourpre, verd, couleur d'œillet, verd, couleur d'œillet, verd. En expofant au jour la brillante furface du plomb fondu, j'ai fouvent obfervé ces dix changemens fe fuccéder avec une rapidité plus ou moins grande, felon que la chaleur du plomb étoit plus ou moins forte. Si la chaleur étoit peu forte, la fucceffion des couleurs s'arrêtois avant que d'en avoir parcouru tous les changemens. Mais quelque violente qu'elle fût, je n'ai jamais obfervé de variations ultérieures. Toutes les couleurs font très - vives, & chacune d'elles, en particulier, paroît parcourir toutes les différentes nuances avant que de fe changer en celle qui la fuit.

Le fyftême de Sir Ifaac Newton donnera, de la formation de ces couleurs, une explication fatisfaifante; & les expériences ingénieufes de M. Delaval fur les corps colorés, répandront fur cette matière un jour lumineux.

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