Page images
PDF
EPUB
[merged small][ocr errors]

sur la fortune de la duchesse d'Orléans sa
belle-sœur; il retenoit dans sa famille les bien-
faits dont le duc de Penthiévre la combloit
il espéroit enfin que sa mort hâteroit celle du
duc dont il dévoroit depuis long-tems par la
pensée, l'entière succession.

D'Orléans donc instruit du pacte qui avoit
été fait avec Manuel, se hâta d'envoyer à
l'hôtel de la Force, une bande d'assassins.
Un nommé Rotondo qui depuis deux ans vi-
voit dans la plus grande intimité avec le
prince, se mit à leur tête. D'Orléans lui or-
donna de lui apporter la tête de la princesse.
Il ne fut que trop fidèlement obéi. La prin-
cesse de Lamballe perdit la vie dans d'affreuses
et longues tortures. Sa tête fut mise au bout
d'une pique, et Rotondo vint planter cette
pique sous les fenêtres de d'Orléans. Rotondo
s'est vanté à une table publique de Londres,
de cette atrocité.

Lorsque cet horrible trophée arriva, le prince alloit se mettre à table avec quelques anglois et une de ses prostituées, appellée Agnès de Buffon. Celle-ci tombe sur un fauteuil, se cache le visage avec les mains, et s'écrie: Ah! mon Dieu, ma tête se promenera un jour de cette manière-là! Quant à This d'Orléans, il s'avança vers la fenêtre, contempla froidement pendant quelques minutes cette sanglante image, et vint ensuite s'as-whom I seoir tranquillement à table avec ses conVives. Il faut admirer le courage de ces Anglois qui purent supporter la vue de ce

true Lind way of Shon knew, was on

of the dinner

[ocr errors]

monstre. Un seul d'entr'eux ne put tenir à l'horreur qu'il lui inspiroit; il se retira.

La ville de Versailles fut ensanglantée comme celle de Paris. L'Américain Fournier dont j'ai déjà eu occasion de parler dans cette histoire, y transféra tous les prisonniers que l'assemblée législative avoit successivement engloutis dans les cachots d'Orléans. Arrivé à Versailles, le cannibale Fournier fit halte, et livra tous ses prisonniers aux assassins qui se précipitèrent sur les charettes où ils étoient entassés; les scélérats prirent plaisir à faire endurer mille morts à chacune de leurs victimes; les unes étoient frappées lentement, les autres étoient déchirées vivantes. On vit encore dans cette circonstance, se renouveller ces repas d'antropophages dont notre révolution, dans ce siècle qui se dit le siècle de la philosophie, a donné tant d'exemples. Des membres palpitans furent mis sur des charbons ardens; des hommes, des femmes se disputoient en

suite ces horribles mets.

On peut évaluer sans crainte d'enfler le calcul, de douze à quinze mille, le nombre des malheureux qui furent égorgés dans ce mois de septembre (1). Il se trouva sans

(1) Peltier qui paroît avoir eu sur cet objet, de bons renseignemens, évalue à huit mille le nombre des infortunés qui périrent dans la seule ville de Paris. Dans l'almanach des honnêtes gens, je ne l'avois évalué qu'à mille quatre-vingt-huit; mais je prévenois que je ne mettois

[ocr errors]

doute parmi les prisonniers, quelques personnes prévenues de délits capitaux ; mais en général le plus pur sang de France coula dans ces jours de carnage. On compta parmi les victimes plusieurs des témoins qui avoient déposé contre d'Orléans dans l'affaire des 5 et 6 octobre, une foule de gentilshommes des premières maisons, et un nombre considérable de prêtres non-assermentés. La seule société des Jésuites depuis si longtems abolie, eut l'honneur de fournir vingtcinq martyrs. La congrégation des Eudistes en donna aussi plusieurs; parmi eux on remarqua Hébert leur supérieur général, confesseur de Louis XVI, à qui ce prince avoit écrit au commencement d'août : Je n'attends plus rien des hommes, apportez-moi les consolations célestes.

Ces assassinats coûtèrent à d'Orléans des sommes immenses; le seul Marat eut de lui quinze mille livres. Le premier fruit que le prince recueillit de tant de nouveaux forfaits, fut comme il s'y étoit attendu, d'éloigner de l'assemblée qui alloit paroître sous le nom de Convention nationale, tous les hommes qui avoient quelque modération, et de la remplir de ministres de ses cruautés. Les électeurs voyant la hache des bour

pas en ligne de compte ceux qui avoient été massacrés dans les cours de l'hôpital de la Salpêtrière et sur le Ponte au-Change.

author of be Theater de Farblas"

[ocr errors]
[ocr errors]

reaux levée sur leur tête, votèrent comme l'on voulut. Au plus fort du carnage, c'est à-dire le 3 septembre, Maximilien Robespierre fut nommé membre de la convention; ainsi ce fut à travers des flots de sang que ce monstre arriva à une place d'où il devoit en faire couler des torrens. La ville de Paris jetta dans cette convention, son écume; elle y nomma pour ses représentans, les deux Robespierre, les Danton, les Collot-d'Herbois, les Manuel, les Billaud-Varennes, les Camille-Desmoulins, les Marat, les Lavicomterie, les Legendre, les Panis, les Sergent, les Fabre d'Eglantine, les Osselin, les David et d'Orléans lui-même. Ailleurs on y envoya les Saint-Just, les Condorcet, les Dubois-Crancé, les Duprat, les Rebecqui, les Barbaroux, les Fauchet, les Carrié, les Buzot, les Voulland, les Guadet, les Cambon, les Chabot, les Coustard, les Louvet, les deux Bourdon, les Thuriot, les Duhem, les Villette, les Clootz, les Soubrany, les Barère, les Lecointre, les Sieyes, les Chenier, les Sillery, les Saint-Fargeau, les Bourbotte, les Joseph Lebon, les Pétion.

D'Orléans s'attendoit qu'une telle assem-blée mettroit sur-le-champ le roi en jugement, le condamneroit à mort, et lui donneroit sa couronne; mais il étoit de la destinée de ce conspirateur, de voir toutes ses espérances confondues au moment même où il paroissoit impossible qu'il ne recueillît pas

[ocr errors]

le fruit de ses infernaux projets. S'il est difficile d'animer plusieurs hommes de bien du même esprit, de les faire marcher au même but, il est impossible que l'union s'établisse entre des milliers de scélérats. Le parti de d'Orléans avoit éprouvé une puissante diversion à la fin de la première assemblée nationale; à la fin de la seconde, il en éprouva une nouvelle, et ce fut dans le cours même des massacres du mois de septembre qu'elle s'opéra.

Manuel outré de l'assassinat de la princesse de Lamballe, déclara dès cet instant, une guerre à mort à d'Orléans. Emporté dans ses passions, ne connoissant de modération ni dans le bien, ni dans le mal, il ne fut plus ni républicain, ni royaliste, ni constitutionnel, ni monarchien; il ne fut plus qu'anti-orléaniste. Pourvû que d'Orléans succombât, peu lui importoit ce que deviendroit l'empire françois. Ce n'étoit pas de la haine, c'étoit de la rage. L'abbé Fauchet fut pris de la même fureur; on ne peut expliquer le changement de celui-ci qu'en conjecturant qu'il ressentoit un violent dépit de ce que son apostasie, ses lâchetés, ses crimes n'alloient avoir d'autre issue de faire pasque ser la couronne du descendant de Louis XIV sur la tête d'un vil et sanguinaire usurpateur. Il se mit à composer un journal qui n'étoit qu'un long tissu d'injures et d'imprécations contre le parti qu'il avoit enfin abandonné. Il lui arrivoit souvent en relisant

« PreviousContinue »