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DE L'HOMME-D'ÉTAT,

E T

DUCITOYE N.

PR

PRAGMATIQUE-SANCTION, Loi fondamentale & capitale d'un Etat.

Na donné particuliérement ce nom en France à l'ordonnance de Louis IX de 1268, & à celle de Charles VII de 1438, fur la collation des bénéfices, en vertu defquelles le roi, de fa propre autorité, nomme à tous les emplois eccléfiaftiques, fans que le pape y ait aucune chose à dire que de confirmer inceffamment la nomination.

On appelle fur-tout auffi dans l'empire, Pragmatique-fan&tion la bulle d'or dreffée fous l'empereur Charles IV, la convention de Paffau en 1552, la paix d'Augfbourg en 1555, le traité de Weftphalie fous l'empereur Ferdinand III, & les capitulations de chaque empereur Romain.

Tome XXVII,

A

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Mais la Pragmatique-fanction qui a fait le plus de bruit dans le monde politique eft l'arrangement pris au commencement de ce fiecle au fujet de la fucceffion des Etats de l'augufte maifon d'Autriche. Elle fut publiée en 1713 par l'empereur Charles VI. Les Etats de l'empire & plufieurs potentats la garantirent. Elle ftatue que, fi les mâles venoient à manquer dans la poftérité de fa majefté impériale, les femmes qui en defcendroient feroient fubftituées à leur place pour fuccéder à tous les pays & droits appartenans à la maison d'Autriche, felon la loi de la primogéniture.

Sanction-Pragmatique & loi perpétuelle à l'égard de la regle & ordre de fucceffion, & union indivifible de tous les royaumes, provinces, & Etats héréditaires de fa majesté impériale & catholique, à Vienne le 6 décembre 2724.

CHARLES

HARLES par la grace de Dieu, empereur des Romains, toujours au, gufte, roi d'Allemagne, de Caftille, de Léon, d'Arragon, des deux Siciles, de Jérufalem, d'Hongrie, de Bohême, de Dalmatie, de Croatie, d'Esclavonie, de Navarre, de Grenade, de Tolede, de Valence, de Galice, de Majorque, de Séville, de Sardaigne, de Cordue, de Corfique, de Murele & de Jean, des Algarbes, d'Algecire, de Gibraltar, des ifles de Canarie, & des Indes orientales & occidentales, des ifles de terre ferme, de la mer Océane, archiduc d'Autriche, duc de Bourgogne, de Lothier, de Brabant, de Limbourg, de Luxembourg, de Gueldres, de Milan, de Stirie, de Carinthe, de Carniole, de Wirtenberg, de la Haute & Baffe Siléfie, d'Athenes & de Neopatrie, prince de Suabe, marquis de St. empire, de Burgau, de Moravie, de la Haute & Baffe Luface, comte d'Habfbourg, de Flandres, d'Artois, de Tyrol, de Barcelone, de Ferrete, de Cybourg, de Gorice, de Roufillon & de Serdagne; Landgrave d'Alface, marquis d'Oristan & comte de Geceano, feigneur de la Marche d'Efclavonie, du Port Naon, de Biscaye, de Moline, de Salins, de Tripoli, & de Malines, &c. »

Savoir faifons à tous & chacun, qu'il appartiendra, que les empereurs des Romains, rois & archiducs d'Autriche, nos ancêtres fe font donnés par un effet de tendreffe paternelle, & par une prévoyance de fageffe, beaucoup de foins, pour établir dans notre augufte maison une regle & forme de fucceffion pour y être à perpétuité immuablement fuivie & obfervée par toute leur poftérité de l'un & de l'autre fexe, dans tous les événemens, que la providence divine pourroit faire naître dans la fuite des temps. Que l'ordre pour cette fucceffion dans toute l'étendue de nos vaftes Etats, royaumes, feigneuries & provinces, tant en général qu'en particulier & en toutes inféparablement a été introduit & fixé, pour en empêcher les démembremens & la divifion entre les héritiers de notre augufte maifon. Qu'entre autres l'empereur Ferdinand II, notre très-honoré bifayeul de glorieuse mémoire par fon teftament du 10 de mai 1621, confirmé par

fes codiciles du 8 août 1635, a réglé l'ordre de fucceffion entre les archiducs fes fils & leurs defcendans mâles par forme de fidéi-commis perpétuel, appellé communément majorat, en ordonnant, que les filles renonçassent à l'hérédité, & fe contentaffent de leur dot, fauf toutefois leur droit de retour: que le même ordre a été fuivi par feu l'empereur Léopold, notre très-honoré feigneur & pere, de glorieufe mémoire, lequel comme chef de notre augufte maifon; & feul en droit de difpofer, de fes royaumes & provinces héréditaires, a établi le même majorat par le partage, qu'il fit le 12 de feptembre 1703, entre notre très-cher & très-aimé frere l'empereur Jofeph d'heureufe mémoire, alors roi des Romains, & nous, de tous les royaumes & Etats fitués tant en fes pays, que dans la monarchie d'Espagne, & dans les dépendances d'icelle, & converti ledit ordre de fucceffion en un vrai droit de primogéniture perpétuel en faveur des mâles & pour plus de fureté il ajouta à ce traité de très-folemnels pactes de fucceffion, ou de famille, qui furent acceptés & confirmés par ferment des parties contractantes de part & d'autre & dans lefquels, après que l'on eut réglé & clairement expliqué l'ordre, qui fe devoit obferver entre ledit empereur Jofeph notre frere & nous, & nos defcendans, ou celui des deux, qui furvivroit à l'autre & fa poftérité, dans la maniere de fuccéder les uns aux autres, tant en nofdits royaumes & provinces de par deçà que dans la monarchie d'Efpagne, & les pays, qui la compofent, a été auffi principalement convenu & difpofé, que les hoirs måles tant qu'il y en aura, excluront les femelles à perpétuité; & qu'entre les mâles, l'aîné excluera auffi tous les autres freres puînés de toute l'hérédité, de forte que la fucceffion à tous ces royaumes & Etats, en quelque part qu'ils foient, demeurera toute entiere, & en indivife attachée inféparablement à l'aîné des mâles, felon l'ordre de la primogéniture; dans lefquels fufdits pactes & conventions de fucceffion a été auffi difpofé & réglé la maniere, dont les archiducheffes fe doivent fuccéder au défaut de mâles, fi le cas y échoit jamais, ce qu'à Dieu ne plaife. Après la mort de l'empereur Jofeph notre très-cher & très-aimé frere, étant auffi devenu l'unique fucceffeur & héritier, tant de notre propre chef, que par le droit du fang, & en vertu des difpofitions faites par nos auguftes ancêtres de tous les royaumes & Etats héréditaires de par deçà; & nous, nous en trouvant aujourd'hui le feul maître abfolu, avons, par notre déclaration & difpofition publiée le 19 avril 1713, en préfence d'un grand nombre de nos confeillers d'Etat intimes, gouverneurs, ou préfidens de nos provinces, & de nos autres miniftres, renouvellé non-feulement le droit de primogéniture, déjà fi fortement établi & enraciné dans notre augufte maison; mais nous l'avons de plus, en vertu de notre pleine puiffance, & felon l'exigence, de l'état de nos affaires érigé en forme de Pragmatique-fanction, & d'édit perpétuel & irrévocable, expliquant nommément ce droit de primogéniture & de fucceffion plus clairement établi par feu l'empereur Léopold entre les princes

mâles de notre augufte maison, & au défaut d'iceux étendu en fa maniere aux archiducheffes: nous avons déclaré en des termes intelligibles & exprès, qu'au défaut des mâles la fucceffion échoira, en premier lieu aux archiducheffes nos filles, en fecond lieu aux archiducheffes nos nieces filles de notre fiere; & en troifieme lieu aux archiducheffes nos fœurs, & enfin à tous les héritiers defcendans de l'un & de l'autre fexe, voulant qu'en tous ces cas elles gardent entre elles l'ordre de fucceffion linéale, tel qu'il eft marqué dans notre fufdit réglement, lequel fe trouve entiérement conforme à celui, qui a été établi pour les mâles, felon le rang de la primogéniture & fucceffion linéale. En conféquence & en exécution de cette fanction, la féréniffime archiducheffe Marie-Jofephe, née princeffe royale d'Hongrie, de Bohême, & des deux Siciles, à préfent époufe du féréniffime prince royal de Pologne & électoral de Saxe, a non-feulement, avant fes noces déclaré d'adhérer & d'accepter les pactes de famille, le droit de primogéniture déjà établi dans notre augufte maison; & le fufdit ordre prefcrit pour la fucceffion linéale, confirmant fon acceptation par fon acte de renonciation formelle, & par fon ferment, mais elle l'a auffi ratifié par femblable ferment, qu'elle a réitéré après fon mariage, & avec elle le féréniffime roi de Pologne, grand-duc de Lituanie, électeur de Saxe, fon beau-pere, comme auffi le féréniffime prince royal & électoral fon mari ont reconnu, & fe font obligés, par ferment folemnel en termes formels d'obferver ledit droit de primogéniture, & le fufdit ordre de fucceffion. C'eft auffi en conformité defdites difpofitions que dans les mêmes par une déclaration & ftipulation également folemnelle, il a été réservé à cette féréniffime archiducheffe & à fes defcendans de l'un & de l'autre sexe leur droit de fuccéder aux royaumes de fes ayeuls, & aux provinces Autrichiennes, felon l'ordre de la naiffance & la regle établie, arrivant le défaut d'archiducs, ce qu'à Dieu ne plaife jamais. La même chofe a été obfervée enfuite avec la féréniffime archiducheffe, Marie-Amélie, née princeffe royale d'Hongrie, de Bohême, & des deux Siciles, épouse du féréniffime prince électoral de Baviere, laquelle a pareillement avant fes noces déclaré d'adhérer & d'accepter les pactes de famille, le droit de primogé niture, déjà établi dans notre augufte maison & le fufdit ordre prefcrit pour la fucceffion linéale confirmant fon acceptation par fon acte de renonciation formelle & par fon ferment, l'ayant de même ratifié par femblable ferment, qu'elle a réitéré après fon mariage & avec ellé le féréniffime électeur de Baviere, fon beau-pere, comme auffi le féréniffime prince électoral fon mari ont reconnu & fe font obligés par ferment folemnel en termes formels, d'obferver ledit droit de primogéniture, & le fufdit ordre de fucceffion, en conféquence des prédites difpofitions par une déclaration & ftipulation pareillement folemnelle; il a été dans le même temps réservé à cette féréniffime archiducheffe & à fes defcendans de l'un & de l'autre sexe leur droit de fuccéder aux royaumes de fes ayeux & aux provinces

Autrichiennes, felon l'ordre de la naiffance & la regle établie, arrivant le défaut d'archiducs, ce qu'à Dieu ne plaife. Et confidérant qu'il eft très-important pour la fureté, repos & tranquillité de nos provinces héréditaires, que nous poffédons dans les Pays-Bas, que ledit ordre & regle de fucceffion indivisible de tous nos royaumes & provinces héréditaires fituées tant au dedans qu'au dehors de l'Allemagne, & ledit droit de primogéniture établi dans notre augufte maifon foient reçus, introduits, établis & promulgués dans nos dites provinces des Pays-Bas, pour SanctionPragmatique & loi perpétuelle & irrévocable, & que pour l'introduction de cette nouvelle loi foit dérogé à celle touchant la fucceffion du prince defdites provinces établie dans nos Pays-Bas par l'empereur Charles-Quint, d'éternelle mémoire, notre prédéceffeur, par fa Pragmatique-fanction du 4 novembre 1549, reçue par chacun de leurs Etats dans leurs affemblées jufques à préfent y reftée en vigueur, & à toutes coutumes de nos dites provinces pour autant feulement, que lefdites fan&tion & coutumes ne feroient pas conformes aux fufdits ordres & regle de fucceffion, lefquelles en tous autres cas feront entretenues & obfervées comme du paffé. Nous avons fait communiquer & propofer ce que deffus aux Etats refpectifs de nos provinces defdits Pays-Bas, afin qu'ils vouluffent fe conformer à cette Pragmatique-fanétion, édit perpétuel & réglement de fucceffion indivisible, & tous les Etats ayant fur ce meurement délibéré dans leurs refpectives affemblées & fpécialement réfléchi au bien & aux avantages, qui en reviendront à nos bons & fideles fujets, ils s'y font unanimement & volontairement conformés, & ont, en tout refpe&t & foumiffion & avec une extrême reconnoiffance, accepté la fufdite Pragmatique-fan&tion, loi perpétuelle, réglement de fucceffion & union indivifible de tous nos Etats, tant au dehors qu'au dedans de l'Allemagne, en loi perpétuelle & irrévocable pour autant qu'elle regarde le réglement de fucceffion à la feigneurie & fouveraineté de chacune defdites provinces, & l'union indivifible de tous nos pays & Etats héréditaires, confentant de plus à la dérogation de la SanctionPragmatique, établie au mois de novembre 1549, par feu l'empereur Charles cinquieme, de glorieufe mémoire, en tant qu'elle n'eft pas conforme à notre fufdire Sanction-Pragmatique, concernant la fucceffion à la fouveraineté defdits Pays-Bas, & nous ont fupplié très-inftamment, de faire publier notredite Pragmatique-fanction & édit perpétuel, afin qu'il foit par tous nos royaumes, provinces & Etats héréditaires à toujours obfervé en loi irrévocable & inaltérable, ainfi qu'il en confte par les actes de chaque defdites provinces, qu'ils nous ont produits & délivrés. Nous après grande & meure délibération, de l'avis de notre plénipotentiaire au gouvernement d'iceux, de notre lieutenant-gouverneur & capitaine général de nofdits pays, & ouï fur le tout notre confeil fuprême, établi auprès de notre perfonne royale pour les affaires des mêmes pays, avons, conformément à l'acceptation en faite par lefdits Etats des provinces de nos Pays-Bas & à leur réquifition,

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